Insinuer que la vidéosurveillance est protectrice revient à dire – si vous permettez que nous nous amusions, nous aussi, à jouer avec les mots – qu’elle interviendrait en amont, ce qui est proprement absurde, d’autant que l’expérience nous prouve exactement le contraire.
Par exemple, quand, l’été dernier, M. Xavier Bertrand nous avait présenté les caméras comme la solution miracle aux problèmes de la violence à l’école, il avait omis de préciser que les trois agressions d’élèves qu’il s’empressait de commenter avaient eu lieu dans des lycées du Val-de-Marne équipés de caméras !
Le fait qu’une infraction soit filmée n’empêche pas qu’elle ait lieu et nous pensons – l’expérience le prouve – que la vidéosurveillance ne fait que déplacer la délinquance.
La vidéosurveillance intervient, en effet, la plupart du temps a posteriori, une fois que les infractions sont commises, pour en éclairer le déroulement ou, éventuellement, comme cela s’est passé après le drame qui a eu lieu dans le métro en décembre dernier, pour permettre l’identification des auteurs. Il n’en demeure pas moins que la dame est morte.
Outre son inefficacité, la vidéosurveillance a un coût. Vous qui aimez tant les chiffres, ce qui suit devrait vous plaire !
La chambre régionale des comptes de la région Rhône-Alpes, autorité indépendante, a récemment révélé l’impact négligeable sur la sécurité publique des caméras de vidéosurveillance installées dans les villes de Lyon et Saint-Etienne. À Saint-Etienne, la mairie investit depuis 2001 de 1, 3 million à 1, 5 million d’euros par an dans la vidéosurveillance. Celle-ci, est-il estimé, permet de repérer entre 1 % et 2 % des crimes et des délits commis dans la commune et poursuivis par la police. Reste à noter que Saint-Etienne est classée au 143e rang des circonscriptions les moins sûres de France…
Depuis 2003, alors que Lyon dépense annuellement entre 2, 7 millions et 3 millions d’euros dans ces équipements, elle voit la délinquance sur la voie publique baisser beaucoup moins rapidement que dans la ville contiguë de Villeurbanne, qui refuse la vidéosurveillance et enregistre une diminution de 48 % alors qu’elle n’est que de 33 % à Lyon. La chambre régionale des comptes conclut qu’« on peut observer que l’outil est suffisamment coûteux pour qu’une évaluation globale de son intérêt soit entreprise ».
Ces exemples montrent, me semble-t-il, l’incurie que dissimule mal votre discours et qui est un témoignage supplémentaire du mépris affiché à l’égard de la sécurité de nos concitoyens et de leurs droits et libertés fondamentales.