Le privé ne financera pas le fret ferroviaire et, sans volonté politique, le public ne le fera pas non plus !
Cette directive est, à juste titre, rejetée par les syndicats. Ces derniers constatent en effet que la libéralisation du fret n'a pas enlevé un seul camion sur les routes - argument pourtant souvent invoqué pour la justifier -, mais qu'elle a en revanche introduit le cannibalisme entre les entreprises ferroviaires.
L'ouverture à la concurrence, loin de développer le ferroviaire et de permettre un transfert de la route vers le rail, introduit un transfert entre les entreprises ferroviaires.
Tel est le constat que l'on peut faire en Allemagne au terme de plus de dix années de libéralisation. On peut également faire le même constat en France : Connex ne crée pas de nouveau trafic, mais prend celui de la SNCF grâce au dumping social !
Les chiffres d'Eurostat sont accablants. En Allemagne, en 1992, le fret ferroviaire représentait 22, 1 % du fret, ce qui est déjà peu ! Mais, en 2003, ce chiffre est tombé à 18, 6 % ! Dans le même temps, le transport routier a gagné six points, passant de 60, 6 % à 67, 8 % !
Le sous-investissement dans le rail au Royaume-Uni nous montre également que la concurrence n'est pas la solution. La seule solution, c'est l'investissement public !
Vous me rétorquerez sans doute que la question de la date - le 1er janvier ou le 31 mars - importe peu. C'est vrai ! En revanche, ce qui est en cause, c'est le fond d'une politique qui s'appelle « retour aux lois du marché ».
Vous me direz également que libéralisation ne signifie pas nécessairement privatisation - du moins pas encore, serais-je tenté d'ajouter. Toutefois, quelle est la différence entre les deux, lorsque la Commission européenne impose aux entreprises publiques de se comporter comme des entreprises privées ?
Dans cette logique, plus rien ne semble lié à l'Etat. Vous considérez même que la sécurité ferroviaire doit être confiée à une autorité indépendante, l'Agence française de sécurité ferroviaire.
Certes, il s'agit d'un établissement public administratif, mais pourquoi le soustraire à l'autorité de l'Etat ? La sécurité est pourtant au coeur de la mission de l'Etat - vous l'avez suffisamment martelé en 2002 ! Pourquoi, dès lors, s'en défausser sur une autorité indépendante, à l'abri du politique, un peu comme l'Union européenne se défausse de toute responsabilité monétaire sur la Banque centrale européenne, la BCE, faisant fi des attentes sociales des Européens ?
La directive européenne du 29 avril 2004 n'oblige pas du tout l'Etat à renoncer à ses missions ; elle impose simplement de créer une autorité de sécurité, laquelle pourrait très bien relever du ministère des transports.
Vous l'aurez compris, nous ne sommes pas favorables à la création de cette Agence. Toutefois, si elle devait effectivement être créée, les impératifs de sécurité exigeraient la présence au sein du conseil d'administration, outre celle de deux représentants du personnel de l'Agence, d'au moins un représentant des salariés du secteur ferroviaire - ils sont en effet les premiers concernés -, ainsi que de parlementaires, comme le proposait M. le rapporteur.