Intervention de Évelyne Didier

Réunion du 28 mai 2008 à 15h00
Responsabilité environnementale — Article additionnel après l'article 1er

Photo de Évelyne DidierÉvelyne Didier :

Cet amendement se décline en deux points : la prescription trentenaire et l’expertise. Il s’agit de sujets que j’ai déjà évoqués dans l’une de mes précédentes interventions, mais je tiens à y insister.

Premier point : l’article L. 161-5, conformément à l’article 17 de la directive, vise à poser le principe de la prescription trentenaire : les demandes de réparation ne seront plus opposables au pollueur lorsque plus de trente ans se seront écoulés depuis l’émission, l’événement ou l’incident ayant causé le dommage. Cette disposition présente l’inconvénient majeur de dédouaner l’exploitant peu scrupuleux qui aurait caché avec succès un tel événement, sans compter qu’elle sera difficile à appliquer pour des pollutions multicausales.

Le Conseil d’État, dans un arrêt du 8 juillet 2005, avait marqué un pas dans la réglementation des sites et sols pollués en reconnaissant l’applicabilité du principe de prescription trentenaire. Il avait censuré la cour administrative d’appel de Marseille, qui avait considéré que l’obligation de remise en état du site était imprescriptible. Ainsi, lorsque plus de trente ans se sont écoulés depuis la date à laquelle la cessation d’activité a été portée à la connaissance de l’administration, le préfet ne peut plus imposer à l’exploitant la charge du coût entraîné par la remise en état d’un site.

Toutefois, cette jurisprudence ne s’applique pas dans le cas où les dangers ou inconvénients présentés par le site ont été dissimulés, l’obligation de remise en état restant alors imprescriptible.

Même s’il est restrictif, l’arrêt du Conseil d’État présente donc au moins l’avantage de ne pas opposer la prescription dans le cas où les faits auraient été dissimulés. C’est un progrès !

Notre amendement va dans ce sens : nous demandons que le point de départ de cette prescription soit porté au jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

Second point : le projet de loi élude la question de l’évaluation des dommages. Il ne pose pas la nécessité de garantir une expertise indépendante et impartiale.

Or, les crédits accordés à la recherche publique ne cessant de diminuer, nous sommes dans une situation où les autorités publiques renvoient presque systématiquement à l’expertise privée. Dès lors, comment éviter les conflits d’intérêt ? Il est donc nécessaire que les experts soient des tiers n’ayant aucun lien financier avec l’entreprise mise en cause.

De plus, on ne saurait mettre légitimement à la charge de la victime ou de la collectivité le coût des analyses nécessaires pour prouver la pollution et son origine. En conséquence, nous demandons que l’expertise indépendante soit réalisée aux frais de l’auteur présumé du dommage.

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