Madame le secrétaire d’État, je veux attirer l’attention de M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration sur une question difficile, mais importante : la pérennisation de la Fondation pour les œuvres de l’islam de France.
Ce projet a vu le jour dès 1999, dans le but de permettre à nos concitoyens de confession musulmane de pratiquer leur culte à l’égal des personnes qui se réclament de l’une des trois autres religions traditionnelles.
Alors ministre de l’intérieur, je citais volontiers l’historien Maurice Agulhon : s’il y a place pour trois, il doit y avoir place pour quatre à la table de la République. J’ai lancé à cette époque une consultation, une istichara, qui a abouti à la création du Conseil français du culte musulman – le CFCM – par M. Nicolas Sarkozy, mon successeur au ministère de l’intérieur.
Le projet de fondation dans le but d’améliorer les conditions d’exercice du culte des musulmans français a été « institutionnalisé » au travers de la création, le 31 mai 2005, de la Fondation pour les œuvres de l’islam de France.
Cette institution est chargée de trois missions, dont la principale est la construction et la gestion des lieux de culte, en accord avec les maires des communes concernées, qui, souvent, mettent à disposition des terrains sous le régime de baux emphytéotiques.
Forte de sa reconnaissance en Conseil d’État, de la caution de l’administration par sa présence au sein du conseil d’administration, de l’engagement de la Caisse des dépôts et consignations, du dépôt d’une somme non négligeable - un million d’euros allouée en vue de son financement par une entreprise française ; d’autres entreprises opérant à l’étranger, notamment dans des pays musulmans, étaient également conviées à contribuer à son action –, forte donc de tous ces avantages tout à fait spécifiques auxquels venait s’ajouter l’accord, dans un premier temps, de toutes les parties musulmanes, cette fondation disposait initialement d’atouts considérables.
Que s’est-il passé ?
Des difficultés ont surgi – je ne l’ignore pas – au sein de son conseil d’administration et la collecte de fonds supplémentaires, par rapport à la dotation originelle de un million d’euros, s’est trouvée interrompue.
Ces dysfonctionnements tiennent d’abord à la composition du conseil d’administration, liée aux équilibres difficiles à trouver, au sein du CFCM, entre les trois fédérations principales de l’islam de France : l’Union des organisations islamiques de France – l’UOIF –, la Fédération nationale des musulmans de France – la FNMF – et la Fédération nationale de la Grande Mosquée de Paris – la FNGMP.
Chacune a effectivement son propre dispositif de financement et c’est là, madame le secrétaire d’État, la question qui se pose : va-t-on s’accommoder d’un système dans lequel chacun dispose de ses propres réseaux, de ses propres relais, de ses propres donateurs ?
Selon moi, il appartient à l’État républicain de faire en sorte que les financements que les uns et les autres peuvent obtenir, de l’Algérie, de l’Arabie Saoudite, du Maroc, de tel ou tel autre pays du Golfe, puissent transiter par le canal de la Fondation pour les œuvres de l’islam de France, de façon que l’argent collecté soit mis en commun.
C’est un test, madame le secrétaire d’État, pour ce que l’on appelle l’islam de France, et non pas l’islam en France !
L’islam de France ne peut se résumer à la juxtaposition de réseaux plus ou moins financés par des pays étrangers. L’État a son mot à dire sur cette question. J’ajoute que l’objectif doit rester de mettre à contribution les entreprises françaises.
Une politique cohérente doit donc être élaborée, tenant compte des besoins des musulmans de France et faisant naturellement une juste place aux différentes sensibilités de l’islam. Ils peuvent s’entendre ! Ce sont des hommes et, en plus, comme je leur ai déjà dit, ce sont des musulmans.
C’est à l’État de faire en sorte que ces équilibres puissent être trouvés et, s’il saisit l’opinion, il aura l’appui de la majorité des musulmans.
Je souhaite donc que vous m’indiquiez, madame le secrétaire d’État, les mesures que le Gouvernement compte mettre en œuvre pour assurer la pérennité de la Fondation pour les œuvres de l’islam de France.
Je vous demande aussi de m’indiquer le montant des fonds dont elle dispose actuellement à la Caisse des dépôts et consignations.