Intervention de Guy Fischer

Réunion du 14 novembre 2006 à 16h10
Financement de la sécurité sociale pour 2007 — Débat sur la prise en charge de la dépendance

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Par ailleurs, les augmentations de salaires des employés ne sont pas prises en compte.

Enfin, vous transférez à la CNSA des charges non financées, liées notamment à la création de l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux, ainsi qu'à la prise en charge des cotisations vieillesse des aidants familiaux.

Rappelons que même la Cour des comptes considérait récemment que les besoins des personnes âgées fragilisées n'étaient couverts qu'à moitié !

Par ailleurs, vous prévoyez d'instaurer un congé de soutien familial permettant à son bénéficiaire de s'occuper d'un proche dépendant. Non rémunéré, d'une durée de trois mois renouvelable quatre fois, il ne pourra pas être refusé par l'entreprise. Le salarié qui en bénéficiera retrouvera son poste, ou un poste équivalent, à son issue. Entre-temps, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie financera ses droits à la retraite. Toutefois, cette mesure laisse entiers les problèmes que pose la pénurie de structures d'aide, les tarifs élevés des établissements et, surtout, le manque de personnel dans les services à domicile et dans les structures d'accueil.

Pour qu'il s'agisse d'un véritable progrès, il faudrait que les personnes concernées puissent choisir entre un maintien à domicile grâce à des structures spécialisées et ce congé de soutien familial. Ce n'est pas le cas. On reste dans une approche palliative de la prise en charge de la dépendance.

En ce qui concerne le maintien à domicile, je dirai qu'il est plus confortable, plus respectueux du maintien de l'indépendance de la personne âgée ou handicapée, dans de bonnes conditions, bien sûr, pour elle et ses proches. Le problème actuel est qu'il est largement à la charge des familles, sur le plan tant de l'organisation que du coût financier. Cela est même devenu l'enjeu d'un véritable marché, comme tout ce qui touche à la retraite, au grand âge, à toutes les formes de dépendance. C'est inégalitaire et inadmissible.

C'est pourquoi nous pensons que le maintien à domicile des personnes dépendantes doit devenir une mission de service public. Cela suppose que, en cas de perte d'autonomie, les personnes concernées puissent accéder à toutes les activités sociales : coordination des soins par des professionnels, transports, accès aux commerces, à la culture, aux moyens de communication. Cela intéresse forcément l'ensemble des services publics.

J'aurais souhaité aborder maintenant les trois questions fondamentales concernant les établissements pour personnes âgées : le manque de structures d'hébergement, la pénurie de personnel qualifié et la question des prix de journée.

Faute de temps, je me bornerai à souligner que le coût de la prise en charge est réparti d'une manière fort peu satisfaisante : il est supporté à hauteur de près de 60 % par le résident ou sa famille, de 25 % par l'assurance maladie et de 15 % par les conseils généraux, au travers de l'APA et de l'aide sociale.

Or il faut savoir que le tarif moyen mensuel d'hébergement est de 1 700 euros et que le montant moyen de la retraite varie de 1 100 à 1 200 euros selon les sources... Pour ma part, je suis chaque jour confronté à des situations dramatiques, où des familles s'endettent pour pouvoir faire face. Les économies de toute une existence sont bien souvent englouties ; les biens immobiliers acquis grâce à toute une vie de travail doivent la plupart du temps être vendus, pour que les familles puissent faire face aux charges qu'elles doivent assumer.

Le problème du « reste à charge » demeure au coeur des préoccupations des Français. Il faut entendre leur colère sourde gronder quand arrivent à la fin de chaque mois des factures d'un montant de 1 700, 1 800, 2500, voire 3 000 euros.

Permettez-moi d'ajouter un mot sur la réforme des unités de soins de longue durée. La date butoir du 31 décembre 2006, fixée dans la loi de financement de 2006, pour déterminer les nouvelles capacités en lits d'USLD et en lits d'EHPAD est repoussée à une date ultérieure.

L'objectif est de requalifier 56 000 lits d'USLD en lits d'EHPAD, avec la baisse du ratio agent-lit qui en découle. Avec les associations, dont l'ADEHPA, j'estime qu'on ne peut accepter cette situation. Le financement des USLD doit être intégralement pris en charge par l'assurance maladie.

S'agissant des personnes handicapées, je voudrais citer un fait récent qui pointe une fois encore les imperfections de la loi du 11 février 2005, si bien décrite par le président About. À la suite d'une réclamation, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE, devrait délibérer sur la différence de traitement relative à l'accès aux prestations accordées au titre du handicap.

Celle-ci résulterait de l'article 16 de la loi du 11 février 2005, qui instaure une garantie de ressources pour les personnes handicapées, la GRPH, et une majoration pour la vie autonome, la MPVH, pour les personnes bénéficiaires de l'AAH. Ne peuvent y prétendre les bénéficiaires d'une pension d'invalidité alors qu'ils justifient, au titre des prestations accordées par ce régime, d'un niveau de ressources pourtant identique à celui des bénéficiaires de l'AAH.

Il y a donc là une différence de traitement, voire une discrimination. Finalement, votre gouvernement et les précédents ont sans cesse éludé le débat de fond qui porte bien sur la définition d'un droit à compensation universel et son financement, fondé sur l'expression d'une réelle solidarité, comme celle qui présida en 1945 à la création de la sécurité sociale.

C'est donc bien d'une réforme du financement de notre protection sociale qu'il est question. En effet, la situation dramatique qui prévaut actuellement est aussi la conséquence d'une politique de réduction des moyens affectés à la santé - c'est vrai à l'échelle européenne -, de disparition des hôpitaux de proximité ...

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