Intervention de Annie David

Réunion du 19 mai 2009 à 21h30
Réforme de l'hôpital — Articles additionnels avant l'article 1er

Photo de Annie DavidAnnie David :

Avec cet amendement, notre objectif est de garantir que les dispositions de ce projet de loi ne s’appliqueront pas aux établissements psychiatriques. En effet, de notre point de vue, toute réforme de la psychiatrie nécessite un large débat préalable avec l’ensemble des acteurs concernés.

À la suite du meurtre dramatique d’un étudiant par un malade mental à Grenoble, le Président de la République a annoncé, le 2 décembre 2008, une nouvelle réforme de l’hospitalisation psychiatrique concernant, notamment, l’internement d’office et l’instauration d’une obligation de soins.

Cette réponse se plaçait sur le seul registre sécuritaire, celui de la criminalisation de la maladie mentale, loin de l’objectif d’apaiser une souffrance, de ne pas stigmatiser ceux qui souffrent, loin aussi de la nécessité de s’attaquer à la situation catastrophique de la psychiatrie publique.

Ce drame et les annonces qui ont suivi ont suscité un grand émoi parmi les professionnels de la psychiatrie, qui ne se reconnaissent pas non plus dans les propositions du rapport d’Édouard Couty Missions et organisation de la santé mentale et de la psychiatrie en santé mentale.

Rendu public le 29 janvier 2009, ce rapport était supposé préfigurer une réforme sur les hospitalisations d’office et une réorganisation territoriale de l’offre de soins en santé mentale, réforme destinée à adapter l’organisation de la psychiatrie au projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, dit HPST.

En juin 2003, des états généraux de la psychiatrie avaient pourtant permis d’élaborer vingt-deux propositions sur l’organisation des soins en psychiatrie et en santé mentale, propositions qui ne sont absolument pas prises en compte dans le rapport Couty.

Les psychiatres réunis autour du Manifeste pour la création d’un mouvement pour la psychiatrie voient dans ce rapport l’annonce du démantèlement de la politique de secteur dans sa double dimension de proximité et de continuité des soins, pivots de la psychiatrie de secteur. Ils considèrent que les propositions du rapport Couty laissent les soignants « dans la position d’instruments d’un triple forfait [...] : évaluer, expertiser et enfermer. ».

Le 7 février, ils étaient deux mille, réunis pour dire non à une instrumentalisation de leur profession, pour rejeter l’amalgame entre folie et dangerosité, et la logique sécuritaire. Ils refusent une politique faisant de la psychiatrie une gardienne de l’ordre social, en contradiction avec les finalités du soin.

Ils demandent, avant toute mesure législative ou réglementaire, un moratoire donnant le temps d’engager un débat sérieux avec l’ensemble de la profession, seul moyen de garantir une réponse sanitaire de haut niveau aux besoins des usagers de la psychiatrie.

Monsieur le rapporteur, dans votre rapport sur la prise en charge psychiatrique en France, vous avez souligné que, compte tenu de la prévalence des troubles psychiatriques, la « santé mentale devrait être une priorité de la santé publique ».

Vous avez, entre autres difficultés, pointé « l’insuffisance des moyens hospitaliers » et le problème soulevé par la suppression « en France, entre 1985 et 2005, de près de trente mille lits et places en psychiatrie ».

Vous avez encore indiqué que les recommandations du rapport Couty ne pouvaient être imposées à la profession et vous avez proposé « l’organisation d’états généraux de la santé mentale », réunissant l’ensemble des professionnels concernés, « devant servir de base au dépôt d’un projet de loi » d’organisation territoriale.

Cela rejoint les préoccupations qui fondent notre amendement, lequel trouvera, j’en suis certaine, un écho favorable.

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