Intervention de Marie-France Beaufils

Réunion du 15 avril 2008 à 10h00
Questions orales — Maintien sur le site de clocheville de l'hôpital pour enfants

Photo de Marie-France BeaufilsMarie-France Beaufils :

Monsieur le président, je regrette l’absence de Mme la ministre sur un sujet qui relève de sa compétence propre.

Notre hôpital public est malade. Ce qui se passe à Tours est révélateur des projets que le Gouvernement compte mettre en place de manière plus globale à l’échelle nationale. Au nom de la modernisation, il procède au démantèlement pièce par pièce de notre système de santé, dont la richesse réside dans le fait qu’il est fondé sur la solidarité. Cette valeur est également portée par les personnels hospitaliers, qui font preuve de dévouement pour faire vivre cette conception de l’hôpital.

Je rappelle à ce titre l’une des recommandations du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé : « Le concept de rentabilité ne peut s’appliquer à l’hôpital de la même manière qu’à une activité commerciale ordinaire. » Il recommande en outre « de réintégrer la dimension éthique et humaine dans les dépenses de santé, afin de permettre à l’hôpital de remplir de manière équilibrée l’ensemble de ses missions. »

L’hôpital pour enfants de Clocheville, à Tours, fait depuis de nombreuses années la preuve de sa pertinence, qui est reconnue non seulement par les personnels mais aussi par les milliers d’usagers et leur famille : tous le manifestent à travers la pétition lancée par l’intersyndicale. La maison des parents, qui est associée à cette structure hospitalière, accroît la qualité de l’intervention des équipes médicales, grâce à l’environnement qu’elle crée autour de l’enfant malade.

Le transfert de cette entité pédiatrique sur le site de Bretonneau serait à l’étude. Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous me préciser si un tel déménagement est prévu ?

Deux éléments semblent le confirmer. D’une part, un avis d’appel public à concurrence, paru dans le quotidien local, la Nouvelle République, le 29 avril 2006, propose une étude de faisabilité d’un transfert de deux cent dix lits pédiatriques du site de Clocheville sur celui de Bretonneau. Cette annonce n’a eu aucune suite. D’autre part, un contrat entre le ministère de la santé et des solidarités et l’agence régionale d’hospitalisation du Centre conclu au début de l’année 2007 évoque le regroupement du centre hospitalier universitaire de Tours sur trois sites et non plus sur deux. Certes, aucune décision officielle n’a été prise à ce jour, mais cette échéance est tout de même inscrite dans ce contrat.

L’un des arguments avancés serait le vieillissement du site de Clocheville. Pourtant, nombre de services sont neufs, comme les blocs opératoires, récemment remis en état. L’exigüité des lieux est aussi invoquée. Or 2 500 mètres carrés de bâtiments sont aujourd’hui disponibles, certains ayant été refaits à neuf voilà peu de temps.

Les syndicats pensent que le transfert de deux cent dix lits sur le site de Bretonneau est quasiment impossible, notamment parce que le service des urgences enregistre 26 000 passages par an.

Aussi comprenons-nous mieux que l’appel d’offre qui a été lancé n’ait pas eu de suite pour le moment. Sauf à démanteler la pédiatrie et à transférer une partie du site de Clocheville, les services de médecine, par exemple, sur celui de Bretonneau, ce qui suscite l’inquiétude des salariés et des usagers, une telle entreprise paraît difficile.

Intégrer les services pédiatriques aux services adultes signerait la fin de l’unité pédiatrique. La stérilisation, les laboratoires ont déjà été transférés sur le site de Bretonneau. La prochaine étape concernerait le service de réanimation des tout-petits. Que restera-t-il de la réanimation pédiatrique pour les plus grands enfants, dans la mesure où celle-ci requiert les mêmes moyens humains et matériels ? Sans ces services, on peut, à juste raison, s’interroger sur la pérennité des urgences et de la chirurgie sur le site de Clocheville.

Monsieur le secrétaire d'État, que comptez-vous faire pour éviter cette disparition à terme ?

Mon inquiétude est d’autant plus grande que le Gouvernement prépare un projet de loi de modernisation de la santé, qui serait débattu au Parlement au cours de l’été prochain. Celui-ci prévoirait qu’après regroupement les hôpitaux publics pourraient être transformés en établissements privés à but non lucratif, ce qui aurait des conséquences désastreuses pour les patients, aux dires des syndicats.

Le regroupement des services, la généralisation de la polyvalence des personnels entre établissements ne sont-ils pas une façon de rentabiliser et d’améliorer la productivité ? Cela reviendrait à considérer que la santé est un commerce comme un autre. Les déclarations de Mme la ministre ce week-end me font craindre que telle est bien malheureusement l’orientation choisie.

Le professeur Danièle Sommelet, dans le rapport de mission qu’elle a remis au mois d’octobre 2006, met en garde sur les risques de voir disparaître la pédiatrie : « La plus-value de la pédiatrie hospitalière doit être maintenue, nous dit-elle, en permanence, notamment dans le domaine des surspécialités que revendiqueraient facilement les spécialistes d’adultes. » Monsieur le secrétaire d'État, que comptez-vous faire pour maintenir la spécificité pédiatrique à l’échelon national, et plus particulièrement dans la ville de Tours ? L’unité pédiatrique et la maison des parents y accueillent la population infantile de toute la région Centre et au-delà.

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