Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 2 est l’occasion pour nous de parler d’une entreprise parfois sous-estimée et, en tout cas, insuffisamment connue de nos concitoyens et même de ceux que l’on appelle les leaders d’opinion, je veux parler de Radio France Internationale.
L’article 2 du projet de loi prévoit une réécriture de la loi du 30 septembre 1986 pour substituer à la société Radio France Internationale la holding « Audiovisuel extérieur de la France », qui devient, elle, une société nationale de programme, ayant pour mission de « contribuer à la diffusion et à la promotion de la langue française, des cultures française et francophone, ainsi qu’au rayonnement de la France dans le monde, notamment par la fourniture d’informations relatives à l’actualité française, francophone, européenne et internationale ».
En conséquence, RFI n’existera plus comme société nationale de programme.
Depuis plusieurs années déjà, particulièrement depuis la création de France 24, son identité, son indépendance éditoriale, son cahier des charges, ses emplois sont mis en cause, au mépris d’un bilan incontestable acquis sur des années d’effort et sans qu’y soit substitué un projet stratégique clair tourné vers l’avenir.
Les personnels de RFI craignent 300 à 400 suppressions de postes, voire plus, sur un total d’un millier d’emplois. On sait déjà que des antennes vont disparaître, ainsi que plusieurs rédactions de langues jugées « trop confidentielles ».
Le 24 octobre dernier, la direction de la holding a confirmé ces craintes en annonçant la fermeture de six rédactions, comme vient de l’évoquer notre collègue Ivan Renar, tandis que trois autres seraient cantonnées à internet – le persan, le chinois et le russe – et s’éteindront sur les ondes.
La plupart des filiales de RFI à l’étranger devraient également fermer. L’exemple de la suppression de l’allemand, parallèlement à la réduction draconienne de notre réseau culturel en Allemagne, doit nous amener à nous interroger, mes chers collègues, sur la cohérence de notre politique étrangère, en particulier européenne.
Au moment où les médias, même publics, programment de moins en moins de films en version originale, ce que je déplore, il est encore plus regrettable de restreindre l’expression de l’audiovisuel extérieur dans les langues étrangères.
Vous feriez mieux, madame la ministre, d’assurer une plus large diffusion de RFI dans l’Hexagone, où seuls les Franciliens peuvent actuellement bénéficier de ses programmes.
Comment ne pas s’inquiéter de cette « chronique d’une mort annoncée »pour RFI ?
En matière de financement, c’est l’incertitude la plus totale. Du fait de la réforme de l’audiovisuel extérieur, les dotations publiques ne sont plus attribuées société par société dans le cadre de la loi de finances. Elles seront regroupées dans une enveloppe globale qui fera l’objet d’une répartition par les dirigeants de la holding Audiovisuel extérieur de la France, entre les différentes entreprises, sans qu’aucun mécanisme ne garantisse un partage équitable.
Or, et ce point vient d’être évoqué, du fait des responsabilités précédentes du président-directeur général de France 24, dont il reste président du directoire, on peut craindre que la répartition des dotations ne favorise cette chaîne au détriment de TV5 Monde et de RFI. TV5 Monde est un peu protégée par son statut multilatéral, mais RFI ne l’est pas.
En outre, par voie d’amendement, la commission des affaires culturelles envisage de prélever les ressources issues de la redevance audiovisuelle destinées à l’audiovisuel extérieur, soit 65 millions d’euros, pour les attribuer à France Télévisions afin de compenser la perte des recettes publicitaires.
Ainsi, l’audiovisuel extérieur apparaît comme une variable d’ajustement. Il se trouvera de plus en plus dépendant des décisions budgétaires et sera dans la main de l’exécutif.
Une réforme de l’audiovisuel public doit faire avancer l’audiovisuel extérieur et non le faire régresser. RFI est un des atouts de la France à l’étranger. Elle mérite un meilleur traitement. Son ministère d’origine, le ministère des affaires étrangères, devrait s’en préoccuper, veiller à la coordination et non à l’absorption !