Madame la ministre, cette histoire turque illustre assez bien toutes les ambiguïtés de l'Europe. En fait, le « problème » turc est déjà réglé, puisque la Turquie est entrée dans l'union douanière européenne au début des années quatre-vingt-dix, dans une espèce de clandestinité. Personne n'en a parlé !
J'amenais à l'époque, dans la Mayenne, un groupe de Chinois de Hong-Kong qui voulaient produire des téléviseurs à l'intérieur de l'Union européenne parce qu'ils avaient l'impression que l'Europe était une forteresse et qu'à défaut d'y produire leurs téléviseurs ils ne pourraient pas les vendre aux Européens. Les malheureux sont allés de déconvenues en déconvenues, car, au même moment, sans qu'il y ait eu le moindre débat démocratique, l'Europe s'est ouverte à la Turquie. Aujourd'hui, sur deux téléviseurs vendus dans l'Union européenne, un au moins est fabriqué en Turquie. Et, tout à l'heure j'évoquais le dépliant de ce parc d'activités turc qui s'appelle European Free Zone, et tout ce qui est envoyé aux industriels français...
Madame la ministre, il faut que nous sortions de toutes ces ambiguïtés : on ne peut pas avoir un discours pour les Français qui les « caresse dans le sens du poil » et laisser filer systématiquement les négociations. Y a-t-il eu un jour un commissaire à la concurrence, participant aux négociations de l'OMC, dont la feuille de route aurait pu être assumée par chaque chef d'État ou de gouvernement des pays membres de l'Union européenne ?
On laisse « filer le bouchon », puis, un beau jour, on est confronté aux réactions d'acteurs économiques souvent malmenés par les ouvertures douanières ! Si l'entrée de la Turquie doit se produire, il faut l'assumer et en tirer les conséquences en modifiant immédiatement nos propres législations internes plutôt que de rester accrochés à un modèle social qui n'est plus adapté à la mondialisation.
Vous rendriez donc un immense service à nos compatriotes, madame la ministre, en mettant fin à toutes ces ambiguïtés. L'Europe ne peut pas être le refuge et le paravent. Sinon, nous allons au devant d'autres déconvenues à côté desquelles le 29 mai apparaîtra comme bien peu de choses !
Comme notre débat sur la Turquie, notre discussion de ce matin ne changera rien, puisque nous sommes face à une obligation. Nous vivons un exercice formel, ...