Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le 14 avril dernier, soutenant devant cette assemblée une motion de renvoi à la commission, j’exposais l’opposition ferme de la majorité de notre groupe à ce texte de circonstance, dont l’objectif fondamental est de déjudiciariser à tout prix, au mépris du contradictoire, de la proximité et de l’intérêt du justiciable.
Ce même 14 avril 2011, avec le talent qui est le sien, notre ancien collègue Robert Badinter soutenait une motion tendant à opposer la question préalable, explicitant clairement les raisons pour lesquelles son groupe contestait ce projet de loi. Je le cite : « Monsieur le garde des sceaux, soyons clairs : ce qui est actuellement au cœur du débat en matière judiciaire, c’est la question majeure, première, de l’indépendance et des garanties statutaires qui doivent être données aux magistrats du parquet s’agissant de leur nomination, de leur promotion et de leurs responsabilités. »
Me souvenant de l’un des ultimes messages si forts de notre ancien collègue, quelle ne fut pas ma surprise de constater la semaine dernière, en commission des lois, l’évolution de quelques-uns de mes collègues socialistes sur ce sujet ! Certes, chacun est libre d’évoluer. C’est respectable. Peut-être est-ce là un avant-goût d’une gouvernance partagée ou, tout simplement, une perte passagère de mémoire ? En tout cas, nous, nous n’adorerons pas ce que nous avons brûlé !
En effet, ce texte est inacceptable, et d’abord en la forme : d’une part, l’utilisation de la procédure accélérée est totalement injustifiée, d’autre part, la tentative d’insérer à la hussarde, avant la réunion de commission mixte paritaire, non un cavalier mais un escadron législatif, à savoir un texte autonome sur les juridictions financières, est déplorable. Je remercie donc M. Hyest, l’ancien président de la commission des lois, et M. le rapporteur d’avoir résisté.