Intervention de Bruno Retailleau

Réunion du 28 mai 2008 à 15h00
Responsabilité environnementale — Article additionnel après l'article 4

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau :

Cet amendement, qui a été approuvé par la commission des affaires économiques, est dans son principe assez symbolique, mais sa portée peut être étendue en raison de ses applications concrètes.

Comme cela a été souligné à plusieurs reprises, la notion de responsabilité se situe au cœur du développement durable, et nous nous sommes réjouis ensemble lorsque, le 16 janvier dernier, le tribunal de grande instance de Paris, faisant œuvre de création jurisprudentielle, a reconnu l’existence d’un préjudice écologique.

Toutefois, les collectivités territoriales ont le plus grand mal à obtenir l’application de ce concept jurisprudentiel. En effet, les normes en vigueur en France aujourd’hui restreignent la possibilité pour elles de se constituer partie civile en cas de préjudice écologique.

Il faut, par exemple, que la collectivité soit propriétaire du bien directement touché par le dommage ou que la loi lui confère une compétence spécifique en matière de protection de l’environnement.

Par conséquent, dans la plupart des cas, en dépit de l’apparition de cette création jurisprudentielle de préjudice écologique, les collectivités ne pourront pas s’en prévaloir, parce qu’elles n’auront pas la capacité de se constituer partie civile. Une telle situation est assez injuste, et ce pour trois raisons.

Premièrement, les collectivités, quelles qu’elles soient – les communes, les départements et les régions – ou leurs groupements sont toujours en première ligne pour réparer les conséquences d’une catastrophe naturelle et effectuer les premières dépenses. C’est incontestable !

Deuxièmement, les associations qui sont reconnues et agréées en matière d’environnement peuvent, elles, se constituer partie civile en cas de dégâts directs ou indirects dans le ressort duquel elles exercent leur activité. Donc, certaines associations qui ne procèdent pas du suffrage universel disposent de cette capacité à agir, qui est refusée aux collectivités et à leurs assemblées délibérantes élues au suffrage universel.

Troisièmement, enfin, une brèche a déjà été ouverte, parce que c’était le bon sens, dans le code de procédure pénale, puisque les collectivités ont la possibilité de se constituer partie civile, même lorsqu’elles ne sont pas propriétaire du terrain sur lequel est advenu un incendie volontaire.

Pour toutes ces raisons, il est temps de moderniser notre droit et de prendre acte de la maturité juridique des collectivités territoriales, après le grand phénomène de décentralisation.

Cet amendement est assez précis. Il ne crée pas une règle générale. Il tend au contraire à réserver la possibilité, en matière de poursuites, de déceler qui est l’auteur d’une faute. Il n’est pas question d’arracher à l’État et à son ministère public une sorte de droit régalien. Les collectivités dans leur ensemble veulent simplement pouvoir se prévaloir d’un juste droit consécutivement à cette reconnaissance du préjudice écologique.

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