Intervention de David Assouline

Réunion du 15 janvier 2009 à 22h00
Communication audiovisuelle — Article 21

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Nous l’avons dit à maintes reprises : tant que le Gouvernement ne prendra pas ses responsabilités et ne trouvera pas un moyen de financement pérenne et garanti pour l’audiovisuel public, nous resterons attachés au mode mixte de financement actuel, fondé sur l’attribution du produit de la redevance et la collecte de recettes publicitaires.

Cela étant, je retiens que l’État a annoncé qu’il garantissait l’apport à l’audiovisuel public des 450 millions d’euros représentant les recettes publicitaires dont celui-ci se voit privé. S’il ne les trouve pas avec un bricolage de taxes, il devra les trouver autrement !

Quant à nous, nous devrions pouvoir légiférer sans avoir une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes.

La taxation des opérateurs de téléphonie pour compenser la perte de recettes publicitaires préalablement collectées par les chaînes du service public relève du bricolage. Cette disposition revient à faire supporter au téléphone le coût du cadeau fait à TF1 et M6.

Comment justifier la création d’un impôt opposable à une catégorie d’acteurs économiques et rendu nécessaire par la seule volonté présidentielle de transférer de la richesse vers une autre catégorie d’acteurs économiques ?

Pourquoi ne pas taxer, dès lors, les industries qui fabriquent des téléviseurs ? Celles-ci sont beaucoup plus étroitement liées au développement de la télévision que les opérateurs de télécommunications !

En effet, les opérateurs de communications électroniques sont étrangers à l’économie de la télévision. Seuls certains d’entre eux proposent une offre d’accès aux programmes de télévision, offre correspondant parfois à une obligation de transport, au titre du must carry, au nom de laquelle il serait paradoxal de les taxer. Par ailleurs, il est économiquement indifférent pour l’opérateur que ses abonnés regardent une chaîne plutôt qu’une autre, de sorte que la suppression de la publicité sur France Télévisions leur est indifférente. Enfin, ce ne sont pas les opérateurs de télécommunications qui bénéficieront des parts de marché publicitaires libérées par France Télévisions, leur modèle économique étant fondé sur les abonnements et les consommations.

Ne répondant à aucun critère rationnel ou objectif, cette taxe est donc constitutive d’une rupture d’égalité des citoyens devant les charges publiques et susceptible d’attirer les foudres du juge constitutionnel, vous le savez.

J’ajoute que les conséquences de cette taxe seront supportées par le consommateur. En effet, les différents opérateurs que nous avons reçus ne s’en cachent pas : le manque à gagner résultant pour eux de l’acquittement de la taxe aura pour conséquence soit de leur faire ajourner leurs investissements à venir, soit d’alourdir les factures des consommateurs. En fait, ils feront sans doute un peu les deux !

Finalement, nous allons aboutir à la situation suivante : d’un côté, le consommateur sa facture augmenter, certes légèrement, mais les opérateurs se feront un plaisir de lui signaler que cette augmentation est due à une taxe de l’État ; de l’autre côté, les investissements nécessaires pour réaliser rapidement la couverture numérique du territoire, notamment pour le développement des troisièmes et quatrièmes générations de téléphone mobile et de la fibre optique, étant réduits en raison du poids de cette taxe, ils ne seront effectués que dans les zones où ils seront les plus rentables, ce qui aggravera la fracture numérique.

Je ne cherche pas à défendre les intérêts des opérateurs de téléphonie, et je tiens d’ailleurs à rappeler qu’ils doivent respecter des obligations, sachant que, dans beaucoup de territoires, les élus locaux constatent que ces opérateurs se défaussent sur les collectivités locales pour financer leurs investissements. Au moment où nous disons qu’il n’est pas bon de taxer ces opérateurs, il convient de leur rappeler ce qu’est leur cœur de métier, afin qu’ils ne profitent pas toujours de leur position : qu’ils remplissent leurs obligations et aident les collectivités locales, qui rencontrent déjà suffisamment de difficultés avec les transferts de charges que l’État leur impose.

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