Il s'agit, j'en ai bien conscience, d'un amendement d'appel, qui vise à attirer l'attention sur un anachronisme de notre fiscalité, l'article 265 bis du code des douanes. Celui-ci institue une exonération de TIPP au bénéfice des produits pétroliers destinés à servir de carburéacteurs dans les aéronefs, c'est-à-dire, pour parler clairement, du kérosène utilisé pour le transport aérien.
Le conseil des impôts, dans son vingt-troisième rapport, consacré à la fiscalité de l'environnement, a mis en cause la légitimité de cette exonération. Il note, en effet, que les divers dégrèvements, partiels ou totaux, généralement anciens, accordés pour certaines utilisations des énergies fossiles n'ont aucune justification écologique, et il invite les pouvoirs publics à évaluer les conséquences de ces choix dommageables pour l'environnement. Il préconise de réexaminer d'un point de vue environnemental l'exonération totale de TIPP pour le transport aérien.
Par ailleurs, dans un contexte marqué par l'évolution erratique des recettes de TIPP, et, plus globalement, par les difficultés à réduire les déficits publics, il est nécessaire de souligner que cette exonération entraîne une perte de recettes pour l'État estimée à plus de 1, 3 milliard d'euros.
C'est pourquoi, en écho aux suggestions du rapport du conseil des impôts, le présent amendement tend à supprimer ce dispositif d'exonération.
Monsieur le ministre, vous savez très bien, pour avoir défendu dans le passé les habitants du nord de la Seine et Marne contre les nuisances aériennes de l'aéroport de Roissy, que les riverains se plaignent non seulement du bruit, mais aussi de la pollution suscitée par le kérosène. Vous n'ignorez pas qu'il s'agit véritablement d'un carburant polluant.
Vous me rétorquerez que cet amendement risque d'entraîner des distorsions de concurrence et un surcoût pour notre compagnie nationale et les transports aériens. Toutefois, quand nous examinerons, à l'occasion du collectif budgétaire, pour tenir un engagement du Président de la République, la création d'une taxe sur le prix des billets d'avion destinée à financer l'aide au développement, nous ne nous soucierons pas excessivement des répercussions sur le prix du billet d'avion et sur la consommation, me semble-t-il ! À ma connaissance d'ailleurs, seul le Chili a décidé de mettre en place une telle taxe, dont nous pouvons cependant approuver l'objectif, compte tenu de l'effort que nous devrions accomplir en faveur de l'aide au développement.
Il me semble que nous ne pourrons éviter de nous poser, un jour ou l'autre, la question du maintien de la fiscalité sur le kérosène, tout de même anachronique. Autant nous pouvions comprendre que, lorsqu'il fallait encourager l'aviation, mode de transport alors émergent, ce carburant était exempté de la fiscalité pétrolière, autant, aujourd'hui, nous ne le pouvons plus, compte tenu de la nécessité d'améliorer nos finances publiques mais aussi de lutter contre les pollutions environnementales.