L'amendement n° 132 rectifié bis appelle deux observations.
En premier lieu, les dispositions prévues par l'amendement figurent déjà à l'article L. 411-11 du code du travail pour les organisations professionnelles. Seules les pratiques visées au titre IV du livre IV du code de commerce sont pénalement sanctionnées, à l'exception de l'article L. 420-6, qui ne semble pas visé ici.
En second lieu, il convient en tout état de cause de limiter la mesure aux seules chambres consulaires et au titre IV du livre IV du code de commerce.
Sous réserve de cette rectification, le Gouvernement s'en remettra à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
J'en viens aux amendements identiques n° 61 et 102 rectifié. Je comprends la préoccupation des parlementaires de tous horizons face aux différents abus de puissance de vente qui peuvent se rencontrer.
Cet ajout vise de manière spécifique les pratiques des « super centrales » constituées par les enseignes pour renforcer artificiellement leur capacité de négociation en s'alliant face aux fournisseurs.
Mesdames, messieurs les sénateurs, l'arsenal juridique existant suffit assez largement pour combattre de telles pratiques. Je doute que l'insertion, dans le projet de loi, d'articles visant un type d'abus déterminé constitue un moyen efficace de lutter contre ces pratiques.
C'est pourquoi le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat sur les amendements identiques n° 61 et 102 rectifié.
J'en arrive aux accords de gamme et à l'amendement n° 182 rectifié.
Ce sujet est très important. Lorsque l'on évoque les accords de gamme, on pense tout de suite aux grandes surfaces qui peuvent ainsi évincer les PME du linéaire, au détriment de l'emploi et de l'innovation que celles-ci peuvent porter.
Toutefois, la situation actuelle est complexe et, si l'on interdisait purement et simplement les accords de gamme, des PME se trouveraient pénalisées.
Il en est ainsi, par exemple, d'une entreprise implantée dans le sud de l'Aisne, pas très loin du village dans lequel j'habite, dont le produit phare est un filtre à café que l'on trouve dans pratiquement toutes les grandes surfaces.
Un jour, les responsables de cette entreprise, forts de leur expérience positive, ont décidé de fabriquer un filtre à thé. Puis, pour conforter leur position de leader sur le marché, ils ont décidé de fabriquer un filtre à tisane. Dans les deux cas, ils ont dû élaborer un produit adapté.
Ces deux produits étaient nouveaux et n'avaient donc pas de clients, pas de demande. Les responsables de l'entreprises ont alors passé des accords de gamme avec les grandes surfaces : elles continuaient de vendre les filtres à café à la condition de placer également en linéaire les filtres à thé et les filtres à tisane. C'est ainsi que ces produits innovants ont rencontré le consommateur, ce qui aurait été impossible sans les accords de gamme.
L'activité des PME s'articule souvent autour d'un produit phare. Pour qu'une PME puisse innover et élargir le nombre des produits qu'elle propose, il faut lui permettre d'accéder au consommateur ; l'accord de gamme est précisément un moyen d'y parvenir. Les sociétés de distribution ne recherchent pas des produits pour lesquels il n'y a pas de clients, pas de demande. Le client, il faut le créer, donc mettre le produit sur le linéaire.
Il faut aussi garder présent à l'esprit qu'une grande partie de l'activité de notre pays repose sur les réseaux de distribution intégrés, tels que les franchises de marque, en particulier dans le secteur de l'automobile.
Mesdames, messieurs les sénateurs, si vous adoptiez l'amendement n° 182 rectifié visant à interdire les accords de gamme, il vous faudrait, de retour dans vos départements, expliquer aux concessionnaires Renault ou Peugeot que, désormais, ils n'ont plus le droit de vendre toute la gamme du constructeur avec lequel ils travaillent.