Intervention de Odette Terrade

Réunion du 15 janvier 2009 à 15h00
Communication audiovisuelle — Articles additionnels après l'article 19

Photo de Odette TerradeOdette Terrade :

Cet amendement, en revenant sur les termes de la loi de finances pour 2009, vise un seul et unique objectif : contribuer à assurer un minimum de ressources financières pérennes au service public de l’audiovisuel, profondément ébranlé par la décision de suppression de la publicité qui l’affecte.

Je me limiterai à cette question financière, notre discussion permettant largement de revenir sur les autres aspects de ce dossier.

Je souhaite d’abord évoquer la redevance. Cette ressource est la plus légitime pour la télévision publique. Elle s’est construite avec elle et représentait dès l’origine une forme d’actionnariat populaire et citoyen, comme nous l’avons déjà signalé. Le Gouvernement l’a transformée en impôt, en demandant au contribuable de s’en acquitter en même temps que la taxe d’habitation.

Dans cet esprit, nous estimons néanmoins que la majoration proposée sera comprise par le citoyen. Comme toutes les études le montrent, ce dernier tient à la qualité de l’outil de lien social et culturel que constitue la télévision.

Majorer la redevance dans le contexte actuel est une question de cohérence ! On ne peut pas à la fois vouloir un service public fort, l’amputer du tiers de ses recettes en supprimant la publicité et refuser toute majoration de la redevance.

L’augmentation de quatre euros que nous proposons pour la redevance ne compense pas les pertes générées par la disparition de la publicité, mais elle permet de dégager 130 millions d’euros de recettes. Pour autant, la redevance française reste infiniment plus basse que celle de la Grande-Bretagne, 195 euros, ou celle de l’Allemagne, 204 euros, et elle n’atteindrait même pas la moyenne européenne, qui s’élève à 161 euros.

Au demeurant, nous pourrions concevoir qu’une augmentation plus sensible de la redevance aille de pair avec le maintien de la qualité des programmes du secteur audiovisuel public ou celui des emplois.

Pourquoi ne pas payer un peu plus si cela place France 3 en situation de maintenir une bonne couverture de l’actualité locale, sans que la chaîne soit contrainte de passer par des accords avec la presse quotidienne régionale ou une simple mise en images de dépêches d’agence couplée à l’utilisation d’archives filmées ?

Par ailleurs, notre groupe souhaite s’élever une nouvelle fois contre le transfert d’une part des ressources de la redevance, déjà trop faible, vers France Télé numérique. Ce groupement d’intérêt public, créé à la suite de la loi du 5 mars 2007, est chargé du processus d’accompagnement de l’extinction de l’analogique au profit de la couverture numérique du territoire.

Devant la fragilisation financière, économique et structurelle de l’audiovisuel public, il est impensable de priver ce dernier d’une part de ses ressources, surtout quand cela revient à lui faire supporter des charges qui devraient procéder du budget général.

Cette situation traduit le double discours gouvernemental sur ce dossier.

L’argument incantatoire de la culture cache un véritable affaiblissement du service public, auquel on retire toujours plus au profit du secteur privé. Ce dernier ne cesse de recevoir des cadeaux du Gouvernement : les canaux bonus de la loi de 2007 ; l’accès automatique aux réseaux de télévision mobile personnelle, ou TMP, aux termes de la même loi ; la mise aux enchères des fréquences hertziennes, qui profite aux plus puissants ; l’échelonnement de paiement proposé l’an dernier pour la quatrième licence UMTS.

Les opérateurs privés participent-ils d’aucune manière au financement de l’extinction de l’analogique, dont ils vont pourtant tirer parti au même titre que les chaînes de l’audiovisuel public ? La mise à contribution de la redevance ne traduit-elle finalement qu’une absence de volonté de faire contribuer comme il convient les opérateurs privés au financement de cette évolution ?

Ainsi, nous assistons aujourd’hui au transfert des revenus publicitaires du secteur public vers le secteur privé et, indirectement, d’une part de la redevance !

En effet, avec l’opération de transfert vers le groupement d’intérêt public France Télé numérique, l’audiovisuel public ne sera plus le seul bénéficiaire de la redevance. Celle-ci sera également destinée aux télévisions privées et au secteur des télécommunications, un des grands gagnants du dividende numérique.

Il s’agit là d’un détournement des crédits de la redevance visant à assumer des dépenses que l’État ne veut pas prendre en charge.

Nous estimons qu’une télévision de qualité doit disposer de moyens à la hauteur de l’exigence visée. C’est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, d’adopter cet amendement.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion