Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec ce titre VII, le Gouvernement poursuit la réforme des CCI, les chambres de commerce et d'industrie. C'est donc l'occasion de réfléchir en profondeur sur le rôle et le mode de fonctionnement des CCI.
Malheureusement, monsieur le ministre, vous n'abordez pas un point qui me paraît pourtant essentiel. J'insisterai donc, non pas sur le contenu de l'article 38 et de la suite du titre VII, mais sur ce qui y est omis, à savoir les modalités des élections aux CCI.
Le 18 mars dernier, prenant acte des déclarations du gouvernement Raffarin en faveur de la lutte contre les discriminations, j'avais interrogé le Premier ministre sur un décret du 24 août 2004, décret qui lui semblait bien embarrassant. Ce texte, signé en catimini en plein été, a eu pour effet de priver de vote aux élections des chambres de métiers les artisans ressortissants de pays autres que les pays membres de l'Union, droit qui leur avait été accordé par le gouvernement Jospin en 1999.
A ma question il a été répondu que le décret visait à harmoniser les règles de vote pour les chambres de métiers et les chambres de commerce et d'industrie, vote réservé aux Français et aux ressortissants communautaires. Techniquement, c'est indéniable, ce décret procédait effectivement à un tel alignement. Mais y aurait-il une fatalité à ce que l'harmonisation se fasse toujours par le bas ? C'est au contraire à un élargissement du corps électoral des chambres de commerce et d'industrie qu'il aurait fallu procéder. C'est ce que nous aimerions trouver dans le texte que nous examinons aujourd'hui.
C'est pourquoi ce titre VII, dans lequel le Gouvernement s'attache à réorganiser le fonctionnement des CCI, est une formidable occasion manquée de donner aux ressortissants non communautaires la juste reconnaissance qu'ils méritent. En effet, les élections aux CCI sont en lien direct avec l'activité économique, qui est la raison de l'existence de ces chambres. Les conditions d'élection et d'éligibilité devraient donc également dépendre du rôle économique.
Dans l'exposé des motifs du projet de loi que vous nous présentez, monsieur le ministre, vous écrivez que les chambres de commerce et d'industrie sont les « représentantes et porte-parole des acteurs économiques et des entreprises ». Il est temps d'en tirer toutes les conséquences : si les CCI sont effectivement les représentantes des acteurs économiques et des entreprises, alors, il ne peut y avoir de discrimination fondée sur la nationalité.
Un tel droit de vote serait non seulement un signe de reconnaissance et de confiance, mais aussi un facteur puissant d'intégration pour des personnes vivant sur notre sol et qui, de surcroît, sont des moteurs dans la vie économique de notre pays en y créant de l'emploi.
Au moment où la grande majorité des pays européens se sont conformés à la résolution du Parlement européen en donnant le droit de vote aux étrangers pour les élections locales, le Gouvernement réduit les droits des étrangers.
En définitive, un tel droit de vote ne serait que justice. Vous-même, monsieur le ministre, avez mené de nombreuses actions pour faciliter l'insertion par la création de micro-entreprises dans les quartiers et avez valorisé ces générateurs de croissance et d'emploi venus d'ailleurs. Vous avez reconnu, à de nombreuses occasions, la contribution des ressortissants non communautaires au tissu économique et à son dynamisme.
Rien qu'avec le décret du 27 août dernier privant du droit de vote à la chambre de métiers les artisans et commerçants étrangers non européens, ce sont 50 000 artisans, représentant plus de 250 professions, qui ont été privés de leur légitime droit de vote, alors qu'ils continuent de payer leurs cotisations et la taxe professionnelle et de travailler au dynamisme de notre économie.
Puisque les CCI sont, comme vous l'affirmez, les « représentantes et porte-parole des acteurs économiques et des entreprises », il est injuste d'exclure une partie de ces acteurs du corps électoral qui désigne les représentants en question.
Vous auriez pu, à l'occasion de ce texte, pousser le raisonnement jusqu'au bout et instaurer également, au-delà du droit de vote, l'éligibilité dans les instances consulaires pour les ressortissants non communautaires. De plus, vous auriez pu arguer de la nécessaire harmonisation entre les modalités de vote, pour étendre cette mesure aux chambres de métiers.
C'est cette injustice, monsieur le ministre, que vous avez l'occasion de réparer. Le Gouvernement s'honorerait en présentant un amendement sur ce point.