Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’un des objectifs affichés dans le cadre de la création du statut de l’auto-entrepreneur était la lutte contre le fléau du travail illégal.
Or les résultats sont contraires à ces annonces. Le régime des auto-entrepreneurs a cassé un système qui donnait satisfaction aux artisans comme aux clients. Ainsi, 80 000 artisans de ce pays, dont la seule ambition était de continuer à travailler dans leur secteur, avec la passion qu’on leur connaît, ont cessé leur activité.
Monsieur le ministre, vous dégradez les conditions d’exécution des chantiers en ne faisant pas respecter les mêmes règles selon que l’on est artisan ou auto-entrepreneur. Cette concurrence déloyale repose sur un régime fiscal et social préférentiel, une absence de contrôle des qualifications ainsi que des garanties réduites ou inexistantes pour les clients.
L’année dernière, en France, le nombre de procès-verbaux dressés pour travail illégal a bondi de 27 %. Une enquête menée par l’URSSAF de la Haute-Vienne chez les auto-entrepreneurs révèle que ce statut ne protège en rien contre de telles dérives. Près d’un dossier sur deux révèle des anomalies, dont plus de 12 % portent sur la dissimulation du chiffre d’affaires.
Le président de l’URSSAF de ce département va jusqu’à dire, dans un article paru en septembre dans la presse locale, que « ce nouveau statut ressemble fort à une légalisation du travail illégal et à la promotion de la concurrence déloyale ».
M. Novelli, alors secrétaire d’État, considérait qu’il avait dopé la création d’entreprises avec ce nouveau statut. Une telle affirmation ressemble fort à un mensonge par omission puisque, après sept années de hausse, l’INSEE nous a informés que le rythme des créations d’entreprises ne relevant pas du régime de l’auto-entreprise a ralenti de 21, 5 % entre 2008 et 2009. En région Centre, les créations d’entreprises employant des salariés ont chuté de près de 30 % entre 2009 et 2008. On est bien obligé de s’interroger !
Monsieur le ministre, les artisans que j’ai rencontrés sont très en colère. Ils ne comprennent pas que vous fassiez le choix de la dérégulation, alors qu’ils sont attachés au travail bien fait et fondé sur des règles qui privilégient l’intérêt de leurs clients.
En outre, 51 % des auto-entrepreneurs n’ont aucune activité et 15 % ont déclaré moins de 1 000 euros par an. Sans chiffre d’affaires et donc sans cotisation, aucun droit à une pension vieillesse ne pourra être ouvert. C’est inacceptable !
L’auto-entrepreneuriat est souvent une forme de salariat déguisé, puisque des entreprises vont jusqu’à faire démissionner des salariés pour les « recycler » dans ce nouveau statut. C’est une nouvelle catégorie de travailleurs « auto-exploités », sans garanties, sans droits et sans protection, qui a ainsi été créée, et qui tire vers le bas l’ensemble du secteur de la petite entreprise.
Les artisans, activités de services ou commerçants souffrent de la création du statut d’auto-entrepreneur.
Je vous demande, monsieur le ministre, quelles mesures le Gouvernement compte prendre afin de mettre sur un pied d’égalité artisans et auto-entrepreneurs, dans l’intérêt de chacun d’entre eux, en respectant les règles et les valeurs qui président à l’artisanat.