Séance en hémicycle du 14 novembre 2006 à 16h10

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • CNSA
  • autonomie
  • dépendance
  • dépendante
  • handicapée
  • personnes handicapées
  • personnes âgées
  • âge
  • âgée

La séance

Source

La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à seize heures dix, sous la présidence de M. Christian Poncelet.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'ai reçu de M. le Premier ministre le rapport sur les activités du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale en 2005-2006, conformément à l'article 44 de la loi n° 98-1267 du 30 décembre 1998 de finances rectificative pour 1998.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il sera transmis à la commission des affaires étrangères et à la commission des finances et sera disponible au bureau de la distribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'ai reçu de M. le président du Conseil constitutionnel une lettre par laquelle il informe le Sénat que le Conseil constitutionnel a été saisi, le 14 novembre 2006, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, par plus de soixante sénateurs, d'une demande d'examen de la conformité à la Constitution de la loi relative au secteur de l'énergie.

Acte est donné de cette communication.

Le texte de cette saisine est disponible au bureau de la distribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, adopté par l'Assemblée nationale (nos 51, 59, 60).

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Nous allons procéder au débat sur la prise en charge de la dépendance.

La parole est à M. le ministre délégué.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est désormais une tradition : chaque année, au moment de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, la Haute Assemblée organise un débat sur les questions de protection sociale, qui sont effectivement les plus importantes pour l'avenir des Français. Je me réjouis de cette très heureuse avancée, que nous devons à votre initiative, monsieur le président.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Le thème retenu cette année est évidemment au centre des préoccupations de nombreuses familles, qui ont des parents vieillissants affectés par les maladies du grand âge. En effet, si l'on s'en tient aux seuls allocataires de l'allocation personnalisée d'autonomie, la dépendance affecte aujourd'hui 971 000 personnes en France, sans compter les personnes handicapées. Avec le vieillissement de notre population, ce nombre est destiné à croître rapidement dans les années à venir.

Or, si le nombre de personnes âgées de plus de 85 ans est resté stable entre 1995 et 2005, en raison d'un déficit de naissances lié à la Première Guerre mondiale, il va au contraire considérablement augmenter dans la période qui s'ouvre, passant de 1, 1 million de personnes en 2005 à 1, 9 million en 2015. En termes de vieillissement de la population, c'est donc à un véritable « raz de marée » que nous allons assister.

Bien sûr, et fort heureusement, le vieillissement et la longévité ne sont pas synonymes de dépendance et le seront, d'ailleurs, de moins en moins.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Aujourd'hui, déjà, le tiers des personnes âgées de plus de 90 ans est autonome, et cette proportion passe à la moitié pour les hommes.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

L'espérance de vie sans incapacité progressant plus vite que l'espérance de vie moyenne, une très large majorité de nos concitoyens va donc vieillir dans de bonnes conditions de santé.

Toutefois, selon les estimations, la dépendance va continuer à toucher, dans les années à venir, de 6 % à 7 % des personnes âgées de plus de 60 ans. C'est la raison pour laquelle, dans son récent rapport, la Cour des comptes a insisté sur l'inévitable augmentation des dépenses liées à la prise en charge de la dépendance.

Actuellement, les sources de financement de la dépendance sont multiples et dispersées.

Il y a, d'abord, bien sûr, les 2 milliards d'euros dégagés par la journée de solidarité.

Il y a, ensuite, les enveloppes de l'assurance maladie destinées aux personnes âgées et aux personnes handicapées. Vous en voterez l'affectation dans la loi de financement de la sécurité sociale.

En 2007, ces crédits pour les personnes âgées augmenteront de plus de 13 % et atteindront en valeur absolue un montant encore plus élevé que celui, déjà sans précédent, de l'année 2006.

Il y a également les fonds dégagés par la Caisse nationale d'assurance vieillesse afin de financer les aides à domicile, que j'ai souhaité faire passer de 231 millions d'euros, chiffre de 2005, à 255 millions d'euros. Il y a aussi, et c'est essentiel, l'aide importante des collectivités territoriales, notamment des départements, auxquels je tiens à rendre hommage. Et je ne compte pas les aides fiscales, les aides au logement et la prise en charge des soins.

Il y a enfin ce qui reste à la charge de la personne dépendante et de sa famille. Malgré tous les efforts fournis par la collectivité, cette part demeure la plus importante. Bien souvent, ce « reste à charge » est difficile à supporter pour les familles : à la souffrance de voir un être cher perdre son autonomie s'ajoutent des préoccupations d'ordre pécuniaire, parfois très graves.

Par exemple, sur 100 euros dépensés pour faire fonctionner un établissement accueillant des personnes âgées dépendantes, c'est-à-dire une maison de retraite médicalisée, l'assurance maladie paie 35 euros pour les soins, le conseil général 5 euros pour la dépendance...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

...et l'aide sociale 6 euros au titre de l'hébergement. Il reste donc en moyenne 54 euros à la charge du résident.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

La question centrale reste donc celle du financement de la prise en charge de la dépendance. Au-delà, notre préoccupation doit se porter sur le financement de la part qui reste à la charge des résidents, de leur famille ou, à défaut, de l'aide sociale. C'est une question importante pour les finances publiques dans leur globalité, qu'il s'agisse des finances locales, du budget de l'État ou de celui de la sécurité sociale. C'est aussi une question importante pour tous les Français.

Avec la journée de solidarité, nous avons franchi une première étape. Comme chacun de vous s'en souvient, le gouvernement de la gauche plurielle avait créé l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA, sans se soucier des modalités de son financement.

Protestations sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Il avait ainsi exposé les personnes âgées à une rupture très grave de prise en charge. Les départements ont, hélas ! fait les frais de ce manque de discernement et de courage.

La loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées a permis de résoudre en partie le problème du financement de cette prestation...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

...mais, du fait de l'augmentation continue du nombre de demandeurs et d'allocataires, nous devons encore faire face à ce problème pour le présent et pour l'avenir.

La journée de solidarité travaillée par les Français a permis de dégager 2 milliards d'euros supplémentaires en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées.

Cet effort fourni par tous nos compatriotes permet de mieux financer l'allocation personnalisée d'autonomie et la prestation de compensation du handicap.

Des fonds très importants ont été délégués, dès le mois de janvier de cette année, aux conseils généraux pour les maisons départementales des personnes handicapées. Ils n'ont pas encore été consommés, ...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

...mais c'est normal, car la montée en régime de la prestation n'est pas achevée.

L'État a ainsi pu contribuer à la trésorerie des conseils généraux, ce qui ne peut que réjouir M. Mercier, qui connaît bien le problème.

Surtout, la journée de solidarité a ouvert la voie à une nouvelle forme de solidarité : la solidarité par le travail.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Dans un pays, la France, où l'on entre plus tard dans la vie professionnelle, où l'on quitte celle-ci plus tôt et où la semaine de travail est plus courte qu'ailleurs, ...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

... il était tout de même possible de consacrer une journée de solidarité à nos aînés et aux personnes handicapées, ...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

...sous le contrôle de la Cour des comptes. Celle-ci veille en effet à ce que chaque euro provenant de cette journée soit bien affecté à la dépendance des personnes âgées et des personnes handicapées. Dans son rapport, elle donne d'ailleurs quitus au Gouvernement et aux départements du bon emploi de ces crédits. Nous devons aux Français la transparence et nous la leur garantissons.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Après la mise en place de la journée de solidarité, nous avons franchi un nouveau cap avec le plan « Solidarité grand âge », que j'ai présenté le 27 juin dernier.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Plusieurs mesures de ce plan permettent de mieux maîtriser le coût payé par les familles et par les résidents. Ce point est essentiel, la part restant à la charge des familles, déjà beaucoup trop élevée, n'ayant cessé d'augmenter au fil des années.

J'ai d'abord voulu permettre aux établissements de continuer à réaliser, année après année, les travaux d'humanisation et de modernisation dont ils ont absolument besoin. Ces établissements hésitent trop souvent à le faire par crainte de devoir augmenter le prix de journée.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

En effet, les charges d'amortissement sont souvent répercutées, faute d'aides, sur le prix payé par les personnes hébergées.

J'ai par ailleurs décidé d'abaisser le taux de TVA de 19, 6 % à 5, 5 % pour les travaux réalisés dans les maisons de retraite médicalisées.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

C'est pour moi une grande joie de voir, lorsque je visite ces établissements, que des projets coûtant 8 millions d'euros pour soixante lits ont vu leur prix ramené, grâce à cette seule mesure, à 6 millions d'euros.

En 2005, grâce aux crédits provenant de la journée de solidarité, nous avons pu consacrer 500 millions d'euros à la réalisation de travaux dans les établissements accueillant des personnes âgées et des personnes handicapées. C'est une somme énorme !

Mais elle ne signifie peut-être pas grand-chose pour nos compatriotes.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Cette somme, réunie en une seule année, représente exactement dix fois l'effort total réalisé au cours des cinq années précédentes ! (Applaudissementssur les travées de l'UMP. -Exclamations sur les travées du groupe CRC.)

Il était temps de le faire ; c'était même indispensable. Mais quel effort de rattrapage pour mettre à niveau notre capacité d'accueil en établissement des personnes âgées dépendantes et des personnes handicapées sans aggraver le prix de journée, ce qui était notre première préoccupation !

Pour 2007, j'ai proposé au Sénat et à l'Assemblée nationale de donner un nouveau coup de pouce à l'investissement. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui vous est soumis a pour objectif d'offrir aux établissements des prêts à taux zéro, afin que les travaux engagés n'entraînent pas une hausse trop sensible du tarif payé par les résidents. Cette mesure de 25 millions d'euros, pour la bonification d'intérêts, permet un flux d'investissement de 400 millions d'euros par an.

Je me suis également engagé à alléger, par voie réglementaire, l'impact des subventions publiques sur les comptes de charge des établissements, mesure très importante pour leurs gestionnaires.

En outre, je veux saluer une initiative de M. le sénateur Jacques Blanc, avec laquelle je suis en plein accord. Votre collègue propose en effet de prolonger cet effort en affectant à l'aide à la modernisation les excédents dégagés par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie en 2006.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Comment cette caisse peut-elle être excédentaire ?

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Vous examinerez cet amendement prochainement, mais je tiens d'ores et déjà à vous dire combien je trouve cette disposition intéressante : elle nous permettra d'amplifier encore l'effort d'humanisation et de modernisation de nos établissements.

À côté de notre action tendant à réduire le « reste à charge » payé par le résident, nous avons voulu faire en sorte de diminuer le nombre de personnes âgées dépendantes. Avant de prendre des mesures de financement, d'augmenter nos moyens et de réduire nos coûts, nous devons en premier lieu, après avoir ajouté des années à la vie, ajouter de la vie aux années.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Cela suppose de faire un effort accru de prévention. Tel est le sens du programme national « Bien vieillir » que j'ai décidé de relancer en mobilisant 3 millions d'euros, en vue de donner un coup de fouet aux initiatives locales et nationales d'aide à la vie quotidienne des personnes âgées.

Je souhaite aussi que, à partir de 2007, nous puissions offrir à toutes les personnes ayant atteint l'âge de 70 ans une consultation gratuite de prévention qui leur permettra de repérer leurs points de faiblesse, d'ajuster leur mode de vie, de prévenir les maladies du grand âge et, ainsi, de retarder la dépendance.

Nous augmenterons également l'effort de recherche sur les maladies liées au vieillissement. M. Dominique de Villepin a d'ailleurs décidé de faire de la lutte contre la maladie d'Alzheimer la prochaine grande cause nationale. La mise en avant de nos besoins à cet égard nous permettra de mobiliser des moyens supplémentaires.

Nous avons confié à M. Jacques Glowinsky, professeur honoraire au Collège de France, une mission sur l'organisation de la recherche autour des maladies du système nerveux et du cerveau.

Les organismes de recherche consacrent déjà 200 millions d'euros à la recherche sur les neurosciences. Grâce à une décision de François Goulard, l'Agence nationale de la recherche consacrera 20 millions d'euros supplémentaires à cet effort. Cela nous permettra de lancer un « plan national de recherche sur le cerveau et les maladies du système nerveux » qui soit à la hauteur du dispositif de lutte contre le cancer. Le fléau sanitaire est en effet de même ampleur.

Plus de 800 000 de nos compatriotes sont aujourd'hui atteints de la maladie d'Alzheimer et 220 000 nouveaux cas apparaissent chaque année. Il était donc grand temps que la France se mobilise pour y faire face.

Au-delà de ces efforts de diminution du « reste à charge » et de réduction de la prévalence de la dépendance, nous devons préparer l'avenir en réfléchissant à de nouveaux modes de financement.

Il nous faut explorer les nouvelles pistes de financement complémentaire de la dépendance en nous référant à ce qui existe en matière de maladie et de retraites. Ainsi, s'agissant des retraites, il existe une assurance complémentaire obligatoire gérée par les partenaires sociaux. Personne ne songe aujourd'hui à remettre en cause cette organisation, qui comprend un régime de base et un système complémentaire.

En ce qui concerne la maladie, notre système est unique au monde : 77 % des dépenses de santé sont prises en charge par l'assurance maladie, mais il faut payer un complément. Les Français les plus démunis bénéficient de la couverture maladie universelle ; et pour ceux qui, tout en ayant des revenus modestes, ne peuvent en profiter, il existe l'aide à l'acquisition d'une assurance complémentaire. Le texte qui vous est proposé tend à renforcer cette aide.

En outre, les mutuelles, les institutions de prévoyance sociale et les assurances privées proposent des contrats complémentaires « dépendance ».

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

La question est non pas de savoir s'il est bien ou mal de disposer d'un système complétant la protection de base mise en place grâce à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, et que nous devons consolider dans les années à venir, mais de définir comment nous allons faire pour compléter cette protection de base, à l'instar de ce que nous faisons déjà pour la maladie et la vieillesse.

Ce problème, qui n'est pas idéologique, mais très concret, il nous faut le résoudre ensemble. Compte tenu de l'augmentation de la population atteinte par les maladies du grand âge et malgré l'amélioration de l'autonomie de chaque personne à un âge donné, nous serons en effet confrontés dans les années à venir à de graves difficultés de financement. Il faut regarder cette réalité en face et s'y préparer.

C'est la raison pour laquelle, au moment où j'ai annoncé la mise en place du plan « Solidarité grand âge », j'ai décidé de confier une mission très importante à Mme Hélène Gisserot, qui avait à mes yeux toutes les qualités requises. Pour avoir été procureur général près la Cour des comptes et avoir exercé des responsabilités très importantes dans le domaine hospitalier, elle connaît parfaitement ces problèmes.

Je l'ai chargée d'animer un groupe de travail et de procéder à de très nombreuses auditions. Je lui ai également demandé de rencontrer celles et ceux d'entre vous qui, au sein de cette assemblée, travaillent depuis des années sur ces questions - par exemple MM. les sénateurs Paul Blanc, Alain Vasselle et Nicolas About -, pour que nous puissions déterminer la meilleure solution possible.

Mme Gisserot me remettra son rapport au début de l'année prochaine. Je souhaite qu'il puisse servir de base au grand débat que nous devons nourrir au-delà des enceintes parlementaires pour faire en sorte que, au moment du grand rendez-vous démocratique de 2007, la question soit clairement mise sur la table, et les propositions de solutions soumises aux Françaises et aux Français.

Voilà, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que je voulais vous dire en ouverture de ce débat sur le financement de la dépendance.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme elle le fait chaque année - c'est devenu maintenant une habitude -, notre assemblée va débattre, au sein de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, d'un thème particulier. Le sujet retenu pour 2006 est la dépendance, plus particulièrement sa prise en charge - toute la problématique est en effet là.

Je le dis au passage, ce sujet ne présente pas, dans l'immédiat tout au moins, le caractère dramatique dont souffre la situation des comptes du FSV, le Fonds de solidarité vieillesse, et du FFIPSA, le Fonds de financement des prestations sociales agricoles.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Je pense que, comme nous tous, M. le ministre en a bien conscience, et j'espère que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ainsi que le ministre délégué au budget ont la même perception de l'acuité des difficultés auxquelles nous devons faire face.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Ce n'est pas certain...

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Mais vous avez une solution : faire payer les familles !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Je voudrais cependant vous convaincre, si ce n'est déjà fait, de l'urgence qu'il y a à mettre au point un système de financement viable et pérenne.

Certes, des progrès incontestables ont été faits sous ce gouvernement et sous le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, dont je tiens à saluer ici, au nom de la commission des affaires sociales, l'action forte et déterminée à cet égard.

Toutefois, il n'existe pas encore - du moins au niveau gouvernemental - de véritable réflexion sur ce que la Cour de comptes appelle, dans son excellent rapport de novembre 2005 sur les personnes âgées dépendantes, « les potentialités de l'articulation entre prise en charge socialisée et assurance volontaire ».

Par cette formule, la Cour veut sans doute parler de l'articulation entre la prise en charge de la dépendance par la collectivité, à travers l'allocation personnalisée d'autonomie et l'assurance maladie, d'une part, et la prise en charge par l'assuré lui-même au travers de cotisations à des assurances privées, d'autre part.

Cette réflexion, la commission des affaires sociales l'a pour sa part lancée depuis plusieurs années, notamment en reprenant à son compte les principaux éléments d'une proposition de loi relative à la création d'une assurance dépendance, déposée sur mon initiative en janvier 2004 et cosignée par quelque quatre-vingts sénateurs de la majorité, dont M. Paul Blanc.

Voilà maintenant trois ans que nous avons déposé cette proposition de loi dont j'ai cru comprendre, monsieur le ministre, que s'inspirerait, au moins partiellement, le rapport que vous venez de nous annoncer.

Vous en convenez, l'enjeu est considérable. Je vais me livrer à un très rapide cadrage macro-économique qui débutera par ce constat : le phénomène de la dépendance des personnes âgées se développera inévitablement de façon exponentielle au cours des prochaines années.

Nous disposons, pour étayer cette affirmation, de deux projections concordantes : l'une élaborée par l'INSEE en avril 2004, l'autre rédigée par vos services, monsieur le ministre, en l'occurrence par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, la DREES, en 2002 et récemment actualisée.

Nous pouvons également nous appuyer sur le rapport, paru en juillet 2005, de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé, coprésidé par MM. About et Dubernard, sur la maladie d'Alzheimer et les maladies apparentées.

J'avais d'ailleurs moi-même déposé une proposition de loi sur la maladie d'Alzheimer. Le ministre délégué à la santé était alors Bernard Kouchner. Le Sénat a examiné ce texte en première lecture, mais l'Assemblée nationale, dont la majorité politique était opposée, n'a pas jugé bon d'en discuter, de sorte qu'il est resté lettre morte.

Les personnes concernées par la dépendance pourraient voir leur nombre progresser de 50 à 70 % d'ici à 2040, ce qui n'est pas rien. De 800 000 en 2000, elles devraient passer à un million en 2020 et à 1, 3 million en 2040.

Comme l'a dit M. le ministre, avec l'amélioration de l'espérance de vie, la dépendance arrive de plus en plus tard. Elle recule en effet plus vite que n'avance l'espérance de vie, ce qui est un bon point.

Cela explique que l'augmentation ne serait pas linéaire, et comporterait deux fortes poussées : l'une avant 2015 - autant dire presque demain, compte tenu des délais pour examiner les textes de loi et les mettre en application -, l'autre à partir de 2030.

Pour les maladies neuro-dégénératives de type Alzheimer, le nombre de nouveaux cas est actuellement de 225 000 par an. Avec l'allongement de la durée de la vie, il y en aura probablement trois fois plus d'ici à 2020. Plus d'un Français sur quatre est déjà concerné par ces pathologies au titre de l'un de ses parents, voire des deux.

À terme rapproché, la maladie d'Alzheimer est susceptible de motiver la majorité des demandes d'allocation personnalisée d'autonomie. Or, les maladies neuro-dégénératives entraînent une dépendance particulièrement difficile à prendre en charge, requérant tôt ou tard une assistance permanente, souvent de longue durée, extrêmement éprouvante pour les proches et très coûteuse lorsqu'elle fait intervenir des professionnels.

J'en viens précisément au coût de la dépendance pour la collectivité. Ce coût va nécessairement croître, comme l'ont compris plus vite que les autres les présidents de conseils généraux.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

En effet, non seulement le nombre de personnes dépendantes va augmenter, mais la montée des exigences en matière de qualité des prestations va également impliquer un accroissement des besoins en personnels qualifiés et une modernisation des structures d'accueil, autant de choses qui ont un coût en termes tant d'investissements que de fonctionnement.

La multiplicité des acteurs et la complexité des circuits de financement ont longtemps caché l'ampleur de l'effort déjà consenti pour la dépendance.

Avec son rapport sur les personnes âgées dépendantes, la Cour des comptes est à ma connaissance la première à s'être livrée à une tentative de chiffrage. Se fondant sur les données de l'exercice 2003, elle a estimé la dépense publique annuelle consacrée aux personnes âgées dépendantes à 15, 5 milliards d'euros, soit un peu plus de 1 % du produit intérieur brut.

Aujourd'hui, cette enveloppe peut même être majorée d'environ 1, 2 milliard d'euros, notamment grâce aux nouvelles sources de financement dégagées par la loi de 2004 créant la journée de solidarité.

Selon la Cour des comptes, sous l'effet cumulé de la démographie et de l'amélioration du service rendu, l'effort financier produit en 2003 pourrait aller jusqu'à doubler et atteindre ainsi, d'ici à 2020, plus de 30 milliards d'euros hors inflation, ce qui n'est pas rien.

Le coût de la seule allocation personnalisée d'autonomie progresserait de près 200 millions d'euros par an, pour dépasser 6 milliards d'euros en 2020 au lieu de 3, 2 milliards d'euros en 2003.

Encore cette hypothèse apparaît-elle comme relativement modérée, alors que les toutes dernières données disponibles font apparaître que nous frôlons le million de bénéficiaires pour une dépense d'APA de quelque 4 milliards d'euros.

Cela étant, le Gouvernement n'est pas resté inerte. Les réformes intervenues ces dernières années pour répondre aux défis de la dépendance ont été substantielles, qu'il s'agisse de la création de l'allocation personnalisée d'autonomie ou de celle de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, nouvelle pierre apportée à notre édifice social par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, qui a permis de sécuriser et de pérenniser le financement de l'APA.

La Cour des comptes, dans un rapport de juillet 2006, a salué le travail de cet organisme qui gère dans une parfaite transparence les ressources financières issues de la journée de solidarité et assure l'égalité de traitement des patients sur tout le territoire.

L'année écoulée a également vu la mise en place du plan « Solidarité grand âge » en faveur des personnes âgées dépendantes, annoncé par le Premier ministre à Bergerac, le 26 mai dernier, plan qui propose un effort réel en direction de ce public. Vous en avez rappelé les principaux éléments, monsieur le ministre.

Le plan « Solidarité grand âge » trouve sa traduction législative et financière dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, avec la mobilisation de moyens importants.

L'objectif global des dépenses, qui regroupe les financements consacrés aux établissements et services concernant les personnes âgées, augmentera de plus de 13 % en 2007 - bien plus que l'ONDAM soins de ville et l'ONDAM hôpital - pour atteindre 5, 6 milliards d'euros, dont 4, 7 milliards d'euros au titre de la contribution de l'assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour les personnes âgées, le solde provenant d'une dotation versée par la CNSA.

Ce sont ainsi 649 millions d'euros supplémentaires qui seront consacrés en 2007 à la prise en charge médicalisée du grand âge dans les établissements et services médico-sociaux, confortant l'augmentation de 587 millions d'euros déjà consentie en 2006.

Pour remarquable qu'il soit, cet effort doit cependant être mis en regard de l'enjeu financier décrit dans le rapport de la Cour des comptes, à savoir un doublement de l'effort public de financement à l'échéance 2020 - en moins de quinze ans, donc -, qui suppose des taux de croissance de l'objectif global de dépenses durablement supérieurs, voire nettement supérieurs, au taux de progression de l'ONDAM.

On peut douter parallèlement que les départements, confrontés à la croissance d'autres demandes à caractère social, le RMI notamment, soient nombreux à pouvoir solliciter davantage leurs ressources fiscales.

C'est presque un cri d'alarme qu'ont lancé certains présidents de conseils généraux, qui se demandent comment ils vont bien pouvoir faire face à cette évolution exponentielle des dépenses. Même s'ils l'appellent de leurs voeux, ils ne croient pas à une contribution supplémentaire de l'État.

Nous ne pensons pas que le seul produit de la CNSA, qui devra également faire face aux besoins de financement de la politique des handicapés, notamment de l'allocation de compensation, permettra de dégager des revenus à la hauteur des besoins tels qu'ils apparaîtront en 2020.

Les exemples étrangers incitent au même pessimisme prudent. L'Allemagne, souvent citée pour la précocité de son engagement, sur la base, il est vrai, d'une situation démographique bien plus défavorable que la nôtre, de sorte qu'il y avait urgence à intervenir, demeure ainsi confrontée à des difficultés importantes dont elle peine à se dégager.

Nos voisins d'outre-Rhin ont, vous le savez, opté dès 1994 pour la création d'une cinquième branche de la sécurité sociale, idée dans laquelle certains voient la recette miraculeuse qui va régler tous les problèmes.

En Allemagne, cette cinquième branche est financée par une assurance dépendance obligatoire, prélevée sous forme de cotisation versée à parité auprès des employeurs et des employés, et couvre environ 90 % de la population.

Une partie du financement provient également, comme en France, de la suppression d'un jour férié.

La mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale que j'ai l'honneur de présider s'est rendue à Berlin au printemps dernier pour étudier les mutations de la protection sociale allemande.

Après avoir auditionné de nombreuses personnalités allemandes, au niveau tant de la Chancellerie que du ministère de la santé, la mission a pu constater que, après un démarrage très prometteur du dispositif du cinquième risque, le régime public d'assurance dépendance s'est enfoncé depuis 2002 dans des déficits considérables, au point même d'absorber la totalité des sommes que le Gouvernement allemand avait placées sur un fonds de réserve initialement destiné à assurer la viabilité à long terme du système.

Cette expérience rappelle celle du fonds de réserve pour les retraites qui avait été créé sous le gouvernement Jospin et qui devait permettre de « lisser » l'augmentation des cotisations pour alimenter le financement des retraites. Nous savons ce qu'il en est aujourd'hui ...

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

On ne va pas vous laisser raconter des mensonges : il a été détourné !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Je ne pense pas qu'il ait été détourné, mais, en tout état de cause, nous sommes loin du compte et il est peu probable qu'il remplisse le rôle espéré.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

La situation en Allemagne doit nous faire prendre conscience que la solution du cinquième risque qu'avancent certains mérite sans aucun doute d'être étudiée, mais qu'il nous faudra beaucoup de rigueur si nous voulons que la nouvelle branche reste durablement équilibrée.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Sachant que, depuis maintenant plus d'une décennie, nous ne sommes parvenus à équilibrer ni la branche vieillesse, ni la branche maladie, ni la branche famille, qui elle aussi a connu des déficits, ni la branche accidents du travail, on peut se demander de quel talent il nous faudra faire preuve pour réussir à équilibrer une branche dépendance dont nous savons par avance qu'elle nécessitera des moyens considérables !

Assurer l'équilibre de cette branche uniquement avec le produit des cotisations payées par les salariés et par les employeurs serait d'ailleurs d'autant plus difficile que, comme l'a fait apparaître le débat sur les prélèvements obligatoires, il faut limiter ces prélèvements et qu'il est donc hors de question d'envisager une augmentation des cotisations existantes ou la création de nouvelles cotisations.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Il faudra bien se poser la question de savoir si, pour financer la prestation personnalisée d'autonomie, l'on doit faire appel aux cotisations, à la solidarité nationale sous une autre forme ou encore, solution qui ne doit à mon avis pas être écartée, aux assurances privées, selon une formule telle que celle que nous avons développée avec Paul Blanc et qui a fait l'objet d'une proposition de loi cosignée par quelque quatre-vingt de nos collègues.

Un autre élément doit également être pris en compte, celui du contexte sociologique, qui est tout aussi peu porteur aujourd'hui. Il faut en effet admettre que la réduction de l'aide matérielle et financière accordée jusqu'à présent par l'environnement familial est inéluctable. Les temps qu'a connus la génération de nos parents, ceux que connaissent ou connaîtront nos enfants et ceux que connaîtront nos petits-enfants ne sont en effet en rien comparables en termes de solidarité familiale.

Cet effacement de l'entourage familial est d'abord le résultat d'une évolution mécanique. Selon une étude de la DREES diligentée par M. Bas - ce n'est donc pas moi qui le dis - les « aidants » non professionnels étaient au nombre de 3, 7 millions au début des années 2000 et, dans 80 % des cas, leur âge était compris entre 50 et 80 ans. Or, globalement, la population de la tranche d'âge de 50 à 79 ans va progresser moins vite que le nombre de personnes âgées dépendantes - c'est, bien sûr, l'effet du baby-boom. Après avoir augmenté de 16 % entre 2000 et 2011, cette population va se stabiliser en valeur absolue puis décliner, et elle n'augmentera au total que de 10 % entre 2000 et 2040. En conséquence, les aidants familiaux seront donc moins nombreux qu'ils ne l'ont été avant 2000.

À cela s'ajoute le fait qu'une bonne part des aidants actuels est constituée de femmes sans activité professionnelle. Or, toujours selon la DREES, le nombre de femmes inactives de 50 à 64 ans va progresser encore moins vite que celui de la population de la tranche de 50 à 79 ans, avec un taux de 6 % seulement d'accroissement d'ici à 2040.

Selon l'INSEE, le nombre des aidants potentiels par personnes âgées passera ainsi d'un ratio actuel de 2, 8 pour les hommes et de 2, 2 pour les femmes à un ratio de 2 pour l'ensemble.

Au problème que soulèvera cette diminution mécanique à laquelle nous ne pourrons pas échapper s'ajoute celui des modes de vie, raison pour laquelle je faisais référence aux nouvelles générations.

L'aide aux personnes dépendantes soumet les aidants à des contraintes dont rien n'indique qu'elles seront supportées de la même façon dans l'avenir. Le Gouvernement en a d'ailleurs d'ores et déjà tiré les conséquences en faisant de l'aide aux aidants familiaux un axe du rapport de la conférence de la famille pour 2006 ...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Exactement !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

...- des dispositions ont ainsi été présentées dans le cadre des deux lois de financement de la sécurité sociale qui se sont succédé - et en évoquant un « droit au répit » qui justifie une partie de l'effort financier consenti dans le cadre de son plan « Solidarité grand âge ».

Pour résumer mes propos, je dirai que nous avons devant nous une situation financière qui ne nous laisse pas une marge de manoeuvre à la hauteur des enjeux, d'une part, et un effacement des relais familiaux dans la prise en charge de la dépendance, d'autre part. La Cour des comptes déclare ceci : « La difficulté prévisible de la collectivité à financer l'ensemble des coûts futurs devrait conduire à chercher à mobiliser les capacités de financement individuelles par une incitation à l'assurance ».

J'en reviens donc à mon propos introductif : monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission des affaires sociales a déposé une nouvelle fois un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale en vue de proposer des mécanismes de réduction d'impôt sur le revenu en cas de souscription d'un contrat d'assurance dépendance et de réduction d'assiette des cotisations sociales pour les contributions des employeurs afférentes à un contrat collectif d'assurance dépendance.

Ce sont les éléments qui étaient déjà inscrits dans ma proposition de loi du 13 janvier 2004 et que la commission avait fait siens dans les amendements que son rapporteur, notre collègue André Lardeux, avait présentés lors de l'examen du projet de loi relatif à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, texte qui a instauré la journée de solidarité.

Ces amendements, monsieur le ministre, nous les avions retirés à la demande de M. Falco, alors ministre délégué aux personnes âgées, afin de lui permettre d'étudier leur impact financier sur le budget de l'État et sur celui de la sécurité sociale.

Par la suite, Mme Vautrin, succédant à M. Falco au titre de secrétaire d'État aux personnes âgées, m'avait indiqué que, le Gouvernement ne remettant pas en cause le principe, une mission commune de l'Inspection générale des affaires sociales et de l'Inspection générale des finances serait diligentée pour expertiser ma proposition de loi et son coût budgétaire pour l'État.

Mme Vautrin a changé de ministère, et vous lui avez succédé, monsieur le ministre. Je vous ai interrogé le 12 avril dernier, dans le cadre d'une question orale, sur ce sujet. Vous ne m'avez apporté aucune indication sur une éventuelle étude d'impact de mes propositions, ni sur la mission conjointe de l'IGF et de l'IGAS que Mme Vautrin m'avait indiqué avoir commandée.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Sans esquisser de dispositif concret, vous m'avez simplement répondu, monsieur le ministre, que, quel que soit le mode de couverture retenu pour la dépendance, il impliquerait nécessairement une dépense fiscale ou une dépense publique - nous le savions -, et vous avez évoqué les marges financières susceptibles d'être dégagées par la baisse tendancielle des dépenses liées au chômage.

C'est évidemment une voie, mais on ne peut pas utiliser la baisse tendancielle du chômage pour financer toutes les réformes ! Or M. Fillon a annoncé devant la représentation nationale qu'il comptait sur la baisse du chômage - avec un taux prévisionnel particulièrement ambitieux et volontariste puisqu'il l'estimait à environ 4, 5 % à l'horizon 2020 - pour dégager, à travers les cotisations UNEDIC, 10 milliards d'euros que l'on pourra faire « basculer » sur les cotisations de l'assurance vieillesse, en allégeant d'autant les cotisations UNEDIC, de telle manière que tout cela restera neutre pour nos concitoyens en termes de prélèvements et de cotisations.

Si le Gouvernement, au moment où il sera confronté à cette situation, utilise la totalité de la marge de manoeuvre qui peut se dégager grâce à un taux de chômage très faible, je ne vois pas comment il pourra également utiliser celle-ci pour financer la prise en charge de la dépendance, d'où les mesures incitatives que nous proposons pour la mise en oeuvre d'un système d'assurance volontaire.

Je souhaite que les présidents de conseils généraux se posent, avec le Gouvernement, la question de savoir s'il vaut mieux maintenir le système actuel en prévoyant une contribution complémentaire sur leurs propres ressources fiscales pour assurer le financement de la prestation personnalisée d'autonomie ou s'il ne vaudrait pas mieux mettre en place au niveau national un système d'incitation fiscale dont pourraient bénéficier ceux de nos concitoyens qui ont la capacité d'assurer pour leur propre compte la couverture du risque dépendance.

Bien sûr, la solidarité nationale devra subsister pour celles et ceux dont les ressources ne sont pas suffisantes pour bénéficier de cet avantage fiscal.

À cet égard, on pourrait envisager un système équivalent à celui qui a fonctionné pendant des années pour l'allocation personnelle. Rappelez-vous, mes chers collègues, lorsque des familles particulièrement déshéritées et aux ressources faibles demandaient à la commission cantonale d'aide sociale la prise en charge de journées d'hospitalisation, souvent les conseils généraux payaient la première facture, mais, pour éviter d'avoir à faire de même pour les suivantes, ils préféraient prendre en charge l'assurance complémentaire pour la couverture du ticket modérateur, cette solution leur revenant beaucoup moins cher que le paiement des journées d'hospitalisation.

De même, je pense que, pour la prestation dépendance, il vaudra mieux prendre en charge, au niveau de l'aide sociale, la couverture des personnes dont les ressources sont insuffisantes pour bénéficier de l'avantage fiscal et leur permettre à terme de disposer de l'assurance qui sera offerte.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

La solidarité nationale ou départementale ne jouerait de fait que pour celles et ceux qui n'auront pas bénéficié de ce dispositif, et ils devraient représenter une minorité.

Ainsi, nous devrions parvenir à une meilleure maîtrise de l'évolution des dépenses liées à la dépendance, raison pour laquelle cette proposition mérite de ne pas être rejetée d'un revers de la main, et je m'inscris complètement en faux contre les affirmations de certains de nos collègues qui siègent sur les travées de la gauche, affirmations selon lesquelles procéder ainsi serait aller vers une privatisation du système de couverture de la prestation dépendance.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

C'est un mauvais procès, et on peut le démontrer chiffres à l'appui et en apportant tous les éléments de nature à rassurer l'ensemble de nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

M. Alain Vasselle, rapporteur. Je souhaite bien évidemment que le Gouvernement prenne à l'égard de la représentation nationale l'engagement très clair de mettre en chantier les études nécessaires afin d'être en mesure de revenir devant le Parlement pour lui faire des propositions concrètes qui, non seulement rassureront tant nos concitoyens que les présidents de conseils généraux, mais ménageront en outre les finances publiques.

Applaudissementssur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Jégou

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat qui se tient aujourd'hui présente un intérêt tout à fait particulier dans la mesure où, comme l'ont dit tous les orateurs qui se sont exprimés avant moi, il nous permet de faire le point sur un sujet qui ne fera que prendre de l'importance et qui est « en marge » du projet de loi de financement de la sécurité sociale : la prise en charge de la dépendance.

Les enjeux sont en effet considérables. Dans un rapport de novembre 2005 consacré aux personnes âgées dépendantes, déjà cité par Alain Vasselle, la Cour des comptes estimait que le nombre de personnes très dépendantes passerait de 796 000 personnes en 2000 à un million de personnes en 2020 et à 1, 22 million de personnes en 2040, et ces chiffres seraient même légèrement dépassés.

Il convient toutefois de rappeler que la dépendance ne concerne pas que les personnes âgées, mais que l'on inclut également dans cette catégorie les personnes handicapées.

Le coût de la prise en charge de la dépendance devrait donc connaître une croissance forte, et il a déjà commencé d'augmenter, ce à quoi le rapporteur pour avis de la commission des finances que je suis ne peut qu'être sensible.

On rappellera en effet que les aides accordées aux personnes dépendantes se sont développées ces dernières années : au 30 juin 2006, 971 000 personnes bénéficiaient ainsi de l'allocation personnalisée pour l'autonomie, qui a succédé à la prestation spécifique dépendance - pour un montant moyen de 476 euros à domicile et de 402 euros en établissement.

Les conseils généraux prennent en charge l'essentiel de cette allocation : ils versent en moyenne 398 euros dans le cas des personnes à domicile et 274 euros dans le cas des personnes en établissement.

La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a également contribué à améliorer le traitement de la prise en charge du handicap, en créant notamment la prestation de compensation du handicap.

Enfin, la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées a institué la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, financée notamment par le produit d'une contribution dite de solidarité de 0, 3 %, portant sur les mêmes revenus que ceux qui sont assujettis aux cotisations d'assurance maladie et de 0, 3 % sur les revenus du patrimoine et des placements.

Je voudrais, après avoir brossé ce très rapide tableau, insister sur deux points : le coût de la prise en charge de la dépendance et l'organisation de cette prise en charge.

Le fascicule bleu « solidarité et intégration » du projet de loi de finances chiffre au total la dépense publique en faveur des personnes dépendantes à 46, 66 milliards d'euros en 2006.

L'État couvrirait ainsi 21, 1 % de la dépense totale, avec une participation de 9, 84 milliards d'euros, la sécurité sociale 55, 5 %, avec 25, 91 milliards d'euros, les départements 16, 3 %, avec 7, 62 milliards d'euros, les crédits propres de la CNSA 6, 2 %, avec 2, 87 milliards d'euros, et l'association pour la gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés, 0, 9 %, soit 420 millions d'euros

Encore faut-il préciser que ces données ne concernent que les crédits accordés et ne prennent pas en compte les dépenses fiscales. Or celles-ci sont de plus en plus importantes. En effet, le fascicule bleu « solidarité et intégration » fait apparaître un montant de dépenses fiscales directement liées à la prise en charge de la dépendance évalué à 5, 27 milliards d'euros. Il convient d'y ajouter 4, 79 milliards d'euros de dépenses fiscales, qui contribuent à la prise en charge de la dépendance sans que ce soit leur objet principal

Le coût pour les finances publiques est donc déjà très lourd, et il ne pourra que croître, compte tenu des évolutions démographiques attendues. Il pèse déjà fortement sur les comptes publics, notamment sur les marges de manoeuvre des conseils généraux.

La question que je me pose est donc simple : jusqu'à quel point la collectivité peut-elle prendre en charge la dépendance ? Qu'est-ce qui doit être du ressort de la collectivité ? Qu'est-ce qui doit demeurer à la charge des personnes concernées ?

Cette problématique est très proche de celle qu'abordait notre collègue Alain Vasselle par le biais de son amendement sur l'assurance dépendance.

J'observe également que M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, prônait dans un récent rapport sur l'épargne retraite de « conjuguer la couverture du risque dépendance avec le développement de l'épargne retraite ».

S'il ne s'agit pas de trancher l'ensemble de ces questions dès aujourd'hui, ce débat doit être l'occasion pour chacun d'entre nous de prendre la mesure des enjeux et de faire avancer les réflexions.

Le second point sur lequel je voudrais insister concerne la CNSA. Cette caisse a été présentée, lors de sa création, comme l'émergence d'une « cinquième branche de la protection sociale », et non comme une branche à part entière de la sécurité sociale.

Elle conserve ainsi un statut hybride, comme l'a montré son traitement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. En 2005, cette caisse apparaissait au titre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base.

La CNSA a aujourd'hui disparu des tableaux d'équilibre, même si l'on trouve des données la concernant dans les annexes, dans la mesure où elle est désormais un organisme qui reçoit des concours provenant des organismes de sécurité sociale. En l'espèce, elle assure la gestion de l'ONDAM médico-social.

Cette architecture de financement ne simplifie pas la lisibilité globale de notre système de protection sociale et ne favorise pas non plus une répartition claire des responsabilités. Celle-ci ne pourra toutefois apparaître que lorsque sera tranchée la question centrale : quel coût la collectivité est-elle prête à assumer pour la prise en charge de la dépendance, compte tenu de ses autres missions et de ses autres besoins ?

Cette intervention soulève donc plus de questions qu'elle n'apporte de réponses, mais j'estime que cette problématique, qui est au coeur des enjeux de demain, doit faire l'objet d'une importante réflexion, avant que l'on ne fasse des choix pouvant se révéler très coûteux et, finalement, budgétairement insoutenables pour la collectivité.

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF. - MM. Gérard Dériot et Louis Souvet applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la dépendance, c'est bien sûr celle qui est liée au grand âge, et Alain Vasselle vous en a admirablement exposé les difficultés et les enjeux.

Pour moi, cela ne vous étonnera pas, il s'agit aussi de la dépendance des personnes handicapées, et je souhaite saisir l'occasion de ce débat pour dresser un premier bilan de la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

Vingt et un mois se sont écoulés depuis l'adoption de ce texte, le 11 février 2005. Onze mois ont passé depuis l'entrée en vigueur de l'innovation majeure de cette loi, la prestation de compensation du handicap, ou PCH, en faveur de laquelle la commission des affaires sociales et son rapporteur, M. Paul Blanc, s'étaient beaucoup battus.

Les financements ont été mis en place : les départements y consacrent en 2006 655 millions d'euros, soit autant qu'à l'ancienne allocation compensatrice pour tierce personne. La Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie complète ces financements à hauteur de 502 millions d'euros. Sur ces sommes toutefois, combien aura réellement été dépensé au profit des personnes handicapées ?

Au 1er janvier 2006 en effet, seuls les décrets relatifs aux personnes prises en charge à domicile étaient parus. Pour les personnes accueillies en établissement, aucune mesure d'application n'a encore été publiée, et le décret permettant l'attribution d'une aide humaine 24 heures sur 24 n'est paru qu'en juin dernier.

À ce jour, très peu de prestations ont réellement pu être attribuées, et de nombreux dossiers restent bloqués au stade des premières évaluations.

Dans bien des départements, les équipes pluridisciplinaires ne sont pas en place ou s'efforcent de parer au plus pressé. Elles sont en fait l'exacte réplique des anciennes équipes de COTOREP, les commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel. La loi prévoyait pourtant d'étoffer ces équipes, de leur apporter le concours de professionnels différents, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Dans le Rhône bien sûr, monsieur Mercier, département qui reste la référence !

La loi prévoyait donc des équipes étoffées susceptibles d'enrichir leurs expertises : ergothérapeutes, spécialistes de telle ou telle pathologie ou professionnels de l'aide à domicile.

Comme pratiquement rien n'a changé, les évaluations sont en fait toujours établies avec la même approche et dans le même état d'esprit : on estime le nombre d'heures nécessaires pour aider la personne handicapée à manger, à se laver, à se coucher. C'est important, mais on ne se soucie pas encore beaucoup de son projet de vie. Telle était pourtant notre préoccupation première.

J'observe par ailleurs que, sur de nombreux points, les décrets méconnaissent l'esprit de la loi.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Ils ont tous été rédigés avec la participation active des associations de personnes handicapées !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Ainsi, dans un premier temps, les décrets ont limité les aides humaines susceptibles d'être prises en charge dans le cadre de la prestation de compensation aux seuls besoins liés directement aux soins ou aux actes essentiels de la vie - je dirai même de la survie, monsieur le ministre. Aucune attention n'a été portée à l'estimation de besoins plus larges, pour l'assistance dans la vie quotidienne ou l'aide ménagère.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

C'est très large !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Il n'a été mis fin à cette restriction que depuis moins d'un mois, grâce à la mobilisation des personnes handicapées elles-mêmes.

Je citerai un autre exemple des ratés de l'application de la loi : les tarifs de prise en charge pour les aides humaines ont été fixés à un niveau tellement bas qu'il est très difficile, surtout en région parisienne, de trouver des candidats à ces fonctions.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Comment expliquer en effet qu'une aide humaine recrutée de gré à gré ne puisse être rémunérée qu'à hauteur de 8, 50 euros de l'heure, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

...quand une femme de ménage est payée en moyenne 12 euros, alors que l'on attend naturellement de la première bien plus qu'un service technique : elle apporte aussi de la chaleur, de l'attention et du soin.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

C'est 14 euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Arguant du fait que la prestation de compensation est une prestation affectée, les décrets ont également mis en place un contrôle de l'effectivité de l'aide que je qualifierai de totalement excessif.

Le dispositif imaginé par le législateur était le suivant : il consistait à verser chaque mois à la personne handicapée une somme correspondant à la moyenne de ses besoins, de telle sorte qu'elle puisse lisser ses dépenses d'un mois sur l'autre, la régularisation intervenant en fin d'année.

Or, dans les faits, on demande à cette personne handicapée qui ne dispose que de peu de ressources d'avancer l'intégralité des sommes nécessaires à la couverture de ses besoins, pour les lui rembourser dans un délai aléatoire, sur présentation de justificatifs et bien sûr dans la limite d'un plafond.

Dans ces conditions, les sommes non dépensées un mois donné sont définitivement perdues.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Elles ne peuvent être reportées sur les mois où les besoins sont plus importants, mois de vacances ou mois de maladie, où l'on demandera aux aides humaines d'assurer un plus grand nombre d'heures.

C'est pourquoi je soutiendrai un amendement tendant à autoriser, pour les personnes handicapées qui le souhaitent, le versement en deux fois des aides relatives aux aides humaines : 90 % de ces aides en début d'année, et le solde après vérification des justificatifs, en fin d'année.

Par ailleurs, un pan entier du dispositif imaginé par la loi du 11 février 2005 reste aujourd'hui lettre morte : il s'agit de la partie qui concerne les fonds départementaux de compensation, normalement chargés de compléter les sommes apportées par la prestation de compensation du handicap au titre de l'aide extralégale, afin de réduire le « reste à charge » pour les personnes handicapées.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Or peu de départements - peut-être le Rhône, toujours à la pointe du progrès - ont mis en place ces fonds.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

L'État, contributeur obligatoire à ces fonds, ne montre d'ailleurs pas l'exemple en la matière : sa participation est strictement identique depuis deux ans aux crédits précédemment affectés aux sites pour vie autonome, alors que les missions des fonds sont infiniment plus larges, désormais.

Lorsque les fonds existent, ils refusent d'apporter une aide au-delà des maxima prévus par le barème de la prestation de compensation, ce qui est à la fois absurde et totalement contradictoire avec leur objet même.

Beaucoup refusent également de soutenir les parents d'enfants lourdement handicapés, et ce malgré votre circulaire, monsieur le ministre, qui en fait un public prioritaire, dans l'attente de l'extension aux mineurs de la prestation de compensation du handicap.

Je rappelle d'ailleurs que l'article 13 de la loi du 11 février 2005 pose explicitement le principe de l'extension aux enfants de cette prestation. Ce point, vous vous en souvenez, avait fait l'objet d'un vif débat au sein de la Haute Assemblée, et la commission des affaires sociales y est très attachée.

La loi prévoit que cette extension doit intervenir dans un délai de trois ans à compter de son entrée en vigueur.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, cela signifie qu'il nous reste désormais moins de dix-huit mois pour identifier et dépasser l'ensemble des obstacles juridiques, financiers et pratiques liés à l'élargissement des catégories de bénéficiaires.

De plus, dans un délai de cinq ans, ce sont les personnes âgées dépendantes qui seront visées par cette extension. Cela suppose de réfléchir dès maintenant aux évolutions des missions et des ressources de la CNSA et aux conséquences de cette mesure sur toutes les branches de la sécurité sociale.

Au-delà de la question de la prestation de compensation, je voudrais encore aborder deux points.

Le premier se rattache à la mise en place des maisons départementales des personnes handicapées.

Je crois nécessaire d'insister à nouveau sur leur mission d'information et de conseil auprès des personnes handicapées et de leurs familles, non seulement quant aux aides et prestations disponibles mais aussi quant aux droits, comme allocataire naturellement, comme employeur parfois, et tout simplement comme citoyen à part entière.

Jusqu'ici, l'administration a déployé beaucoup d'efforts pour former et informer les professionnels, ce qui était sans doute indispensable pour assurer le démarrage de la réforme.

Il convient désormais d'engager la même démarche au bénéfice des personnes handicapées, s'agissant, notamment, de leurs besoins de formation aux différentes responsabilités de l'employeur, lorsqu'elles souhaitent recourir elles-mêmes au recrutement de leurs aides humaines en gré à gré.

Mon second point portera sur la question de la représentativité associative et de la place laissée dans les faits aux associations non gestionnaires d'établissements.

L'article 1er de la loi du 11 février 2005 rend obligatoire la présence simultanée d'associations gestionnaires et non gestionnaires au sein de toutes les instances nationales et locales qui émettent un avis ou prennent des décisions concernant la politique relative aux personnes handicapées.

Or, nous ne pouvons le nier, ce principe est très mal respecté dans les faits : les associations non gestionnaires, lorsqu'elles sont effectivement représentées, n'ont qu'un très faible poids, que ce soit dans les commissions des droits et de l'autonomie, dans les commissions exécutives des maisons départementales ou encore dans les conseils consultatifs des personnes handicapées.

Pourtant, je persiste à penser qu'il s'agit d'une mesure essentielle.

Tout d'abord, la nouvelle génération de parents ne souhaite plus forcément assurer ce rôle de gestionnaires et considère, avec raison, que ce dernier doit revenir à l'État, au nom de la solidarité nationale.

Ensuite, nous ne pouvons passer sous silence les inévitables conflits d'intérêt qui naissent de cette confusion des rôles, notamment en matière d'orientation des personnes handicapées.

Comment une association gestionnaire peut-elle être totalement neutre à l'égard du choix de vie d'une personne lorsqu'elle a le souci de la pérennité des structures d'accueil qu'elle gère elle-même ?

En 2005, le législateur n'a pas souhaité poser un interdit brutal, sous la forme d'une incompatibilité totale entre les fonctions de gestionnaire et celles de représentant des personnes handicapées. Il a voulu laisser au monde associatif une chance de prendre lui-même conscience de la nécessité de mieux séparer ces fonctions.

Mais encore faut-il que les pouvoirs publics, désormais chargés d'appliquer les principes édictés par le législateur, encouragent en ce sens les associations, ce qui est très loin d'être le cas.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, veillons donc à la bonne application de la loi de 2005, afin de ne pas décevoir les espoirs qu'elle a suscités.

Gardons présent à l'esprit que ce que nous faisons aujourd'hui pour les personnes handicapées servira demain à nous-mêmes ou à un membre de notre famille.

Notre société ne recueillera l'adhésion de tous que si elle sait faire preuve de solidarité à l'égard de ceux qui en ont particulièrement besoin.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 47 minutes ;

Groupe socialiste, 32 minutes ;

Groupe Union centriste-UDF, 14 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 11 minutes ;

Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 9 minutes ;

Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe, 7 minutes.

Dans la suite du débat, la parole est à M. Michel Mercier.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite tout d'abord remercier M. le président de la commission des affaires sociales, M. le rapporteur et M. le ministre d'avoir accepté d'organiser ce débat sur la dépendance.

Je m'exprimerai devant vous non en tant qu'expert, comme l'ont fait ceux qui m'ont précédé, mais en tant que simple praticien des textes qui ont été votés par le Sénat, et dont j'évoquerai la mise en oeuvre.

Il est tout à fait exact que, lorsque l'on traite de la dépendance, il faut songer à la fois aux personnes âgées dépendantes et aux personnes handicapées. Si les textes que nous avons adoptés nous conduisent à évoquer de façon globale ce problème, nous aurons déjà accompli un grand progrès.

Dans les réformes en cours, je soulignerai, dans un premier temps, ce qui me semble constituer un mieux, avant de relever, dans un second temps, ce qui marche moins bien, car j'y suis, hélas ! obligé ; c'est d'ailleurs tout à fait normal s'agissant de réformes de l'ampleur de celles que nous avons lancées, qui visent à mieux prendre en charge la dépendance des personnes âgées et à mieux accueillir les personnes handicapées dans notre société.

L'étude personnalisée de la dépendance, tout d'abord, me semble constituer une véritable réforme de fond. Désormais, une personne handicapée ou une personne âgée dépendante est non plus un dossier, mais une personne, qui est suivie par une équipe pluridisciplinaire. Il s'agit là d'un des plus grands progrès qui aient été accomplis dans le domaine de l'action sociale.

Offrir à chacun un traitement personnalisé, permettre à la personne dépendante ou handicapée de définir un projet de vie, qui est ensuite validé et porté par une équipe pluridisciplinaire, constitue une réelle nouveauté, qui honore notre pays et sa conception de l'action sociale.

À l'évidence, les deux lois que nous avons adoptées sont très généreuses, et c'est bien normal. Toutefois, elles posent un certain nombre de problèmes.

Les personnes âgées dépendantes, tout d'abord, se sont révélées particulièrement nombreuses. Dans le département que j'ai l'honneur d'administrer, avec l'aide de Mme Dini et de M. Fischer d'ailleurs - vous voyez, mes chers collègues, combien ma tâche est facile !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

En l'espace de seulement cinq ans, dans le département du Rhône, le nombre de personnes âgées qui touchent l'APA est passé de 14 600 à 20 500, soit 6 000 personnes supplémentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Il s'agit donc d'un dossier très important, qui pèse lourdement sur les départements.

Je souhaite rendre hommage aux agents qui, dans tous les départements, ont pris de plein fouet les deux réformes que nous avons lancées. Leur capacité à transformer aussi vite l'action sociale afin de personnaliser l'aide mérite d'être soulignée.

Des dizaines de milliers de dossiers constitués par les personnes âgées, et maintenant par les personnes handicapées, parviennent aujourd'hui dans les services des conseils généraux, où ils sont plutôt bien et rapidement traités.

À la fin de l'année, nous pourrons constater, me semble-t-il, que les délais prévus par la loi pour le traitement des dossiers présentés par les personnes handicapées auront été sinon scrupuleusement suivis, du moins approchés de très près. Je suis même certain que, dans bien des départements, la gageure du respect des délais inscrits dans la loi aura été tenue.

Face à une telle augmentation du nombre des personnes concernées, comment mettre en oeuvre les plans d'aide définis au profit des personnes âgées dépendantes ou des personnes handicapées ? Deux solutions sont possibles : recourir aux établissements spécialisés ou engager des intervenants à domicile.

Les plans d'aide réalisés à domicile sont relativement habituels s'agissant des personnes âgées, mais entièrement nouveaux pour ce qui concerne les personnes handicapées.

La remarque formulée par Nicolas About, qui soulignait tout à l'heure la nécessité de faire jouer un rôle plus important aux associations non gestionnaires d'établissements, prend ici tout son sens. En effet, dès lors qu'une part importante de la prise en charge du handicap se fera à domicile, ce sont toutes les associations représentatives, et non plus seulement les gestionnaires, qui devront siéger dans les instances existantes.

Monsieur le ministre, les aidants professionnels posent de véritables problèmes, car leur coût s'accroît, et ce n'est pas près de cesser.

Le Parlement a adopté divers textes, qui étaient tous fondés et qui s'articulent bien, mais qui ont conduit à une très forte augmentation du coût des aidants à domicile. Je pense notamment aux lois relatives à la validation des acquis de l'expérience, aux formations professionnelles et à l'accroissement des salaires des aides ménagères, que nous avons tous souhaité, mes chers collègues.

S'agissant du financement, monsieur le ministre, j'ai trouvé vos propos tout à fait merveilleux, même si je reconnais que vous étiez dans votre rôle.

En fait, j'ai bien mesuré la distance qui séparait la rue Duquesne d'une ville comme Lyon, car les financements ont quelques difficultés à arriver sur le terrain.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Si l'on examine le financement de l'APA, on constate qu'il représente pour les départements une dépense bien plus lourde que le RMI.

Dans un département comme celui dont je suis l'élu, le RMI qui n'est pas versé par l'État représente grosso modo 25 millions d'euros par an, alors que le financement de l'APA qui n'est pas avancé par la CNSA, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, est bien supérieur.

D'ailleurs, la CNSA finance de moins en moins l'accompagnement de la perte d'autonomie ! Je ne comprends pas comment elle peut, dans ces conditions, dégager des excédents ! Si cette caisse finançait les prestations au même niveau qu'il y a trois ans, ...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Mais elle n'existait pas il y a trois ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

...elle ne connaîtrait pas d'excédents, me semble-t-il, et il serait donc bien moins difficile de répartir ces fonds !

Dans le département du Rhône, la CNSA couvrait au départ un peu plus de 30 % des dépenses, contre 29 % cette année et 26 % l'an prochain. La charge nette pour les départements, qui était inférieure à 50 millions d'euros à l'origine, sera de 60 millions d'euros cette année et probablement de 70 millions d'euros l'an prochain.

Cette progression forte, et inquiétante naturellement, doit nous amener à réfléchir ensemble sur le financement de la dépendance.

En effet, réclamer plus d'argent à l'État constitue un exercice assez facile, auquel il est toujours loisible de se livrer - il peut d'ailleurs faire plaisir pendant un moment -, mais qui ne rapportera pas grand-chose si vous n'avez rien à donner, monsieur le ministre.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Très bien ! Voilà une attitude responsable !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Il faut donc aller plus loin, probablement en recentrant la CNSA sur ses missions premières.

Monsieur le ministre, il ne faut pas faire financer par cette caisse toutes les idées qui peuvent passer par la tête de vos collaborateurs, même si ceux-ci sont excellents !

Certains des articles du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoient que la CNSA financera des actions innovantes, entre autres. C'est une très bonne idée, et il faut développer ces initiatives, mais, de grâce, commençons par régler les dépenses de base avant de financer ce qui, demain, sera peut-être intéressant !

J'évoquerai également le problème du financement du handicap. La prestation compensatoire du handicap est-elle plus ou moins généreuse que les dispositifs qui l'ont précédée ? En fait, elle l'est plus sur le papier et beaucoup moins dans la réalité, car elle laisse les personnes handicapées et les personnes âgées résoudre seules le problème du « reste à charge ».

Monsieur le ministre, vous avez eu raison de souligner qu'il s'agissait là d'une question essentielle, mais ce n'est pas la CNSA qui financera le « reste à charge ».

Pour ma part, je vous demanderai pourquoi la contribution de l'État au fonds de compensation du handicap diminuera l'année prochaine, et ce très nettement puisque, dans un département comme le mien, on annonce une baisse de 30 % de la participation de l'État à ce fonds, ce qui pose certains problèmes.

De la même façon, je souhaite vous interroger sur les dispositions de l'article 42 du texte dont nous débattons aujourd'hui. Cet article ne crée rien : c'est l'article 46 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 qui établit une distinction entre les personnes âgées très dépendantes hébergées dans les unités de soins de longue durée, les USLD, qui relèvent du secteur sanitaire, et celles qui dépendent du secteur médicosocial. Pourquoi réduire les moyens affectés au financement des lits de long séjour ? Vous habillez cela parfaitement, monsieur le ministre, et, du point de vue théorique, il n'y a rien à y redire.

Un arrêté publié au mois de mai dernier - la commission des affaires sociales vous félicite de votre célérité - a établi un « référentiel définissant les caractéristiques des personnes relevant de soins de longue durée », qui vise à distinguer, parmi les personnes grabataires, celles qui sont « grabataires-grabataires » des autres. Il fallait inventer une telle classification ! Vous l'avez fait, monsieur le ministre !

En fait, cet outil a pour seul objet de supprimer les unités de soins de long séjour et de les remplacer par des sections chargées d'accueillir un nombre beaucoup moins important de personnes âgées, nécessitant des soins médicotechniques importants, les SMTI. À peu près le tiers des patients actuellement en USLD dépendront de cette structure, les deux tiers restants sortant du financement de la sécurité sociale intégrale, ce qui entraînera une forte baisse du financement par l'assurance maladie.

Monsieur le ministre, vous nous avez annoncé beaucoup de « plus ». Je souhaite donc, pour ma part, vous interroger sur les « moins », notamment sur cette baisse qui concernera un grand nombre de personnes. Certes, le dispositif ne sera pleinement appliqué qu'en 2009, mais j'aimerais savoir comment les diverses augmentations de financement que vous nous avez annoncées s'articuleront avec les diminutions très fortes que vous nous proposez de voter à l'article 42.

Telles sont les quelques remarques que je tenais à formuler sur la mise en oeuvre pratique du texte qui nous est soumis. Tout ne peut pas être fait en un jour, nous le savons bien, et j'ai souligné les aspects positifs de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Mais la vraie question du financement reste devant nous.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Plutôt que répéter que tout va bien, profitons du bruit que feront les diverses élections...

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

...pour travailler à trouver de bonnes solutions.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

C'est ce que j'ai dit !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

En l'espèce, ce ne sont pas des solutions, c'est plutôt du bricolage !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

On retire aux personnes âgées, on contrôle un peu plus les personnes handicapées...

Bien sûr, de tels contrôles s'imposent, mais, demain, le nombre de personnes âgées, qu'elles soient handicapées ou non, augmentera, et il faudra définir les modes de financement nécessaires.

Je souhaite donc que les financements de la CNSA soient concentrés très fortement sur les prises en charge directes des personnes âgées et des personnes handicapées.

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées de l'UMP.

Mme Michèle André remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Blanc

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat qui nous réunit aujourd'hui concerne une partie somme toute réduite des dépenses de la sécurité sociale, mais qui est en progression constante du fait de l'évolution de notre société.

Pour tout ce qui concerne les soins, la dépendance est prise en charge par la sécurité sociale, à travers les dépenses de prestations sociales et médicosociales.

La redéfinition par la loi du 11 février 2005 des missions de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie a modifié le cadre de gestion de ces dépenses. Seules nous intéressent dans ce débat les dépenses des établissements et services pour personnes âgées dépendantes et pour personnes handicapées, qui relèvent de la CNSA.

L'année 2006 est la première année de plein exercice des attributions définitives de la CNSA : cela fonctionne parfaitement bien, et nous avons certainement fait les bons choix institutionnels en ne créant pas une nouvelle branche, dont les lourdeurs auraient pu nous faire perdre tous les bénéfices de ce que nous avons mis en place. Elle est aussi la première année de mise en oeuvre de la réforme du lien entre autorisation et financement, qui permet la création de places par anticipation. C'était une réforme très attendue par de nombreux établissements et services dont l'extension ou la création était bloquée par la rigueur de la règle de l'annualité budgétaire, qui empêchait de faire avancer des dossiers en raison de l'absence de dotation budgétaire.

Le 10 juillet dernier, la Cour des comptes a rendu public son rapport sur les conditions de mise en place et d'affectation des ressources de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. Elle constate que les nouvelles recettes créées en 2004, en particulier celles qui sont tirées de la journée de solidarité, ont bien été intégralement affectées à la Caisse : « Les craintes qui ont pu être exprimées sur l'affectation des nouvelles ressources de la contribution de solidarité ne sont pas fondées : elles bénéficient bien intégralement aux personnes âgées dépendantes et aux personnes handicapées. Un effet vignette n'est pas à craindre. »

Les « Cassandre » qui avaient annoncé que l'utilisation de ces fonds risquait d'être détournée se sont trompées. Nous ne pouvons donc que nous féliciter du dispositif mis en place et des choix qui ont été faits. C'était indispensable au regard de l'évolution très dynamique des dépenses d'assurance maladie en faveur du secteur médico-social, de l'ordre de 9, 12 %. Pour 2006 et 2007, les recettes de la journée de solidarité ont rendu possibles de nombreux progrès en termes de prise en charge pour les personnes âgées dépendantes comme pour les personnes handicapées.

Pour les personnes âgées, les montants dégagés ont permis de poursuivre la médicalisation des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, et d'assurer, voire dans certains cas d'accélérer, la mise en oeuvre des plans pluriannuels de créations de places et de structures.

Le plan « Vieillissement et solidarités » de 2003 avait déjà permis la création de nombreuses places nouvelles en établissements, mais aussi de services de soins infirmiers à domicile, les SSIAD.

Monsieur le ministre, vous venez de présenter un nouveau plan, le plan « Solidarité grand âge », qui amplifiera cet effort. Il prévoit un doublement du rythme actuel de créations de places : le nombre des places de SSIAD sera augmenté de 40 % sur cinq ans ; 2 500 places d'accueil de jour et 1 100 places d'hébergement temporaire seront créées par an afin d'apporter un soutien physique et matériel aux aidants familiaux, qui souffrent trop souvent d'isolement et de fatigue ; le taux d'encadrement par des professionnels soignants des personnes âgées les plus dépendantes dans les maisons de retraite sera relevé.

De même, la complémentarité entre l'accompagnement en hôpital et l'accompagnement en service social et médico-social sera améliorée. En effet, chacun a pu constater que la prise en charge de pathologies propres aux personnes âgées est reportée trop souvent sur des structures d'urgence ou de spécialité médicale. Des places de gériatrie seront donc créées pour parfaire l'accueil des personnes âgées.

Pour les personnes handicapées, de nouvelles places seront ouvertes. Pour les adultes handicapés, cela concerne 2 250 places de SSIAD et 2 500 places en maisons d'accueil spécialisé et foyers d'accueil médicalisé. Pour les enfants, cela représente 1 250 places de services d'éducation spéciale et de soins à domicile, 180 places en établissement pour polyhandicapés, 250 places en établissement pour autistes, 120 places d'instituts thérapeutiques éducatifs et pédagogiques, 7 centres de ressources pour autistes, 22 centres médico-psycho-pédagogiques et 22 centres d'action médico-sociale précoce.

Un tel dispositif est très satisfaisant et démontre une fois de plus, si cela était nécessaire, la volonté du Gouvernement de répondre toujours mieux aux besoins de ceux qui souffrent et à l'égard desquels la solidarité doit s'exercer avec la plus grande vigueur.

Je me félicite de voir les efforts dirigés notamment vers les services de soins à domicile, qui manquent cruellement.

Je profiterai de ce débat pour aborder un sujet qui me tient particulièrement à coeur, le vieillissement des personnes handicapées. Cette question, qui se pose en France depuis une vingtaine d'années avec de plus en plus d'acuité, a été soulevée de façon récurrente, en particulier par les professionnels et par les familles, ces derniers s'alarmant des difficultés concrètes de prise en charge des personnes handicapées vieillissantes.

Monsieur le ministre, vous avez bien voulu me charger d'étudier les enjeux de ce problème : je vous ai remis au mois de juillet dernier un rapport proposant plusieurs pistes de réflexion. Vous me permettrez de reprendre aujourd'hui quelques-unes des idées que j'ai développées à cette occasion.

Le problème du vieillissement des personnes handicapées prend une nouvelle dimension du fait de l'ampleur des mutations démographiques et sociales en cours. Dans un pays qui a structuré ses droits sociaux et ses formes d'aide aux personnes en perte d'autonomie en deux régimes bien distincts - l'un pour les personnes handicapées, l'autre pour les personnes dépendantes âgées -, l'apparition d'une catégorie intermédiaire, les personnes handicapées vieillissantes, contraint à repenser la structure globale du dispositif. En effet, le critère d'âge est devenu à l'évidence excessivement simplificateur.

Les choix qui seront opérés à court et à long terme auront des conséquences sensibles non seulement pour les personnes concernées et leur famille, mais aussi pour les financeurs des dispositifs, principalement l'État, l'assurance maladie et les départements, sans oublier les personnes concernées elles-mêmes.

La loi du 11 février 2005 prévoit de supprimer d'ici à cinq ans toute distinction en matière de compensation et d'aide sociale à l'hébergement entre personnes handicapées en fonction de l'âge. Le critère d'âge conduit en effet aujourd'hui à distinguer deux régimes conçus en réponse à des situations types contrastées : un système destiné aux personnes âgées, qui répond à des situations considérées comme caractéristiques du grand âge et relativement homogènes ; un autre système destiné aux personnes handicapées, qui embrasse une gamme plus hétérogène de situations, évaluées par des outils multidimensionnels, et qui se situe dans la perspective dynamique d'un projet de vie.

La dualité des systèmes et l'appartenance à l'un ou l'autre régime selon un critère d'âge posent donc des problèmes incontestables de frontière et d'équité.

Bien sûr, le système le plus universel dans son objet n'est supportable par la société et les collectivités publiques que dans la mesure où il demeure réservé à des situations exceptionnelles. Pour autant, les deux régimes sont destinés à converger à terme, car, s'ils diffèrent sur leurs « cibles », ils ont des points communs. Un rapprochement des institutions et des dispositifs locaux est donc souhaitable.

Devant le panorama institutionnel - maisons départementales des personnes handicapées, d'un côté, centres de liaison et d'information, et équipes médicosociales qui évaluent la situation au regard de l'APA, de l'autre -, l'existence d'un double dispositif peut apparaître comme une source de complication et de perte d'efficacité. Certains départements y ont d'ailleurs déjà réfléchi.

Ce rapprochement des structures aurait l'avantage de permettre une meilleure diffusion territoriale et le partage des savoir-faire utiles. Par ailleurs, des procédures parallèles sont déjà prévues et rendues obligatoires par les textes en ce qui concerne l'élaboration et la validation de stratégies à moyen terme dans les deux secteurs.

Les collaborations d'ores et déjà constatées contribuent à une salutaire confrontation avec des réalités de terrain. Les représentations que chacun se fait de « l'autre secteur » peuvent ainsi évoluer. À terme, on peut, dans ces conditions, projeter la constitution d'un large réseau technique, comprenant un panel de compétences diversifiées et les spécialisations nécessaires.

Les plus importantes difficultés immédiates pourraient se rencontrer dans les départements où aucune politique active de liaison et de coordination dans le secteur des personnes âgées n'a encore été mise en place. Tel n'est pas le cas, je le sais, dans le département du Rhône !

Il est également indispensable de préparer une évolution des référentiels et des grilles d'évaluation.

En effet, pour cadrer les décisions d'attribution des prestations et construire les plans de compensation et d'aide, dans le secteur des personnes âgées comme dans celui du handicap, il est fait appel à des référentiels se fondant sur la classification internationale du handicap.

Cependant, les objectifs visés au travers de la construction des grilles diffèrent.

La grille AGGIR, utilisée en matière de dépendance des personnes âgées, permet de construire un « score », d'apprécier la lourdeur du handicap d'une personne, tandis que, dans le secteur du handicap, le référentiel employé et le guide d'évaluation ne sont pas conçus pour permettre de classer une personne dans un « groupe » ou sur une « échelle » de handicap. Si les deux systèmes de référence et d'évaluation sont appelés à évoluer, car rien techniquement ne s'y oppose, on ne connaît pas les conséquences, pour la solidarité nationale ou les collectivités publiques, de la généralisation de l'un des deux à l'ensemble des personnes visées.

Il me semblerait donc opportun qu'une réflexion soit entreprise sur les possibilités techniques de juxtaposer un « tronc commun » de références pour l'accès au droit à compensation, ce qui serait plus satisfaisant que la situation actuelle au regard du principe d'universalité du droit à compensation, et des « questions filtres » permettant de répartir les personnes ayant droit à compensation entre plusieurs régimes, dont un régime applicable aux personnes âgées dépendantes.

Par ailleurs, nous devons progresser vers une harmonisation des prestations, des prises en charge et des tarifs.

Du fait de la dualité des systèmes, les prestations, les tarifs et les conditions d'accès aux différents types de prise en charge appliqués aux personnes handicapées et aux personnes âgées diffèrent de façon souvent inutilement compliquée, aussi bien pour les personnes concernées que pour les prestataires de services et les financeurs. Dans la perspective d'une convergence, ces disparités doivent être traitées chaque fois que c'est possible.

En tout état de cause, une harmonisation est de nature à simplifier la gestion de toutes les instances qui ont à traiter de ces sujets, depuis les administrations jusqu'aux prestataires de services.

Quant à la question de l'évolution des sources de financement, elle est cruciale, eu égard à une hausse des charges difficilement évitable.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Blanc

Des pistes ont été récemment ouvertes par le rapport du Centre d'analyse stratégique sur ce sujet. La principale difficulté réside, tout le monde l'a dit, dans le « reste à charge » des personnes.

Le rapport souligne qu'il convient de limiter son montant, pour permettre un vrai choix de vie aux personnes dépendantes. Ses auteurs préconisent sans ambages plusieurs actions, dont une « remise à plat de l'aide sociale en établissement » : il s'agit notamment de considérer « dans des ensembles cohérents, d'une part les différentes possibilités de solvabilisation de la prise en charge en institution à la charge des départements (quelles que soient les sections tarifaires et en prenant en compte la solidarité devant s'exercer envers les personnes démunies), d'autre part les possibilités de mobilisation du patrimoine [...] ».

Si les propositions visant à « renforcer la sélectivité des dispositifs de solvabilisation publics en faveur des publics les plus fragiles » étaient retenues et si des ressources nouvelles étaient recherchées, comme le préconise le Centre d'analyse stratégique, par la prévoyance individuelle, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Blanc

... l'accès au crédit et l'assurance dépendance, des possibilités nouvelles de rapprochement entre systèmes et de « suppression des barrières d'âge » seraient ouvertes.

Chacune de ces pistes doit être explorée, monsieur le ministre, et, dans cette perspective, la contribution des représentants des personnes handicapées et de leurs familles à ces travaux sera particulièrement utile.

Sachez que nous soutenons pleinement la politique mise en place par le Gouvernement, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Blanc

... grâce à laquelle notre société progresse, de façon sans doute perfectible mais significative, vers une meilleure intégration des personnes privées de leur autonomie. Ce texte concourt pleinement à cette évolution, et reçoit donc tout notre soutien.

Certains, sur les travées de gauche, sont toujours prêts à critiquer.

Mme Patricia Schillinger s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Blanc

M. Paul Blanc. Je constate néanmoins que, lorsque je suis entré à la Haute Assemblée, en 1992, on parlait déjà de travailler sur ce dossier. Or rien n'a été fait, jusqu'à ce que vous engagiez, monsieur le ministre, une démarche positive ; c'est la raison pour laquelle nous vous apportons notre entier soutien.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais commencer mon propos sur la prise en charge de la dépendance par une affirmation : il ne devrait pas y avoir « morcellement » des mesures distinguant entre personnes âgées et personnes handicapées. Cela permettrait de répondre aux besoins de nos concitoyens les plus fragilisés de façon cohérente, plus universelle et plus solidaire, sans que soit instaurée, comme actuellement, une barrière d'âge.

Faute de temps pour revenir en arrière

Sourires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

... et évoquer des dispositifs tels que la prestation spécifique dépendance, remplacée par l'APA, la modification restrictive des conditions d'attribution de celle-ci, intervenue en 2002, les conventions tripartites, je m'arrêterai à la création de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Avec un statut incertain et un périmètre grossièrement défini, que M. Mercier a d'ailleurs souhaité préciser, la CNSA constituait déjà, selon moi, l'amorce de la mise en place d'un dispositif de protection séparé pour les personnes âgées et les personnes handicapées, contraire aux principes de l'assurance maladie, qui a vocation à couvrir tous les besoins de toutes les catégories de population.

Cette volonté de « mettre à part » les personnes âgées et les handicapés constitue en effet une remise en cause de la solidarité entre les bien-portants et les malades, entre les cotisants et les autres. La création de cette « caisse » signifiait clairement que la dépendance due au vieillissement ou au handicap n'aurait plus vocation à être prise en charge par la solidarité nationale.

De la même façon, la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a créé une prestation de compensation dont le financement est des plus flous, puisqu'il relève lui aussi de la CNSA.

Je n'aurai garde d'oublier, dans cette « panoplie », la loi relative aux libertés et responsabilités locales, qui a confié aux départements la mise en oeuvre complète des trois grandes allocations de solidarité que sont le RMI, l'APA et la PCH, sans que leur soit assurée une dotation couvrant intégralement les charges transférées. C'est un débat prégnant au sein de l'Assemblée des départements de France.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Aujourd'hui, dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, monsieur le ministre, que proposez-vous pour les personnes dépendantes, qu'elles soient âgées ou handicapées ?

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Je vous l'ai dit !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Voyons votre plan « Solidarité grand âge » : ses crédits augmenteront de 650 millions d'euros en 2007, soit une progression de 13 % ; 6 000 places supplémentaires en services de soins infirmiers à domicile seront créées, et un plan d'investissement « exceptionnel » sera mis en oeuvre au profit des maisons de retraite.

S'agissant des personnes handicapées, vous proposez de déployer 385 millions d'euros supplémentaires provenant de l'assurance maladie et de créer 6 800 places dans les établissements et les services.

Toutefois, la réalité vient grandement atténuer la portée de vos promesses.

En effet, si la progression de 13 % des crédits affectés au plan « Solidarité grand âge » est apparemment séduisante, ce taux d'augmentation annoncé se fonde sur des prévisions excessivement optimistes s'agissant des crédits dégagés grâce à la suppression d'un jour férié ; ainsi, le taux d'augmentation des crédits de l'assurance maladie est inférieur pour 2007 à celui que l'on aura connu en 2006 !

En outre, vous utilisez des subterfuges pour afficher des créations de postes et de places, par ailleurs insuffisantes tant les besoins sont grands.

Tout d'abord, il y a diminution du ratio entre personnels et personnes hébergées dans certains établissements, dont les USLD, les unités de soins de longue durée. C'est là, on le sait, l'un des principaux enjeux, sur lequel nous aurons l'occasion de revenir : disons-le clairement d'emblée, les lits en USLD devant devenir des lits d'EHPAD, on voit bien qu'il s'agit d'une manoeuvre consistant à procéder à des transferts de charges. Sur ce point, je suis d'accord avec M. Mercier.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Par ailleurs, les augmentations de salaires des employés ne sont pas prises en compte.

Enfin, vous transférez à la CNSA des charges non financées, liées notamment à la création de l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux, ainsi qu'à la prise en charge des cotisations vieillesse des aidants familiaux.

Rappelons que même la Cour des comptes considérait récemment que les besoins des personnes âgées fragilisées n'étaient couverts qu'à moitié !

Par ailleurs, vous prévoyez d'instaurer un congé de soutien familial permettant à son bénéficiaire de s'occuper d'un proche dépendant. Non rémunéré, d'une durée de trois mois renouvelable quatre fois, il ne pourra pas être refusé par l'entreprise. Le salarié qui en bénéficiera retrouvera son poste, ou un poste équivalent, à son issue. Entre-temps, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie financera ses droits à la retraite. Toutefois, cette mesure laisse entiers les problèmes que pose la pénurie de structures d'aide, les tarifs élevés des établissements et, surtout, le manque de personnel dans les services à domicile et dans les structures d'accueil.

Pour qu'il s'agisse d'un véritable progrès, il faudrait que les personnes concernées puissent choisir entre un maintien à domicile grâce à des structures spécialisées et ce congé de soutien familial. Ce n'est pas le cas. On reste dans une approche palliative de la prise en charge de la dépendance.

En ce qui concerne le maintien à domicile, je dirai qu'il est plus confortable, plus respectueux du maintien de l'indépendance de la personne âgée ou handicapée, dans de bonnes conditions, bien sûr, pour elle et ses proches. Le problème actuel est qu'il est largement à la charge des familles, sur le plan tant de l'organisation que du coût financier. Cela est même devenu l'enjeu d'un véritable marché, comme tout ce qui touche à la retraite, au grand âge, à toutes les formes de dépendance. C'est inégalitaire et inadmissible.

C'est pourquoi nous pensons que le maintien à domicile des personnes dépendantes doit devenir une mission de service public. Cela suppose que, en cas de perte d'autonomie, les personnes concernées puissent accéder à toutes les activités sociales : coordination des soins par des professionnels, transports, accès aux commerces, à la culture, aux moyens de communication. Cela intéresse forcément l'ensemble des services publics.

J'aurais souhaité aborder maintenant les trois questions fondamentales concernant les établissements pour personnes âgées : le manque de structures d'hébergement, la pénurie de personnel qualifié et la question des prix de journée.

Faute de temps, je me bornerai à souligner que le coût de la prise en charge est réparti d'une manière fort peu satisfaisante : il est supporté à hauteur de près de 60 % par le résident ou sa famille, de 25 % par l'assurance maladie et de 15 % par les conseils généraux, au travers de l'APA et de l'aide sociale.

Or il faut savoir que le tarif moyen mensuel d'hébergement est de 1 700 euros et que le montant moyen de la retraite varie de 1 100 à 1 200 euros selon les sources... Pour ma part, je suis chaque jour confronté à des situations dramatiques, où des familles s'endettent pour pouvoir faire face. Les économies de toute une existence sont bien souvent englouties ; les biens immobiliers acquis grâce à toute une vie de travail doivent la plupart du temps être vendus, pour que les familles puissent faire face aux charges qu'elles doivent assumer.

Le problème du « reste à charge » demeure au coeur des préoccupations des Français. Il faut entendre leur colère sourde gronder quand arrivent à la fin de chaque mois des factures d'un montant de 1 700, 1 800, 2500, voire 3 000 euros.

Permettez-moi d'ajouter un mot sur la réforme des unités de soins de longue durée. La date butoir du 31 décembre 2006, fixée dans la loi de financement de 2006, pour déterminer les nouvelles capacités en lits d'USLD et en lits d'EHPAD est repoussée à une date ultérieure.

L'objectif est de requalifier 56 000 lits d'USLD en lits d'EHPAD, avec la baisse du ratio agent-lit qui en découle. Avec les associations, dont l'ADEHPA, j'estime qu'on ne peut accepter cette situation. Le financement des USLD doit être intégralement pris en charge par l'assurance maladie.

S'agissant des personnes handicapées, je voudrais citer un fait récent qui pointe une fois encore les imperfections de la loi du 11 février 2005, si bien décrite par le président About. À la suite d'une réclamation, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE, devrait délibérer sur la différence de traitement relative à l'accès aux prestations accordées au titre du handicap.

Celle-ci résulterait de l'article 16 de la loi du 11 février 2005, qui instaure une garantie de ressources pour les personnes handicapées, la GRPH, et une majoration pour la vie autonome, la MPVH, pour les personnes bénéficiaires de l'AAH. Ne peuvent y prétendre les bénéficiaires d'une pension d'invalidité alors qu'ils justifient, au titre des prestations accordées par ce régime, d'un niveau de ressources pourtant identique à celui des bénéficiaires de l'AAH.

Il y a donc là une différence de traitement, voire une discrimination. Finalement, votre gouvernement et les précédents ont sans cesse éludé le débat de fond qui porte bien sur la définition d'un droit à compensation universel et son financement, fondé sur l'expression d'une réelle solidarité, comme celle qui présida en 1945 à la création de la sécurité sociale.

C'est donc bien d'une réforme du financement de notre protection sociale qu'il est question. En effet, la situation dramatique qui prévaut actuellement est aussi la conséquence d'une politique de réduction des moyens affectés à la santé - c'est vrai à l'échelle européenne -, de disparition des hôpitaux de proximité ...

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Vous ne vous feriez pas opérer dans un hôpital de proximité, qui a un petit plateau technique !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Vous êtes donc pour la suppression des blocs opératoires ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

... et de milliers de postes de médecins et d'infirmiers, de milliers de lits, notamment de gérontologie, et du gel des crédits destinés aux personnes âgées ou handicapées. Tout se tient.

Dans le même esprit, je considère qu'il existe un risque de privatisation de la prise en charge de la dépendance, avec la volonté clairement affichée du Gouvernement et de certains membres de la majorité de privilégier la prévoyance individuelle, assurantielle, en matière d'autonomie. Les grandes compagnies d'assurance sont d'ailleurs bien conscientes du marché qui leur est ouvert.

Mes collègues du groupe communiste républicain et citoyen et moi-même considérons qu'il existe des pistes de financement fondées sur une plus grande justice sociale et sur la solidarité. Lorsque l'on sait que plus de 25 milliards d'euros d'aides directes sont consentis aux entreprises sous forme d'exonération de charges - sans effet sur l'emploi -, on imagine aisément le nombre d'actions qui pourraient être financées dans le domaine de la solidarité nationale !

Nous sommes en revanche opposés à toute forme de TVA sociale ou de fiscalisation accrue. C'est donc bien la réforme du financement de la sécurité sociale qui est à l'ordre du jour.

Forts de ces nouvelles sources de financement, nous proposons de créer un cinquième risque de la sécurité sociale, celui de la dépendance, de l'incapacité ou de la perte d'autonomie, sans discrimination quant à l'âge de la personne ou quant à l'origine de son handicap. En 2004, le Conseil économique et social avait d'ailleurs mis au point la définition d'une branche nommée « handicap, incapacité, dépendance » qu'il considérait nécessaire de créer au sein du régime général.

Je note avec satisfaction, monsieur le ministre, que vous évoquez à présent le fameux cinquième risque que nous préconisons depuis plusieurs années ! J'attends donc de vous des éclaircissements quant à l'évolution de votre politique à l'égard des personnes âgées et des personnes handicapées.

Votre dernier texte sur le handicap a soulevé beaucoup d'espoir chez les personnes handicapées. Mais de nombreuses déceptions sont en train de naître, notamment parce que les aides techniques pour les personnes restant sous le régime de l'allocation compensatrice de tierce personne ne sont pas prises en charge.

De même, il conviendra d'approfondir l'examen de la situation réelle, et de ses conséquences, des bénéficiaires de l'AAH qui basculent dans le RMI, dont le nombre est de plus en plus important.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a un peu plus de trois ans, la canicule tuait quinze mille personnes et mettait gravement en cause la crédibilité des pouvoirs publics dans le domaine de la prise en charge des personnes âgées.

Le 6 novembre 2003, le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin annonçait un plan Vieillissement et solidarité ouvrant des droits garantis en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées.

Ces droits devaient être garantis par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, elle-même financée par un jour férié travaillé. C'est le lundi de Pentecôte qui fut choisi, sans aucune concertation, ce qui a finalement abouti à une journée de grève et à un absentéisme record.

Devant un tel fiasco, le comité de suivi et d'évaluation de la journée de solidarité préconisa des aménagements. Le nouveau Premier ministre fit alors adopter des circulaires permettant aux employeurs publics et privés de s'organiser librement en 2006. Ainsi, un accord de branche ou d'entreprise peut dorénavant fixer la journée de solidarité à une autre date que la Pentecôte.

Cette solution n'est pas la bonne. Elle génère des inégalités et des confusions, car - ne l'oublions pas ! - toutes les professions ne participent pas à ce geste de solidarité. Les professions libérales par exemple ne sont pas sollicitées. Nous pensons que le jour férié doit être abrogé et remplacé par un prélèvement prenant en compte tous les revenus, comme le fait la CSG. C'est une question de justice sociale.

Le plan Raffarin, qui se voulait historique, a vite montré ses limites en raison de la méthode utilisée, mais aussi et surtout parce que le financement de la CNSA s'est révélé inconséquent. La suppression d'un jour férié n'est en effet pas suffisante pour financer le retard français en matière d'aide aux personnes âgées dépendantes handicapées.

De plus, le dispositif a subi plusieurs amputations puisqu'il a servi au financement de dispositifs décidés antérieurement, comme le plan d'aide aux personnes handicapées - certes indispensable mais qui aurait dû être mis en place grâce à d'autres financements -, ou comme l'aide personnalisée à l'autonomie votée en 2001 !

Depuis sa création, la CNSA a aussi été l'objet de pertes de crédits dues à des désengagements parfois importants de la sécurité sociale ou de l'État. En 2005 par exemple, l'État a fait diminuer l'effort de l'assurance maladie en matière d'aide aux personnes âgées, parallèlement à l'arrivée des crédits liés à la suppression du jour férié. La même année, l'État a utilisé une partie des fonds de la CNSA pour payer les engagements qu'il n'avait pas honorés antérieurement dans ses contrats de plan signés avec les régions. En 2006, l'État a demandé à la CNSA de financer les enquêtes sur les conditions de vie des personnes âgées et handicapées.

Si la CNSA est reconnue depuis sa création comme un véritable lieu de participation, d'échanges et d'information, nous pensons que la tutelle excessive et les pressions exercées par l'État doivent être considérablement allégées, afin de lui permettre de remplir ses missions en toute sérénité.

En mai dernier, le Gouvernement annonçait la mise en oeuvre du plan solidarité grand âge. Vous l'avez ensuite détaillé le 27 juin dernier, en évoquant le lourd défi posé à la France pour les prochaines années par un « tsunami démographique » d'ici à 2015, où le nombre des plus de 85 ans va passer de 1, 1 million à 1, 9 million.

L'objectif de ce plan est d'adapter le dispositif à la diversité des attentes et des besoins des personnes âgées. Il prévoit la création de 25 000 places supplémentaires en maisons de retraite, une augmentation du taux d'encadrement, mais aussi une plus grande possibilité de rester à domicile. Dans cette optique, il envisage la création de 32 000 places de services de soins infirmiers à domicile et de porter le nombre de places en hospitalisation à domicile à 15 000. Pour son financement, l'assurance maladie devra consacrer 2, 3 milliards d'euros de crédits supplémentaires, de manière progressive sur cinq ans.

Les réactions n'ont pas tardé. Les initiateurs de la pétition « Vieillir digne » ont évoqué un plan « largement sous dimensionné » par rapport à l'évolution des besoins. Ils ont trouvé « très étonnant - et même inquiétant - de voir qu'un plan censé être consacré à la prise en charge des personnes âgées faisait totalement abstraction de la problématique des unités hospitalières de soins de longue durée ».

L'Association des directeurs d'établissements d'hébergement pour personnes âgées, l'ADEHPA, a exprimé quant à elle son « désaccord sur les réponses qui sont apportées ». Pour elle, « on se trouve à nouveau avec un petit plan ». Pour l'UNIOPPS, ce plan « fixe des objectifs consensuels mais, quand on y regarde de près, il est très loin de répondre aux besoins, qu'il s'agisse du taux d'encadrement en personnel soignant dans les établissements ou les services de soins, ou du nombre de créations de places en établissements d'hébergement ».

Enfin, si la Fédération hospitalière de France, la FHF, a approuvé les mesures du plan, elle a estimé que « les moyens annoncés pour financer ce plan ne sont pas suffisants ». Elle a également regretté que la question « du ?reste à charge? » pour les résidents et leur famille, aujourd'hui encore beaucoup trop élevé » ne soit abordée que de manière partielle.

D'un avis unanime, monsieur le ministre, c'est le terme « insuffisant » qui caractérise le mieux votre plan. J'ajouterai même, au regard de sa mise en oeuvre dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, qu'il s'inscrit dans une démarche pusillanime.

Si l'on prend l'exemple du congé de soutien familial, permettant à un membre de la famille d'interrompre son activité professionnelle, il ne s'adresse qu'à des cas où les revenus familiaux le permettent. Comment feront les familles les plus démunies ? Elles devront se débrouiller pour financer la prise en charge de la personne dépendante avec des aides qui fondent comme neige au soleil.

Mettre en place une consultation de prévention pour les personnes de plus de soixante-dix ans afin de dépister des maladies ou des incapacités est certes une bonne idée, mais à cet âge, il est un peu tard pour faire de la prévention. C'est tout au long de la vie qu'il faut instaurer la prévention et l'éducation à la santé. Monsieur le ministre, il ne faut pas avoir peur d'aller plus loin !

La prise en charge de la dépendance des personnes âgées est une réforme qui doit être menée en profondeur. L'insuffisance de financement de votre plan fait craindre que des problèmes essentiels ne soient mis de côté.

La formation des personnels est l'un de ces problèmes. Il faut veiller à ce que la formation soit de qualité et à ce qu'elle intègre une approche spécifique et humanitaire du patient.

La complexité des financements est un autre problème. Cette complexité aboutit à des financements disparates sur tout le territoire, au détriment d'une prise en charge équitable des personnes dépendantes, ce dont ces personnes sont les premières victimes ainsi que leurs familles. La participation de l'État, du département, des communes, des caisses de sécurité sociale, sans oublier la contribution des personnes âgées rendent illisible le partage des responsabilités et des compétences en matière de financement. La trop grande hétérogénéité des tarifs ne permet pas d'appréhender facilement le « reste à charge ». Une transparence totale doit être apportée en matière de tarification.

La prise en charge de la dépendance est un défi auquel nous devrons faire face dans les années à venir. L'allongement de la durée de vie est une chance pour notre société, mais il doit être correctement accompagné par la création de places en maisons de retraite et d'emplois supplémentaires. D'autres questions essentielles devront être également traitées : le coût élevé des établissements, le « reste à charge », la clarification des compétences et la formation des personnels. Pour répondre à toutes ces questions, un débat public avec tous les partenaires nous paraît indispensable.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de André Lardeux

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la dépendance présente de multiples aspects et concerne de nombreuses personnes, âgées ou non, ainsi que leurs familles. Des problèmes difficiles commencent à se poser. On pourrait ainsi longuement évoquer le problème de la prise en charge des adultes handicapés par des parents âgés ; des solutions d'hébergement devront être trouvées très rapidement.

Je n'aborderai ici que certains points concernant la situation des personnes âgées.

La dépendance est l'un des problèmes sociaux les plus aigus auxquels nous sommes confrontés, non pas que le phénomène soit nouveau - les premiers rapports sur ce sujet datent d'environ vingt ans -, mais l'allongement de la vie entraîne mécaniquement l'augmentation du nombre de personnes et de familles concernées. C'est ce qui se passe notamment en ce qui concerne les situations de désorientation temporo-spatiale, qu'elles soient dues à la maladie d'Alzheimer ou à d'autres formes de dégénérescence. Dans ces situations, les proches sont souvent désemparés, d'autant plus que l'état de dépendance peut s'étendre sur une longue période.

La majorité actuelle, monsieur le ministre, a fait plus que n'importe quelle autre dans ce domaine, en assurant notamment la pérennisation d'un certain nombre de financements, auparavant fort aléatoires ; elle a en quelque sorte mis fin au financement à crédit pratiqué précédemment.

Il n'en reste pas moins que nous devons relever plusieurs défis. J'en distinguerai plus particulièrement trois : la prévention, la prise en charge et le financement de la dépendance. Je conclurai par quelques mots sur un problème qui m'inquiète, à savoir la complexité administrative de plus en plus grande dans ce secteur.

Le premier défi à relever est celui de la prévention.

Il n'est pas sûr que la prévalence de la dépendance augmente à l'avenir. Des signes indiquent même qu'elle pourrait diminuer dans les sociétés développées, du fait d'une amélioration de la qualité de vie et des soins, ainsi que d'une plus grande activité intellectuelle des générations à venir de personnes âgées. Cependant, cette diminution pourrait être en grande partie masquée par l'augmentation de l'indice de vieillissement de la population.

Aussi, si nous voulons limiter le nombre de personnes dépendantes, il nous faut développer la recherche dans ce domaine, tant en sciences médicales qu'en sciences humaines, tout en nous gardant de susciter des espoirs inconsidérés s'agissant de telle ou telle thérapie innovante que d'aucuns s'empressent de nous présenter comme le miracle absolu. Aucun résultat dans ce domaine ne peut être atteint du jour au lendemain.

Il y a lieu également de préparer les futurs retraités à cette nouvelle période de leur vie. Si un grand nombre d'entre eux savent préparer intelligemment et activement ce changement de situation, il en est trop qui se trouvent désemparés, se sentent inutiles et plus ou moins rejetés par nos systèmes économiques et sociaux - cela plaide d'ailleurs en faveur du maintien au travail des seniors. Ils peuvent alors être victimes davantage et plus vite de la dépendance. Il nous faut donc encourager les initiatives dans ce domaine.

Le deuxième défi qu'il nous faut relever est celui de la prise en charge.

Dans ce domaine, il y a lieu de se pencher sur la formation de ceux qui sont appelés à intervenir auprès des personnes âgées. Les aspects techniques de la formation sont en général assez bien assurés. En revanche, la formation humaine constitue un point faible. En effet, les personnes âgées à prendre en charge, quelle que soit la dégradation de leur état, demeurent des personnes à part entière et doivent être considérées et traitées avec encore plus d'humanité.

Certes, la plupart des professionnels font des efforts considérables dans ce sens, mais n'oublions pas que la maltraitance existe, comme cela a été souligné dans de nombreux rapports, celle-ci étant plus souvent due à une absence de connaissances qu'à une volonté de nuire.

La formation humaine doit, à mon sens, concerner l'ensemble des intervenants, du médecin jusqu'au personnel de service, en passant par les cadres hospitaliers, les infirmiers, les aides-soignants ou les gestionnaires d'établissement.

La prise en charge peut également être améliorée, me semble-t-il, par une meilleure organisation, notamment dans les établissements. À cet égard, il est regrettable que la généralisation de la réduction du temps de travail ait trop souvent eu trois conséquences : l'augmentation de la charge financière pour les résidents - et éventuellement pour la collectivité -, l'accroissement de la charge de travail pour certains personnels et, en fin de compte, la détérioration du service. Finalement, si la réduction du temps de travail a peut-être été une avancée sociale pour certains, elle a également constitué une régression sociale pour d'autres.

Il n'est que trop patent que le maintien du carcan absurde de la RTT empêchera toute amélioration significative du service rendu aux personnes. Ainsi, j'ai fait calculer dans le département du Maine-et-Loire, lorsque j'en avais la responsabilité, le coût des 35 heures dans le domaine du handicap : il a représenté deux cents places d'accueil de personnes adultes handicapées !

Debut de section - PermalienPhoto de André Lardeux

Beaucoup pensent - et l'idée n'est pas à rejeter - au développement d'un service civil pour les jeunes. D'aucuns imaginent de le rendre obligatoire, sans s'inquiéter du fait que l'on n'ait pas le premier euro pour le financer. Malgré tout, si un tel service devait être instauré, que ce soit ou non sur la base du volontariat, l'accompagnement de la population âgée devrait être l'un des axes de sa mise en oeuvre. Cela aurait, me semble-t-il, l'avantage de rapprocher les générations, de permettre aux jeunes qui accompliraient ce service d'acquérir une expérience utile et, accessoirement, d'atténuer les coûts de prise en charge.

J'en viens au troisième défi : le financement de la dépendance.

Certains occultent volontiers cet aspect ou s'imaginent qu'il y a ici ou là une poudre de perlimpinpin, des trésors cachés qu'il suffirait de faire surgir. En réalité, le financement est le nerf de la guerre, mais la porte du financement est étroite...

Monsieur le ministre, je veux saluer à cet égard les améliorations que prévoit le projet de loi de financement de la sécurité sociale, comme le congé de soutien familial, mais tout le monde sait que le cadre actuel de financement ne suffira pas dans l'avenir, que ce soit le financement national ou le financement départemental.

Un premier pas a été fait avec la fameuse Journée de solidarité, le lundi de Pentecôte. Si l'on veut financer de nouveaux besoins, il faut en effet créer un peu plus de richesses. Cela passe évidemment par une augmentation du temps de production. Dans le cas présent, l'effort demandé a été minime, puisqu'il ne représente qu'un surcroît de 0, 4 %, soit deux minutes par jour travaillé. Ce n'est tout de même pas la mer à boire ! Je regrette donc l'incroyable manifestation d'égoïsme national qui s'est déclenchée au moment de la mise en oeuvre de cette Journée. En observant cela, on ne peut qu'être inquiet quant à l'idée que certains se font de la solidarité et se dire que l'on aurait peut-être dû être plus audacieux : quitte à être impopulaire, autant instaurer non par une Journée, mais deux Journées de solidarité !

Debut de section - PermalienPhoto de André Lardeux

Cela nous aurait donné un peu plus de moyens et de recul pour examiner les problèmes à venir.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Pourquoi ne pas faire sauter la cinquième semaine de congés payés aussi ?

Debut de section - PermalienPhoto de André Lardeux

Cela arrivera peut-être un jour, monsieur Muzeau !

Debut de section - PermalienPhoto de André Lardeux

Cela étant dit, comme on ne peut raisonnablement pas augmenter les prélèvements obligatoires, qui sont l'une des causes de la faible croissance en France et dans la zone euro, il faudra avoir le courage de faire des choix entre les différentes prestations et de remettre en cause une partie d'entre elles, dans certaines limites cependant. Ainsi, il ne faut pas toucher aux prestations concernant l'enfance, qui conditionnent notre avenir.

J'évoquerai également un sujet qui est cher à certains d'entre nous- je suis de ceux-là - et que d'aucuns considèrent comme un serpent de mer : la récupération sur succession.

On va crier à l'injustice, ce qui ne me paraît pas justifié. À mon sens, c'est la situation actuelle qui est injuste. En effet, la récupération est possible sur l'aide sociale à l'hébergement, mais non sur l'allocation personnalisée d'autonomie. La récupération s'effectue donc au détriment des personnes les moins favorisées, ce qui est un comble !

On peut certes préconiser la suppression de toute récupération, mais je pense qu'il faut faire le contraire. La récupération sur succession a un effet non négligeable de moralisation et de régulation de la demande. Elle permet à ces aides de demeurer ce qu'elles doivent être, c'est-à-dire des aides subsidiaires.

Nous devrons donc, les uns et les autres, faire preuve d'un peu de courage. Si tel n'était pas le cas, nous ne serions plus très fondés à récriminer contre l'augmentation des charges, notamment à l'échelon départemental.

Je n'ignore pas, monsieur le ministre, les objections juridiques que vous ne manquerez pas d'opposer à ces arguments, mais elles ne doivent pas, à mon sens, nous interdire d'examiner cette question de façon approfondie.

Pour terminer sur ce chapitre, j'indique dès maintenant que j'apporterai tout mon soutien aux amendements qu'Alain Vasselle défendra dans la suite du débat sur l'assurance dépendance.

En annexe à ces questions de financement, je tiens à aborder le problème des subventions d'investissement que l'on accorde aux établissements. J'ai évidemment accordé de telles subventions lorsque j'étais responsable d'une collectivité, mais je me suis toujours interrogé à leur sujet, notamment sur leur efficacité.

Il faut savoir que dans le prix de journée les frais de personnel représentent 70 %. L'investissement pèse donc assez peu. Lorsqu'il bénéficie d'une subvention d'investissement, l'établissement ne fait donc que l'économie des frais financiers que représente l'emprunt non réalisé. En revanche, le capital doit être amorti et répercuté sur le prix de journée. Bien sûr, nous pouvons utiliser l'artifice de l'allongement de la durée d'amortissement, mais cela a des limites, notamment pour la rénovation future et la modernisation des établissements. Il nous faut donc réfléchir à des moyens. L'idée du prêt à taux zéro constitue déjà un progrès dans ce sens.

Enfin, pour conclure, je dirai quelques mots de la complexité administrative de notre système de prise en charge.

Nous avons mis en place la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, ce qui est une bonne chose. Dans son principe, cette Caisse devait permettre une simplification. À cet égard, je tiens à saluer le travail qu'effectuent son président et son directeur pour la faire fonctionner le mieux possible.

Mais vues de la base, les choses ne paraissent pas si simples. Les responsables d'établissement sont ballottés entre la CNSA, le conseil général, la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, la DDASS, les services centraux du ministère, sans oublier l'agence régionale de l'hospitalisation, l'ARH, la caisse régionale d'assurance maladie, la CRAM, la caisse primaire d'assurance maladie, la CPAM, la Mutualité sociale agricole, la MSA, et les divers organismes de retraite. C'est à se demander s'il y a réellement un pilote dans l'avion !

Pourquoi faire adresser à l'administration centrale les demandes de subventions qui sont financées par la CNSA ? Dans ce cas, à quoi sert la DDASS ? En matière de déconcentration, il me semble qu'on fait mieux et que cela n'accélère pas la consommation des crédits. Je vous laisse imaginer les dégâts lorsque la réponse est négative alors que le dossier a exigé beaucoup de temps, que la demande répond aux critères et qu'elle porte parfois sur un montant modeste ! Comment voulez-vous que les acteurs locaux ne perdent pas un peu confiance ? Ces demandes devraient être traitées à l'échelon local.

Monsieur le ministre, il me semble nécessaire de mettre un peu d'ordre dans ce domaine. Il est urgent que, sur le terrain, les responsables disposent d'un interlocuteur unique. Les DDASS sont-elles encore nécessaires ? Peut-être pas. Peut-être faudrait-il imaginer un autre dispositif et créer, par exemple, un échelon régional unique, regroupant la direction régionale des affaires sanitaires et sociales, la DRASS, et l'ARH, avec des responsabilités déconcentrées.

Voilà les quelques réflexions que m'inspire la question de la dépendance. La façon dont nous y répondrons fixera l'image de notre société : elle sera positive si la solidarité s'exerce effectivement, négative si l'individualisme hédoniste le plus égoïste triomphe.

Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2005, on comptait en France quelque 1 100 000 personnes de plus de quatre-vingt-cinq ans. Elles seront 800 000 de plus en 2015 et leur nombre aura doublé en 2020. Si la plupart des personnes âgées vont bien vieillir, en conservant un bon état de santé, il faut savoir que la perte d'autonomie touche aujourd'hui 6 % à 7 % des personnes de plus de soixante ans.

Toutes les projections démographiques le confirment : nous allons vers un vieillissement progressif de la population française et un accroissement des situations de dépendance physique et psychique. La société française, comme la plupart des sociétés occidentales, va être durablement affectée par cette situation qui, directement ou indirectement, concernera tôt ou tard toutes les familles. Il s'agit d'un défi médical, social et financier encore largement sous-estimé, que seule une politique soigneusement préparée et construite pourrait aider à relever.

Malheureusement, la politique du Gouvernement en direction des personnes âgées et handicapées souffre d'un manque de lisibilité et de cohérence. Cette politique, faute de financement pérenne, manque d'ambition. Elle se situe encore aux limites de l'aide sociale, alors que la perte d'autonomie devrait être appréhendée comme un risque social à part entière, avec un financement et une prise en charge à long terme. Les perspectives concernant la prise en charge sont pessimistes, aussi bien pour les personnes âgées dépendantes que pour les handicapés.

La Cour des comptes a, à maintes reprises, fortement critiqué l'insuffisance des financements concernant les personnes âgées dépendantes. Les personnes âgées et leurs familles sont les premières victimes de l'insuffisance et de la complexité des financements.

En effet, la situation actuelle aboutit à des financements disparates sur tout le territoire, au risque d'engendrer des discriminations, au détriment d'une prise en charge équitable des personnes.

Le financement des dépenses assurées par la collectivité relève d'un grand nombre d'acteurs : l'État, les collectivités territoriales, la sécurité sociale, les établissements publics comme le Fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie, le FFAPA, remplacé en 2004 par la CNSA. Cet ensemble d'acteurs est marqué par un faible engagement direct du budget de l'État dans les dépenses en faveur des personnes âgées. L'essentiel des financements provient des départements, de l'assurance maladie et des coûts supportés indirectement par l'État via des exonérations d'impôts.

Les financements budgétaires de l'État en faveur des personnes âgées dépendantes ont toujours été limités et ont régressé au rythme des transferts de compétences vers le FFAPA, puis la CNSA et les départements.

Les sources et les circuits de financement sont particulièrement complexes, puisqu'ils font intervenir la fiscalité nationale, la fiscalité locale, les cotisations sociales. Un même type de ressources peut profiter à plusieurs acteurs : la contribution sociale généralisée, la CSG, participe ainsi au financement des prestations de la sécurité sociale, mais aussi à celui de l'APA.

L'État, les départements, les communes, les caisses de sécurité sociale ou de vieillesse ainsi que les établissements sont autant d'intervenants pour cette prise en charge. De plus, les personnes âgées contribuent directement.

Cette multiplicité d'intervenants rend illisible le partage des responsabilités et des compétences en matière de financement des dépenses de fonctionnement et d'investissement des établissements. Il faut simplifier le paysage institutionnel. Un service efficace est aussi un service lisible, et ce n'est pas le cas actuellement.

La création de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, par la loi du 30 juin 2004, annoncée comme une solution par le Gouvernement, n'a pas permis de clarifier le financement des actions en faveur des personnes âgées, actuellement prises en charge par de multiples acteurs. Comme nous l'avions annoncé au cours des débats en 2004, la création de cette caisse a renforcé la complexité d'un système déjà fort compliqué, avec des responsables multiples et des financements croisés.

Les différentes aides apportées aux personnes dépendantes doivent être clairement affichées, qu'elles proviennent des collectivités territoriales ou des caisses de sécurité sociale et de retraite. Il est urgent de mettre en place un système d'information maîtrisé par la Caisse qui organise la transparence sur les actions menées et les dépenses réalisées par les départements et qui permette de repérer les situations particulières.

Par ailleurs, le 25 avril 2006, lors d'une réunion du conseil de la CNSA, il aurait été décidé de l'affectation partielle de fonds au financement du recrutement et de la formation de trois cents éducateurs sportifs au bénéfice de fédérations de sport adapté. Cette information est-elle exacte, monsieur le ministre ?

Cette décision est particulièrement choquante. Je rappelle que le budget de la CNSA, financé par les salariés à travers les cotisations sociales et la journée annuelle de travail gratuite, ne doit pas financer une activité qui est du ressort du budget de l'éducation nationale et donc de l'État. À l'issue de cette réunion, de nombreux membres du conseil de la CNSA auraient d'ailleurs demandé à leur président de notifier au Gouvernement leur opposition à cette décision.

Monsieur le ministre, où est la transparence ? Pouvez-vous nous donner des explications ?

Il faut assurer une meilleure visibilité des enveloppes budgétaires et de leur répartition dans le but de mieux connaître les besoins analysés au niveau local.

En l'état actuel, malgré de nouvelles sources gérées par la CNSA, les financements sont loin de couvrir les besoins de l'ensemble des personnes âgées.

Je tiens à évoquer un autre défi, celui de la prise en charge des personnes handicapées vieillissantes. À soixante ans, celles-ci sont souvent renvoyées des établissements spécialisés. Environ 650 000 personnes sont aujourd'hui concernées.

Déjà lourd à prendre en charge pour les familles, le handicap est encore plus difficile à appréhender lorsqu'il est cumulé avec l'âge. Que devient-on quand on est handicapé, particulièrement handicapé mental, et que l'on atteint l'âge de soixante ans ? Passé ce stade, les institutions considèrent ces citoyens non plus comme des handicapés, mais comme de simples personnes âgées, ne leur proposant donc pas d'accueil spécifique.

À l'exception de certaines initiatives locales individuelles dispersées sur le territoire, il n'y a, à ce jour, aucun système coordonné en France pour faire face à ce problème singulier et, compte tenu de l'augmentation de l'espérance de vie, inexorablement croissant. Or quelque 400 000 personnes handicapées depuis leur plus jeune âge ont aujourd'hui dépassé la soixantaine. Au total, la population handicapée vieillissante est estimée à 650 000. C'est ainsi que 70 % des actuels porteurs de la trisomie 21 devraient vivre au-delà de cinquante ans.

Le rapport de M. Paul Blanc intitulé : « Une longévité accrue pour les personnes handicapées vieillissantes : un nouveau défi pour leur prise en charge » dénonce une situation alarmante. Selon lui, « les personnes handicapées vieillissantes et leur famille vivent dans la hantise d'être virées de l'établissement qui les héberge après soixante ans ».

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Toujours selon ce rapport, l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA, qui intervient à soixante ans, inciterait les directeurs d'établissements spécialisés à « mettre dehors » ces personnes handicapées...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Mais non !

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

...sous prétexte qu'elle peut couvrir en partie les frais d'hébergement dans des maisons de retraite ou des établissements pour personnes âgées classiques.

Il faut donc des places spécifiquement destinées à ces personnes dans les établissements...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Bien sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

...et davantage de fonds, monsieur le ministre.

Pour finir, on observe que l'insuffisance des crédits globaux conduit l'État à différents subterfuges tels que la diminution des ratios de personnels dans certains établissements, le non-financement des augmentations de salaires des employés, la sous-estimation du coût réel des créations nouvelles et le transfert à la CNSA de charges non financées.

L'amélioration de l'aide aux personnes âgées fragilisées à domicile et en établissement ne peut passer que par la création de ressources nouvelles, sans quoi les graves retards français ne pourront jamais être comblés.

La seule réponse tangible du Gouvernement aux besoins de prise en charge de la dépendance est finalement la suppression d'un jour de congé au détriment des salariés, qu'il s'agisse d'un jour férié travaillé - le fameux lundi de Pentecôte - ou d'un jour de congé dans le cadre de la réduction du temps de travail. Le plan dépendance sera donc financé par les salariés, qui devront travailler un jour supplémentaire, et ce gratuitement.

Ainsi, après avoir joué de la culpabilisation, le Gouvernement fait porter le poids de la solidarité nationale sur les seuls salariés. Il prend prétexte d'un problème grave pour notre pays qui exige une vraie réponse solidaire.

La dépendance est un défi majeur qu'il faut relever. L'important est de définir clairement les responsabilités et de se donner les moyens.

Je me permets d'insister sur la nécessité d'accélérer la professionnalisation des personnels. La formation doit permettre une nouvelle approche des soins : technicité et humanité doivent aller de pair pour améliorer le bien-être des résidents dans les établissements. Un plan de formation et de qualification est un élément essentiel pour que les établissements répondent aux besoins des personnes et de leurs familles.

Il est également essentiel de développer un partenariat dans l'ensemble du champ sanitaire, social et médicosocial. L'accès aux soins de proximité doit être préservé et même privilégié dans certaines régions qui subissent un déficit de professionnels. L'articulation entre les secteurs hospitalier et ambulatoire, mais aussi médicosocial, social, médical et paramédical doit être encouragée, notamment en gérontologie.

Notre pays va devoir relever le grand défi du vieillissement de la population et de la prise en charge des personnes dépendantes. Cela aurait mérité une réflexion collective plus approfondie. Il faut bien dire que le Gouvernement manque aujourd'hui d'une véritable ambition pour répondre durablement aux questions posées par les réalités démographiques et sanitaires.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la dépendance est une question grave, à la fois humaine et sociale.

À son sujet, nos concitoyens sont travaillés par deux interrogations : « comment prendra-t-on en charge la dépendance de l'un de mes proches ou de moi-même ? Combien cela me coûtera-t-il au final ? », qui deviennent tout simplement pour les plus modestes : « pourrai-je payer ? ».

Parce qu'il en va de la dignité de l'existence et qu'ils ont conscience que les handicaps physiques ou mentaux sont incontournables, les Français aspirent fondamentalement à une prise en charge collective de la dépendance.

Comme pour les risques traditionnels, ils souhaitent que nous nous dotions de mécanismes solidaires de prévention et de protection. Ils refusent ainsi de voir le devenir des personnes âgées ou handicapées relever de la simple responsabilité familiale, avec le cortège d'inégalités qu'implique le chacun pour soi.

C'est de l'adéquation entre les besoins des personnes dépendantes et les capacités de notre système de santé et de solidarité qu'il nous faut aujourd'hui parler. Mon propos consistera donc à aborder les deux défis que nous aurons à affronter : améliorer la qualité des soins et veiller à un financement suffisant et pérenne des politiques publiques de prise en charge de la dépendance. Comme l'atteste une récente étude de la DRESS, ce sont les deux préoccupations majeures des Français.

Je passerai assez rapidement sur la question de la qualité des soins et des prises en charge, tant les efforts accomplis par les professionnels, qu'il s'agisse des intervenants à domicile ou en établissement, sont constants et incontestables.

Toutefois, il est intéressant de noter que la CNSA a fait figurer parmi ses objectifs pour 2007 une inscription budgétaire en faveur de l'élévation de la qualité des interventions pour les personnes dépendantes. Ces subventions pour le renforcement de la professionnalisation des métiers de service, inscrites dans la section IV du budget de la caisse, vont dans le bon sens. Elles devraient cependant être réformées.

En effet, en 2006, les crédits budgétés pour l'aide à la qualification de l'aide à domicile n'ont été que peu consommés, faute sûrement d'incitation ou de communication suffisante. Ne pourrait-on imaginer que cette enveloppe soit déléguée aux conseils généraux afin qu'ils impulsent, en lien avec l'État et les conseils régionaux, des démarches locales pour améliorer la profession ainsi que les statuts des intervenants, qui sont souvent précaires ?

En 2007, la CNSA a prévu l'élargissement de ces actions de formation vers les personnes handicapées. C'est heureux ! Il serait paradoxal, alors que vient d'être instaurée une nouvelle et généreuse prestation centrée sur les aides humaines - la prestation de compensation du handicap -, que rien ne soit prévu pour la professionnalisation des métiers d'aide à la personne handicapée.

À ce propos, je souhaite préciser que la CNSA, malgré les déclarations rassurantes ou les documents d'objectifs communs, a pris un parti contraire à celui du Gouvernement. Ce dernier, en introduisant l'aide à domicile parmi les secteurs d'activité éligibles au chèque emploi-service universel, a en effet ouvert la brèche de l'abaissement de la qualification moyenne des intervenants, et donc de la réduction potentielle de la qualité des prises en charge.

La vision très libérale du Gouvernement, avec l'organisation d'une concurrence par les prix entre quelques grandes enseignes du secteur de la banque et de l'assurance, n'est pas celle que nous souhaitons. À nos yeux, l'aide à domicile n'est pas et n'a pas à devenir un marché comme les autres. Nous souhaitons donc que l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux, créée par le projet de loi de financement de la sécurité sociale, permette la mise en place d'une évaluation objective et transparente du niveau des prestations fournies aux personnes âgées et handicapées.

Mais venons-en aux questions quantitatives, qui constituent le coeur du problème.

La solidarité pour l'autonomie progresse-t-elle en France ? Si oui, peut-on dire que son rythme de progression est compatible avec les besoins de notre époque ? Son financement est-il suffisant et pérenne ?

J'ai bien noté la volonté du Gouvernement, maintes fois réitérée depuis la catastrophe sanitaire de l'été 2003, d'« adapter le système de soins à la longévité de la vie », notamment par l'application du plan de solidarité grand âge.

J'ai également pris acte de la volonté exprimée dans le PLFSS d'offrir des solutions sur tout le territoire aux personnes en situation de handicap.

Reste toutefois à savoir si la vérité des actes est en harmonie avec le volontarisme des paroles. Pour répondre à cette question, je distinguerai deux éléments dans les engagements financiers de l'ONDAM médico-social et de la CNSA : d'une part, les établissements et, d'autre part, les allocations individuelles, qui, si elles ne relèvent pas de I'ONDAM stricto sensu, participent de la volonté d'humanisation de la dépendance.

En ce qui concerne les établissements, je veux d'abord saluer la méthode de travail instaurée par la CNSA en vue d'évaluer les besoins médico-sociaux sur l'ensemble du territoire. La méthode des programmes interdépartementaux d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie, plus communément appelés PRIAC, devrait permettre une analyse exhaustive et, je l'espère, partagée des besoins. En tout cas, pour la première année de sa mise en oeuvre, la concertation entre les représentants de l'État - le préfet de région et le préfet de département - et les présidents de conseils généraux a été très limitée, du moins pour ce qui me concerne.

Aujourd'hui, sans contestation possible, nous savons où nous en sommes des projets sur le territoire. Mais passés les décomptes vient l'heure des comptes. Et là, malgré des efforts, le Gouvernement nous soumet un PLFSS trop peu doté !

Certes, l'objectif global des dépenses médico-sociales, c'est-à-dire le cumul de I'ONDAM médico-social et de la dotation complémentaire de la CNSA, augmente à un rythme notable, comme l'a indiqué M. le rapporteur. Avec une inscription de 11, 700 milliards d'euros, l'OGD évolue. C'est essentiellement le cas pour les crédits en faveur des personnes âgées, qui enregistrent une progression supérieure à 10 %, tandis que les financements médico-sociaux pour les personnes handicapées ne devraient augmenter que de 5 %, passant de 6, 8 milliards à 7, 5 milliards d'euros.

Nous pourrions être tentés de penser que le Gouvernement a enfin pris le parti de l'action, après quatre années insatisfaisantes. Mais les évolutions en pourcentage ne doivent pas masquer que nous partons de très loin ...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

À qui le dites-vous !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Nous partons de loin en raison de votre inaction.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Plutôt de celle des gouvernements précédents !

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

C'est insupportable : c'est toujours la faute des autres !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Nous connaissons le refrain de l'héritage. On nous le serine depuis le début de la législature. Mais il faudrait peut-être arrêter : vous êtes au pouvoir depuis cinq ans !

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

C'est vous qui avez parlé d'héritage !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Bref, pour les personnes âgées, on nous annonce 5 000 places supplémentaires en EHPAD. C'est positif, mais il en faudrait le double ! Ce n'est pas moi qui le dis, c'est l'ensemble des acteurs de ce secteur. Certains parlent même de 30 000 places par an jusqu'en 2010. Vous le savez, le nombre de personnes âgées est en forte croissance dans ce pays grâce aux progrès de la médecine.

On nous parle de la maison de retraite de demain, mieux encadrée, mieux médicalisée. Mais nous en sommes bien loin en pratique, et les taux d'encadrement en établissement n'évoluent que symboliquement.

On nous parle du libre choix et de la promotion du maintien à domicile, alors que l'on ne propose que 6 000 places supplémentaires de SSIAD, tandis que les besoins sur le terrain sont colossaux.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

À combien les besoins s'élèvent-ils ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Je ne fais que constater l'augmentation des besoins, monsieur le ministre.

Quel paradoxe de la communication politique de voir le Gouvernement se réjouir dès la mise en place du plan de solidarité grand âge quand on sait que son rythme de croisière ne sera atteint qu'en 2010, c'est-à-dire dans quatre ans, et que nous n'en sommes encore qu'aux balbutiements. Mais je sais que vous êtes un champion de l'effet d'annonce. Il faut bien être champion de quelque chose ...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

C'est aimable !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Pour les personnes handicapées, de nombreuses créations sont annoncées en MAS, FAM ou SAMSAH. L'autisme et le polyhandicap semblent être mieux pris en compte. Vous le voyez, je reconnais que votre bilan n'est pas toujours négatif.

Mais, dans le détail, ces mesures nouvelles sont insuffisantes, surtout dans mon département où elles sont égales à zéro ! Pourtant, nous avions fait de fortes demandes.

Bref, I'OGD a beau progresser, le compte n'y est pas encore.

Je terminerai par les allocations.

Je profite du débat sur la prise en charge de la dépendance pour alerter notre Haute Assemblée sur les manquements à la solidarité nationale en matière de prestations individualisées sous forme d'allocation. C'est dès à présent vrai pour l'allocation personnalisée d'autonomie, que M. Mercier a lui-même évoquée.

Après un taux de couverture de la dépense de l'APA des départements par la CNSA de 34 % en 2005, de 33 % en 2006, nous nous acheminons - je parle en moyenne, car certains chiffres sont inférieurs à 30 % - vers un taux de 32 % en 2007.

Cette situation appelle une réforme urgente. La solidarité nationale, si elle poursuit son déclin, risque de déboucher sur de fortes disparités entre départements riches et pauvres. L'APA, qui se fondait sur la parité entre solidarité nationale et solidarité locale, ne correspond plus à la volonté du législateur de 2002. En sera-t-il de même pour la PCH, qui, contrairement à I'APA, connaît une montée en charge beaucoup plus lente, mais dont le fort élargissement de l'assiette peut nous laisser craindre des problèmes financiers à l'avenir ?

Les allocations individuelles, outils majeurs de la prise en charge de la dépendance, ne sont finalement pas correctement financées. Les conseils généraux en paient le prix, parfois aux dépens de leurs politiques traditionnelles, parfois au prix de l'élévation de la pression fiscale. M. Mercier le sait bien, mais son département étant riche, il parvient à surmonter le problème sans trop pressurer les contribuables, quoique

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Votre département est tout aussi riche !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Cette situation n'est pas tenable. L'État doit donc prendre ses responsabilités mieux qu'il ne le fait aujourd'hui.

Vous le voyez, monsieur le ministre, le tableau de la politique nationale de la dépendance n'est pas aussi idyllique que la communication gouvernementale voudrait le laisser croire. Nous possédons certes de bons outils, mais pas assez de moyens pour les rendre performants.

Prenons le cas de la CNSA, qui a fait ses preuves.

Malgré son incongruité sociale originelle - une solidarité principalement payée par les travailleurs de ce pays -, la CNSA s'est inscrite dans le paysage national. En matière de pilotage budgétaire, elle a prouvé qu'elle pouvait être un délégataire opérationnel efficace des crédits de l'assurance maladie consacrés à la dépendance : elle a bien maîtrisé ses coûts de gestion - il faut en remercier M. Denis Piveteau - et elle collabore intelligemment avec les autres institutions publiques impliquées dans le traitement de la dépendance. Mais elle témoigne de plusieurs carences, qui ont toutes la même origine : la CNSA ne peut dépenser que ce qu'elle peut donner !

Se pose dès lors la question fondamentale de l'évolution des coûts des prises en charge pour les bénéficiaires et leurs familles. À domicile, ces coûts devraient croître de 4 % à 5 % par an. En établissement, ils croîtront de 6 % à 8 % annuellement. Qui prendra en charge ces évolutions, soit directement, soit indirectement par le biais de la fiscalité départementale : la solidarité nationale ou les familles ?

Sur ce point, nous savons que le Gouvernement n'a pas de réponse à apporter, du moins pour l'instant. Mais nous savons surtout que les familles - et pas seulement les plus modestes - n'en peuvent plus d'ores et déjà.

Je terminerai donc par où j'avais commencé : notre pays est-il préparé aux bouleversements à venir, à une société à quatre générations, celle que nous allons connaître et qui existe parfois déjà ? Pas encore ! Il semble que le Gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le ministre, n'en ait pas jusqu'ici pris la mesure. Nous espérons qu'à la suite de ce débat il commencera à le faire.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Nous voici parvenus au terme du débat sur la prise en charge de la dépendance. Je vais maintenant m'efforcer de répondre à chacun des intervenants.

Je voudrais d'abord souligner l'importance des mesures du projet de loi de financement de la sécurité sociale visant à permettre la mise en oeuvre en 2007 du plan de solidarité grand âge, que j'ai présenté en juin dernier.

Ainsi, 32 millions d'euros seront consacrés au développement des services de soins infirmiers à domicile, 5 millions à la création du congé de soutien familial, 38 millions - ce qui représente 5 000 places - à la création de places en maison de retraite médicalisée, 159 millions - soit 90 000 places - à l'achèvement de la médicalisation des places existantes et 67 millions à l'augmentation de l'encadrement en personnels soignants pour les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes. Le projet de loi prévoit également la modernisation du cadre bâti, sans peser sur le prix de journée grâce au prêt à taux zéro, auquel devraient s'ajouter, je l'espère, 100 millions d'euros si le Sénat décidait d'affecter cette somme aux travaux dans les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes.

En outre, une politique de qualité est engagée avec la création de l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux, la création de filières gériatriques, la réorganisation des unités de soins de longue durée et la consultation de prévention pour les personnes de plus de soixante-dix ans, ce qui représente 26 millions d'euros sur l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour les soins ambulatoires.

Ce sont donc des moyens très importants qui sont mobilisés au service de notre politique de solidarité à l'égard des personnes âgées dépendantes.

L'objectif global de dépenses, qui recouvre la totalité des financements des établissements et services concernant les personnes âgées dépendantes, augmentera en 2007 de 13, 04 %, pour atteindre 5, 6 milliards d'euros. Ce sont ainsi 650 millions d'euros supplémentaires qui seront consacrés en 2007 aux personnes âgées dépendantes, contre 587 millions d'euros en 2006.

L'énoncé de ces quelques chiffres suffit, monsieur Cazeau, à démontrer que votre survol de l'effort de la nation en faveur des personnes âgées dépendantes a pris une altitude telle que vous avez perdu l'exacte mesure des dispositions que contient le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 ! Je tenais à faire cette mise au point.

MM. Vasselle, Jégou et Mercier ont rappelé l'ampleur de l'évolution de la dépendance et le coût qu'elle aura pour la collectivité mais aussi pour les personnes âgées et pour leur famille.

C'est en raison de l'importance de ces coûts qu'il est aujourd'hui tout à fait nécessaire de réfléchir à l'élaboration d'un nouveau schéma pour le financement de la dépendance.

M. Vasselle a évoqué l'expérience allemande. Il a également fait part de ses limites puisque l'instauration d'un cinquième risque dans ce pays constitue d'une certaine façon un demi-succès ou un demi-échec !

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

En fait, j'ai perçu la réticence que vous éprouvez pour ce schéma allemand, monsieur le rapporteur. Vous vous prononcez clairement en faveur d'un schéma alternatif qui prendrait la forme d'un système d'encouragements fiscal et social à la souscription d'une assurance dépendance. Il s'agit d'une proposition à étudier.

À cet égard, l'examen que vous avez entrepris et qui a débouché sur une proposition de loi, cosignée par Paul Blanc et quatre-vingt de vos collègues, constitue un pas en avant dans cette voie.

Cependant, il ne s'agit pas du seul schéma possible. C'est pourquoi j'ai confié à Mme Gisserot une mission dont j'ai rappelé tout à l'heure l'importance. Le rapport qu'elle remettra préparera le grand débat national de 2007 sur la prise en charge des personnes âgées dépendantes.

M. Mercier a exprimé le souci qu'il se fait au sujet de la transformation d'une partie des lits d'unités de soins de longue durée en lits de maisons de retraite médicalisées.

C'est un sujet sur lequel je travaille depuis dix-huit mois. J'ai hérité d'un dispositif qui, dans un premier temps, visait à transférer l'intégralité des unités de soins de longue durée en maisons de retraite médicalisées. Puis, l'année dernière, vous avez adopté, mesdames, messieurs les sénateurs, une mesure qui nous donnait un an de réflexion.

À l'expiration de cette échéance, je vous propose de permettre aux établissements de choisir la formule qui leur convient le mieux, et ce dans un délai de trois ans.

Il faut considérer, en effet, que la place d'une personne âgée quand elle n'est pas malade, même si elle est lourdement dépendante, n'est pas à l'hôpital. Le maintien durable au sein du système hospitalier des personnes âgées de notre pays n'est pas un avenir à leur offrir. L'accueil dans une maison de retraite médicalisée conviendrait beaucoup mieux à leur situation en leur offrant une prise en charge et une combinaison d'actes de soins en relation avec leur état.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Il est donc très légitime de s'interroger sur la pertinence de la prise en charge hospitalière d'un certain nombre de personnes âgées qui ne souffrent pas de maladie.

C'est tout simplement en fonction de cette approche, que je qualifierai d'humaniste, que ce processus a été engagé bien avant que je sois ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. J'ai souhaité accorder tout le temps nécessaire pour que cette prise en charge s'opère dans de bonnes conditions, en faisant en sorte que le partage des malades, sur place - il ne s'agit bien sûr pas de faire déménager qui que ce soit ! -, entre les personnes âgées qui vivront sous le régime de la maison de retraite médicalisée et celles qui seront maintenues en unité de soins gériatriques puisse se faire au cas par cas, dans les meilleures conditions possibles pour les établissements et en accordant naturellement à ces derniers les moyens qui conviennent à leur bon fonctionnement. C'est un engagement que j'ai pris et qui sera tenu.

Il s'agit uniquement pour moi d'améliorer la prise en charge des personnes âgées et non de mettre en oeuvre des dispositions dont le seul motif serait d'ordre financier. Cela va de soi, je n'y insiste pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

La vérité, c'est que vous voulez faire des économies !

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

M. Paul Blanc a rappelé notre effort de création de places.

J'ai cru comprendre que pour M. Cazeau cet effort n'était pas suffisant. Pourtant, monsieur le sénateur, avant le plan vieillesse-solidarité, décidé par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, et le plan solidarité grand âge, décidé par le gouvernement de Dominique de Villepin, jamais en France un effort aussi colossal - pour reprendre votre expression - n'avait été mis en oeuvre dans la prise en charge des personnes âgées.

On n'avait jamais rien vu de tel en France auparavant : une création de 6 000 places de soins infirmiers à domicile par an pendant cinq ans, c'est tout à fait considérable quand on sait que ces places s'ajoutent aux 5 000 places en maisons de retraite médicalisées, aux 2 250 places en hébergements temporaires et aux 1 250 places d'accueil de jour !

Par ailleurs, l'augmentation du nombre de places en hospitalisation à domicile, qui est aujourd'hui de 8 000 places et qui atteindra 15 000 places en 2010, profitera également beaucoup aux personnes âgées dépendantes.

Cet incontestable effort sans précédent, qui ne relève pas de l'effet d'annonce puisqu'il est intégralement financé et qu'il est en cours d'accomplissement, nous permet effectivement de rattraper un retard colossal, monsieur Cazeau, le mot est juste ! Et ce retard, monsieur Cazeau, je suis au regret de devoir vous le rappeler, ce n'est pas la majorité de gauche qui aura contribué à le combler entre 1997 et 200 !

Protestations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Monsieur About, s'agissant des personnes handicapées, on peut bien sûr voir tout ce qui ne va pas. En ce qui me concerne, sur le terrain, chaque fois que quelque chose ne va pas - je me rends deux fois par semaine dans nos régions -, je prends les dispositions nécessaires pour y remédier ! Mais on peut aussi considérer l'importance des progrès qui, grâce à la majorité, ont été réalisés de par l'adoption de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, que Mme Boisseau, puis Mme Montchamp vous ont présentée.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Je me suis attelé à la mise en oeuvre de cette loi et j'essaie d'y mettre toute l'énergie possible, car il s'agit d'un important changement culturel.

En effet, les prestations ne sont plus, comme dans le passé, calculées en fonction d'un taux de handicap, sans considération du projet de vie de la personne. Il s'agit aujourd'hui avant tout de partir non du handicap mais du projet de la personne, de ses capacités, de ses talents, de ses possibilités, de son potentiel, pour l'amener à se dépasser elle-même grâce à la mobilisation des moyens de la solidarité.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

C'est la raison pour laquelle il ne suffit pas de transférer des fonctionnaires de l'État, comme nous l'avons fait, aux maisons départementales des personnes handicapées. Encore faut-il qu'une nouvelle culture de la prise en charge du handicap se diffuse !

À cet égard, je remercie l'ensemble des présidents de conseil général qui s'impliquent personnellement dans le succès des maisons départementales de personnes handicapées, ce qui nous permet justement d'entrer dans cette ère nouvelle.

Je suis naturellement prêt à apporter toutes les corrections nécessaires aux textes réglementaires qui vous paraîtront insuffisants.

Néanmoins, je dois également être attentif à ce que les moyens de la solidarité très importants qui sont mobilisés grâce à la Journée de solidarité, mais aussi grâce aux prélèvements que nous opérons sur les crédits de l'assurance maladie en faveur des établissements médicosociaux pour enfants et adultes handicapés soient dépensés au mieux de l'intérêt des personnes handicapées, en assurant l'équilibre de ce compte de solidarité.

Bien sûr, je souhaite moi aussi pouvoir faire davantage. Mais commençons aujourd'hui par attribuer la prestation de compensation du handicap à ceux qui la demandent et attendons de faire le bilan pour voir s'il est possible d'aller plus loin !

Je ne méconnais pas certaines difficultés - je pense, par exemple, en ce qui concerne les aides humaines, aux tarifs qui ont été retenus par les textes réglementaires. Mais vous savez qu'il nous faut aussi comparer le système actuel avec le système antérieur.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Sous le régime de l'allocation compensatrice pour tierce personne, l'ACTP, il existait deux tarifs. Chacun recevait son allocation indépendamment du coût de la prestation et avait droit à autant d'aide humaine qu'il lui était accordé d'argent via l'ACTP, c'est-à-dire très peu en réalité !

Aujourd'hui, la prestation de compensation du handicap ouvre droit à un nombre d'heures en principe nettement plus important qu'avec l'allocation compensatrice, ...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

... mais il est vrai que le tarif de chaque heure est plafonné, car nous avons été très attentifs aux demandes de l'Assemblée des départements de France, notamment à celles du président de sa commission des affaires sociales, ...

Sourires.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

... qui nous a mis en garde sur les coûts, n'est-ce pas, monsieur Cazeau ? Vous le savez bien puisque c'est de vous qu'il s'agit !

Nous avons veillé à ce que les tarifs correspondent à une juste moyenne. Je constate que, dans certains départements, notamment parce que les temps de transport sont assez longs et qu'il faut davantage de personnels, 14 euros de l'heure, c'est insuffisant pour financer un service prestataire. J'en suis conscient et j'apporterai, en concertation avec les associations de personnes handicapées, une solution à ce problème d'ici à la fin de l'année, notamment en mobilisant les crédits de l'État qui subsistent pour la prise en charge des auxiliaires de vie. De la sorte, nous pourrons améliorer les capacités de financement des maisons départementales des personnes handicapées en allant au-delà de ces 14 euros de l'heure lorsque le service prestataire coûte plus cher.

En tout état de cause, aujourd'hui déjà, les allocations qui sont accordées au titre de la prestation de compensation du handicap donnent davantage de moyens aux personnes handicapées pour les aides humaines que ne leur en accordait l'allocation compensatrice pour tierce personne.

S'agissant des fonds de compensation qui prennent en quelque sorte le relais des sites de la vie autonome et qui seront gérés au sein des maisons départementales des personnes handicapées, monsieur About, de nombreux crédits d'État ont été délégués aux maisons départementales : 13, 8 millions d'euros au titre des crédits anciennement attribués aux sites pour la vie autonome ; 13, 9 millions d'euros supplémentaires pour doter les fonds de compensation ; enfin, 14, 5 millions d'euros délégués en 2006 pour abonder les fonds de compensation spécifiquement consacrés aux aides techniques grâce à un fonds de concours qui a été alimenté par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Je pourrais naturellement, monsieur About, répondre plus en détail à un certain nombre de vos questions, mais je souhaitais surtout souligner ce point, qui me paraît revêtir une importance particulière.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Je souhaite également répondre à M. Paul Blanc.

Je tiens d'abord à faire part à la Haute Assemblée de la qualité de la collaboration que nous avons nouée de nouveau, puisque M. Blanc m'a remis au mois de juillet dernier un rapport sur une question cruciale pour les personnes handicapées et surtout pour leurs familles, à savoir le vieillissement des personnes handicapées.

Vous vous souvenez, monsieur Blanc, que j'avais aussitôt pris un certain nombre de mesures.

À ce propos, je tiens à répondre à celles et ceux d'entre vous qui ont fait part de leur inquiétude ; je pense en particulier à Mme Schillinger. Mesdames, messieurs les sénateurs, il n'existe aucune loi permettant à un établissement pour personnes handicapées de contraindre une personne qui a atteint l'âge de soixante ans à quitter l'établissement. C'est exactement le contraire : l'établissement doit garder ces personnes handicapées quand elles atteignent l'âge de soixante ans.

Pour qu'il n'y ait aucune ambiguïté sur ce point, immédiatement après avoir reçu le rapport de M. Paul Blanc, j'ai adressé à chaque préfet une instruction d'une très grande clarté afin qu'il veille à ce qu'une telle situation ne puisse pas se produire. Pour rencontrer souvent des familles de personnes handicapées, je sais que c'est une grande angoisse pour elles.

Je le répète, tout établissement accueillant des personnes handicapées en France a l'obligation de garder la personne qui a atteint l'âge de soixante ans, sauf si elle-même ou sa famille préfère opter pour une autre solution.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

À partir du rapport de M. Paul Blanc, j'ai également décidé que 10 % des places créées en maison d'accueil spécialisée seraient dorénavant réservées aux personnes handicapées vieillissantes, de manière à leur assurer des perspectives de vie, souvent dans les lieux mêmes où elles ont passé plusieurs décennies avant d'atteindre l'âge de leur retraite, à leur permettre de continuer à vivre au milieu de ceux qui ont partagé leur vie durant toutes ces années.

J'ai aussi demandé au directeur de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie qu'il me soumette des propositions très précises pour permettre d'accueillir en maison de retraite médicalisée les parents, devenus dépendants, d'une personne handicapée ayant elle-même atteint l'âge de la retraite afin qu'ils ne soient pas séparés de leur enfant handicapé dont ils se sont toujours occupés. Il convient de prévoir une prise en charge spécifique au sein de certaines maisons de retraite pour que ces familles ne soient pas séparées, comme c'est encore le cas trop souvent aujourd'hui.

Monsieur Blanc, je tenais à rendre hommage à la qualité de vos propositions sur ce point puisqu'elles nous ont permis de prendre, très rapidement, des décisions pratiques et concrètes, ce qui, là encore, montre, contrairement à ce que M. Cazeau disait tout à l'heure, que le Gouvernement ne se borne pas à des effets d'annonce.

Monsieur Fischer, vous craignez un morcellement des mesures, et vous vous inquiétez du statut de la CNSA, du périmètre que couvrent ses interventions.

Les choses sont plus simples que vous ne l'avez dit. La maladie est du ressort de l'assurance maladie ; pour les retraites, c'est l'assurance vieillesse ; pour la famille, c'est la Caisse nationale des allocations familiales ; pour les personnes âgées dépendantes et pour les personnes handicapées, c'est la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Bien sûr, cette dernière protection ne constitue pas une branche de la sécurité sociale. Le texte créant la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie a défini ce nouvel instrument de solidarité comme une branche de la protection sociale et non pas de la sécurité sociale. C'est un choix qu'il faut assumer.

À la différence de la sécurité sociale que nous ont léguée nos pairs, correspondant à un système d'assurance fondé sur la solidarité et géré paritairement entre organisations syndicales et patronales, ce système, qui procède également de la solidarité, est financé par des ressources de l'assurance maladie et par celles de la Journée de solidarité. Il s'agit donc bien d'un financement solidaire mais qui s'appuie sur un réseau d'actions de proximité relevant des départements. C'est ce mariage unique entre un système de solidarité nationale et une responsabilité qui est confiée aux acteurs de proximité que sont les départements qui fait l'originalité de notre Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie et de cette cinquième branche de protection sociale, qui n'est pas une branche de la sécurité sociale.

Il faut bien sûr continuer à réfléchir afin d'aller plus loin, mais il est vital de maintenir l'implication très forte et maintenant ancienne des départements dans la prise en charge des personnes âgées dépendantes, dont les maisons départementales des personnes handicapées sont aujourd'hui une nouvelle illustration. Il est donc essentiel d'assurer aux départements les financements qui sont nécessaires au fonctionnement de cette solidarité.

Nous ne sommes pas encore allés au bout du chemin. La réflexion se poursuit. Comme je l'ai déjà dit, j'attends avec intérêt le rapport de la commission présidée par Mme Gisserot.

Mme Printz a soulevé la question du « reste à charge », sur laquelle j'ai moi-même insisté dans mon intervention liminaire.

Nous faisons déjà beaucoup pour limiter la progression de ce « reste à charge ». Mais il est vrai que ce qui reste à la charge de la personne âgée, de sa famille et de l'aide sociale représente plus de 50 % du coût de la maison de retraite médicalisée. C'est un problème d'autant plus important que le coût du foncier et la nécessité de mettre aux normes de confort moderne et aux normes d'accueil pour des personnes handicapées vont encore accroître pour les établissements le coût d'hébergement des personnes résidentes.

Nous devons donc prendre des mesures. C'est tout le sens des propositions formulées dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, notamment de l'abaissement à 5, 5 % de la TVA sur les travaux, des 500 millions d'euros mobilisés cette année ou du prêt à taux zéro.

C'est aussi le sens de l'amendement déposé par M. Jacques Blanc qui vise à augmenter de 100 millions d'euros, en 2007, les moyens destinés à lutter contre la vétusté de certains établissements, amendement qui sera accueilli favorablement par le Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

M. Lardeux s'est inquiété de la diversité des acteurs. Mais diversité d'acteurs ne signifie pas forcément confusion. Nous avons besoin de tous ces acteurs. L'essentiel est que leurs interventions soient bien coordonnées.

Je conçois que, pour une maison de retraite, devoir établir une distinction entre les crédits qui proviennent de l'assurance maladie et ceux qui lui sont attribués par le département, ou entre les personnels qui relèvent de la prise en charge de la dépendance et ceux qui relèvent de la prise en charge des soins, ce soit très artificiel. Seul le directeur de la maison de retraite médicalisée peut faire la synthèse de tout cela.

Des conventions sont établies entre le département et l'État. Le département prend un certain pourcentage de l'aide sociale ; il en est de même pour l'assurance maladie. Mais, naturellement, tout cela peut être rediscuté, simplifié, et je souhaite vraiment que nous parvenions à une certaine simplification.

Vous avez aussi souligné, monsieur Lardeux, l'importance de la recherche dans la prévention de la dépendance, j'y souscris pleinement.

Vous avez insisté sur l'importance de préparer les futurs retraités à cette nouvelle période de leur vie. C'est en effet essentiel.

Vous avez évoqué la nécessité d'améliorer nos connaissances dans la prévention de la maltraitance. Cela fait partie de mes propres objectifs, et la création de l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux nous permettra, j'en suis certain, de progresser dans cette voie.

Monsieur Cazeau, tout d'abord, je vous remercie de m'avoir donné acte de l'augmentation des crédits consacrés à la prise en charge de la dépendance. En effet, comme vous l'avez souligné, l'objectif de dépenses croît rapidement.

D'ailleurs, je regrette - mais peut-être le regrettez-vous plus que moi -, compte tenu des louanges que vous avez adressées à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, à la différence de Mmes Printz et Schillinger, qui n'ont pas attribué tant de mérites à cette institution

Mmes Gisèle Printz et Patricia Schillinger font un signe de dénégation.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Après avoir reconnu l'effort réalisé, vous avez ensuite affirmé, dans une brusque inflexion de votre discours, sans doute pour équilibrer votre propos, que les besoins étaient vraiment colossaux et que le compte, en quelque sorte, n'y était pas. Vous avez ajouté : « dans mon département, la Dordogne, c'est zéro ! ».

Monsieur Cazeau, j'ai dû - et je vous prie de me le pardonner - mal vous informer.

J'ai effectivement été saisi par les élus de la Dordogne du cas de la maison de retraite de Brantôme, très belle ville, surtout connue pour son abbaye, heureusement moins connue pour sa maison de retraite, laquelle battait des records de vétusté. Installée au dernier étage, dans une sorte de grenier, la salle commune où s'alignaient les lits des personnes âgées était dans un tel état de vétusté - les fils électriques pendaient aux poutres -, que j'ai pris les dispositions nécessaires pour financer un investissement qui est parmi les plus importants de France.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Non, monsieur Cazeau, en Dordogne, comme dans tous les départements de France, l'effort consenti est très important.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Il est particulièrement significatif pour Brantôme. Peut-être le cas de Brantôme ne vous intéresse-t-il pas, ...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

... mais le ministre des personnes âgées que je suis ne pouvait pas laisser cet établissement dans un tel état de vétusté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Monsieur le ministre, me permettez-vous de vous interrompre ?

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Laissez-moi terminer, j'en ai pour une minute ; vous aurez ensuite tout loisir de vous exprimer.

Madame Schillinger, je m'honore, et c'est également à l'honneur de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, d'avoir pris les décisions qui ont permis le recrutement de 300 professionnels de l'éducation physique et sportive affectés dans des maisons pour mineurs handicapés. J'estime, en effet, qu'il est de notre devoir de proposer aux personnes dépendantes, notamment aux jeunes, l'accès aux activités sportives.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

La loi de 2005 pour la citoyenneté des personnes handicapées le prévoit. C'est, à mes yeux, extrêmement important.

Mesdames, messieurs les sénateurs, compte tenu de leur très grande richesse, je n'ai pu répondre à toutes les observations qui ont été présentées par chacun des orateurs, mais je tenais à vous apporter ces différents éléments de réponse.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Monsieur le ministre, il faut être précis dans la vie, particulièrement en politique. Sans doute votre perception était-elle altérée au moment où je m'exprimais par la présence, à vos côtés, de M. Mercier, qui vous entretenait. En effet, je vous ai dit : « En ce qui concerne les personnes handicapées, de nombreuses créations sont annoncées en MAS, FAM, ou SAMSAH ». Je ne parlais ni des personnes âgées ni de la maison de retraite de Brantôme. Il s'agissait bien des personnes handicapées.

D'ailleurs, si vous le souhaitez, je tiens à votre disposition le document de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie qui l'atteste - vous savez que je suis membre du conseil de cette instance : dans le département de la Dordogne, l'effort en faveur des personnes handicapées, c'est zéro ! Je le réaffirme avec force. Il ne faut pas confondre les établissements pour personnes handicapées et les maisons pour personnes âgées.

Je souhaitais apporter cette rectification, monsieur le ministre, car je n'ai pas l'habitude d'énoncer des contrevérités, en particulier lorsque je m'exprime à la tribune de cette assemblée.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

M. Philippe Bas, ministre délégué. Monsieur le sénateur, je vous remercie d'avoir implicitement reconnu l'importance de l'effort que nous menons en faveur des personnes âgées dans votre département.

Riressur les travées de l'UMP - Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Par ailleurs, s'agissant de l'accueil des personnes handicapées, la Dordogne n'a naturellement pas été oubliée. Mais l'État ne peut apporter de financements aux foyers d'accueil médicalisés, aux maisons d'accueil spécialisées et aux centres d'aide par le travail que si le conseil général le fait également.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Nous avons achevé le débat sur la prise en charge de la dépendance.

Nous reprenons l'examen des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

Nous en sommes parvenus à l'examen de la troisième partie, concernant les dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre général pour 2007.

TROISIÈME PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L'ÉQUILIBRE GÉNÉRAL POUR 2007

Est approuvé le rapport figurant en annexe B à la présente loi décrivant, pour les quatre années à venir (2007-2010), les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes, ainsi que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie.

ANNEXE B

Rapport décrivant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour les quatre années à venir

Hypothèses d'évolution - moyennes sur la période 2008-2010

Scénario haut

Scénario bas

Produit intérieur brut volume

Masse salariale du secteur privé

Objectif national de dépenses d'assurance maladie

Inflation hors tabac

Les projections quadriennales sont présentées sous deux scénarios économiques et en l'absence de toute affectation de ressources supplémentaires.

Ces deux scénarios reprennent les hypothèses d'évolution du produit intérieur brut (PIB), de la masse salariale et de l'inflation retenues dans les scénarios présentés dans le rapport sur la situation et les perspectives économiques, sociales et financières de la Nation annexé au projet de loi de finances pour 2007. Dans ces deux scénarios et en retenant une progression moyenne de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) de 2, 5 % dans le scénario haut et de 2, 2 % dans le scénario bas, le solde global du régime général et de l'ensemble des régimes de base s'améliore régulièrement sur la période 2007-2010. Le retour à l'équilibre du régime général est atteint en 2009 dans le scénario haut, et en 2010 dans le scénario bas.

Le déficit de la branche Maladie se réduit rapidement, la branche redevenant excédentaire dès 2009 dans les deux scénarios. La forte progression apparente des charges et des produits de la branche entre 2005 et 2006 est due à la prise en compte des nouveaux transferts entre l'assurance maladie et la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) : en application de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, outre le versement des dépenses médico-sociales, les régimes d'assurance maladie doivent à partir de 2006 comptabiliser en charges un transfert égal à l'ONDAM médico-social vers la CNSA et en contrepartie reçoivent en produits le remboursement par la CNSA des prestations médico-sociales.

L'excédent de la branche Accidents du travail - maladies professionnelles augmente régulièrement sur la période.

La branche Famille renoue avec une situation excédentaire dès 2008 dans les deux scénarios, notamment du fait de l'achèvement de la montée en charge de la prestation d'accueil du jeune enfant.

S'agissant de la branche Vieillesse, l'anticipation du départ en retraite de certains travailleurs et le grand nombre de bénéficiaires de la mesure « carrière longue » amènent à constater un déficit plus important qu'en 2006. Cette dégradation ne remet pas en cause le sens des projections de moyen et de long termes réalisées dans le cadre du Conseil d'orientation des retraites. Conformément au choix fait de présenter ces tableaux sans affectation de ressources supplémentaire, les présentes projections sont bâties sans préjuger des mesures qui pourraient être prises dans le cadre du premier rendez-vous quinquennal d'examen du financement de la branche pour assurer un retour du régime général à l'équilibre en 2009 et qui devront notamment tenir compte de l'amélioration de la situation de l'emploi.

Les soldes calculés sur l'ensemble des régimes de base sont assez proches de ceux du seul régime général. De nombreux régimes bénéficient en effet de mécanismes garantissant leur équilibre financier (contribution du régime général, subvention de l'État ou attribution d'une ressource externe). Le poids des quelques régimes ne bénéficiant pas de tels dispositifs d'équilibrage étant faible, leurs résultats n'affectent que marginalement celui du régime général.

Le Fonds de solidarité vieillesse devrait quant à lui bénéficier de l'amélioration de la conjoncture, qui se traduit par une accélération des recettes, et par un ralentissement des charges au titre de la prise en charge des cotisations de retraite des chômeurs. Son solde s'améliorerait notablement sur la période.

Le Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (FFIPSA) connaît une progression relativement modérée de ses charges comme de ses recettes. Le déficit de ce fonds ne se retrouve pas au sein des comptes de l'ensemble des régimes de base, puisque, avec la mise en place du FFIPSA en 2005, le régime des non salariés agricoles comptabilise un produit à recevoir du FFIPSA.

Prévision de recettes et de dépenses sur la période 2007-2010

- scénario économique bas

Régime général

(En milliards d'euros)

Maladie

Recettes

Dépenses

Solde

Accidents du travail - maladies professionnelles

Recettes

Dépenses

Solde

Famille

Recettes

Dépenses

Solde

Vieillesse

Recettes

Dépenses

Solde

Toutes branches consolidé

Recettes

Dépenses

Solde

Ensemble des régimes obligatoires de base

En milliards d'euros

Maladie

Recettes

Dépenses

Solde

Accidents du travail - maladies professionnelles

Recettes

Dépenses

Solde

Famille

Recettes

Dépenses

Solde

Vieillesse

Recettes

Dépenses

Solde

Toutes branches consolidé

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

En milliards d'euros

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles

En milliards d'euros

Recettes

Dépenses

Solde

Prévision de recettes et de dépenses sur la période 2007-2010

- scénario économique haut

Régime général

En milliards d'euros

Maladie

Recettes

Dépenses

Solde

Accidents du travail - maladies professionnelles

Recettes

Dépenses

Solde

Famille

Recettes

Dépenses

Solde

Vieillesse

Recettes

Dépenses

Solde

Toutes branches consolidé

Recettes

Dépenses

Solde

Ensemble des régimes obligatoires de base

En milliards d'euros

Maladie

Recettes

Dépenses

Solde

Accidents du travail - maladies professionnelles

Recettes

Dépenses

Solde

Famille

Recettes

Dépenses

Solde

Vieillesse

Recettes

Dépenses

Solde

Toutes branches consolidé

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

En milliards d'euros

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles

En milliards d'euros

Recettes

Dépenses

Solde

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je suis saisie de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 232 est présenté par MM. Cazeau et Godefroy, Mmes Demontès, Le Texier et Schillinger, M. Domeizel, Mmes Printz, Alquier et Jarraud-Vergnolle, M. Tropeano et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 263 est présenté par MM. Fischer, Muzeau et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Bernard Cazeau, pour présenter l'amendement n° 232.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

L'article 9 ouvre la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui concerne les dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre général pour 2007. En l'occurrence, il nous est demandé d'approuver, dès cet article, les perspectives d'évolution sur les quatre prochaines années.

Comment voulez-vous que nous vous accordions une once de confiance quand nous actons un déficit de 8 milliards d'euros sur 2007, c'est-à-dire dès la première de ces quatre années, au lieu du retour à l'équilibre auquel vous vous étiez engagés, et alors que les besoins de financement avoisineront 37 milliards d'euros sur la période 2004-2009 ?

Comment voulez-vous que nous considérions comme sincère le rapport figurant en annexe B, auquel l'article 9 fait référence, alors que vous n'avez jamais su, pu et encore moins voulu tenir un engagement tout au long de cette législature ?

Monsieur le ministre, la confiance ne va pas de soi ; elle se mérite. La méritez-vous quand nous actons une détérioration du financement de notre protection sociale année après année ? Comment vous accorder un quelconque crédit quand vous laissez comme héritage - cette fois, vous ne pourrez pas accuser la gauche, qui vous avait laissé des comptes sociaux pratiquement en équilibre - près de 50 milliards de déficit cumulé ?

De surcroît, au-delà des dettes accumulées, vous avez entrepris d'assécher volontairement les recettes. La situation est telle que le montant dû par l'État atteignait 14 milliards d'euros en 2003 et que la sécurité sociale a perçu l'année de la réforme 9 milliards d'euros de moins, ce qui équivaut à 75 % de son déficit annuel ; excusez du peu !

Votre politique d'exonération de cotisations sociales est également responsable de l'état financier de notre système de protection. L'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'ACOSS, évalue le montant de ces exonérations à 19, 8 milliards d'euros pour l'année 2005 et à 25 milliards d'euros pour l'année prochaine.

Certes, et je vous l'accorde, monsieur le ministre, la responsabilité du ministère n'est pas totale. En effet, la Cour des comptes a relevé que trente-six mesures ont été envisagées depuis le janvier 2005, dont dix-sept sans que le ministère en charge des affaires sociales soit informé ! Au-delà de cette illustration de la cohésion gouvernementale

sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Au-delà de cette mascarade, car c'en est une, vous faites fi d'une des caractéristiques principales de notre économie, c'est-à-dire son incertitude. Notre puissance économique peut être faite de changements nationaux ou internationaux susceptibles de remettre en cause vos prévisions. Savez-vous quelle sera l'évolution du baril de brut dans les trois prochaines années ? Souvenez-vous des propos du Président de la République, qui, lors du sommet d'Evian au mois de mai 2003, déclarait : « Nous venons de subir, ces deux dernières années, un ralentissement très significatif de la croissance mondiale, aggravé par les incertitudes internationales. Il a touché toutes les grandes zones économiques. » Croyez-vous sincèrement que rien ne viendra désormais perturber votre planification ?

En outre, comment ne pas évoquer une fois encore l'injustice de cette politique ? Quelle autre conclusion tirer quand la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et statistiques, la DRESS, observe que « la part de la sécurité sociale et des organismes complémentaires dans le financement des dépenses de santé diminue de 0, 27 point en 2005, le reste à charge des ménages augmentant à due proportion, passant de 8, 47 % en 2004 à 8, 74 % en 2005 » ? Cela procède d'une simple logique mécanique : lorsque l'État baisse le taux de participation de la sécurité sociale pour l'ensemble des dépenses de soins, ce sont les ménages qui règlent la facture.

La situation n'est-elle pas suffisamment alarmante pour vous ? Visiblement pas ! Mais, en la laissant se détériorer inéluctablement, peut-être nourrissez-vous un autre dessein pour la protection sociale, un dessein qui - je l'ai déjà laissé entendre les deux années précédentes, mais il faut parfois répéter certains propos - s'apparenterait à la logique d'une médecine à deux vitesses, logique que vous enclenchez dans le présent projet de loi de financement à travers le système optionnel. Ne souhaitez-vous pas une protection minimale pour tous qui laisserait la logique du profit se saisir de notre bien le plus précieux, la santé ?

C'est au regard de ces considérations et de ces inquiétudes que nous proposons la suppression de l'article 9.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° 263.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Notre amendement vise également à supprimer l'article 9.

En effet, cet article fait référence au rapport fourni en annexe, relatif aux prévisions de dépenses et de recettes pour les quatre années à venir et dans lequel nous trouvons des prévisions particulièrement optimistes. À l'aube de grandes échéances électorales, le Gouvernement et sa majorité souhaitent certainement pouvoir communiquer sur de telles prévisions.

Non seulement vous ne tablez pas sur un équilibre des comptes à l'horizon 2010 - si l'équilibre était atteint, ce ne serait déjà pas si mal -, mais vous misez carrément sur un excédent qui pourrait atteindre 4, 7 milliards d'euros. C'est une première surprise.

Autre surprise, l'équilibre viendrait de l'assurance maladie, qui pourrait afficher un solde positif de 4, 1 milliards d'euros en 2010.

Monsieur le ministre, pour arriver à de tels chiffres, vos services ont dû choisir les données conjoncturelles les plus hautes. Or qu'en est-il au troisième trimestre de cette année s'agissant de la croissance du PIB ? Les prévisions les plus optimistes se sont-elles vérifiées ? Pas du tout : c'est la stagnation, le calme plat !

Cela n'empêche pas vos services de retenir les hypothèses conjoncturelles les plus hautes. Ainsi, vous vous basez sur un taux de croissance du PIB moyen de 3 % sur la période 2008-2010, sur une progression de la masse salariale - les salariés et les retraités pourront s'en réjouir

sourires sur les travées du groupe CRC

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Par ailleurs, les fonds de financement connaîtraient la même embellie. Ainsi, le FSV atteindrait l'équilibre en 2009 et le FFIPSA verrait son déficit limité à moins de 2 milliards d'euros.

C'est peut-être ce qui justifie l'attitude de M. Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, consistant à ne pas bouger et à ne pas apporter les assurances tant réclamées par les agriculteurs, notamment par la mutualité sociale agricole.

Ces prévisions ne nous semblent pas seulement optimistes ; elles manquent totalement de sincérité.

Je le rappelle, la Cour des comptes se prononce de façon particulièrement claire sur le sujet. En effet, selon elle, « aucune amélioration globale n'est prévue pour les prochaines années ». Cette analyse nous paraît bien plus proche de la réalité.

Au regard de la situation actuelle des finances sociales et surtout, hélas ! de votre volonté de contourner une nouvelle fois tout débat sur le financement de la protection sociale alors qu'aucun mode de financement pérenne n'est proposé par votre majorité, nous ne pouvons que refuser de tels chiffres.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 3, présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

A. Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

II.- À compter de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, l'annexe B comprendra la présentation détaillée des hypothèses, des méthodes et des résultats des projections sur la base desquelles est établi le projet de loi de financement de l'année à venir, ainsi que les perspectives d'évolution pour les quatre années à venir.

B. En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention :

I.-

La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Le dispositif que cet amendement tend à instituer s'inscrit dans la continuité des propos que j'ai tenus sur la présentation des prévisions quadriennales à l'occasion de la discussion générale.

La commission des affaires sociales a considéré, et à l'unanimité me semble-t-il, qu'il y avait lieu de demander au Gouvernement de développer le contenu de l'annexe quadriennale. En effet, les quelques paragraphes que celle-ci comporte aujourd'hui sont nettement insuffisants pour permettre une appréciation des évolutions des finances sociales à quatre ans qui ne soit pas excessivement simpliste.

D'ailleurs, nous ne demandons rien de plus que des prévisions détaillées sur le modèle des prévisions quadriennales qui sont apportées par le ministère des finances dans le cadre du projet de loi de finances. Nous souhaitons donc le parallélisme des formes, afin de pouvoir apprécier les évolutions futures à leur juste mesure.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 74, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. Dans la deuxième ligne (Recettes) de la quatrième colonne (2007) du quatrième tableau (Fonds de solidarité vieillesse) de cette annexe, remplacer le chiffre :

par le chiffre :

II. En conséquence, dans la dernière ligne (Solde) de la quatrième colonne (2007) du quatrième tableau (Fonds de solidarité vieillesse) de l'annexe B, remplacer le chiffre :

par le chiffre :

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Jégou

Cet amendement vise simplement à rectifier une erreur qui est contenue dans le tableau retraçant l'évolution des recettes et des dépenses du fonds de solidarité vieillesse.

En effet, toutes les autres données relatives à la situation du FSV en 2007 mentionnent des recettes de 13, 9 milliards d'euros et un déficit de 600 millions d'euros.

Les chiffres évoqués dans ce tableau correspondent aux données de la commission des comptes de la sécurité sociale avant prise en compte de l'effet du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale sur les recettes du FSV.

Il convient donc de mettre en cohérence les données de ce tableau avec celles qui figurent dans les autres parties du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Permettez-moi de profiter de cette occasion pour souligner les difficultés liées à l'utilisation d'arrondis grossiers dans les différents tableaux du projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 75, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Dans la dernière ligne (Solde) de la dernière colonne (2010) de l'avant-dernier tableau (Fonds de solidarité vieillesse) de cette annexe, remplacer le chiffre :

par le chiffre :

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Jégou

Cet amendement vise également à corriger une erreur d'addition dans le tableau retraçant l'évolution du FSV à l'horizon 2010. Celle-ci est peut-être due aux arrondis auxquels le Gouvernement a procédé mais, dans ce cas, force est de constater qu'il est difficile de s'y retrouver.

Je voudrais, à cette occasion, attirer l'attention du Gouvernement sur la nécessité de traiter convenablement cet exercice de projection pluriannuelle et de prêter toute l'attention nécessaire à la rédaction des tableaux annexés.

Je m'étonne, en particulier, que la situation du FSV diffère très peu entre les scénarios économiques haut et bas, présentés en annexe B. Cette quasi-identité de situation, en dépit de deux situations économiques différentes me paraît particulièrement étrange dans la mesure où le FSV est extrêmement sensible à la conjoncture économique, tant en recettes qu'en dépenses.

Je voudrais donc comprendre, monsieur le ministre, comment on peut aboutir à des résultats aussi similaires. J'ai cru comprendre que cette situation pourrait s'expliquer par des transferts opérés entre le FSV et la CNAVTS, mais il n'en est pas fait mention dans l'annexe B.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Les amendements n° 232 et 263 visent à la suppression de l'article 9, ce qui entraînerait le non-respect d'une disposition de la loi organique. Ils ne sont donc pas recevables à ce titre.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

M. Alain Vasselle, rapporteur. Ils ont sans doute offert l'occasion à MM. Cazeau et Fischer de prendre la parole pour exprimer leur point de vue. Maintenant qu'ils se sont exprimés, nos collègues conviendront qu'il serait plus sage de leur part de retirer leurs amendements qui vont à l'encontre de la loi organique. S'ils étaient adoptés, nous risquerions d'encourir les foudres du Conseil constitutionnel.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Nos collègues savent bien, de toute façon, que l'amendement de la commission risque d'être adopté par la Haute Assemblée.

Quant aux amendements n° 74 et 75, présentés au nom de la commission des finances par M. Jégou, qui est perfectionniste dans l'âme, ils méritent de faire l'objet d'un commentaire de la part du Gouvernement.

La commission des affaires sociales s'est, elle aussi, interrogée sur la pertinence de la présentation de vos chiffres, monsieur le ministre. Elle a pensé qu'un degré de précision plus fin que la centaine de millions d'euros devait pouvoir être obtenu.

Vous savez que la commission des finances a l'habitude de travailler à l'euro près. Le fait que la commission des affaires sociales travaille à la centaine de millions d'euros près apporterait de l'eau au moulin des membres de ladite commission des finances qui considèrent que nous ne sommes pas de véritables gestionnaires ! Ce qui est faux, bien sûr !

Rassurez donc la Haute Assemblée, monsieur le ministre, et surtout les membres de la commission des finances, qui risqueraient sinon de réserver au PLFSS un sort qui n'est pas celui que nous souhaitons !

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Tout comme la commission, le Gouvernement est défavorable aux amendements n° 232 et 263 et pour les mêmes motifs.

S'agissant de l'amendement n° 3, je comprends, bien sûr, les préoccupations de la commission, mais il me semble très difficile de parvenir à une plus grande précision pour des prévisions à l'échéance de quatre ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Et nous, nous n'arrivons pas à comprendre d'où viennent les 4, 7 milliards d'euros d'excédent en 2010 !

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

En tout cas, je serai disposé à y travailler avec vous, mais il n'est pas besoin pour cela d'adopter une disposition législative. Sous le bénéfice de cette explication, je souhaite que la commission veuille bien retirer son amendement.

Quant aux amendements n° 74 et 75, je propose au Sénat de leur réserver un sort différent.

L'amendement n° 74 met en cohérence des tableaux d'équilibre. Il est donc bienvenu et je remercie M. Jégou d'avoir mis le doigt sur une imperfection réelle de la présentation de ces tableaux.

Quant à l'amendement n° 75, il vise à corriger l'arrondi d'un solde afin de le rendre conforme à la différence des arrondis des produits et des charges. J'ai d'abord été ébranlé par la motivation de cet amendement. Puis, mes services ont fait travailler les ordinateurs et nous avons constaté qu'il y avait effectivement un problème de cumul d'arrondis.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Mais il ressort de nos recherches, monsieur le rapporteur pour avis, que le montant du solde qui figure dans le projet de loi est le bon, ...

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

... même si l'addition des résultats intermédiaires figurant à l'annexe B n'aboutit pas à l'évidence à ce total, parce que l'on a additionné des grandeurs qui ont été arrondies, tandis que le total a été calculé en conservant les décimales.

Je vous remercie d'avoir fait preuve une fois de plus d'acuité dans votre examen des comptes mais, puisque notre résultat est le bon, il faut maintenir les chiffres qui sont inscrits dans le texte du projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Jégou

Monsieur le ministre, je vous remercie de vos explications. L'exercice n'est pas facile et notre travail consiste à faire preuve d'une grande attention en vous apportant ainsi un service supplémentaire de vérification. Mais, contre l'ordinateur, je reconnais que je n'avais aucune chance !

Au demeurant, vous ne m'avez pas expliqué l'absence de variation du solde du FSV en fonction des prévisions hautes et basses de la conjoncture économique alors que tout le monde connaît l'extrême sensibilité du FSV à la variabilité du contexte économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Entre le cumul d'arrondis, la sensibilité à la variabilité, nous sommes très étonnés que l'on puisse prévoir à l'échéance de 2010 un excédent de 4, 7 milliards d'euros. Il doit certainement y avoir « anguille sous roche ». En fait, les conséquences de vos choix au regard des besoins pèseront certainement dans les résultats que vous attendez.

Nous avons retrouvé une étude de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques du ministère de la santé et des solidarités qui montre que « la part de la sécurité sociale et des organismes complémentaires dans le financement des dépenses de santé a diminué de 0, 27 point en 2005, le reste à charge des ménages augmentant à due proportion, passant de 8, 47 % en 2004 à 8, 74 % en 2005 ». C'est donc cela, le cumul des variations...

Cette même étude souligne par ailleurs, concernant le financement de la dépense de soins et biens médicaux, la « diminution de 0, 14 point de la part de prise en charge par la sécurité sociale en 2005 ». Mon ami le député Patrick Braouezec, s'appuyant sur un échange que vous aviez eu avec Mme Jacqueline Fraysse lors du débat d'orientation budgétaire à l'Assemblée nationale, en a fait la démonstration.

Le Gouvernement prétendait à l'époque prendre des mesures de justice sociale sans toucher le périmètre de prise en charge des soins. Or les dépassements d'honoraires autorisés non remboursés - rappelez-vous le maquis de la convention tarifaire de janvier 2005 -, la contribution d'un euro et les vagues de déremboursements de médicaments - qui continuent pourtant d'être prescrits - ont amputé la couverture de base. Pour que ces références soient bonnes, monsieur le ministre, il faut les prendre en compte non pas sur dix ans, mais sur cette dernière période !

Nous estimons que de telles prévisions ne sont possibles qu'au prix d'une mise à contribution plus grande encore des assurés sociaux. C'est la raison pour laquelle nous pensons que vos tableaux ne sont pas sincères et nous demandons la suppression de l'article 9.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Madame la présidente, nous allons, pour notre part, « arrondir » notre position et retirer notre amendement. Nous n'avons pas besoin de faire chauffer les ordinateurs pour voir que l'amendement n° 3 de M. Vasselle s'inscrit dans le même esprit que le nôtre. Nous nous rallions donc à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 232 est retiré.

La parole est à M. le président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. En raison des engagements pris par M. le ministre de travailler en collaboration plus étroite avec elle sur les équilibres financiers et consciente qu'elle va obtenir pour les années à venir des rapports plus complets et plus étoffés, la commission retire l'amendement n° 3.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je suis donc saisie d'un amendement n° 3 rectifié, présenté par M. Cazeau, qui est ainsi libellé :

A. Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

II.- À compter de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, l'annexe B comprendra la présentation détaillée des hypothèses, des méthodes et des résultats des projections sur la base desquelles est établi le projet de loi de financement de l'année à venir, ainsi que les perspectives d'évolution pour les quatre années à venir.

B. En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention :

I.-

Je mets aux voix l'amendement n° 263.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour explication de vote sur l'amendement n° 75.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Jégou

En liaison avec nos collègues de la commission des affaires sociales, avec lesquels nous travaillons en très bonne intelligence, et dans l'intérêt du Gouvernement, je souhaiterais obtenir une réponse de M. le ministre à ma question sur le FSV. Nous avons reçu des explications contradictoires et je souhaiterais que nous puissions y voir clair.

Il ne s'agit pas pour nous de vous créer une difficulté, monsieur le ministre, mais nous voudrions comprendre. Si j'ai bien saisi, les dettes du FSV ne seraient pas remboursées avant de servir la CNAV. Mon amendement serait donc fondé.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Monsieur le rapporteur pour avis, vous vous êtes interrogé sur la très faible variabilité du solde inscrit au titre du FSV dans l'annexe B quelles que soient les hypothèses économiques retenues. Mais le FSV n'a pas vocation à dégager des excédents.

Lors de l'élaboration des prévisions, l'hypothèse de travail retenue fut la suivante : à partir du jour où le Fonds de solidarité vieillesse sera en excédent, les sommes excédentaires dégagées devront être utilisées à d'autres fins que le financement dudit fonds. Leur vocation la plus naturelle est de venir augmenter les ressources de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, qui, naturellement, malgré la réforme de ce secteur, aura besoin de ces crédits complémentaires.

À ce moment-là - moment proche car le FSV reprend assez rapidement le chemin de l'équilibre -, nous étudierons les décisions qui devront être prises.

En tout cas, il est certain que, dès que la ligne relative au FSV enregistre un excédent, les chiffres ne sont plus modifiés.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Mes chers collègues, je voudrais attirer votre attention pour que nous gardions l'attitude cohérente qui a toujours été la nôtre.

Nous ne pouvons pas critiquer le ministère des finances de ne pas engager le remboursement de la dette de l'État vis-à-vis de la sécurité sociale, dette qui, je le rappelle, s'élève aujourd'hui à 5 milliards d'euros, si nous-mêmes nous n'acceptons pas d'amorcer le remboursement de la dette du FSV et, dès lors que ce dernier sera excédentaire, de permettre l'utilisation de ces excédents pour alimenter la CNAV, qui connaît des difficultés.

Quoi qu'il en soit, si nous décidions d'affecter les excédents du FSV à la CNAV, nous devrions modifier une disposition législative aux termes de laquelle les excédents dégagés par le FSV doivent alimenter le FRR, le Fonds de réserve des retraites.

Nous aurons l'occasion de revenir sur ce point puisque la mise en oeuvre de la proposition que vient de formuler M. le ministre nécessitera l'adoption d'une disposition législative.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Jégou

J'en suis navré, monsieur le ministre, mais, selon moi, l'annexe est fausse.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Jégou

M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis. Je vous en prie, mon cher collègue, n'ajoutez pas à la difficulté !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Jégou

Par conséquent, il me semble préférable que l'amendement n° 75 soit adopté.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué

Monsieur le sénateur, je ne peux pas vous laisser dire que l'annexe est fausse ! Elle est juste, compte tenu des hypothèses qui ont été prises. C'est la raison pour laquelle je vous ai demandé de retirer votre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° 75 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Jégou

À cette heure, madame la présidente, étant donné notre état d'hypoglycémie certain, je suis bien obligé de le retirer.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'amendement n° 75 est retiré.

Je mets aux voix l'article 9 et l'annexe B, modifiés.

L'article 9 et l'annexe B sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures quinze.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt-deux heures vingt-cinq.