Je crois pouvoir dire que le Sénat a imprimé sa marque dans la rédaction du texte qui nous est proposé, et je veux remercier toutes celles et tous ceux qui ont participé à ses délibérations et ont permis l'enrichissement du texte.
Qu'il me soit permis de formuler trois observations.
La première est relative à l'exonération des collectivités territoriales, qui, en application du bouclier fiscal, devaient à l'origine prendre leur part du remboursement. Cela pouvait se comprendre au moment du premier vote du texte ; convenons cependant qu'aujourd'hui, avec l'inclusion de la CRDS et de la CSG, la complexité est devenue telle qu'elle nous a conduits à l'opposé de ce principe de responsabilité qui voulait associer les élus territoriaux à la charge du bouclier fiscal. Il n'y a aucune corrélation entre le bouclier fiscal et la gestion municipale. Par conséquent, maintenir cette pénalité était une sorte d'offense aux collectivités territoriales.
Oserai-je rappeler que le bouclier fiscal a été très peu sollicité ? Vos services, madame la ministre, avaient évalué à environ 90 000 le nombre des foyers fiscaux qui pouvaient en bénéficier ; entre 2 000 et 2 500 demandes ont été formulées, toutes pour l'ISF, aucune au titre des impôts locaux. Peut-être une sorte d'inhibition a-t-elle conduit à ne pas en parler parce que les collectivités locales risquaient d'être sanctionnées ?
Je crois, madame, que la disparition de cette disposition permettra au Gouvernement d'être infiniment plus à l'aise pour communiquer sur le bouclier fiscal avec le plein soutien des élus territoriaux. C'est une bonne décision, et je veux saluer votre élégance, puisque, en dépit de vos réserves - car je vous sais attentive au déficit public -, vous avez bien voulu supprimer le gage. Soyez-en très sincèrement remerciée.
Ma deuxième observation porte sur la liquidation de l'impôt choisi. Les redevables de l'ISF vont pouvoir se libérer de leur impôt en souscrivant au capital de PME, et je remercie le Gouvernement d'avoir été attentif à nos arguments pour résister à la tentation d'intermédiation. Car celle-ci contribue à l'hyperfinanciarisation, et les actionnaires ignorent aujourd'hui ce que sont les entreprises dans lesquelles leur épargne est investie. Il est impératif de réconcilier les Français avec l'esprit d'entreprise. Une intermédiation systématique, en quelque sorte une gestion de l'épargne pour ceux qui se libèrent de leur ISF, eût été, me semble-t-il, une offense aux principes de la République. Vous n'avez d'ailleurs pas manqué, madame, de souligner le risque constitutionnel qu'aurait à coup sûr encouru le texte si nous l'avions adopté dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.
Avec vous, nous avons voulu redonner tout son sens à l'affectio societatis, et j'espère que les élus locaux, les chambres consulaires, les instituts de réflexion, le Centre des jeunes dirigeants d'entreprise, les jeunes chambres économiques, permettront à la France entière de connaître une immense mobilisation pour aider les redevables de l'ISF à sortir de la suspicion qui pèse sur eux. Qu'ils se fassent connaître désormais, puisqu'ils participeront au financement du développement local en souscrivant des parts et des actions dans des PME !
Je voudrais aussi vous remercier de votre pragmatisme, monsieur le haut-commissaire. Vous avez bien voulu rappeler que votre texte comporte quelques emprunts à des rapports sénatoriaux : c'est dire la grande complicité qui peut exister entre le Sénat et vous-même !
Je remercierai naturellement Hervé Novelli, qui a été à nos côtés à maintes reprises, physiquement ou par la pensée.
Enfin, nous serons amenés à revenir sur le bouclier fiscal. Le texte était en effet perfectible sur ce point. Mais, comme il n'aura aucune application en 2007, c'est lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2008 que nous pourrons revoir notre copie, en sachant que l'exercice sera rendu particulièrement compliqué par l'inclusion des prélèvements de CSG et de CRDS.
Prenons le cas d'un foyer fiscal dans lequel le mari est exploitant agricole. Il connaît une mauvaise année et constate des pertes. Son épouse, infirmière ou institutrice, perçoit un salaire qui reste en deçà de ce qui est imputable sur les pertes agricoles, si bien que le revenu du foyer est proche de zéro. Que fait-on avec la CSG et la CRDS qui, chaque mois, sont prélevées sur le salaire de l'intéressée ? Il nous faudra clarifier toutes les questions de ce type d'ici à l'examen du projet de loi de finances pour 2008.
Madame la ministre, ce texte, je l'espère, sera un outil puissant pour créer un choc de confiance et de croissance. Il m'arrive néanmoins de penser que nous n'avons peut-être pas suffisamment évoqué la mondialisation, ses défis et ses enjeux, et ce sera ma troisième observation.
J'écoutais notre collègue M. Bret à l'instant : on peut taxer le capital, on peut taxer le patrimoine, c'est vrai. Mais que faites-vous, mon cher collègue, lorsque les contribuables s'exilent ? Vous n'avez plus aucun moyen d'action ! À quoi sert-il d'afficher des impôts aussi élevés si, par ailleurs, la matière imposable vous échappe ? Il faudra bien que vous intégriez cette donnée, qui est devenue désormais totalement incontournable, dans vos engagements législatifs !
Au fond, deux dispositifs nous pénalisent économiquement, socialement, - et j'exprime là une conviction personnelle - ce sont les 35 heures et l'ISF.