Intervention de Daniel Dubois

Réunion du 18 octobre 2005 à 16h00
Sécurité et développement des transports — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Daniel DuboisDaniel Dubois :

Ce texte fait de plus l'objet d'une déclaration d'urgence ! Il a été présenté en conseil des ministres le 5 octobre et a été déposé sur le bureau du Sénat quelques jours après. Deux semaines plus tard, nous l'examinons en séance publique sans que nous disposions d'une deuxième lecture pour apporter d'éventuelles améliorations.

Monsieur le ministre, avec mes collègues du groupe UC-UDF, je déplore ces méthodes de travail. Je regrette que, sur des sujets aussi importants qui concernent l'ensemble de nos concitoyens, le Gouvernement confonde parfois efficacité et précipitation.

Ce projet de loi regroupe des mesures très disparates qui vont du renforcement des sanctions contre le débridage des véhicules à deux et quatre roues, aux garanties accordées aux femmes de marins, en passant par la transposition du « deuxième paquet ferroviaire », sur l'ouverture à la concurrence en 2006 de l'ensemble du marché du fret ferroviaire, sans oublier la sécurité des aéronefs.

Tels sont, pêle-mêle, des exemples de dispositions proposées dans ce texte qui ressemble un peu, il faut bien le dire, monsieur le ministre, à un patchwork.

Mais il est vrai aussi que ce projet de loi comporte des mesures très opérationnelles, qui répondent pleinement aux attentes des professionnels. Je m'attacherai plus particulièrement à deux d'entre elles.

Tout d'abord, l'article 13 va autoriser l'établissement public Réseau Ferré de France à conclure un contrat de partenariat public-privé ou une convention de délégation de service public. Ce nouveau type de contrat lui permettra de construire, d'entretenir et d'exploiter tout ou partie de l'infrastructure ferroviaire.

Nous savons, monsieur le ministre, que l'objectif est de favoriser la mobilisation de ressources nouvelles pour le développement du réseau ferré national.

Cette mesure va de pair avec le choix du Gouvernement. Vous avez en effet décidé vendredi dernier, lors du comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires, de recourir aux partenariats public-privé, les PPP, dans le secteur des transports.

Vous l'avez d'ailleurs vous-même confirmé, monsieur le ministre, lors de la conférence de presse qui a suivi.

Ainsi, dans la continuité du programme d'infrastructures décidé lors du comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire, le CIADT, du 18 décembre 2003, une partie des projets d'infrastructures - vingt et un sur trente-cinq - seront susceptibles d'être financés par des PPP, comme la desserte ferroviaire de l'aéroport de Roissy, la ligne à grande vitesse Aquitaine ou encore l'aéroport Notre-Dame-des-Landes en Loire-Atlantique.

Par ailleurs, monsieur le ministre, vous avez déclaré : « Grâce à ces financements innovants et pour la première fois en France, trois lignes ferroviaires à grande vitesse seront engagées simultanément en 2006 - Perpignan-Figueras, le TGV Est européen et le TGV Rhin-Rhône -, avant même que la représentation nationale ne se soit prononcée sur le sujet. Même si nous jugeons qu'il s'agit d'une mesure intéressante, nous regrettons qu'elle soit déjà annoncée comme acquise dans la presse, alors que le Parlement est appelé à se prononcer à ce sujet cette semaine.

Par ailleurs, monsieur le ministre, qu'en est-il des projets décidés lors du CIADT du 18 décembre 2003, qui ne devraient pas faire l'objet d'un financement par PPP ? Seront-ils demain prioritaires dans l'affectation des hypothétiques ressources de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, l'AFITF, ou sont-ils tout simplement doublement laissés pour compte ? Je pense notamment à l'électrification de la ligne Amiens-Boulogne, au deuxième tracé de TGV Paris-Londres et, bien sûr, au canal à grand gabarit qui ne semble pas être repris dans la liste des vingt et un projets, et dont je n'entends pas parler alors qu'il est stratégique pour le transport fluvial.

Je tiens d'ailleurs à vous préciser, monsieur le ministre, que j'ai déposé un amendement visant à permettre à Voies navigables de France d'avoir recours à l'outil des PPP. Il permettra de financer le développement des infrastructures de transport fluvial et non pas de limiter cette possibilité à l'entretien des écluses et des barrages à gestion manuelle, même produisant de l'électricité.

J'espère, mes chers collègues, compte tenu de l'importance de ce projet de canal Seine-Nord Europe à grand gabarit, inscrit parmi les trente projets prioritaires européens de transport, que cet amendement engagera un nécessaire débat sur le financement de cette autoroute fluviale Seine-Escaut.

En effet, le transport fluvial est l'un des oubliés de ce projet de loi. Or, au point de vue tant économique qu'environnemental, il me semble indispensable de relancer le transport fluvial en France. Et seul un large partenariat devrait permettre de réunir les capitaux nécessaires pour des projets de cette envergure.

Pour clore sur ce chapitre, monsieur le ministre, je vous informe que mon collègue Philippe Nogrix interviendra jeudi matin pour obtenir des assurances précises quant à la pérennité des ressources de l'AFITF, alors que le Gouvernement, auquel vous appartenez, décide de vendre les parts de l'Etat dans les sociétés autoroutières.

Le deuxième point sur lequel je souhaiterais intervenir concerne la mise en place d'un dispositif de répercussion des variations du coût du gazole sur le prix du transport routier de marchandises.

On le sait tous, le carburant constitue un poste essentiel pour les entreprises de transport routier puisque c'est le deuxième poste de charges, après le coût du travail, en atteignant 20 % à 25 % des charges d'exploitation.

L'envolée des cours du pétrole a fait augmenter de 500 millions d'euros la facture des transporteurs en 2004 ; elle risque d'être proche du milliard d'euros en 2005.

Pour l'ensemble de la profession, compte tenu des marges réduites, particulièrement dans le domaine du transport routier de marchandises, cette inflation des charges est devenue insupportable et la répercussion de ces hausses sur le prix du transport est devenue essentielle.

C'est pourquoi ce dispositif est indispensable à la survie de ce secteur d'activité. N'oublions pas, monsieur le ministre, mes chers collègues, que le transport routier représente en France près de 400 000 salariés, 41 000 entreprises et que cette activité représente plus de 1 % du PIB. C'est dire l'importance de ce secteur, dont la santé est essentielle pour l'économie nationale.

Mais, monsieur le ministre, ce dispositif ne suffira pas à restaurer la compétitivité du transport routier français ; il ne doit pas nous affranchir d'une double réflexion sur le cabotage, qui nuit à nos transporteurs, et surtout sur l'harmonisation des règles applicables en matière de fiscalité sur le carburant. Il est plus que temps de faire avancer le dossier du gazole professionnel au niveau européen.

Les disparités de taxation du gazole entre Etats membres génèrent actuellement d'insupportables distorsions de concurrence pour les transporteurs français. Ainsi, le montant des accises en France est de 41, 7 euros par hectolitre de gazole, contre 33, 9 euros en moyenne à l'échelle européenne. Il est ainsi supérieur de 36 % à celui du Luxembourg, de 29 % à celui de l'Espagne et de 18 % à celui de la Belgique.

Cette disposition du texte n'est donc, selon nous, qu'une première étape pour restaurer les marges des entreprises de transport routier et il serait dommage de s'arrêter en si bon chemin. Nous sommes persuadés qu'il y a urgence à intervenir pour ces entreprises.

Par ailleurs, nous sommes très favorables à la proposition du rapporteur d'intégrer les transporteurs fluviaux dans cette démarche.

S'agissant de l'agence française de sécurité ferroviaire, le groupe UC-UDF approuve la proposition du rapporteur de renoncer à la mise en place de cet établissement public, estimant qu'il est inutile d'encourager la multiplication des autorités administratives indépendantes, lorsqu'il s'agit d'exercer une prérogative essentielle de l'Etat, telle la sécurité.

Comme le préconise la commission, le groupe UC-UDF souhaite la création, au sein du ministère des transports, d'une direction spécifique chargée des missions que la directive européenne entend confier à l'autorité de sécurité, même si, pour ma part - et je tiens à le dire - j'étais favorable à la création de cette agence qui aurait été un outil plus souple et qui devait être installée à Amiens.

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