Intervention de Bernard Dussaut

Réunion du 13 décembre 2007 à 9h30
Développement de la concurrence au service des consommateurs — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Bernard DussautBernard Dussaut :

Qui nous dit que la pression sur les fournisseurs ne sera pas encore accrue, impliquant un effet boomerang sur les coûts ?

Dans cette logique qui concentre le pouvoir d'achat dans la baisse des prix, on donne l'occasion formidable à la grande distribution de revendiquer une totale liberté d'action pour négocier ses tarifs auprès de ses fournisseurs.

Interrogé récemment dans la presse, le président de Système U présentait le constat et l'analyse suivants : « Au regard de ce qui s'est passé depuis la loi Dutreil de 1995, on voit bien que la baisse des prix tient plus aux promotions qu'aux articles dans les rayons. En d'autres termes, les distributeurs mettent en avant des produits d'appel qu'ils ajustent au seuil de revente à perte. » Il poursuit : « Les prix permanents vont augmenter et les prix en promotion vont baisser. »

La poussée des prix a finalement été assez limitée dans ce secteur de la distribution : ce n'est donc pas là que se situe entièrement le problème. En revanche, les revenus des Français ne progressent plus.

Si l'on ne fait pas le choix d'une augmentation des bas salaires et des minima sociaux, dont le niveau est très faible, l'impact sera nul. En France, la part des salariés à plein-temps payés au salaire minimum, le SMIC, en 2006 s'élève à 15 %, l'un des pourcentages les plus élevés en Europe.

Pourtant, encourager la valeur travail, chère à notre Président, c'est aussi assurer sa juste rémunération.

La démarche choisie par le Gouvernement est donc particulière : on n'augmente pas les salaires qui demeurent au niveau de l'inflation, mais on se place dans une logique consumériste. Pourtant, avant d'être consommateur, avant de dépenser, il faut avoir les revenus nécessaires.

À moins qu'il ne s'agisse d'une invitation du Gouvernement à inciter les Français qui en sont pourvus de se délester de leur épargne : monétisation des RTT et crédit épargne temps.

Le titre Ier du projet de loi s'attache aux relations commerciales.

Le commerce est, par essence, le domaine de la négociation entre un acheteur et un vendeur. À ce titre, rabais, ristournes - conditionnelles ou non -, remises, escomptes, délais de paiement y ont, de fait, toute leur place.

C'est ainsi que se sont constituées les marges arrière, avec une relative complicité du législateur, qui, les considérant comme incontournables, en quelque sorte constitutives de tout commerce, ne les a pas interdites, mais les a légalisées. Elles s'apparentent pourtant trop souvent, avec la coopération commerciale, à une forme de pression, parfois proche du racket.

À partir du moment où les marges arrière sont reconnues, il convient d'être très précis sur les contrats de coopération commerciale, que nous refusons de voir remplacés par de simples conventions.

Le contrat, et non une convention, doit permettre de connaître avec précision les services facturés par le distributeur et les ristournes obtenues : il revient à la grande distribution de prouver la réalité des services qu'elle se fait rémunérer et donc des marges de manoeuvre dont elle dispose pour diminuer les prix. Les conditions générales de vente doivent primer sur les conditions générales d'achat.

C'est pourquoi nous déposerons plusieurs amendements allant dans le sens d'un meilleur encadrement.

Maintenir et définir correctement le seuil de revente à perte, le SRP, est primordial et nous proposerons d'intégrer les charges afférentes au fonctionnement de l'établissement.

Il faut être d'autant plus vigilant que tous les fournisseurs ne disposent pas des mêmes moyens pour résister à la pression de la grande distribution : la négociation ne se fait pas dans les mêmes termes avec les multinationales de l'alimentaire et avec les PME.

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