Intervention de Gérard Longuet

Réunion du 9 novembre 2005 à 15h00
Gestion de la dette dans les etats de l'union européenne — Débat de contrôle budgétaire

Photo de Gérard LonguetGérard Longuet :

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur spécial, mes chers collègues, je n'emprunterai pas ma conclusion à Louis-Ferdinand Céline, comme vient de le faire avec talent M. de Montesquiou.

Je tiens tout d'abord à vous remercier, monsieur le ministre, d'avoir accepté ce débat sur le sujet difficile de la gestion de la dette.

Ce débat s'inscrit dans l'optique d'une revalorisation du travail du Parlement que rend possible la LOLF. Cette revalorisation est également facilitée par votre engagement public de recourir à des audits et d'en communiquer les conclusions dans la transparence, afin que le Parlement, et au premier chef la Haute Assemblée, retrouve la fonction de contrôle qui fut à son origine, mais aussi sa fonction de conseil, de proposition, je n'ose dire de censure, car ce serait alors entrer dans un autre débat.

Le rapport qui nous est soumis porte moins sur la stratégie de la dette que sur sa gestion. Nous partageons tous la préoccupation qu'a exprimée M. Aymeri de Montesquiou sur le poids écrasant et toujours croissant de la dette. La question qui nous est posée est de savoir si nous parvenons, grâce à l'Agence France Trésor, qui est un outil de qualité, à gérer la dette avec intelligence.

Permettez-moi de faire un bref rappel historique. Il est bon de parler de ce qui ne va pas. Souvent, en France, nous gommons les réalités économiques parce que, au fond, cela nous arrange et que cela permet d'éluder les responsabilités des uns et des autres.

De 1945 à 1980, le financement de l'économie s'est fait principalement par l'inflation. Les dettes n'ont donc pas été payées. En 1980, l'endettement de l'Etat n'était certes que de 20 % du PIB, mais nous avions spolié des générations d'épargnants par une inflation systématique. Celui qui avait foi en l'Etat et qui lui confiait son épargne avait la certitude de perdre une partie de son pouvoir d'achat et de ses revenus. Nous avons donc alors, si je puis dire, ruiner les générations précédentes.

Depuis, le financement par l'inflation, la dévaluation et les ajustements n'étant plus possibles, nous avons endetté les générations à venir.

Ce n'est pas brillant pour le passé antérieur à 1980 et c'est terrifiant pour les vingt-cinq dernières années que nous avons vécues.

Aujourd'hui, monsieur le ministre, vous affichez, avec Thierry Breton, une inflexion courageuse. Je n'y reviens pas, elle est suffisamment exceptionnelle pour que l'on forme des voeux de succès. Espérons que nous parviendrons à développer une stratégie pour contenir et bloquer la dette.

Vous avez confié à Michel Pébereau, qui a le sens de l'Etat et de la chose publique tout comme celui de la réalité du privé - toute sa vie professionnelle le démontre -, la responsabilité de réfléchir à la réduction des déficits. Vous avez esquissé une solution à laquelle nous ne pouvons que souscrire : la réforme de l'Etat. Sans elle, nous n'obtiendrons pas de résultats durables.

Mais revenons au rapport de M. Paul Girod.

La gestion de la dette est marquée par un très grand professionnalisme. Il faut rendre hommage à la capacité de votre administration, monsieur le ministre, celle du ministère de l'économie et des finances, d'avoir su concevoir un outil original. Constitué de professionnels issus, dans leur grande majorité, de l'Etat, il propose néanmoins des contrats à des spécialistes venus du secteur privé.

L'optimisation de la dette constitue un enjeu important puisque, selon les circonstances, elle représente entre quelques dizaines et quelques centaines de millions d'euros. Elle doit se faire dans le sens de l'allégement des coûts de gestion, comme ce fut le cas en 2004 et en 2005.

Dans son rapport, M. Paul Girod évoque les contraintes qui pèsent sur la gestion de la dette.

L'AFT est obligée de travailler avec le poids du passé et avec les réalités du présent. Elle est surtout obligée de tenir compte, et c'est sans doute le plus difficile, de la politique de la Banque centrale européenne.

A l'heure actuelle, les taux d'intérêt sont exceptionnellement bas. La menace d'une majoration plane comme une épée de Damoclès - l'expression figure dans le rapport - sur la tête de l'AFT, comme sur la nôtre, d'ailleurs. Or, cent points de taux de base aboutiraient immédiatement à une augmentation de la charge de la dette. Les chiffres sont spectaculaires : un milliard d'euros par an pour cent points, puis deux milliards d'euros la deuxième année et ainsi de suite puisque la dette se reconstitue et que sa « pyramide des âges » se déforme.

L'AFT exprime un vrai savoir-faire personnel : elle a su s'engager, optimiser la gestion de la dette, imaginer des produits nouveaux. La France a été, me semble-t-il, l'un des premiers pays européens, si ce n'est le premier, à proposer un produit qui court sur cinquante ans, assorti de conditions attractives. L'AFT affiche une performance satisfaisante, à une réserve près.

Dans votre rapport, monsieur le rapporteur, vous présentez le différentiel de taux comme un critère absolu de gestion de la dette.

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