Depuis le 5 janvier 2009, les antennes de France Télévisions ne diffusent plus, sur instruction du Gouvernement et avant même l’entrée en vigueur du projet de loi dont nous débattons, d’écrans de publicité entre 20 heures et 6 heures le lendemain matin.
Ce sont, d’après les experts du marché de la publicité, environ 250 millions d’euros qui ne seront plus investis sur les chaînes publiques.
Pour la parfaite information de tous, il faut rappeler que le total des recettes publicitaires des chaînes de télévision s’est monté, en 2007, à 3, 46 milliards d’euros.
Ce sont donc près de 8 % de ce montant qui connaissent, depuis le 5 janvier, une migration de la télévision publique vers les autres acteurs du marché.
En tout état de cause, il est difficile d’établir des prévisions quant à l’évolution du marché de la publicité en 2009, car, pour citer un analyste de ce secteur, « on n’a jamais vécu une fin d’année avec des informations qui arrivent aussi tard et un paysage aussi bousculé, avec une nouvelle réglementation et une crise ».
Il semble cependant vraisemblable que 60 % à 70 % des investissements publicitaires échappant désormais à France Télévisions soient captés par l’acteur dominant du marché de la publicité télévisé, c’est-à-dire TF1, 25 % allant vers M6.
Certes, dans un marché qui se contractera d’au moins 5 %, et peut-être même de 10 %, dans les mois qui viennent, du fait de la crise économique, TF1 et M6 verront leur chiffre d’affaires publicitaire au mieux rester stable par rapport à ceux de 2008, au pis se dégrader quelque peu.
La récession générale du marché publicitaire masquera donc un réel transfert de richesse du secteur public vers le secteur privé, et spécifiquement vers ses acteurs dominants, dans un climat économique particulièrement morose.
France Télévisions n’en essaiera pas moins, jusqu’à l’extinction totale de la diffusion de publicité sur ses antennes, en 2011, de réaliser ses objectifs de chiffre d’affaires publicitaire, de l’ordre de 260 millions d’euros – parrainages et partenariats inclus – en 2009, pour tenter de pas connaître un déséquilibre de ses comptes encore plus substantiel que celui qu’a directement provoqué la décision du Président de la République.
France Télévisions devrait ainsi clôturer l’exercice 2008 avec un déficit de 116 millions d’euros et l’exercice 2009 avec un déficit de 135, 3 millions d’euros.
En journée, les grandes chaînes de télévision hertzienne sont d’ores et déjà en train de se livrer une compétition très vive pour vendre leurs écrans publicitaires.
Sous nos yeux se déroule une restructuration profonde du marché de la publicité, en particulier du marché de la publicité télévisée, du fait de changements réglementaires importants. En plus de la suppression de la publicité sur la télévision publique, les éditeurs privés vont bénéficier de mesures de libéralisation des conditions de diffusion de la publicité sur leurs antennes, par exemple la seconde coupure publicitaire au cours de la diffusion des films.
Le Gouvernement prend ainsi la lourde responsabilité de bouleverser un peu plus un marché et, au delà, tout un secteur économique allant de la production à la diffusion, qui vit déjà de profondes évolutions liées à la révolution numérique et à la multiplication des modes de réception et de consommation de la télévision.
Dans cette perspective, il est essentiel que le législateur, qui aura à se prononcer, tous les ans, sur les conditions de financement du service public de l’audiovisuel, dispose de toutes les informations utiles à sa compréhension de l’évolution du marché publicitaire, à laquelle aura contribué le projet de loi que nous examinons.
Nous proposons donc que le Gouvernement remette, tous les ans pendant cinq ans, un rapport au Parlement évaluant les conséquences de la loi sur le marché publicitaire.
En fait, ce sous-amendement vise simplement à étendre le champ d’une disposition introduite dans la loi de 1986 par la loi dite « Trautmann-Tasca » du 1er août 2000 modifiant la loi 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, qui prévoyait la réduction à huit minutes par heure du temps consacré à la diffusion de messages publicitaires sur les antennes de France 2 et de France 3.