Pourquoi, monsieur le secrétaire d'État, une telle parcellisation des mesures ? Une grande loi d'orientation n'aurait-elle pas eu un impact autre ? Devons-nous devenir soupçonneux et imaginer que le Gouvernement souhaite ainsi mieux faire accepter, à tous, des mesures qui n'auront d'impacts positifs que pour certains ? Ou bien cette segmentation s'inscrit-elle dans un « plan média » permettant d'occuper ce terrain sur toute une session budgétaire ?
Notre sentiment aurait été tout autre si, dès la rentrée parlementaire, le Gouvernement nous avait annoncé un échéancier global de la politique qu'il entendait conduire dans ce domaine. Là, tout apparaît improvisé, les textes se bousculent, ils arrivent au coup par coup comme collant aux remous des déceptions qu'ils suscitent dans l'opinion publique.
Mais revenons au projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs.
Nous pensons que le dispositif envisagé repose sur une analyse erronée.
S'il est vrai - c'est ce qu'affirme l'INSEE - que le revenu réel des Français a augmenté de 2 % à 4 % par an depuis dix ans, ceux-ci ont le sentiment d'une baisse ou d'une stagnation de leur pouvoir d'achat.
Sans doute doivent-ils faire face à de nouvelles dépenses, mais surtout, les dépenses contraintes ont augmenté.
C'est pour ceux qui ont les salaires les plus bas et pour les classes moyennes que le poids de ces dépenses contraintes est le plus élevé : l'augmentation de l'énergie, des loyers, le coût des déplacements sont autant de dépenses incompressibles qui pèsent lourdement sur nos compatriotes. Et l'on apprend que les tarifs du gaz devraient encore augmenter, alors que l'entreprise rémunère confortablement ses actionnaires !
Dans quel contexte de prix nous situons-nous ?
Au mois d'octobre, on relève que, pour le dix-huitième mois consécutif, les prix des produits des grandes marques ont continué de baisser, alors que les prix des produits de consommation courante ont augmenté pour les marques de distributeurs et les « premiers prix ». Or ce sont eux qui pèsent le plus lourdement sur les ménages modestes.
Nous pensons que l'accroissement de la concurrence dans le secteur commercial n'aura probablement pas les effets escomptés sur les prix. Si, ces dernières années, la consommation a tiré notre croissance, force est de constater que ce moteur demeure fragile, d'autant plus qu'elle est artificiellement soutenue par un surendettement de certains ménages.
Enfin, faut-il encore souligner que, si nos ménages consomment, ce sont nos entreprises qui importent ? Qui nous dit que, dans un contexte d'accroissement de la concurrence, la grande distribution n'importera pas plus de produits des pays à bas coûts pour maintenir ses marges ?