Tout le monde est conscient du fait que le français est une langue, sinon menacée, du moins insuffisamment enseignée ou pratiquée dans le monde.
Son exclusion de facto des diverses organisations internationales - je pense notamment à l'Organisation des nations unies, à l'Organisation de coopération et de développement économiques, et même à l'Union européenne -, sans même évoquer les institutions sportives, au profit de la langue anglaise, est patente.
À l'inverse, les entreprises françaises ont su s'internationaliser et ont une présence très forte hors de France, sous la forme de filiales ou de succursales.
Il semble donc essentiel de faire progresser, par le biais de cette expansion économique internationale, l'enseignement et donc la pratique du français auprès des membres non francophones du personnel des entités étrangères de ces groupes.
Cela étant dit, les entreprises locales, établissements stables ou filiales, ne sont pas suffisamment motivées pour engager des frais à cet égard.
Cet amendement vise précisément à lever l'obstacle « fiscalo-financier ». Cela paraît constituer un préalable, afin de supprimer le prétexte du coût pour ne pas engager la dépense. Cette suppression doit, compte tenu des obstacles, être totale.
En autorisant une déduction, par des sociétés françaises, de dépenses faites hors de France au profit de collaborateurs d'entités non taxables en France, il est clair que l'on crée une exception aux principes fiscaux, notamment à celui de la territorialité.
Toute la question est donc de savoir si, comme nous le pensons, l'enjeu vaut cette exception. Notons, d'ores et déjà, que celle-ci est tout à fait spécifique et peu susceptible de créer un précédent contagieux pour d'autres dépenses.
Cela étant, il ne s'agit pas d'instituer un guichet ouvert, sans contrôle de pertinence ni limite budgétaire.
C'est pourquoi l'enseignement déductible doit répondre à des critères de qualité attestés par un agrément préalable, qui pourrait, sous le contrôle du ministère de l'éducation nationale et du ministère chargé de la francophonie, être délivré par les écoles françaises locales, les attachés culturels, voire le réseau de l'Alliance française.
En outre, les frais ne doivent être déductibles fiscalement que dans certaines limites. C'est pourquoi cet amendement tend à créer un plafond annuel pour les dépenses d'enseignement par personne et un nombre maximum de bénéficiaires par entité. Les chiffres retenus paraissent très raisonnables : 1 500 euros par personne pour un nombre de bénéficiaires au plus égal à 2 % du total de l'effectif de l'entité, et ce dans la limite de cent personnes par entité.
De ce point de vue, il est clair que la population effectivement ciblée est prioritairement celle des cadres locaux.
Enfin, la couverture du coût n'est pas tout à fait totale, puisque le crédit d'impôt est de 90 % des frais. Il reste donc un coût résiduel. Dès lors, la question se pose de savoir si l'on doit en rester là ou aller plus loin. Un coût modeste effectif peut paraître sain et souhaitable ; il ne faudrait pas qu'il détourne les entreprises du dispositif.
En effet, tout le pari de réussite de cette opération réside dans l'espoir que, grâce à la prise en charge des frais - ou de l'essentiel de ceux-ci -, il sera difficile pour les entreprises de refuser de proposer ce type d'enseignement. Le dispositif retenu permettra d'en faire la promotion et, le cas échéant, de procéder sans hésitation à des « piqûres de rappel » auprès de ces entreprises.
La dépense fiscale devrait donc, en définitive, être modérée. En effet, si 5 000 personnes suivaient un enseignement de français, le coût fiscal n'atteindrait que 6 750 000 euros.