Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la dépendance présente de multiples aspects et concerne de nombreuses personnes, âgées ou non, ainsi que leurs familles. Des problèmes difficiles commencent à se poser. On pourrait ainsi longuement évoquer le problème de la prise en charge des adultes handicapés par des parents âgés ; des solutions d'hébergement devront être trouvées très rapidement.
Je n'aborderai ici que certains points concernant la situation des personnes âgées.
La dépendance est l'un des problèmes sociaux les plus aigus auxquels nous sommes confrontés, non pas que le phénomène soit nouveau - les premiers rapports sur ce sujet datent d'environ vingt ans -, mais l'allongement de la vie entraîne mécaniquement l'augmentation du nombre de personnes et de familles concernées. C'est ce qui se passe notamment en ce qui concerne les situations de désorientation temporo-spatiale, qu'elles soient dues à la maladie d'Alzheimer ou à d'autres formes de dégénérescence. Dans ces situations, les proches sont souvent désemparés, d'autant plus que l'état de dépendance peut s'étendre sur une longue période.
La majorité actuelle, monsieur le ministre, a fait plus que n'importe quelle autre dans ce domaine, en assurant notamment la pérennisation d'un certain nombre de financements, auparavant fort aléatoires ; elle a en quelque sorte mis fin au financement à crédit pratiqué précédemment.
Il n'en reste pas moins que nous devons relever plusieurs défis. J'en distinguerai plus particulièrement trois : la prévention, la prise en charge et le financement de la dépendance. Je conclurai par quelques mots sur un problème qui m'inquiète, à savoir la complexité administrative de plus en plus grande dans ce secteur.
Le premier défi à relever est celui de la prévention.
Il n'est pas sûr que la prévalence de la dépendance augmente à l'avenir. Des signes indiquent même qu'elle pourrait diminuer dans les sociétés développées, du fait d'une amélioration de la qualité de vie et des soins, ainsi que d'une plus grande activité intellectuelle des générations à venir de personnes âgées. Cependant, cette diminution pourrait être en grande partie masquée par l'augmentation de l'indice de vieillissement de la population.
Aussi, si nous voulons limiter le nombre de personnes dépendantes, il nous faut développer la recherche dans ce domaine, tant en sciences médicales qu'en sciences humaines, tout en nous gardant de susciter des espoirs inconsidérés s'agissant de telle ou telle thérapie innovante que d'aucuns s'empressent de nous présenter comme le miracle absolu. Aucun résultat dans ce domaine ne peut être atteint du jour au lendemain.
Il y a lieu également de préparer les futurs retraités à cette nouvelle période de leur vie. Si un grand nombre d'entre eux savent préparer intelligemment et activement ce changement de situation, il en est trop qui se trouvent désemparés, se sentent inutiles et plus ou moins rejetés par nos systèmes économiques et sociaux - cela plaide d'ailleurs en faveur du maintien au travail des seniors. Ils peuvent alors être victimes davantage et plus vite de la dépendance. Il nous faut donc encourager les initiatives dans ce domaine.
Le deuxième défi qu'il nous faut relever est celui de la prise en charge.
Dans ce domaine, il y a lieu de se pencher sur la formation de ceux qui sont appelés à intervenir auprès des personnes âgées. Les aspects techniques de la formation sont en général assez bien assurés. En revanche, la formation humaine constitue un point faible. En effet, les personnes âgées à prendre en charge, quelle que soit la dégradation de leur état, demeurent des personnes à part entière et doivent être considérées et traitées avec encore plus d'humanité.
Certes, la plupart des professionnels font des efforts considérables dans ce sens, mais n'oublions pas que la maltraitance existe, comme cela a été souligné dans de nombreux rapports, celle-ci étant plus souvent due à une absence de connaissances qu'à une volonté de nuire.
La formation humaine doit, à mon sens, concerner l'ensemble des intervenants, du médecin jusqu'au personnel de service, en passant par les cadres hospitaliers, les infirmiers, les aides-soignants ou les gestionnaires d'établissement.
La prise en charge peut également être améliorée, me semble-t-il, par une meilleure organisation, notamment dans les établissements. À cet égard, il est regrettable que la généralisation de la réduction du temps de travail ait trop souvent eu trois conséquences : l'augmentation de la charge financière pour les résidents - et éventuellement pour la collectivité -, l'accroissement de la charge de travail pour certains personnels et, en fin de compte, la détérioration du service. Finalement, si la réduction du temps de travail a peut-être été une avancée sociale pour certains, elle a également constitué une régression sociale pour d'autres.
Il n'est que trop patent que le maintien du carcan absurde de la RTT empêchera toute amélioration significative du service rendu aux personnes. Ainsi, j'ai fait calculer dans le département du Maine-et-Loire, lorsque j'en avais la responsabilité, le coût des 35 heures dans le domaine du handicap : il a représenté deux cents places d'accueil de personnes adultes handicapées !