La séance est ouverte à quatorze heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation du sénateur appelé à siéger au sein du conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine, en remplacement de M. Jean-Claude Etienne.
La commission des affaires sociales a fait connaître qu’elle propose la candidature de M. Jean-Louis Lorrain pour siéger, en qualité de membre titulaire, au sein de cet organisme extraparlementaire.
Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l’article 9 du règlement, s’il n’y a pas d’opposition à l’expiration du délai d’une heure.
J’informe le Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation des deux sénateurs appelés à siéger au sein de la commission de suivi des conséquences des essais nucléaires créée en application de l’article 7 de la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français.
Conformément à l’article 9 du règlement, j’invite la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et la commission des affaires sociales à présenter chacune une candidature.
Les nominations au sein de cet organisme extraparlementaire auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.
(Texte de la commission)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion en deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (projet n° 195, texte de la commission n° 215, rapport n° 214).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre III, à l’article 9 bis.
Chapitre III
Utilisation des nouvelles technologies
Section 1
Identification d’une personne par ses empreintes génétiques
(Non modifié)
Il est créé un fonds de soutien à la police technique et scientifique chargé de contribuer au financement, dans la limite de ses ressources, de l’ensemble des opérations liées à l’alimentation et à l’utilisation du fichier automatisé des empreintes digitales et du fichier national automatisé des empreintes génétiques dans les enquêtes de flagrance, les enquêtes préliminaires ou les enquêtes sur commission rogatoire visant à rechercher les auteurs des infractions définies au 6° de l’article 311-4 et au 3° de l’article 311-5 du code pénal.
Ce fonds est alimenté par un versement dont le montant est déterminé par convention en fonction de la valeur des biens restitués à l’assureur ayant indemnisé le vol desdits biens.
Les modalités de gestion du fonds sont fixées par un décret en Conseil d’État.
L’amendement n° 53 rectifié, présenté par Mme Procaccia, MM. Cambon et J. Gautier, Mmes Bout et Henneron, MM. Vial et Laménie et Mmes Malovry et Rozier, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
L’article 9 bis concerne la police technique et scientifique, dont l’efficacité est unanimement reconnue, et vise à créer un fonds de soutien.
La police technique et scientifique est certes devenue un instrument indispensable à l’élucidation des actes de délinquance, qu’ils concernent les personnes ou les biens. Cependant, une convention passée entre l’État et les assureurs concernant les véhicules volés existe déjà et permet à la police d’agir avec une plus grande efficacité. Les auteurs de cet amendement s’étonnent donc qu’une procédure similaire n’ait pas été suivie dans le cas présent, avec la négociation d’une convention nationale liant les assureurs à l’État et visant à améliorer le taux d’élucidation des cambriolages et à définir les modalités de restitution des biens ainsi retrouvés.
Je crois savoir que M. le ministre de l’intérieur a établi un calendrier de réunions de travail avec les assureurs. Le vote de cet article risquerait donc de s’avérer contre-productif, car il pourrait remettre en cause l’aboutissement de cette négociation, alors qu’il semble – M. le ministre nous le confirmera – que les discussions sont bien engagées.
Je tiens à préciser que les assureurs ont déjà exprimé leur accord pour participer au financement de la police technique et scientifique, mais ce serait une « première » d’intégrer dans une loi le principe de la participation d’acteurs privés au financement d’une fonction régalienne de l’État.
Le présent amendement tend à supprimer l’article 9 bis créant un fonds de soutien à la police technique et scientifique alimenté en partie par les assureurs, au motif que ceux-ci sont déjà entrés dans un processus de négociation avec le ministère de l’intérieur et qu’une disposition législative est donc inutile.
Toutefois, l’adoption de cet amendement, ma chère collègue, nous ferait perdre le bénéfice de la création d’un fonds spécifique, qui ne peut être décidée que par la loi. Je vous rappelle également que cette création résulte d’une initiative du Sénat, confirmée par l’Assemblée nationale. C’est la raison pour laquelle la commission des lois vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
Je souscris à l’avis émis par la commission des lois. En effet, il ne me paraît pas opportun de supprimer cet article au moment précis où s’exprime la nécessité d’une mobilisation de tous les moyens en faveur de la police technique et scientifique. Bien que je comprenne les motivations des auteurs de cet amendement, j’émets un avis défavorable, à moins que l’amendement ne soit retiré.
Non, je le retire, madame la présidente.
J’espère simplement, monsieur le ministre, que les responsables de la gestion de ce fonds veilleront à ce que les contributions des assureurs soient bien affectées à la police technique et scientifique et, en tout cas, aux actes que l’on demande aux assurés – c’est-à-dire, à nous ! – de financer.
Je regrette de devoir toujours formuler les mêmes observations lors de la discussion de divers projets de loi, qu’il s’agisse de la réforme des retraites, des lois de finances ou, aujourd’hui, de la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure : nous adoptons régulièrement des amendements mettant à contribution les assureurs. Or qui paie les assureurs ? Nous !
Nous nous étonnons tous de voir augmenter nos cotisations d’assurances de 8, 5 % au début de cette année, sans compter les assurances complémentaires maladie. Une nouvelle fois, par cet article, sont créées des dépenses que nous allons devoir supporter en tant qu’assurés.
L’amendement n° 53 rectifié est retiré.
L’amendement n° 12, présenté par M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa est ainsi rédigé :
Ce fonds ne compense pas les engagements en loi de finances des moyens consacrés chaque année par l’État au service de la police technique et scientifique.
La parole est à M. Alain Anziani.
La création de ce fonds nous paraît une idée intéressante, à condition d’en évaluer les conséquences et, si j’ose dire, les effets pervers, toujours possibles… Je salue d’ailleurs les propos de Mme Procaccia : en effet, ce sont les assurés, et non les assureurs, qui supporteront in fine ce financement ! Nous devons donc rappeler clairement que cette charge supplémentaire va peser sur les assurés, qu’ils soient contribuables ou non. Cette inquiétude est donc légitime.
Je voudrais également me faire le porte-parole du Syndicat national des personnels de police scientifique qui a exprimé une autre inquiétude : en effet, il ne faudrait pas que la création de ce fonds serve à justifier, dans un avenir plus ou moins proche, la réduction des crédits affectés à la police technique et scientifique, mais M. le ministre nous rassurera peut-être sur ce point. Si la création de ce fonds devait se résumer à un « mouvement de bascule », les sommes recouvrées auprès des assureurs étant déduites des crédits budgétaires, personne n’y gagnerait rien, et nous y perdrions sans doute même beaucoup ! Nous souhaiterions donc que M. le ministre prenne un engagement en ce sens.
Nous voulons même aller plus loin et inscrire dans la loi que la création de ce fonds ne saurait compenser un désengagement de l’État. Nous devrions être tous d’accord pour voter cet amendement, puisque personne parmi nous ne souhaite un désengagement financier de l’État en matière de sécurité. La situation mérite en tout cas d’être clarifiée.
Cet amendement tend à préciser que la dotation du fonds créé par l’article 9 bis pour soutenir la police technique et scientifique n’est pas compensée par une baisse équivalente des crédits inscrits dans la loi de finances.
Cette mention est dépourvue de portée normative, mon cher collègue : elle ne pourrait, en tout état de cause, lier le Gouvernement et le législateur en matière de loi de finances. J’ajoute que ce fonds a vocation à s’ajouter aux crédits budgétaires existants. L’avis de la commission est donc défavorable.
Monsieur Anziani, ce fonds n’est pas un faux nez destiné à masquer le désengagement de l’État, il n’y a aucune ambiguïté sur ce point ! Ce fonds doit jouer un rôle additionnel, comme vient de le rappeler M. le rapporteur. Je vous remercie cependant de m’avoir donné l’occasion de dissiper une inquiétude sur ce point, monsieur le sénateur.
Au total, près de 16 millions d’euros ont été affectés à la modernisation de la police technique et scientifique et à celle des grands fichiers d’identification. J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n’est pas adopté.
L’article 9 bis est adopté.
Section 2
Fichiers de police judiciaire
Section 3
Recueil des images numérisées pour l’établissement des titres sécurisés
(Non modifié)
Le II de l’article 104 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008est ainsi rédigé :
« II. – La mission confiée au maire de réception et de saisie des demandes de passeport ne comporte le recueil de la photographie du visage du demandeur que pour les communes équipées à cette fin à la date du 1er janvier 2011 et pour une période définie par décret.
« Sans préjudice de l’alinéa précédent, les photographies destinées à la réalisation des passeports, cartes nationales d’identité et autres titres sécurisés sont, à compter de la promulgation de la loi n° … du … d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, réalisées par un professionnel de la photographie dans des conditions fixées par voie réglementaire. »
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1 rectifié bis, présenté par MM. Houel, Lefèvre, Billard, Leclerc, Gilles, Leroy et Trillard, Mme Henneron, MM. du Luart, Fouché et Doublet, Mme Des Esgaulx et MM. Milon, Leleux, Mayet, Couderc, Ferrand, Revet, Bécot, B. Fournier, Beaumont, J.P. Fournier, Gouteyron et Cléach, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Le maire peut cependant décider de ne pas procéder au recueil numérisé du visage du demandeur. Celui-ci doit alors fournir deux photographies d’identité au format 35x45 mm identiques, récentes et parfaitement ressemblantes, le représentant de face et tête nue et conformes à un modèle-type fixé par arrêté du ministre de l’intérieur.
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
À l’occasion de la première lecture du projet de loi au Sénat, un article 12 A avait été adopté, sur l’initiative de notre collègue Michel Houel, visant à préciser que les photographies d’identité nécessaires à l’établissement de l’ensemble des titres d’identité seraient réalisées par un professionnel de la photographie et non directement en mairie.
L’article 104 de la loi n° 2008–1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 avait déjà introduit la faculté pour le maire de renoncer au recueil de l’image numérisée du visage en mairie pour l’établissement de passeports biométriques.
En première lecture, le Sénat a décidé d’aller encore plus loin en interdisant le recueil de la photographie du demandeur en mairie, non seulement pour le passeport, mais également pour la carte nationale d’identité et pour le permis de conduire. L’article instituait ensuite pour cette mission le recours à des professionnels de la photographie.
L’article 12 A, tel qu’adopté en deuxième lecture par l’Assemblée nationale en décembre 2010, a modifié le dispositif et permet, d’une part, d’introduire un calendrier de retrait des appareils photos des mairies dans toute la France – défini par voie réglementaire – et, d’autre part, de « sanctuariser » le principe selon lequel les passeports et les autres titres sécurisés à venir ne pourront plus faire l’objet de prise de vue en mairie.
Cependant, jusqu’à la publication du décret qui généralisera le retrait des appareils photos, il paraît légitime et cohérent de rappeler le droit du maire à pouvoir encore renoncer à la prise de vue en mairie, dans les termes qui avaient été introduits en 2008.
L’amendement n° 13 rectifié, présenté par Mme M. André, M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mme Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
« Nonobstant, dans le cadre de sa mission de réception et de saisie des demandes de passeport, le maire peut décider de ne pas procéder au recueil de l’image numérisée du visage du demandeur. Dans ce cas le demandeur doit fournir deux photographies d’identité de format 35x45 mm identiques, récentes et parfaitement ressemblantes, le représentant de face et tête nue, et conformes à un modèle-type fixé par arrêté du ministre de l’intérieur.
La parole est à Mme Michèle André.
Afin de ne pas être accusée d’usurpation d’identité politique, je tiens tout d’abord à préciser que je suis toujours socialiste, puisque le dérouleur de séance m’attribue une autre étiquette, au demeurant fort sympathique ! Je présente donc cet amendement en tant que membre du groupe socialiste…
Sourires.
Plus sérieusement, cet amendement a le même objet que l’amendement déposé par M. Michel Houel et défendu par M. Antoine Lefèvre.
Je voudrais, à ce sujet, faire un bref rappel. Du fait de ma qualité de rapporteur spécial de la commission des finances sur la mission « Administration générale et territoriale de l’État » – la mission AGTE –, je suis à l’origine, avec le rapporteur général Philippe Marini, de l’article 104 de la loi du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008, qui avait instauré une possibilité de choix quant au recueil des photos d’identité en mairie.
Cette idée a cheminé, tant à l’Assemblée nationale qu’ici, au Sénat, mais je tiens à préciser que, sur les 2 000 mairies ayant accepté de s’équiper d’une station pour l’établissement de passeports biométriques, beaucoup ont choisi de ne pas activer l’appareil photographique. Elles souhaitaient ainsi préserver l’activité des professionnels de la photographie, à laquelle beaucoup d’entre nous sont attachés.
Il est sans doute utile, aujourd’hui, de sécuriser le dispositif pendant la période qui sera nécessaire à l’établissement du décret par vos services, monsieur le ministre. À cet égard, je voudrais saluer la qualité de la relation que j’ai établie avec votre secrétaire général et toute son équipe sur le sujet.
Donc, je sais que le dossier progresse, au bénéfice de tous nos concitoyens, y compris s’agissant de la dématérialisation du transfert des photographies vers l’Agence nationale des titres sécurisés – l’ANTS –, procédé qui sécurise complètement le processus d’établissement des passeports et pourra être appliqué ultérieurement à l’établissement des cartes d’identité.
Voilà pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à adopter cet amendement, qui me paraît correspondre à l’intérêt de tous.
Ces deux amendements ont pour objet de modifier à nouveau le dispositif relatif au recueil de la photographie des demandeurs de passeport dans les mairies.
La combinaison de l’article L. 1611-2-1 du code général des collectivités territoriales et des dispositions du décret du 30 décembre 2005 relatif aux passeports, qui prévoyaient le recueil de l’image numérisée du visage en mairie, avait entraîné une forte inquiétude chez les photographes professionnels.
Pour répondre à cette inquiétude, l’article 104 de la loi du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 avait introduit la faculté pour le maire de renoncer au recueil de l’image numérisée du visage en mairie pour l’établissement de passeports biométriques.
L’article 12 A du présent projet de loi, introduit par le Sénat en première lecture, sur l’initiative de notre collègue Michel Houel, contre l’avis du Gouvernement et de notre commission des lois, allait plus loin en interdisant le recueil de la photographie du demandeur en mairie non seulement pour le passeport, mais également pour la carte nationale d’identité et pour le permis de conduire. L’article instituait ensuite un monopole de cette mission au bénéfice de photographes professionnels agréés par l’État.
L’Assemblée nationale a adopté une position intermédiaire : les mairies déjà équipées au 1er janvier 2011 du matériel nécessaire, soit environ 2 000 mairies, continueront à réaliser les photographies pour une période qui sera définie par un décret. Dans les autres communes, les photographies seront réalisées par des photographes professionnels.
Les amendements que nous examinons visent à permettre aux maires, même dans les communes déjà équipées, de renoncer à la réalisation en mairie des photographies nécessaires à l’établissement du passeport, au profit des photographes professionnels.
Sur cette question délicate, il me semble préférable d’en rester à l’équilibre trouvé à l’Assemblée nationale, étant précisé que, si une mairie ne souhaite pas continuer à utiliser son appareil de photographie, il suffit qu’elle le débranche.
L’avis est donc défavorable sur ces deux amendements.
Ce sujet majeur a de toute évidence beaucoup passionné et mobilisé, bien qu’il soit un peu en marge du projet de loi. Je pense – je le dis tout particulièrement à l’attention de Mme Michèle André – que nous sommes parvenus à l’Assemblée nationale, après une très longue discussion, à un compromis relativement équilibré.
Cela étant dit, j’entends les arguments développés au nom de M. Michel Houel, ainsi que ceux qui ont été exprimés par Mme Michèle André et je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
Je comprends mal la position de M. le rapporteur.
En l’état actuel, le projet de loi renvoie cette question aux calendes grecques, c’est-à-dire à la publication d’un décret dont nous ignorons et la date et les circonstances. Or le problème se pose dès maintenant.
Il est tout de même plus simple, plutôt que de laisser le sujet dans les limbes, de revenir sur terre et, conformément à notre vocation de législateur, de préciser les choses. Que va-t-il se passer pendant cette période d’attente ? C’est à nous de le décider !
J’entends M. le rapporteur nous expliquer que le problème est simple : dans l’attente du décret, il suffira de débrancher la machine.
Franchement, mes chers collègues, on ne va pas commencer à « bidouiller » et à créer des courts-circuits dans les mairies. Il vaut mieux que nous prenions nos responsabilités et que nous donnions aux maires le pouvoir d’apprécier si, oui ou non, les photographies doivent être prises en mairie.
J’avoue que je ne comprends pas ces amendements.
J’évoquais tout à l’heure la situation des assurés… Interrogeons-nous sur celle des citoyens ! On est tout de même content quand on peut faire faire sa photographie d’identité dans le même temps que l’on dépose sa demande de passeport ou de carte d’identité, sans devoir se rendre chez un photographe, et ce sans compter qu’il n’y a pas forcément de photographes dans toutes les communes.
Je ne comprends absolument pas que, dans une commune acceptant de délivrer ce service, on puisse contraindre les personnes à se rendre dans une autre commune pour réaliser leurs photographies d’identité.
Je ne comprends pas non plus le lobbying qui peut être fait à ce sujet. Une pièce d’identité est valable dix ans : ce n’est pas avec cela que se construit le fonds de commerce des photographes !
Je voterai donc résolument contre ces deux amendements.
On peut effectivement chercher à savoir quel est le meilleur système… Mais, pour faire des photographies, le meilleur système reste le recours aux professionnels de la photographie !
Environ 1 000 mairies, sur les 2 000 qui sont pourvues de stations permettant l’établissement de passeports biométriques, ont choisi de jouer leur rôle et, me semble-t-il, elles l’ont fait en toute connaissance de cause. Ainsi, dans mon département, pratiquement toutes les mairies ont laissé les photographes travailler. Cela ne pose aucun problème particulier.
Si, comme je le crois possible, nous pouvons en outre mettre en œuvre, avec les services du ministère de l’intérieur qui travaillent sur le sujet, un système de dématérialisation de ces clichés – ils seraient directement transférer à l’ANTS qui les joindrait au document CERFA recueilli en mairie –, nous obtiendrons un dispositif parfaitement sécurisé et répondant au souhait de beaucoup d’entre nous de pouvoir choisir librement d’aller ou de ne pas aller chez le photographe.
L'amendement est adopté.
L'article 12 A est adopté.
Section 4
Vidéoprotection
L'amendement n° 81, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi l'intitulé de cette division :
Vidéosurveillance
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Avec l’examen de cette section 4 du projet de loi, nous abordons un sujet qui fait couler beaucoup d’encre, car il interpelle, voire préoccupe un grand nombre de nos concitoyens.
Il s’agit de la « vidéosurveillance », puisque je me plais à continuer de l’appeler ainsi.
Par cet amendement, nous demandons tout simplement au Gouvernement de cesser d’user d’arguments tendant à faire croire à l’ensemble de nos concitoyens que le simple fait d’installer des caméras les protégerait contre l’insécurité.
On peut dire ce que l’on veut, c’est un glissement sémantique qui a pour unique vocation de rassurer et de justifier l’installation de procédés onéreux pour les finances publiques et, par ailleurs, très juteux pour un certain nombre d’entreprises privées.
Il s’agit là d’entretenir ce que j’appellerai une mystification, selon laquelle l’installation de caméras dans l’ensemble de l’espace public protégerait nos concitoyens de tout risque d’agression, minime ou grave.
Cette manœuvre, ou toute autre opération de communication, pourrait faire sourire tant est dérisoire la tentative de jouer encore une fois avec la sémantique afin d’ancrer dans les esprits le bien-fondé de la vidéosurveillance, tout comme, d’ailleurs, certains sondages sur la question ont été instrumentalisés.
À plusieurs reprises, on nous a rétorqué que l’opinion était largement favorable à la vidéosurveillance, en appuyant cette affirmation sur des sondages.
Il est vrai que des études ont montré que 50 % de la population se disait favorable à ces dispositifs et 21% très favorable. Mais il faut tout dire ! Dans le même temps, 15 % des personnes consultées estiment que les caméras sont trop nombreuses et 33 % qu’elles sont en nombre suffisant.
Les populations ne sont donc pas favorables à une surveillance généralisée – entendons-nous bien sur le terme, car il est important.
Expliquez-leur donc, monsieur le ministre, ce que cela coûtera à l’État ! Faites-leur part des frais engendrés par ces installations pour un taux d’élucidation, nous le savons, relativement dérisoire ! Vous verrez alors peut-être que les Français sont bien moins enclins à croire à la prétendue protection apportée par ces caméras, que vous ne cessez de mettre en avant.
Nous vous invitons donc, avec cet amendement, à assumer votre propre projet de société auquel, bien évidemment, nous n’adhérons pas.
Cet amendement a pour objet de revenir au terme « vidéosurveillance » pour l’intitulé de cette section. Ce débat a déjà été tranché en première lecture, le terme « vidéoprotection » exprimant mieux les attentes de nos concitoyens à propos de cette technologie. L’avis est défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L’article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité est ainsi modifié :
1° Les deux premiers alinéas du II sont remplacés par onze alinéas ainsi rédigés :
« La transmission et l’enregistrement d’images prises sur la voie publique par le moyen de la vidéoprotection peuvent être mis en œuvre par les autorités publiques compétentes aux fins d’assurer :
« 1° La protection des bâtiments et installations publics et de leurs abords ;
« 2° La sauvegarde des installations utiles à la défense nationale ;
« 3° La régulation des flux de transport ;
« 4° La constatation des infractions aux règles de la circulation ;
« 5° La prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans des lieux particulièrement exposés à des risques d’agression, de vol ou de trafic de stupéfiants, ainsi que la prévention, dans des zones particulièrement exposées à ces infractions, des fraudes douanières prévues par le second alinéa de l’article 414 du code des douanes et des délits prévus à l’article 415 du même code portant sur des fonds provenant de ces mêmes infractions ;
« 6° La prévention d’actes de terrorisme ;
« 7° La prévention des risques naturels ou technologiques ;
« 8° Le secours aux personnes et la défense contre l’incendie ;
« 9° La sécurité des installations accueillant du public dans les parcs d’attraction.
« Après information du maire de la commune concernée, les autres personnes morales peuvent mettre en œuvre sur la voie publique un système de vidéoprotection aux fins d’assurer la protection des abords de leurs bâtiments et installations, dans les lieux susceptibles d’être exposés à des actes de terrorisme ou particulièrement exposés à des risques d’agression ou de vol. » ;
2° Le III est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Lorsque le système comporte des caméras installées sur le territoire de plusieurs départements, l’autorisation est délivrée par le représentant de l’État dans le département dans lequel est situé le siège social du demandeur et, lorsque ce siège est situé à Paris, par le préfet de police, après avis de la commission départementale de vidéoprotection compétente. Les représentants de l’État dans les départements dans lesquels des caméras sont installées en sont informés. » ;
b) Au deuxième alinéa, après le mot : « images », sont insérés les mots : « et enregistrements » et il est ajouté une phrase ainsi rédigée :
« Le visionnage des images peut être assuré par les agents de l’autorité publique ou les salariés de la personne morale titulaire de l’autorisation ou par ceux des opérateurs publics ou privés agissant pour leur compte en vertu d’une convention. » ;
c) Après le même deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu’une autorité publique ou une personne morale n’exploite pas elle-même son système de vidéoprotection de voie publique, la convention qu’elle passe avec un opérateur public ou privé est agréée par le représentant de l’État dans le département et, à Paris, par le préfet de police, après information du maire de la commune concernée, et conforme à une convention type fixée par voie réglementaire après avis de la commission nationale prévue à l’article 10-2. Par ailleurs, les salariés de l’opérateur privé chargés de l’exploitation du système sont soumis aux dispositions du titre Ier de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 réglementant les activités privées de sécurité, à l’exception de ses articles 3 à 3-2 et 10, et sont tenus au secret professionnel.
« Lorsqu’une autorité publique n’exploite pas elle-même le système, les salariés de la personne privée qui y procèdent sous son contrôle et pour son compte ne peuvent pas avoir accès aux enregistrements des images prises sur la voie publique. » ;
d) Aux première et troisième phrases du troisième alinéa, après le mot : « nationales », sont insérés les mots : « ainsi que des douanes et des services d’incendie et de secours » ;
e) Au quatrième alinéa, après les mots : « arrêté ministériel », sont insérés les mots : « après avis de la Commission nationale de la vidéoprotection » ;
f) Après le même quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Seuls sont autorisés par la Commission nationale de l’informatique et des libertés en application de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée les systèmes, installés sur la voie publique ou dans des lieux ouverts au public dont les enregistrements sont utilisés dans des traitements automatisés ou contenus dans des fichiers structurés selon des critères permettant d’identifier, directement ou indirectement, des personnes physiques. » ;
g) L’avant-dernier alinéa est remplacé par huit alinéas ainsi rédigés :
« La commission départementale prévue au premier alinéa du présent III peut à tout moment exercer, sauf en matière de défense nationale, un contrôle sur les conditions de fonctionnement des systèmes de vidéoprotection répondant aux conditions fixées au II. Elle émet, le cas échéant, des recommandations et propose la suspension ou la suppression des dispositifs non autorisés, non conformes à leur autorisation ou dont il est fait un usage anormal. Elle informe le maire de la commune concernée de cette proposition.
« La Commission nationale de l’informatique et des libertés peut, sur demande de la commission départementale prévue au premier alinéa du présent III, du responsable d’un système ou de sa propre initiative, exercer un contrôle visant à s’assurer que le système est utilisé conformément à son autorisation et, selon le régime juridique dont le système relève, aux dispositions de la présente loi ou à celles de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée. Lorsque la Commission nationale de l’informatique et des libertés constate un manquement aux dispositions de la présente loi, elle peut mettre en demeure le responsable d’un système de le faire cesser dans un délai qu’elle fixe et qui ne peut excéder trois mois. Si le responsable ne se conforme pas aux termes de la mise en demeure, elle peut prononcer un avertissement public à son égard. Si ces mesures ne permettent pas de faire cesser le manquement constaté, la Commission nationale de l’informatique et des libertés peut demander au représentant de l’État dans le département et, à Paris, au préfet de police, d’ordonner la suspension ou la suppression du système de vidéoprotection. Elle informe le maire de la commune concernée de cette demande.
« Les membres de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, les agents de ses services habilités dans les conditions définies au dernier alinéa de l’article 19 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 précitée ainsi que les membres des commissions départementales de vidéoprotection ont accès de six heures à vingt et une heures, pour l’exercice de leurs missions, aux lieux, locaux, enceintes, installations ou établissements servant à la mise en œuvre d’un système de vidéoprotection, à l’exclusion des parties de ceux-ci affectées au domicile privé. Le procureur de la République territorialement compétent en est préalablement informé.
« En cas d’opposition du responsable des lieux, la visite ne peut se dérouler qu’avec l’autorisation du président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les locaux à visiter ou du juge délégué par lui. Ce magistrat est saisi à la requête du président de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ou du président de la commission départementale de vidéoprotection. Il statue par une ordonnance motivée, conformément aux articles 493 à 498 du code de procédure civile. La procédure est sans représentation obligatoire. La visite s’effectue sous l’autorité et le contrôle du juge qui l’a autorisée. Celui-ci peut se rendre dans les locaux durant l’intervention. À tout moment, il peut décider l’arrêt ou la suspension de la visite.
« Les personnes mentionnées au onzième alinéa du présent III peuvent demander communication de tous documents nécessaires à l’accomplissement de leur mission, quel qu’en soit le support, et en prendre copie ; elles peuvent recueillir, sur place ou sur convocation, tout renseignement et toute justification utiles ; elles peuvent accéder aux programmes informatiques et aux données, ainsi qu’en demander la transcription par tout traitement approprié dans des documents directement utilisables pour les besoins du contrôle.
« Elles peuvent, à la demande du président de la commission, être assistées par des experts désignés par l’autorité dont ceux-ci dépendent.
« Il est dressé contradictoirement procès-verbal des vérifications et visites menées en application du présent article.
« À la demande de la commission départementale prévue au premier alinéa du présent III, de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ou de sa propre initiative, le représentant de l’État dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent fermer pour une durée de trois mois, après mise en demeure non suivie d’effets dans le délai qu’elle fixe, un établissement ouvert au public dans lequel est maintenu un système de vidéoprotection sans autorisation. Lorsque, à l’issue du délai de trois mois, l’établissement n’a pas sollicité la régularisation de son système, l’autorité administrative peut lui enjoindre de démonter ledit système. S’il n’est pas donné suite à cette injonction, une nouvelle mesure de fermeture de trois mois peut être prononcée. » ;
h) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Les autorisations mentionnées au présent III et délivrées avant le 1er janvier 2000 expirent le 24 janvier 2012. Celles délivrées entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2002 expirent le 24 janvier 2013. Celles délivrées entre le 1er janvier 2003 et le 24 janvier 2006 expirent le 24 janvier 2014. » ;
3° Le III bis est ainsi modifié :
a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La même faculté est ouverte au représentant de l’État dans le département ou, à Paris, au préfet de police, informé de la tenue imminente d’une manifestation ou d’un rassemblement de grande ampleur présentant des risques particuliers d’atteinte à la sécurité des personnes et des biens. L’autorisation d’installation du dispositif cesse d’être valable dès que la manifestation ou le rassemblement a pris fin. » ;
b) Au début du second alinéa, sont ajoutés les mots : « Sauf dans les cas où les manifestations ou rassemblements de grande ampleur mentionnés à l’alinéa précédent ont déjà pris fin, » ;
4° Le IV est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’autorisation peut prévoir un délai minimal de conservation des enregistrements. » ;
5° Le deuxième alinéa du V est ainsi rédigé :
« Toute personne intéressée peut saisir la commission départementale mentionnée au III ou la Commission nationale de l’informatique et des libertés de toute difficulté tenant au fonctionnement d’un système de vidéoprotection. » ;
6° Au VI, après les mots : « commission départementale », sont insérés les mots : « ou de la Commission nationale de l’informatique et des libertés » ;
7° Au VI bis, après le mot : « libertés », sont insérés les mots : « et à la Commission nationale de la vidéoprotection » ;
8° À la première phrase du VII, après les mots : « décret en Conseil d’État », sont insérés les mots : «, après avis de la Commission nationale de la vidéoprotection, ».
Le présent article tend à promouvoir et encadrer l’utilisation de la vidéosurveillance.
Son adoption permettrait ainsi aux autorités publiques d’installer des caméras dans les lieux exposés aux risques d’agression, de vol ou de trafic de stupéfiants ou pour prévenir toute une série d’autres risques. En outre, – c’est là le point important – les personnes morales de droit privé seraient autorisées à installer, elles aussi, après information du maire et autorisation du préfet, des systèmes de vidéosurveillance sur la voie publique afin de protéger les abords de leurs bâtiments dans les lieux susceptibles d’être exposés à des actes de terrorisme ou à des risques d’agression ou de vol.
En conséquence, l’article vise à modifier substantiellement le cadre juridique actuel de la vidéosurveillance. Les images pourront en effet être visionnées par les agents de l’autorité publique, les salariés de la personne morale ou ceux des opérateurs publics ou privés agissant pour leur compte. Elles pourront être partiellement contrôlées, a posteriori, par la Commission nationale de l’informatique et des libertés – la CNIL – ou par des commissions départementales de vidéosurveillance.
Globalement, le groupe socialiste est favorable au principe de l’utilisation de nouveaux instruments pour garantir plus de sécurité aux citoyens. La vidéosurveillance, comme technologie de pointe, en fait bien sûr partie.
Toutefois, nous considérons que la vidéosurveillance n’est pas la panacée ou le remède miracle en matière de lutte contre l’insécurité. En particulier, elle ne peut remplacer les acteurs de terrain que sont la police et la gendarmerie ni les personnels de prévention dont la présence humaine sur les territoires est évidemment indispensable à toute politique de sécurité efficace.
Elle doit donc être envisagée comme un outil parmi d’autres, d’autant que, comme tout instrument technique neutre en lui-même, elle peut rapidement conduire à des dérives si elle n’est pas correctement encadrée.
Par conséquent, nous considérons que la vidéosurveillance doit être strictement encadrée dans son usage par les pouvoirs publics, afin de respecter scrupuleusement les libertés publiques, constitutionnellement garanties, et nous proposons d’encadrer de manière plus contraignante son usage.
De notre point de vue, afin de conserver la maîtrise du système, de son utilisation et, plus particulièrement, des données, la vidéosurveillance ne doit être utilisée que par les autorités publiques.
Ouvrir son champ aux personnes morales de droit privé, ou même confier sa gestion et son contrôle à des prestataires privés, conduit à une forme de privatisation de la vidéosurveillance et à un désengagement de l’État sur l’une de ses missions régaliennes. Nous n’y sommes pas favorables.
De même, si le groupe socialiste est favorable à un accroissement du rôle des acteurs locaux en matière de sécurité, il n’entend pas confondre coproduction de sécurité et désengagement progressif des pouvoirs publics. Le financement des installations doit donc être assumé par l’État ou, à tout le moins, aidé par lui et non délégué purement et simplement aux collectivités locales, comme c’est, hélas ! le cas aujourd’hui.
En outre, pour que le dispositif soit lisible et efficace, une seule et même autorité doit être compétente pour contrôler les systèmes de vidéosurveillance. Nous proposons que ce contrôle revienne à la CNIL, institution déjà existante, plutôt qu’à une nouvelle autorité, dont le coût pèsera sur les finances publiques.
Enfin, nous souhaitons que les collectivités territoriales soient au cœur du dispositif. En effet, la vidéosurveillance doit être un outil au service des élus, dans le cadre d’une politique de sécurité locale et totale. Son installation doit être laissée à l’appréciation des maires, après un débat au sein du conseil municipal. Il s’agira alors de déterminer, sur le territoire dont ils ont la responsabilité, la place de la vidéosurveillance dans la politique locale : nombre de caméras, localisation, habilitation du personnel, mise en place d’un comité d’éthique, etc.
Toutes ces décisions doivent être traitées en étroite concertation avec les élus locaux. Il faut qu’ils soient associés au maximum au processus de décision dans ces domaines sensibles.
Voilà les messages que je souhaitais exprimer au nom du groupe socialiste sur l’encadrement nécessaire et rigoureux de la vidéosurveillance, qui, je le répète, doit être considérée comme un outil parmi d’autres dans la mise en œuvre des politiques de sécurité publiques. Et c’est en ce sens que nous présenterons des amendements sur cet article.
Mmes Virginie Klès et Gisèle Printz applaudissent.
L'amendement n° 82, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Insinuer que la vidéosurveillance est protectrice revient à dire – si vous permettez que nous nous amusions, nous aussi, à jouer avec les mots – qu’elle interviendrait en amont, ce qui est proprement absurde, d’autant que l’expérience nous prouve exactement le contraire.
Par exemple, quand, l’été dernier, M. Xavier Bertrand nous avait présenté les caméras comme la solution miracle aux problèmes de la violence à l’école, il avait omis de préciser que les trois agressions d’élèves qu’il s’empressait de commenter avaient eu lieu dans des lycées du Val-de-Marne équipés de caméras !
Le fait qu’une infraction soit filmée n’empêche pas qu’elle ait lieu et nous pensons – l’expérience le prouve – que la vidéosurveillance ne fait que déplacer la délinquance.
La vidéosurveillance intervient, en effet, la plupart du temps a posteriori, une fois que les infractions sont commises, pour en éclairer le déroulement ou, éventuellement, comme cela s’est passé après le drame qui a eu lieu dans le métro en décembre dernier, pour permettre l’identification des auteurs. Il n’en demeure pas moins que la dame est morte.
Outre son inefficacité, la vidéosurveillance a un coût. Vous qui aimez tant les chiffres, ce qui suit devrait vous plaire !
La chambre régionale des comptes de la région Rhône-Alpes, autorité indépendante, a récemment révélé l’impact négligeable sur la sécurité publique des caméras de vidéosurveillance installées dans les villes de Lyon et Saint-Etienne. À Saint-Etienne, la mairie investit depuis 2001 de 1, 3 million à 1, 5 million d’euros par an dans la vidéosurveillance. Celle-ci, est-il estimé, permet de repérer entre 1 % et 2 % des crimes et des délits commis dans la commune et poursuivis par la police. Reste à noter que Saint-Etienne est classée au 143e rang des circonscriptions les moins sûres de France…
Depuis 2003, alors que Lyon dépense annuellement entre 2, 7 millions et 3 millions d’euros dans ces équipements, elle voit la délinquance sur la voie publique baisser beaucoup moins rapidement que dans la ville contiguë de Villeurbanne, qui refuse la vidéosurveillance et enregistre une diminution de 48 % alors qu’elle n’est que de 33 % à Lyon. La chambre régionale des comptes conclut qu’« on peut observer que l’outil est suffisamment coûteux pour qu’une évaluation globale de son intérêt soit entreprise ».
Ces exemples montrent, me semble-t-il, l’incurie que dissimule mal votre discours et qui est un témoignage supplémentaire du mépris affiché à l’égard de la sécurité de nos concitoyens et de leurs droits et libertés fondamentales.
Cet amendement tend à supprimer l’article 17. Or, cet article est tout à fait nécessaire puisqu’il fixe l’ensemble du régime de la vidéosurveillance sur la voie publique. L’avis est donc défavorable.
Mme Assassi souhaitant que je réponde à son intervention, je vais le faire, sans toutefois reprendre tout le raisonnement sur la vidéoprotection.
Madame, vous avez évoqué plusieurs faits divers. D’abord, je vous précise que le ministre de l’éducation est non pas Xavier Bertrand mais Luc Chatel.
Sur l’éducation, reconnaissez que c’est assez stable !
Je ne vous ferai pas l’injure de vous rappeler que, quand M. Besancenot, qui est, comme vous, très hostile à la vidéoprotection, a perdu son téléphone portable, il a finalement été assez satisfait que la vidéoprotection ait permis qu’il puisse être retrouvé.
Mmes Éliane Assassi et Nicole Borvo s’exclament.
Vous avez évoqué le drame qui s’est récemment produit dans le métro. Il y a eu deux agressions, dont les médias ont à juste titre parlé et qui ont naturellement frappé l’opinion. Dans ces deux cas, c’est quasi exclusivement grâce à la vidéoprotection qu’ont pu être identifiés les agresseurs, ce qui a facilité leur interpellation. Dans le cas qui s’est produit au printemps dernier, les services de police ont pu remonter de station en station jusqu’à une gare située en Seine-et-Marne, me semble-t-il – M. président de la commission des lois rectifiera si je me trompe –, grâce à la vidéoprotection. C’est donc un élément très important dans l’élucidation.
Enfin, je suis en désaccord avec vous sur le fait que cela ne favoriserait pas la prévention. Il y a, on le sait bien, une certaine forme de petite délinquance qui est attentive à la présence ou non de caméras de vidéoprotection.
Mme Éliane Assassi s’exclame de nouveau.
Donc, pour ces deux raisons, je vous confirme que le Gouvernement est totalement engagé et mobilisé pour le développement de la vidéoprotection.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de quinze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 83 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 128 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet, Chevènement et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 13
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour défendre l’amendement n° 83.
Je présenterai en même temps les amendements n° 83, 84 et 85.
Cet article 17 prévoit que les entreprises privées seront habilitées à placer des caméras de vidéosurveillance dans la rue mais les autorise aussi à visionner les images recueillies.
Vous leur confiez, monsieur le ministre, des prérogatives exorbitantes puisqu’elles pourront échapper aux obligations imposées dans le cadre de l’installation de caméras dans les espaces privatifs : information par voie d’affichage ou de panneaux indiquant les nom, qualité et numéro de téléphone du responsable, pour permettre à toute personne intéressée d’exercer son droit d’accès. Il s’agit d’une privatisation rampante du domaine public, que nous persistons à dénoncer.
La vidéosurveillance a, de fait, un caractère intrusif au regard du droit au respect de la vie privée. Elle est en outre susceptible de mettre en cause la liberté d’aller et de venir des citoyens, ainsi que celle des salariés d’une entreprise concernée, qui verront leurs faits et gestes sur la voie publique surveiller par des sociétés privées et pour des intérêts eux-mêmes privés.
Ce faisant, le Gouvernement cherche à se défausser d’une mission de service public sur le secteur privé.
Nous savons que la vidéosurveillance a un coût. Au lieu d’assumer sa politique, le Gouvernement souhaite confier à d’autres le soin d’investir et de payer, et ce au mépris des libertés.
Je rappellerai d’ailleurs que c’est Alain Peyrefitte, …
… qui, le premier, avait fait un rapport entre sécurité et liberté. La sécurité est peut-être un droit, mais plus les mesures prises envers la sécurité augmentent, plus nos libertés diminuent, et notre degré de sécurité reste très faible ; nous n’avons vraiment rien à y gagner.
Je citerai ici la recommandation n° 3 du groupe de travail sénatorial sur la vidéosurveillance, inscrite dans le rapport d’information que vous avez coécrit, monsieur Courtois : « Ne pas déléguer la vidéosurveillance de la voie publique à des personnes privées, ni permettre aux autorités publiques de vendre des prestations de vidéosurveillance de la voie publique à des personnes privées. » Ce sont vos propres termes, monsieur Courtois. Or, en l’occurrence, il me semble que vous vous en écartez.
L’article 17 du projet de loi prévoit en effet l’inverse puisqu’il permet, d’une part, le visionnage des images par les utilisateurs privés et, d’autre part, la possibilité pour l’autorité publique de déléguer au secteur privé le visionnage d’images filmées sur la voie publique.
Que les personnes morales de droit privé ayant installé des caméras de surveillance puissent visionner les images que celles-ci ont prises, cela paraît logique, mais seraient désormais concernées les images filmées sur la voie publique. C’est cet espace-là qui devient le plus inquiétant.
Les garde-fous sont insuffisants au regard des enjeux des libertés publiques. Aussi, nous estimons que la convention déléguant à un opérateur public le visionnage des images recueillies aussi bien sur la voie publique que dans des lieux ouverts au public ne doit pouvoir être conclue qu’après avis conforme de la CNIL, ce que nous proposons donc par voie d’amendement.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 128 rectifié.
Cet amendement nous tient à cœur. Nous ne sommes pas, nous, opposés au principe de la vidéosurveillance et, dans de nombreux cas, ces installations peuvent apporter un plus au niveau de la sécurité. Je reviendrai sur le principe de la vidéosurveillance dans une explication de vote, ce qui me permettra d’ailleurs de répondre à M. le ministre sur ce que mes électeurs peuvent attendre dans mon département en matière de sécurité.
Le présent amendement vise à supprimer, au sein de l’article 17, l’alinéa 13 qui dispose : « Après information du maire de la commune concernée, » – il s’agit uniquement d’information, il y a dans cet hémicycle beaucoup de maires et d’élus locaux – « les autres personnes morales » – l’expression est particulièrement vaste – « peuvent mettre en œuvre sur la voie publique un système de vidéoprotection aux fins d’assurer la protection des abords de leurs bâtiments et installations dans les lieux susceptibles d’être exposés à des actes de terrorisme » – dans les départements ruraux, normalement, il ne devrait pas y en avoir beaucoup ! – …
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat rit.
Je sais que j’ignore tout, monsieur le ministre, mais quand même !
... « ou particulièrement exposés à des risques d’agression ou de vol. » – cela concerne tout le monde et partout, parce qu’il n’y a pas un mètre carré de voie publique qui n’est pas exposé à de tels risques d’agression ou de vol.
Cela signifie qu’avec cet alinéa le maire sera simplement informé, …
… c’est-à-dire que, s’il n’est pas d’accord pour qu’il y ait ce type d’installation sur une voie publique de sa commune, il ne pourra rien faire, si ce n’est de la procédure. Nous considérons donc que cet alinéa 13 va servir de base juridique pour permettre sans restriction suffisante à des prestataires privés de filmer le domaine public municipal, ce qui n’est pas leur vocation.
Cet élargissement nous semble d’autant plus difficile à accepter que le projet de loi ne prévoit qu’une simple information des maires. En outre, cette disposition nous paraît contraire à la jurisprudence du Conseil d’État qui, dans son arrêt Commune d’Ostricourt du 29 décembre 1997, avait fortement affirmé que les prestataires privés ne peuvent pas participer à des missions de police administrative. Les laisser installer ce type d’équipement en prévoyant une simple information du maire me semble être non conforme à cette jurisprudence.
Je reviendrai sur ce point, qui me paraît extrêmement important, à travers d’autres amendements et lors des explications de vote. Il eut fallu, au moins, modifier la formulation de cet alinéa 13 qui est véritablement trop large dans son application.
L'amendement n° 61, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 13
Supprimer cet alinéa.
II. - Alinéa 18
Supprimer les mots :
ou les salariés de la personne morale titulaire de l'autorisation
III. - Alinéa 20
1° Première phrase
Supprimer les mots :
ou une personne morale
et les mots :
ou privé
2° Seconde phrase :
Supprimer cette phrase.
IV. - Alinéa 21
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Comme mon collègue Jacques Mézard vient de le dire à l’instant, cet alinéa 13 est très important et c’est la raison pour laquelle nous demandons sa suppression.
En effet, les alinéas de l’article 17 offrent aux personnes morales de droit privé la possibilité de recourir à la vidéosurveillance de l’espace public. Il leur sera ainsi possible non seulement de filmer la voie publique mais aussi de visionner ces images.
Nos faits et gestes seront donc capturés, puis livrés à des sociétés privées, sans aucun contrôle, en tout cas sans aucune justification de ce dernier sauf à ce que nous adoptions – peut-être tout à l’heure – un autre de mes amendements exigeant un rapport d’activité – nous y reviendrons !
Quoi qu’il en soit, sur le principe, c’est tout à fait inacceptable car en d’autres termes, demain, ce sont de vastes centres de visionnage d’images de la voie publique qui seront mis en place, probablement entre les mains d’un seul et même opérateur privé – qui fait d’ailleurs du « business » de la sécurité – en charge de surveiller des espaces discontinus, voire de plusieurs communes.
Le Gouvernement organise ainsi sans ambiguïté la privatisation de la mission régalienne de sécurisation du domaine public, ce que nous refusons fermement. Sous couvert de lutter contre le terrorisme, les vols ou les agressions, l’État tente de se désengager, alors qu’il doit assurer son rôle et son monopole légitime dans ce domaine de sécurité de l’espace public pour la confiance et le crédit de tous les citoyens.
L'amendement n° 14, présenté par MM. C. Gautier et Anziani, Mme Klès, MM. Frimat et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Yung, Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Rédiger ainsi cet alinéa :
Après accord de la commune concernée, les autres personnes morales peuvent mettre en œuvre sur la voie publique un système de vidéoprotection des abords immédiats de leurs bâtiments et installations, aux fins d'assurer la protection de ces bâtiments et installations, ainsi que de leurs usagers, dans les lieux susceptibles d'être exposés à des actes de terrorisme.
La parole est à M. Mézard, à M. Anziani veux-je dire.
En revanche, vous êtes le bienvenu au groupe socialiste, monsieur Mézard.
Je voudrais commencer par préciser que notre position, exposée voilà quelques instants avec beaucoup de clarté par mon collègue Roland Ries, n’est pas d’être hostiles à la vidéosurveillance par principe mais nous souhaitons que cette dernière soit encadrée.
Comme mon collègue Charles Gautier – qui ne peut pas être avec nous aujourd’hui – l’a rappelé à de multiples reprises lors de l’examen du texte en première lecture, nous souhaitons non seulement avoir des assurances, mais aussi que la loi encadre précisément ces dispositifs. Cet article et le présent amendement posent justement cette question.
En effet, l’article 17 a tout de même ceci de particulier – ce qui devrait tous nous choquer ! – qu’il permet à une personne morale de droit privé, par exemple une grande surface, de faire de la vidéosurveillance aux abords de son bâtiment pour des raisons de terrorisme ou de vol, sans que l’on précise quoi que ce soit. Que signifie l’expression « aux abords » ?
Vous allez forcément trouver, mes chers collègues, une grande surface pour vous expliquer que les abords concernant la prévention du vol commencent très loin, à un kilomètre de son bâtiment par exemple : à cette distance, des groupes peuvent se réunir, qui s’organisent et qui préparent le vol. Pour les anticiper, elle voudra prévoir cette vidéoprotection dès 1 kilomètre, 500 mètres ou 300 mètres.
Est-ce cela que nous souhaitons ? Sans doute pas ! Alors, si ce n’est pas ce que nous voulons, autant le préciser dans la loi et ne pas laisser à ces personnes morales de droit privé une telle latitude d’interprétation de notre texte. Nous protestons régulièrement contre le fait que nos textes sont parfois dévoyés. Donnons-nous aujourd’hui la possibilité d’être précis. D’une part, nous souhaitons que le texte soit modifié en faisant référence aux abords « immédiats », notion beaucoup plus précise.
D’autre part, alors que vous indiquez dans le texte que le maire sera informé d’une telle installation, – et je rejoins ce qui a été dit voilà un instant par mon collègue Jacques Mézard, même s’il n’est pas encore au groupe socialiste ! §– il serait plus simple de prévoir l’accord du conseil municipal, et ce pour plusieurs raisons.
Ainsi, un débat aurait lieu au sein du conseil municipal, ce qui va de soi puisqu’il s’agit de la voie publique, donc du domaine public. Après tout, il n’est pas extravaguant de considérer que les autorités publiques, en particulier les membres du conseil municipal, puissent donner leur position sur une telle question.
Cela permettrait également une négociation entre l’opérateur et la mairie, à l’instar de ce qui existe en matière d’enseignes publicitaires. Les abords pourraient donc être définis au cours de cette négociation et ne seraient plus laissés à la discrétion d’une personne voulant faire en sorte qu’ils soient le plus étendu possible.
L'amendement n° 130 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet, Chevènement et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Après accord de la commune concernée, les autres personnes morales ne peuvent mettre en œuvre sur la voie publique un système de vidéoprotection qu’aux fins d’assurer la protection des abords immédiats de leurs bâtiments et installations, ainsi que celle de leurs usagers, dans les lieux susceptibles d’être exposés à des actes de terrorisme ou particulièrement exposés à des risques d’agression ou de vol. » ;
La parole est à M. Jacques Mézard.
À la suite de ce que vient de dire notre collègue Alain Anziani, qui est effectivement très proche de la position majoritaire du groupe RDSE, je souhaite insister sur le caractère extrêmement grave de cet alinéa 13. À défaut de le supprimer, il faudrait, comme nous le proposons, le modifier à la fois pour qu’il soit sécurisé juridiquement et pour que le maire puisse avoir un rôle en ce qui concerne l’installation de tels systèmes sur la voie publique ou à proximité.
Tout d’abord, selon le texte du projet de loi, la personne privée désireuse de surveiller le domaine public municipal à proximité d’un bâtiment pourra le faire dans les seuls « lieux susceptibles d'être exposés à des actes de terrorisme ou particulièrement exposés à des risques d'agression ou de vol ». Ce sont des critères beaucoup trop larges et nous souhaitons être assurés que les dispositions de l’alinéa 13 se limitent aux seuls cas où les critères sont réellement réunis.
Dans cette perspective, nous proposons que l’accord du maire de la commune concernée soit indispensable. Qu’y a-t-il de choquant à rendre obligatoire son accord pour des installations de vidéosurveillance qui sont installées sur la voie publique ? Je crois que nous pouvons tous être d’accord sur ce point.
Ensuite, l’alinéa 13 prévoit une installation aux abords des bâtiments. Or, comme l’a rappelé notre collègue Alain Anziani, il faudrait au moins que cela soit limité aux abords « immédiats ».
Il me semble extrêmement important de rendre l’accord du maire indispensable. Je ne vois pas comment il pourrait en être autrement. À défaut, les contentieux seront nombreux ; je connais nombre de maires qui feront de la procédure afin d’empêcher l’installation de vidéosurveillance sur la voie publique s’ils ne souhaitent pas une telle installation. Par conséquent, il vaut mieux leur demander leur accord. Il est scandaleux de prévoir simplement leur information.
Avec les dispositions telles que vous nous les proposez, on ne va pas dans le bon sens. À la limite, – comme je le disais en aparté à M. le ministre tout à l’heure – si le dispositif avait été restreint aux risques d’actes de terrorisme, on aurait peut-être pu comprendre – et encore, sur le principe, cela peut se discuter. Mais dès lors que sont également visés les cas de risques d’agression ou de vol, c’est tout notre domaine public qui pourra potentiellement être l’objet d’une vidéosurveillance par des organismes ou des sociétés privés. Cela n’est pas normal et c’est contraire à nos traditions et à nos principes. En l’occurrence, il ne s’agit aucunement de laxisme !
L'amendement n° 129 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet, Chevènement et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Remplacer les mots :
information du maire
par le mot :
accord
La parole est à M. Jacques Mézard.
Cet amendement va dans le même sens que le précédent puisqu’il s’agit d’une solution subsidiaire à la solution elle-même subsidiaire que ce dernier prévoit. Au lieu de l’information du maire, nous souhaitons que son accord soit prévu, pour les raisons que j’ai indiquées à l’instant.
L'amendement n° 15, présenté par MM. C. Gautier et Anziani, Mme Klès, MM. Frimat et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Yung, Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Après les mots :
des abords
insérer le mot :
immédiats
La parole est à M. Alain Anziani.
Madame la présidente, je présenterai en même temps les amendements n° 15, 16 et 18 rectifié.
L’amendement n° 15, qui reprend une précision prévue à l’amendement n° 14, vise à limiter le dispositif aux abords « immédiats ».
L’amendement n° 16 n’est pas absurde dans son principe et il est même profondément démocratique. En effet, cette vidéosurveillance est faite dans l’intérêt bien sûr de personnes morales de droit privé, de la sécurité, mais aussi, sans doute, de la population. Aussi, nous souhaitons que l’on puisse interroger la population sur ce sujet en procédant à sa consultation.
Quant à l’amendement n° 18 rectifié, il correspond au droit existant. Qui va visionner les images ? Il s’agit d’un pouvoir régalien. Savoir si une infraction a été commise ou non relève des autorités judiciaires, d’un officier de police judiciaire. Par conséquent, nous devons confier ce visionnage, qui est au fond un acte d’enquête, à des autorités publiques, et non pas à des autorités privées.
L'amendement n° 16, présenté par MM. C. Gautier et Anziani, Mme Klès, MM. Frimat et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Yung, Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
S'agissant des bâtiments à usage d'habitation, la personne morale qui souhaite procéder à l'installation d'un dispositif de vidéoprotection organise une consultation des habitants.
Cet amendement a été défendu.
L'amendement n° 18 rectifié, présenté par MM. C. Gautier et Anziani, Mme Klès, MM. Frimat et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 18
Rédiger ainsi cet alinéa :
Le visionnage des images est assuré par les agents de l'autorité publique ou par ceux des opérateurs publics.
II. - Alinéa 20
1° Première phrase
Supprimer les mots :
ou privé
et remplacer le mot :
information
par le mot :
accord
2° Dernière phrase
Supprimer cette phrase.
III. - Alinéa 21
Supprimer cet alinéa.
Cet amendement a été défendu.
L'amendement n° 84, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 18
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le visionnage des images est assuré par les agents de l'autorité publique ou par ceux des opérateurs publics agissant pour son compte en vertu d'une convention. » ;
II. - Alinéa 20, première phrase
Supprimer les mots :
ou privé
III. - Alinéa 21
Supprimer cet alinéa.
Cet amendement a été défendu.
L'amendement n° 131 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Supprimer les mots :
ou les salariés de la personne morale titulaire de l'autorisation
La parole est à M. Jacques Mézard.
C’est un amendement de coordination à travers lequel nous indiquons très simplement que nous ne souhaitons toujours pas que les salariés d’une personne morale de droit privé puissent mette en œuvre un dispositif de vidéoprotection sur la voie publique et visionner les images. Il y a non seulement le problème de l’installation mais aussi celui de l’utilisation du mécanisme de surveillance. L’alinéa 18 est très clair dans son expression : « Le visionnage des images peut être assuré par les agents de l’autorité publique ou les salariés de la personne morale titulaire de l’autorisation ou par ceux des opérateurs publics ou privés agissant pour leur compte en vertu d’une convention. »
Il s’agit d’une ouverture de l’utilisation des images au secteur privé, qui ne nous paraît pas être une bonne chose et, là encore, c’est contraire à nos traditions.
L'amendement n° 132 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 20
I. - Première phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Lorsqu'une autorité publique n'exploite pas elle-même son système de vidéoprotection de voie publique, la convention qu'elle passe avec un opérateur public est agréée par le représentant de l'État dans le département et, à Paris, par le préfet de police, après information du maire de la commune concernée, et conforme à une convention type définie par voie réglementaire après avis de la commission nationale prévue à l'article 10-2.
II. - Seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Jacques Mézard.
Il s’agit d’un amendement de coordination. L’objet est toujours le même.
L'amendement n° 85, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 20, première phrase
Remplacer les mots :
de la commission nationale prévue à l'article 10-2
par les mots :
conforme de la commission nationale de l'informatique et des libertés
Cet amendement a été défendu.
L'amendement n° 19, présenté par MM. C. Gautier et Anziani, Mme Klès, MM. Frimat et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 20, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et de la Commission nationale de l'informatique et des libertés
La parole est à M. Claude Domeizel.
Nous présentons à nouveau cet amendement car il est en cohérence avec la reconnaissance des pouvoirs que le projet de loi va conférer de la Commission nationale de l’informatique et des libertés et que nous souhaitons renforcer.
Il existe toujours une opposition en matière de contrôle des systèmes de vidéosurveillance entre l’Assemblée nationale et le Sénat. Pourtant, en première lecture, nous avions trouvé un certain équilibre avec, premièrement, le maintien au niveau local de l’autorisation du représentant de l’État après avis des commissions départementales, deuxièmement, l’attribution d’un rôle de conseil et d’évaluation à la commission nationale de vidéoprotection et, troisièmement, l’attribution du contrôle d’ensemble à la CNIL.
C’est en se référant à ce contexte que nous proposons, à travers le présent amendement, que la convention type fixée par voie réglementaire soit également prise après avis de la CNIL dès lors qu’il reviendra à celle-ci le soin d’assurer le contrôle de la mise en œuvre de ces dispositifs.
Il s’agit à nos yeux d’une mesure de bon sens : si l’on reconnaît des compétences à la CNIL, il faut aller au bout de la logique et lui permettre de les exercer pleinement.
L'amendement n° 133 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jacques Mézard.
Cet amendement, qui vise à supprimer l’alinéa 21, découle de la logique que j’ai développée tout à l’heure.
Plusieurs des amendements déposés sur cet article ont déjà été examinés en première lecture. Le débat que nous avons eu à cette époque a donc purgé la question, si je puis dire.
Ainsi, l’amendement n° 83, qui a déjà été examiné en première lecture, vise à supprimer la possibilité pour des personnes morales d’installer des systèmes de vidéosurveillance filmant également la voie publique.
Ce retour en arrière par rapport au droit en vigueur ne serait pas raisonnable. La commission a donc émis un avis défavorable.
L’amendement n° 128 rectifié, qui a également déjà été examiné en première lecture, tend à supprimer la possibilité pour des personnes morales de filmer la voie publique.
Ce faisant, il prévoit de revenir en arrière par rapport au droit en vigueur, ce qui ne paraît pas souhaitable. La commission a par conséquent émis un avis défavorable.
L’amendement n° 61 a pour objet de supprimer toute possibilité pour les personnes morales d’installer un système de vidéosurveillance de la voie publique ainsi que la possibilité de déléguer cette vidéosurveillance à des prestataires privés.
Cette possibilité est pourtant nécessaire au développement de la vidéosurveillance, développement souhaité par de nombreux élus et une large majorité de nos concitoyens. Aussi, la commission a émis un avis défavorable.
L’amendement n° 14 tend à prévoir l’accord du maire pour l’installation par des personnes morales de systèmes de vidéosurveillance.
Or, dans le dispositif actuel ainsi que dans celui qui résultera de la LOPPSI, la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, l’instance qui autorise la vidéosurveillance de la voie publique est le préfet et non le maire. J’ajoute que nous avons trouvé un équilibre entre le rôle joué par la CNV, la CNIL, le préfet et le maire. Nous ne souhaitons pas que celui-ci soit modifié. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
L’amendement n° 130 rectifié vise à restreindre la possibilité pour les personnes morales de filmer la voie publique aux seuls « abords immédiats » de leurs bâtiments.
Ce débat a déjà été tranché en première lecture : la mention des seuls « abords » est suffisante. La commission a donc émis un avis défavorable.
L’amendement n° 129 rectifié a pour objet de prévoir l’accord du maire pour l’installation de certains systèmes de vidéosurveillance.
Ce dispositif est contraire au texte de la commission, dans lequel l’autorisation reste un pouvoir du préfet. Je rappelle que nous avons trouvé un équilibre en commission des lois et que nous ne souhaitons pas y déroger. La commission a par conséquent émis un avis défavorable.
L’amendement n° 15 tend à limiter le champ de la vidéosurveillance aux abords immédiats des bâtiments.
Ce débat a déjà été tranché en première lecture. Je le répète, la mention des abords est suffisante. La commission a donc émis un avis défavorable.
L’amendement n° 16 vise à rendre obligatoire une consultation des habitants avant l’installation d’un système de vidéosurveillance sur un bâtiment à usage d’habilitation.
Cet amendement a déjà été présenté en première lecture. Nous sommes ici non pas dans le régime de la vidéosurveillance des parties communes des immeubles, mais dans celui de la vidéosurveillance de la voie publique. Une consultation des habitants n’a donc pas lieu d’être. Aussi, la commission a émis un avis défavorable.
L’amendement n° 18 a pour objet de supprimer la possibilité de déléguer la vidéosurveillance à des personnes privées.
Nous estimons au contraire que permettre cette délégation dans de bonnes conditions est l’un des apports importants de l’article 17. La commission a donc émis un avis défavorable.
L’amendement n° 84 a le même objet que l’amendement précédent. La commission a donc également émis un avis défavorable.
L’amendement n° 131 rectifié est un amendement de coordination avec l’amendement n° 128 rectifié. Par cohérence, la commission a par conséquent également émis un avis défavorable.
L’amendement n° 132 rectifié tend à rendre impossible la délégation de la vidéoprotection à des personnes privées. Comme précédemment, la commission a émis un avis défavorable.
Concernant l’amendement n° 85, le rôle de la CNIL, tel que défini par le présent texte, est de contrôler le fonctionnement des systèmes de vidéoprotection. La définition en amont des normes réglementaires relève, elle, de la commission nationale de la vidéoprotection.
Cet accord a été approuvé par la commission des lois du Sénat, par le Gouvernement et par l’Assemblée nationale. Nous ne souhaitons pas y revenir. La commission a donc émis un avis défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 19, qui traite du même sujet que l’amendement précédent, la commission a également émis un avis défavorable.
Quant à l’amendement n° 133 rectifié, il s’agit d’un amendement de coordination. Aussi, la commission a émis un avis défavorable.
Même avis que la commission sur l’ensemble de ces amendements, madame la présidente.
Je voudrais simplement revenir sur un point qui préoccupe tant M. Anziani que M. Mézard : l’encadrement du dispositif.
Je les rassure : le dispositif est bel et bien encadré. Tout d’abord, il est soumis à l’avis d’une commission, qui, je le rappelle, est présidée par un magistrat de l’ordre judiciaire.
Ensuite, la décision du préfet pourra, par définition, être contestée devant le tribunal administratif.
Il existe donc plusieurs garde-fous, pardonnez-moi l’expression, permettant d’encadrer le dispositif.
Si je reprends le raisonnement de M. Mézard, qui a également été tenu par M. Anziani – vous le voyez, monsieur le sénateur, j’ai été attentif à vos propos –, il faudrait demander l’autorisation préalable du maire. La conséquence inéluctable d’un tel raisonnement serait que la décision du préfet ne compterait plus et que, à terme, l’avis du maire s’y substituerait.
Or je n’ai pas cru comprendre, messieurs les sénateurs, que vous souhaitiez que l’État n’ait plus son mot à dire et que cette question relève de la seule compétence municipale. C’est pourtant ce à quoi aboutirait votre proposition. Voilà pourquoi j’ai émis un avis défavorable.
Je veux préciser notre position, surtout après ce que vient de dire M. le ministre.
Nous ne sommes pas opposés, je l’ai déjà dit, au principe de la vidéosurveillance ou de la vidéoprotection. La différence entre ces deux notions me paraît d’ailleurs minime, voire même inexistante.
En tant qu’élu local, j’ai favorisé des installations de ce type avec le concours de subventions de l’État. Il ne faut donc pas avoir de discours contradictoires. Dans certains cas, c’est effectivement un moyen de conforter la sécurité. Reste que ce n’est pas non plus la panacée, sinon cela se saurait et nous n’aurions plus de problème, monsieur le ministre.
Pour ce qui me concerne, je suis opposé à la désagrégation du pouvoir régalien de l’État et, de manière générale, de la puissance publique, qu’elle soit nationale ou locale ; cette position est peut-être liée à mon attachement à la tradition jacobine. Il est donc nécessaire, vous l’avez dit tout à l’heure, monsieur le ministre, qu’il y ait une concertation entre le représentant de l’État et les collectivités locales. Pourtant, ce n’est pas ce qui ressort du texte que vous nous proposez.
Le problème que nous soulevons est que l’installation sur la voie publique municipale de systèmes de vidéosurveillance fait simplement l’objet d’une information du maire. Certes, il nous est répondu que l’autorité préfectorale prendra une décision sous le contrôle d’une commission présidée par un magistrat. Mais nous nous demandons pourquoi vous vous méfiez du maire.
Le moins que l’on puisse dire est que ce texte est mal rédigé.
Nous avons l’habitude : quoi que l’on dise, c’est toujours non, monsieur le président Hyest !
Si !
Tout démembrement de la puissance publique, tout recours systématique aux prestataires privés est nocif. Il en va d’ailleurs de même pour le traitement des infractions au code de la route, dont nous reparlerons certainement tout à l’heure.
Il est emblématique, et j’appelle l’attention de mes collègues sur toutes les travées de l’hémicycle, qui d’ailleurs le savent, que l’on puisse laisser mettre en place ce type d’installation sur la voie publique municipale avec une simple information du maire. Je suis sûr que les élus locaux qui siègent dans cette enceinte sont choqués.
Monsieur le ministre, « Big Brother nous regarde » écrivait George Orwell dans 1984. Je n’irai pas jusqu’à dire que vous être celui-là.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
J’étais sûr que j’allais déclencher ce type de réaction chez mes collègues.
Ceux d’entre nous qui font leurs courses dans les grandes surfaces ont l’habitude de voir ces pancartes où il est écrit : « Souriez, vous êtes filmé ». Or nous n’avons pas envie d’être filmés sur la voie publique ni que ces vidéos soient utilisées par n’importe qui. Le discours habituel est de nous rétorquer : « Si vous n’avez rien à vous reprocher, ce n’est pas un problème d’être filmé ». Mais, vous le savez bien, cet argument ne tient pas la route.
Monsieur le ministre, je pense vraiment que l’alinéa 13 est très mal rédigé. Il sera donc certainement source de nombreux conflits, ce qui sera légitime.
En outre, il y a le problème du traitement de ces images. Moi aussi je peux tenir un discours très sécuritaire quand c’est nécessaire, mais sachez que les électeurs, vous en parliez hier soir, attendent que les infractions soient constatées, puis qu’elles soient véritablement traitées. Je peux vous dire que, parmi les nombreuses plaintes que je dépose, des centaines d’entre elles ne sont pas suivies d’effet pour des raisons soit d’insuffisance de personnel, soit d’insuffisance de motivation. Je m’entends en effet systématiquement répondre « poursuite inopportune » ou « infraction insuffisamment caractérisée ».
Or, je le répète, ce qu’attendent mes électeurs, c’est que le travail soit fait sur le terrain, ce qui est malheureusement rarement le cas aujourd’hui sur de nombreux dossiers.
Je ne peux pas vous laisser dire, monsieur Mézard, que je réponds toujours non.
Rappelez-vous ce matin encore, par exemple, ce qui ne fera pas forcément plaisir au ministre de l’intérieur.
Cela étant, votre argumentation serait parfaite…
… s’il n’existait pas tout un dispositif : la décision du préfet, après avis d’une commission présidée par un magistrat de l’ordre judiciaire.
Veuillez m’excuser, mais on ne peut pas non plus laisser la décision à la fantaisie de certains maires qui seraient totalement hostiles à ce type de dispositif. En outre, que je sache, l’ordre public est tout de même de la responsabilité de l’État.
Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Vous mélangez les choses en isolant un alinéa du texte. Je vous rappelle que les maires sont représentés à la CNV et que les autorisations ne seront délivrées que si la situation le justifie.
Il peut effectivement arriver que, pour protéger une banque, des caméras soient installées à l’extérieur de l’établissement. Cela ne me choque pas, d’autant que toutes les garanties ont été prises. N’oubliez pas non plus que, dans un certain nombre de lieux, cela ne sert strictement à rien de mettre des caméras à l’intérieur si l’on ne contrôle pas les abords du bâtiment.
Quant à la lutte contre le terrorisme, lequel touche beaucoup plus les établissements publics, ce qui est donc de la responsabilité de l’État, les cas seront à mon avis peu nombreux.
Je comprends parfaitement votre prudence en matière de vidéosurveillance. Pour autant, vous ne pouvez pas isoler un alinéa du reste du texte. Le maire doit être informé, nous le disons, mais cela ne signifie pas qu’il n’y a aucune procédure juridiquement protectrice des libertés en amont. Or vous oubliez de le dire, ce qui n’est pas acceptable.
Je le répète, nous avons prévu une procédure afin de ne pas accorder les autorisations à la légère : il y aura une décision du préfet, un avis de la CNV et le contrôle de la CNIL. Je pense donc vraiment que toutes les protections ont été prévues pour éviter que la vidéosurveillance ne soit faite par n’importe qui et dans n’importe quelle condition. Voilà ce que je tenais tout de même à dire, monsieur Mézard !
Nous voterons bien entendu nos amendements de suppression. Je le dis clairement : nous sommes contre la prolifération de la vidéosurveillance. Si ces amendements devaient ne pas être adoptés, nous avons déposé des amendements visant à mieux encadrer cette pratique lorsqu’elle est nécessaire.
La vidéosurveillance existe dans un certain nombre de lieux clos ou sur la voie publique. Mais, aujourd’hui, elle prolifère à certains endroits sur l’initiative de maires que vos dispositions encouragent.
Je ne sais pas si nous sommes dans 1984 et que le ministre est aux manettes de l’organisation de George Orwell, mais, nous le savons bien, à Paris, nombre de commerces, de grands magasins veulent élargir la vidéosurveillance aux abords de leur établissement, même s’ils ont déjà de la surveillance à l’intérieur de leur magasin.
Ainsi, certaines copropriétés, qui souhaitent déjà avoir non des gardiens d’immeuble, mais de la surveillance privée – on sait ce que cela signifie – voudront également faire surveiller les alentours et faire installer un système de vidéosurveillance de la voie publique – dans quel périmètre ? –afin, peut-être, de s’assurer que tel îlot de copropriétaires ne sera pas trop proche, par personne interposée, de quelques immeubles populaires des environs.
C’est extrêmement dangereux ! Mais de quel monde voulez-vous ?
Vous voulez que le privé puisse décider…
… d’étendre la vidéosurveillance sur la voie publique – une simple information sera nécessaire –, qu’il puisse la gérer lui-même et prendre les mesures de sécurité qui vont avec, lesquelles seraient entièrement confiées à des sociétés privées.
Vous rendez-vous compte jusqu’où vous allez ? Le résultat pour le commun des mortels est pourtant loin d’être prouvé, sauf, sans doute, pour de petits groupes particuliers, pour qui, effectivement, la vidéosurveillance – laquelle coûte d’ailleurs très cher – peut être efficace.
Évidemment, si on dit aux citoyens que la vidéosurveillance, c’est l’assurance pour eux d’être en sécurité du matin au soir, ils ne peuvent que s’y déclarer favorables. Mais, Éliane Assassi l’a démontré, les résultats des enquêtes d’opinion ne sont pas aussi simples. Il serait préférable d’en revenir, ou d’en venir, à la démocratie réelle, plutôt qu’à la démocratie d’opinion. Les citoyens sont influencés par les images qu’ils voient à un moment donné sur tel ou tel sujet. C’est ainsi que l’on est sûr d’obtenir à peu près des résultats d’enquêtes d’opinion permettant de proposer les dispositions prévues dans ce texte, et encore...
En revanche, je ne suis pas sûre que l’on obtiendrait les mêmes résultats si on interrogeait les citoyens sur le type de tranquillité qu’ils souhaitent et sur la manière dont ils veulent qu’elle soit assurée, si on leur disait que l’on va surveiller toute la voie publique, tous les coins de la ville, qu’ils seront filmés, souriants ou non d’ailleurs, en train de faire ceci ou cela avec tel ou tel, surtout si on ajoute que cela ne permettra d’élucider – élucider, et non prévenir – que 2 % des délits commis sur la voie publique, et ce pour un coût très élevé ! Les citoyens savent réfléchir, ils l’ont montré à plusieurs reprises, y compris sur des sujets très difficiles.
Nous sommes résolument contre la prolifération de la vidéosurveillance, premièrement parce que le monde que vous préparez, monsieur le ministre, où les moyens humains seront toujours en diminution, sera absolument invivable, deuxièmement parce qu’il est évident que le privé ne doit pas décider de la mise en œuvre des moyens de surveillance des citoyens sur la voie publique.
Madame la présidente, je voudrais reprendre les propos des collègues qui m’ont précédée, surtout ceux de M. Mézard, auxquels je souscris complètement.
Vous voudrez bien me pardonner d’avoir un raisonnement purement scientifique – c’est ma formation de base –, mais parfois, surtout quand on veut faire des preuves et quand on veut manipuler les chiffres, un tel raisonnement peut être intéressant.
Que les choses soient très claires : je ne suis pas contre les caméras. Par ailleurs, – que cela soit très clair également – je ne dis pas qu’elles sont toujours inutiles. J’affirme simplement qu’on n’a pas prouvé dans quels cas elles sont utiles et dans quels cas elles ne le sont pas, dans quels cas elles sont inutiles et dans quels cas elles ne le sont pas.
Ce n’est pas parce que, dans certains cas très concrets et très précis, la vidéosurveillance a permis d’élucider certains crimes ou délits ou de protéger des personnes parce qu’on a mis en place, après une alerte, rapidement des moyens humains qu’elle est systématiquement meilleure. S’il n’y avait pas eu de caméras, peut-être ces crimes ou ces délits auraient-ils tout de même été élucidés, peut-être les personnes concernées auraient-elles été protégées parce qu’un autre dispositif aurait été en place à ce moment-là, un dispositif peut-être plus humain, même si je ne sais pas lequel.
On ne peut dire que c’est meilleur que quand on compare deux choses totalement identiques par ailleurs – c’est bêtement scientifique –, mais pas la présence ou non de caméras.
Je reprendrai l’image que j’ai déjà prise hier sur le même type de sujet : qui peut dire qu’il est contre les médicaments ? Personne, surtout pas moi ! Les médicaments sont parfois utiles. En revanche, ce n’est pas parce qu’un médicament a permis de guérir une personne de telle maladie qu’il doit être prescrit dans n’importe quel cas, sans se soucier des effets secondaires.
Je ne m’étendrai pas longuement sur ce sujet. On le sait aujourd’hui : si un certain nombre d’expériences et de comparaisons de témoins avaient été prises en compte, certains médicaments n’auraient jamais été prescrits, il y a certaines choses que l’on n’aurait sans doute pas vécues aujourd’hui et certaines familles n’auraient pas vécu les drames qu’ils ont provoqués. Je pense que tout le monde voit parfaitement à quoi je fais allusion. Mais ce n’est pas la seule fois où c’est arrivé. Le Mediator, il y en a eu d’autres et il y en aura d’autres tant qu’on continuera d’être aveugles et de s’attacher uniquement à un fait pour prouver quelque chose de général. Ce n’est pas possible !
Comme les médicaments, les caméras peuvent être utiles, mais tant qu’on n’aura pas pris en compte leurs effets secondaires, tant qu’on ne se sera pas garanti de ces effets, tant qu’on n’aura pas mis en place un système permettant de dire que les bienfaits que l’on en attend à tel endroit et dans telles circonstances sont supérieurs aux effets secondaires, on aura tort.
Je suis désolée, monsieur le ministre, mais ce n’est pas ainsi qu’il faut fonctionner concernant les caméras. Revenons à la base. C’est un outil, c’est un médicament, il a des effets secondaires. Prenons donc des précautions et mettons de véritables barrières pour se garantir des effets secondaires, et gardons un prescripteur et un contrôleur. Ne laissons pas les laboratoires pharmaceutiques nous vendre seuls leur poudre de perlimpinpin !
M. René Teulade applaudit.
J’ai écouté M. le ministre, puis M. le président de la commission des lois nous faire la leçon…
… et nous dire que nous ne comprenions rien, que l’on ne pouvait pas, d’un côté, vouloir que l’État abandonne ses compétences et, de l’autre, demander que le maire soit associé à la décision.
À mon tour, je vous demanderai de faire preuve d’un peu de cohérence, monsieur le ministre !
Si vous alliez au bout de votre raisonnement, vous renonceriez tout à l’heure aux dispositions prévoyant d’octroyer la qualité d’adjoint de police judiciaire au directeur de la police municipale. De même, vous renonceriez à la participation de la police municipale aux contrôles du taux d’alcoolémie et à la mise en œuvre de toutes les actions de prévention par le maire, sinon il pourrait y avoir certaines conséquences sur le fonds d’intervention – le texte, du moins je l’espère, va évoluer sur ce point, heureusement. Il y a quelque temps, M. Estrosi a dénoncé les maires en leur disant qu’ils devaient s’inscrire dans le dispositif sécuritaire. Vous allez devoir condamner ses propos, monsieur le ministre. Un peu de cohérence !
Alors que vous nous proposez de surveiller la voirie municipale de façon télévisuelle, vous nous dites : « Il n’y a rien à voir, circulez ! ». Non ! Puisque c’est de la voirie municipale qu’il s’agit, le maire doit être associé à la décision concernant le dispositif envisagé et même donner son accord. C’est une question de cohérence.
Pour renforcer l’argumentation de mes collègues, je tiens à dire avec force que le débat n’oppose pas en la circonstance les modernes et les archaïques. D’ailleurs, la longueur du débat démontre que cette question n’est pas complètement tranchée et que bien imprudent serait celui qui afficherait des certitudes en la matière.
L’image choisie par Virginie Klès est tout à fait éloquente. Effectivement, ce remède peut être efficace, mais il peut avoir des effets secondaires.
Dans les enquêtes sur les délits, les caméras de surveillance peuvent indéniablement apporter un plus. Ce qui m’effraie dans l’insistance avec laquelle vous présentez votre projet, monsieur le ministre, c’est que j’ai l’impression que vous essayez de substituer à ce qui constitue l’organe le plus important en matière de sécurité, c'est-à-dire la police nationale, un dispositif qui vous permettrait de vous défausser. À cet égard, je vous renvoie aux chiffres que vous avez évoqués hier concernant la diminution du nombre de policiers et de gendarmes dans notre pays.
Les caméras de surveillance ne sont pas la panacée. Si elles peuvent être utiles, elles doivent être mises en place avec discernement, en association avec toutes les personnes concernées. Mon collègue Alain Anziani a raison de dire que, dès l’instant où la notion de libertés publiques est engagée, on ne peut essayer d’échapper aux prérogatives du maire.
Nous ne disons pas « Non ! » par principe, nous disons simplement qu’il faut prendre les précautions nécessaires et ne pas donner à l’opinion publique l’impression que, parce qu’il y aurait des caméras, tous les problèmes seraient résolus. Vous le savez vous-même, monsieur le ministre, ce serait loin d’être le cas.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 17, présenté par MM. C. Gautier et Anziani, Mme Klès, MM. Frimat et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Yung, Sueur, Guérini et Ries, Mme Boumediene-Thiery, M. Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 16, dernière phrase
Après les mots :
sont installées
insérer les mots :
et les maires des communes concernées
La parole est à M. Alain Anziani.
C’est un amendement de coordination. Il tend à compléter, au sein de l’article 17, la dernière phrase de l’alinéa 16. Celui-ci prévoit : « Lorsque le système comporte des caméras installées sur le territoire de plusieurs départements, l’autorisation est délivrée par le représentant de l’État dans le département dans lequel est situé le siège social du demandeur […]. Les représentants de l’État dans les départements dans lesquels des caméras sont installées en sont informés. »
Partout ailleurs, il est précisé que les maires sont informés, sauf dans ce cas-là. Lorsqu’un système concerne un département, les maires sont informés, mais quand il concerne plusieurs départements, ils ne le sont pas. Selon nous, il s’agit là d’une erreur. Il convient donc de préciser que, dans ce cas également, les maires des communes concernées sont informés.
Cet amendement tend à prévoir l’information des maires sur l’installation de systèmes de vidéosurveillance comportant des caméras installées sur le territoire de plusieurs départements.
L’information des maires est déjà prévue pour les systèmes mis en œuvre par les personnes morales – alinéa 13. À l’alinéa 16 visé par le présent amendement, il n’est question que des préfets en tant que compétents pour autoriser les systèmes.
La commission émet donc un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 87, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 23
Remplacer les mots :
de la Commission nationale de la vidéoprotection
par les mots :
conforme de la commission nationale de l'informatique et des libertés
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Compte tenu des enjeux, la vidéosurveillance exige un contrôle indépendant. Or la Commission nationale de vidéoprotection n’offre pas les garanties d’indépendance suffisantes en matière de protection de la vie privée et des libertés individuelles. Nous pensons que ce rôle doit être confié à une autorité publique, de composition pluraliste, ayant le souci de la chose publique.
Aucun intérêt autre que l’intérêt général ne doit primer. Les frontières entre les responsabilités publiques et les intérêts privés sont devenues si poreuses que la création de ce genre de structure, qui ouvre grand la porte à des personnalités qualifiées, nous fait craindre le pire.
Nous souhaitons donc que ces pouvoirs soient conférés à la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, afin que les libertés de nos concitoyens puissent être préservées.
L'amendement n° 20, présenté par MM. C. Gautier et Anziani, Mme Klès, MM. Frimat et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 23
Compléter cet alinéa par les mots :
et de la Commission nationale de l'informatique et des libertés
La parole est à M. Claude Domeizel.
L’alinéa 23 de l’article 17 rend obligatoire la consultation de la Commission nationale de vidéosurveillance préalablement à la publication de l’arrêté fixant les normes techniques auxquelles les systèmes de vidéosurveillance doivent être conformes. Si la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, devient l’instance de référence en matière de contrôle, il semble cohérent de l’associer à une telle mission.
Il s’agit donc d’un amendement de coordination. Le projet de loi ne prévoit que l’avis de la CNV, dont nous ne remettons pas en cause le rôle à ce stade du débat. D’ailleurs, l’article qui s’y rapporte a fait l’objet d’un vote conforme et n’est plus en discussion. Cependant, par cohérence avec le rôle que la CNIL doit jouer en matière de contrôle, il ne nous semblerait pas superflu de recueillir son avis.
Tel est l’objet de cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 21, présenté par MM. C. Gautier et Anziani, Mme Klès, MM. Frimat et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 28, première phrase
Supprimer les mots :
, selon le régime juridique dont le système relève,
La parole est à M. Claude Domeizel.
Nous abordons une question sensible qui concerne les pouvoirs de la CNIL en matière de contrôle des systèmes de vidéosurveillance.
Il existe une opposition entre l’Assemblée nationale et le Sénat sur le sujet.
Nous n’avons pas le même avis que nos collègues députés sur le rôle que la Commission nationale de l’informatique et des libertés doit jouer en la matière.
La commission des lois est revenue à la position qu’elle avait retenue en première lecture sur proposition de notre collègue Alex Türk, qui préside par ailleurs la CNIL. Nous en prenons acte.
Mais un doute subsiste encore dans la nouvelle rédaction, qui fait référence au « régime juridique dont le système relève ».
Une telle mention pourrait laisser sous-entendre que la compétence de la CNIL varierait selon que le système relève de la loi du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité ou de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
Si tel est le cas, en faisant allusion implicitement à la loi de 1995, qui fixe un régime spécifique, nous risquons de restreindre le champ du contrôle et d’affaiblir l’efficacité de la CNIL.
Le contrôle de la CNIL doit constituer un bloc qu’il ne faut surtout pas morceler, sous peine d’affadir le dispositif.
Notre amendement a pour objet de préciser les conditions de fond du contrôle et confie clairement cette mission à la CNIL sans risque particulier de dérapage ou de détournement.
Le présent amendement vise à supprimer la précision selon laquelle le contrôle de la CNIL s’exerce selon le « régime juridique dont le système relève ».
Pourtant, cette précision ajoutée par les députés est logique. La loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés concerne la protection des données personnelles, et non la vidéosurveillance de la voie publique, qui relève de la loi du 21 janvier 1995, visée par le présent article.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 86, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 28
I. - Deuxième phrase
Supprimer les mots :
et qui ne peut excéder trois mois
II. - Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La décision de fermeture de l'établissement peut être reconduite jusqu'à ce que le manquement ait cessé.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Aux termes de l’alinéa 25, le préfet, sur sa propre initiative ou à la demande de la commission départementale ou de la CNIL, pourra, après mise en demeure, ordonner la fermeture d’un établissement ouvert au public ayant maintenu des caméras de surveillance sans autorisation. Cette fermeture pourra durer au maximum trois mois.
Au terme de la première lecture, le Sénat a convenu de supprimer la référence au mot « maximale ». Or la rédaction de l’alinéa 28 de l’article 17 rétablit cette limite de trois mois, qu’il nous paraît toujours souhaitable de supprimer.
Si nous voulons que le dispositif institué par l’alinéa 28 ait une certaine efficacité, il paraîtrait logique de maintenir la fermeture jusqu’à ce que le manquement ait cessé. Il est probable que les décisions de fermeture soient très limitées. Dans ce cas, il vaudrait mieux prévoir que celles-ci puissent être prolongées tant que le manquement n’a pas cessé.
Comme l’amendement de M. Alex Türk a été adopté afin de revenir au texte initial du Sénat, nous vous proposons de le faire intégralement.
Le présent amendement tend à modifier de nouveau la procédure de fermeture administrative d’un établissement utilisant de manière irrégulière un système de vidéosurveillance.
Or le dispositif figurant à l’alinéa 34 de l’article 17 dans le texte de la commission – cette rédaction résulte, je vous le rappelle, de l’adoption d’un amendement que j’avais déposé – semble efficace et permet déjà de reconduire la sanction de fermeture de l’établissement.
Par conséquent, cet amendement est déjà satisfait. La commission en sollicite donc le retrait. À défaut, l’avis serait défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 22, présenté par MM. C. Gautier et Anziani, Mme Klès, MM. Frimat et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 28
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
À la demande de la commission départementale prévue au premier alinéa du présent III, de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ou de sa propre initiative, le représentant de l'État dans le département et, à Paris, le préfet de police, peut fermer pour une durée de trois mois, après mise en demeure non suivie d'effets dans le délai qu'elle fixe, un établissement ouvert au public dans lequel est maintenu un système de vidéoprotection sans autorisation. La décision de fermeture de l'établissement peut être reconduite jusqu'à ce que le manquement ait cessé.
La parole est à M. Alain Anziani.
Nous proposons de revenir à la rédaction que le Sénat avait adoptée avec beaucoup de sagesse en première lecture. Il s’agit de permettre au préfet de fermer temporairement, pour une durée de trois mois, les établissements qui ne respecteraient pas leurs obligations.
Je sais que nos collègues députés ont eu un autre raisonnement ; ils ont estimé que nous étions trop rigoureux et que notre dispositif était excessif. Mais ce n’est pas le cas ! Nous offrons simplement une possibilité au préfet ; il ne s’agit nullement d’une obligation ! En fonction des circonstances, le représentant de l’État « peut » prendre une telle décision, tout comme il « peut » ne pas la prendre. Je crois qu’il est effectivement sage de lui laisser une telle faculté.
Là encore, les dispositions du présent amendement font double emploi avec celles de l’alinéa 34, qui permettent la fermeture administrative d’un établissement ouvert au public utilisant un système de vidéoprotection sans autorisation.
La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 62 est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard.
L'amendement n° 88 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 37 à 40
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l’amendement n° 62.
Cet amendement concerne le dispositif de vidéosurveillance ad hoc.
Les alinéas 37 à 40 de l’article 17 ouvrent la possibilité pour le préfet de mettre en œuvre des systèmes de vidéosurveillance ad hoc pour toute manifestation ou rassemblement « de grande ampleur ». Aucune précision n’est d’ailleurs apportée quant au nombre de participants pouvant entrer dans cette catégorie. La notion de « grande ampleur » est déjà peu précise.
Surtout, il s’agit d’une orientation particulièrement inquiétante et liberticide, qui traduit parfaitement le type de société de surveillance à laquelle le Gouvernement souhaite nous soumettre.
La condition de la mise en œuvre de ce dispositif est, elle aussi, trop générale. En effet, le texte fait référence à l’existence de « risques particuliers d’atteinte à la sécurité des personnes et des biens ».
De notre point de vue, un tel critère, trop évasif, est une coquille vide qui permettra de filmer n’importe quel rassemblement, n’importe quelle manifestation, au mépris de la liberté de chacun de manifester ou de se réunir.
Peu importe que le rassemblement soit pacifique ou qu’il s’agisse d’une marche silencieuse ; les caméras seront présentes pour épier, et donc ficher, chaque participant !
À titre d’exemple, un enterrement pourrait constituer un événement « de grande ampleur » si un nombre important de personnes souhaitent se recueillir le jour des obsèques… Laissera-t-on filmer une telle réunion d’individus dès lors qu’un préfet y verra un risque pour la sécurité ? Qu’en sera-t-il du respect de la vie privée de chacun ?
Au-delà de cet exemple, et pour les autres catégories de manifestations, un tel dispositif porte en lui le germe d’une criminalisation toujours plus forte des mouvements sociaux. Il s’agit donc d’un réel outil de contrôle social.
Sous couvert de prévention, ce sont en réalité de véritables instruments de surveillance des manifestants, avec tout ce que cela implique en termes d’atteinte à nos libertés individuelles. Je pense notamment à la liberté de manifestation et de réunion de tout citoyen.
Nous refusons catégoriquement que l’espace public devienne demain un espace privé bis, régi par le numérique et le fichage des individus.
C'est la raison pour laquelle nous vous proposons de supprimer la possibilité de mettre en œuvre des systèmes de vidéosurveillance ad hoc.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l'amendement n° 88.
À partir de combien de personnes peut-on considérer une manifestation ou un rassemblement comme étant « de grande ampleur » ? Et quels sont les « risques particuliers d’atteinte à la sécurité des personnes et des biens » mentionnés à l’alinéa 39 ? Vous voyez bien qu’il n’est évidemment pas possible de retenir une telle rédaction !
Monsieur le ministre, mes chers collègues, si vous voulez que toutes les manifestations organisées par des syndicats soient filmées, dites-le clairement !
Au demeurant, nous constatons que les manifestations pacifiques de salariés sont souvent infiltrées par des casseurs. J’ai connu une époque – c’est le privilège de l’âge – où la police contrôlait les individus qui venaient à de tels rassemblements pour d’autres raisons que l’objet de la manifestation, le plus souvent armés de barres de fer…
Aujourd'hui, je continue de participer à des manifestations, et je constate que des personnes s’y infiltrent avec des barres de fer sans être appréhendées par la police, pourtant vigilante. C’est curieux…
Vous proposez à présent que les cortèges puissent être filmés. Mais, vous savez, ce n’est pas en visionnant les vidéos des manifestations une fois que les casseurs auront sévi que nous réglerons le problème !
Dites carrément que vous voulez surveiller les organisations et les militants syndicaux ; ce sera plus clair !
L'amendement n° 23, présenté par MM. C. Gautier et Anziani, Mme Klès, MM. Frimat et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 37
Remplacer la référence :
III bis
par la référence :
II
La parole est à M. Alain Anziani.
Je souscris aux arguments qui viennent d’être avancés.
De deux choses l’une : soit vous avez effectivement la volonté de filmer les manifestations publiques, qu’elles soient politiques, syndicales ou culturelles, et vous persévérez sans doute en ce sens ; soit il s’agit d’une erreur de rédaction ou, à tout le moins, d’une imprécision.
Dans ce dernier cas, vous devriez accepter cet amendement, qui vise à soumettre de telles formes de vidéosurveillance au contrôle préalable de la commission départementale. À cette fin, il suffit de remplacer la référence « III bis » par la référence « II ».
Ces amendements visent à supprimer la possibilité d’installer en urgence un système de vidéoprotection en cas de manifestations de grande ampleur. Ils sont donc contraires à la position de la commission des lois comme du Sénat, qui avaient opté pour une telle faculté en première lecture.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur les amendements n° 62, 88 et 23.
La réalité, c’est que l’objectif du projet de loi n’est évidemment pas de restreindre les libertés individuelles ou de porter atteinte au droit de manifester ! Nous souhaitons simplement garantir que des événements ou rassemblements de grande ampleur puissent avoir lieu sans perturbation ni risque pour la sécurité des participants.
Je vous répète et vous confirme que la vidéoprotection vise à protéger nos concitoyens des délinquants, et non l’inverse !
Comme l’a souligné M. le rapporteur, la notion de « manifestations de grande ampleur » fait référence aux rassemblements pour lesquels les forces de police ou de gendarmerie auront décelé des risques d’infiltration de la part d’éléments perturbateurs extérieurs. Il s’agit bien évidemment de manifestations rassemblant un très grand nombre de personnes.
Par conséquent, notre souci est bien de protéger nos concitoyens, et non de les épier.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 89, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 46
Supprimer cet alinéa.
II. - Alinéa 47
Remplacer les mots :
Commission nationale de la vidéoprotection
par les mots :
Commission nationale de l'informatique et des libertés
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Cet amendement s’inscrit dans la logique de ce que nous venons de dire sur la Commission nationale de la vidéoprotection.
L'amendement n° 24, présenté par MM. C. Gautier et Anziani, Mme Klès, MM. Frimat et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 47
Compléter cet alinéa par les mots :
et de la Commission nationale de l'informatique et des libertés
La parole est à M. Claude Domeizel.
Nous avons déjà défendu cette idée en présentant les amendements n° 19 et 20 : nous souhaitons que la CNIL devienne l’instance chargée du contrôle des dispositifs de vidéosurveillance. Nous voulons qu’elle élabore un corpus de règles à respecter sur tout le territoire afin d’éviter des décisions divergentes comme en ont parfois pris les commissions départementales.
C’est la raison pour laquelle nous pensons qu’il convient d’associer systématiquement la CNIL au contrôle, y compris en ce qui concerne les modalités d’application de l’article 10, sans remettre en cause son rôle.
Je croyais avoir bien expliqué que la CNV concevait, que la CNIL contrôlait et que les préfets délivraient les autorisations. La commission ne peut donc qu’être défavorable à ces deux amendements.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 17 est adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 63 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La Commission nationale de vidéoprotection remet chaque année au Parlement un rapport public rendant compte de son activité de conseil et d'évaluation de l'efficacité de la vidéoprotection et comprenant les recommandations destinées au ministre de l'intérieur en ce qui concerne les caractéristiques techniques, le fonctionnement ou l'emploi des systèmes de vidéoprotection.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
La Commission nationale de la vidéoprotection, placée sous la responsabilité du ministère de l’intérieur, aura pour principale mission de conseiller et d’évaluer l’efficacité de la vidéosurveillance.
Il faut admettre que ses pouvoirs sont en réalité très restreints, aucune précision supplémentaire ne nous étant apportée sur les moyens réels dont elle sera dotée.
Nous regrettons l’opacité de fonctionnement dans laquelle le projet de loi plonge la CNV : aucun de ses travaux, aucune de ses recommandations, aucun de ses avis ne sera publié ni communiqué au Parlement.
Nous devons mettre un terme à cette opacité en rendant publics les travaux de la CNV. C’est la raison pour laquelle nous proposons, au travers de cet amendement, que la CNV remette chaque année au Parlement un rapport sur sa mission de conseil et d’évaluation.
Ce rapport nous permettra de prendre connaissance de la manière dont la CNV exerce ses prérogatives, mais aussi d’apprécier régulièrement l’efficacité du dispositif de vidéosurveillance mis en place par ce projet de loi.
L'amendement n° 92, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La Commission nationale de l'informatique et des libertés remet chaque année au Parlement et au ministre de l'intérieur un rapport public rendant compte de son activité de contrôle des systèmes de vidéosurveillance et comprenant des recommandations pour remédier aux manquements qu'elle a constatés.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Si la vidéosurveillance est généralisée, il est nécessaire que la représentation nationale, afin de mieux légiférer, dispose d’une évaluation régulière du dispositif mis en place, particulièrement au regard de ses conséquences sur les libertés publiques, mais également sur les finances publiques. La CNIL paraît indubitablement l’organisme le mieux placé pour répondre à cette exigence.
L’amendement n° 63 rectifié tend à prévoir que la CNV remette un rapport annuel au Parlement sur son activité en matière de vidéosurveillance. Il ne semble pas souhaitable de multiplier les rapports au Parlement dans la mesure où ce dernier en reçoit déjà des quantités phénoménales. Quoi qu’il en soit, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
En ce qui concerne l’amendement n° 92, il ne paraît pas nécessaire de prévoir un rapport supplémentaire puisque la CNIL publie déjà un rapport annuel. Il serait plus simple que cette instance annexe un rapport d’évaluation à son propre rapport.
Sous le bénéfice de cette observation, la commission demande le retrait de cet amendement.
Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote sur l'amendement n° 63 rectifié.
Il faut bien que chacun se rende compte ici de la différence importante qui existe entre la CNIL, autorité administrative indépendante, qui remet un rapport annuel et qui rend des avis n’allant pas toujours dans le sens voulu par des divers gouvernements, de droite comme de gauche, – j’ai été membre de cette commission pendant plus de dix ans, je sais de quoi je parle – et la CNV, commission placée sous l’autorité du ministre de l’intérieur, totalement sous sa tutelle et sous son emprise, qui n’a aucune indépendance et ne présente aucune garantie pour le citoyen.
On le bien, le Gouvernement, encore une fois, comme il le fait actuellement avec le Défenseur des droits, veut supprimer toutes les commissions indépendantes qui le gênent par les avis qu’elles rendent !
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17.
Madame Assassi, l'amendement n° 92 est-il maintenu ?
(Suppression maintenue)
(Non modifié)
I. – Après l’article L. 126-1 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 126-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 126 -1 -1. – La transmission aux services chargés du maintien de l’ordre des images réalisées en vue de la protection des parties communes des immeubles collectifs à usage d’habitation lors de circonstances faisant redouter la commission imminente d’une atteinte grave aux biens ou aux personnes est autorisée sur décision de la majorité des copropriétaires dans les conditions fixées à l’article 25 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis et, dans les immeubles sociaux, du gestionnaire. Les images susceptibles d’être transmises ne doivent concerner ni l’entrée des habitations privées, ni la voie publique.
« Cette transmission s’effectue en temps réel et est strictement limitée au temps nécessaire à l’intervention des services de la police ou de la gendarmerie nationales ou, le cas échéant, des agents de la police municipale.
« Une convention préalablement conclue entre le gestionnaire de l’immeuble et le représentant de l’État dans le département précise les conditions et modalités de ce transfert. Cette convention prévoit l’information par affichage sur place de l’existence du système de prise d’images et de la possibilité de leur transmission aux forces de l’ordre.
« Lorsque la convention a pour objet de permettre la transmission des images aux services de police municipale, elle est en outre signée par le maire.
« Cette convention est transmise à la commission départementale de vidéoprotection mentionnée à l’article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité qui apprécie la pertinence des garanties prévues et en demande, le cas échéant, le renforcement au représentant de l’État dans le département.
« Ne sont pas soumis au présent article les systèmes utilisés dans des traitements automatisés ou contenus dans des fichiers structurés selon des critères permettant d’identifier, directement ou indirectement, des personnes physiques, qui sont soumis à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. »
II. – L’article 25 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est complété par un p ainsi rédigé :
« p) L’autorisation de transmettre aux services chargés du maintien de l’ordre les images réalisées en vue de la protection des parties communes, dans les conditions prévues à l’article L. 126-1-1 du code de la construction et de l’habitation. »
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 25 est présenté par MM. C. Gautier et Anziani, Mme Klès, MM. Frimat et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 90 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l’amendement n° 25.
Nous avons défendu un amendement similaire en première lecture.
Cet article n’est que la reprise de l’article 5 de la loi du 2 mars 2010 renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public, lequel, vous le savez, a été censuré par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 25 février 2010 au motif qu’il n’apportait pas de garanties suffisantes au respect de la vie privée.
Il est vrai que le Gouvernement a modifié la rédaction de cet article et que la commission des lois du Sénat a également retravaillé le texte. Néanmoins, à nos yeux, il n’est toujours pas conforme aux exigences constitutionnelles relatives au respect de la vie privée, notamment en ce qui concerne la transmission d’images prises dans les parties communes des immeubles, en particulier dans les parties communes intérieures.
Nous avions posé quelques questions et nous n’avons toujours pas obtenu de réponses. Qui prendra l’initiative du transfert des images ? Est-il suffisant de faire reposer l’autorisation de la transmission des images sur une majorité, même qualifiée, des copropriétaires ? Qu’en est-il du locataire ? Il est bien d’obtenir l’autorisation des copropriétaires, mais le locataire est, lui, directement impliqué ! Peut-on laisser à la convention seule le soin de déterminer les conditions générales et les modalités de ce transfert ?
Sur le plan pratique, le dispositif paraît inutile : en cas d’infraction imminente, une présence instantanée des forces de l’ordre pour empêcher que l’infraction ne soit commise est quasi impossible.
De surcroît, les traitements de données automatisés et structurés qui permettent d’identifier des personnes physiques sont interdits. Or, aujourd'hui, l’évolution des techniques rend possible le croisement à la fois des images et de la reconnaissance faciale, croisement qui peut tomber sous le coup de l’interdiction que je viens d’évoquer.
Je ne reviendrai pas sur ce que vient de dire mon collègue.
Je rappelle néanmoins que le Conseil constitutionnel a supprimé une disposition figurant dans la loi renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public, considérant que le législateur avait méconnu sa compétence en omettant de concilier le respect de la vie privée et d’autres exigences constitutionnelles.
Or, en dépit de quelques aménagements qui visent à détourner notre attention, le présent article tend à transformer les propriétaires et les bailleurs en agents de renseignement. Cette disposition n’est qu’une reprise du dispositif que le Conseil constitutionnel avait censuré. D’où notre amendement de suppression.
En première lecture, la commission des lois du Sénat a strictement encadré le dispositif de l’article 17 quater, en prévoyant, notamment, que la transmission d’images ne pourrait s’effectuer qu’en temps réel et pour un temps strictement nécessaire à l’intervention des forces de l’ordre.
Ces précisions définissent un bon équilibre entre la nécessaire efficacité des forces de police et de gendarmerie et le respect de la vie privée des habitants.
La commission est donc défavorable à la suppression de cet article.
L’installation des caméras dans les halls d’immeuble et le transfert des images sont bien sûr indispensables à l’accompagnement de l’action de la police, notamment en Seine-Saint-Denis, pour mettre fin à l’utilisation trop fréquente des parties communes par certains voyous et certains trafiquants.
L’article 17 quater vise à apporter les garanties demandées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 25 février 2010 sur le dispositif adopté dans la loi anti-bandes et qu’il avait annulé faute de précisions suffisantes.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n° 26, présenté par Mme Boumediene-Thiery, M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, MM. Yung, Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2, première phrase
Après les mots :
est autorisée
rédiger ainsi la fin de cette phrase :
à l'unanimité des copropriétaires présents ou représentés
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
II. - L'article 26–1 de la loi n° 65–557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 26–1. - La transmission des images des systèmes de vidéosurveillance aux services de police ou de gendarmerie nationales ou, le cas échéant, aux agents de la police municipale dans les cas prévus à l'article L. 126–1 du code de la construction et de l'habitation fait l'objet d'une autorisation qui est accordée par un vote à l'unanimité des voix des propriétaires. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Nous souhaitons que la transmission des images de vidéosurveillance aux autorités habilitées fasse l’objet d’une autorisation accordée à l’unanimité des voix des propriétaires.
À mon tour, je me permettrai un simple petit retour en arrière. Lors de l’examen de la loi renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public, où ce dispositif avait déjà été proposé, le Sénat dans sa grande sagesse avait conditionné, sur notre initiative, la transmission des images de vidéosurveillance à la police à une décision unanime des propriétaires réunis en assemblée générale.
L’Assemblée nationale avait balayé cette exigence et, quelques semaines après, le Conseil constitutionnel déclarait, dans la décision du 25 février 2010, le dispositif anticonstitutionnel, estimant qu’il ne présentait pas toutes les garanties de protection de la vie privée des occupants des logements.
C’est la raison pour laquelle je vous propose de rétablir cette obligation de respect de la vie privée. Nous sommes convaincus qu’elle figure, de manière implicite, parmi les exigences formulées par le Conseil constitutionnel dans la décision que je viens d’évoquer.
La loi du 10 juillet 1965, qui organise les votes en assemblée générale des copropriétaires prévoit, en son article 24, que dans le silence de la loi le vote est acquis à la majorité simple.
Cependant, il existe des domaines dans lesquels l’unanimité est requise. Par exemple, est prise à l’unanimité la décision de supprimer le service de concierge ou, surtout, d’installer un interphone à la porte d’entrée d’un immeuble. Ce dernier exemple est important puisqu’il concerne le recours aux nouvelles technologies, dont la vidéosurveillance fait partie.
Il serait intolérable d’imposer à un propriétaire la mise en place d’un tel système sans que son consentement n’ait été recueilli.
Aussi, cet amendement tend à prévoir que la transmission des images d’un système de vidéosurveillance est soumise à une décision de l’assemblée générale des copropriétaires prise à l’unanimité des propriétaires.
Dès l’examen de la loi du 2 mars 2010 renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public, la commission des lois avait estimé qu’il n’était pas réaliste d’imposer un vote à l’unanimité pour l’autorisation de transmission des images de caméras de vidéosurveillance aux forces de police et de gendarmerie.
L’Assemblée nationale a précisé le dispositif en prévoyant que cette autorisation serait donnée dans les mêmes conditions de majorité que l’autorisation donnée aux forces de l’ordre de pénétrer dans les parties communes des immeubles, ce qui est logique, puisque les deux dispositifs ont vocation à être complémentaires.
L’avis de la commission est donc défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 17 quater est adopté.
(Suppression maintenue)
(Non modifié)
I. – L’article L. 6342-2 du code des transports est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Ces fouilles et visites peuvent être réalisées, avec le consentement de la personne, au moyen d’un dispositif d’imagerie utilisant des ondes millimétriques dans les conditions visées à l’alinéa précédent. En cas de refus, la personne est soumise à un autre dispositif de contrôle.
« L’analyse des images visualisées est effectuée par des opérateurs ne connaissant pas l’identité de la personne et ne pouvant visualiser simultanément celle-ci et son image produite par le scanner corporel. L’image produite par le scanner millimétrique doit comporter un système brouillant la visualisation du visage. Aucun stockage ou enregistrement des images n’est autorisé.
« Un décret en Conseil d’État détermine les aéroports et destinations pour lesquels le recours au contrôle par dispositif d’imagerie utilisant les ondes millimétriques est autorisé. » ;
2° (Supprimé)
II. – Les troisième à cinquième alinéas de l’article L. 6342-2 du code des transports sont applicables durant une période de trois années à compter de la promulgation de la présente loi.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 91, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
« L'analyse des images visualisées transmises de manière sécurisée est effectuée par des opérateurs publics spécialement formés ne connaissant pas l'identité de la personne et ne pouvant visualiser simultanément celle-ci et son image produite par le scanner corporel. Aucun stockage ou enregistrement des images n'est autorisé.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Je suis en effet saisie d’un amendement n° 93, également présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, et ainsi libellé :
Alinéa 7
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. - Les troisième à cinquième alinéas de l'article L. 6342-2 du code des transports sont applicables durant une période de six mois à compter de la promulgation de la présente loi. À l'issue de cette période, une étude d'impact devra être réalisée et soumise au Gouvernement et au Parlement.
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
La visualisation des images obtenues à partir du scanner corporel des individus peut se révéler très intrusive et attentatoire à l’intimité des personnes.
Elle rend nécessaire la définition de conditions juridiques et techniques entourées de garanties suffisantes en matière de respect de la vie privée. À ce titre, le G 29 ainsi que la CNIL avaient émis un certain nombre de recommandations.
Parmi ces dernières figure notamment la restriction de la visualisation de telles images à des personnels habilités dans des locaux non ouverts au public. L’autorité indépendante insiste sur la formation des opérateurs aux impératifs de protection de la vie privée en préconisant aussi de limiter la conservation des images produites par ces scanners à la durée nécessaire au contrôle.
Par ailleurs, de sérieuses réserves peuvent être formulées quant à la non-dangerosité des ondes émises lors des contrôles. Aucune étude d’impact n’a été effectuée concernant l’innocuité de dispositifs recourant aux rayons X dans un contexte non médical. Songeons, par exemple, aux femmes enceintes.
Eu égard aux conséquences que les scanners pourraient avoir sur la santé des passagers, conséquences qu’il n’est d’ailleurs pas encore possible d’évaluer, il convient de limiter l’usage de ces instruments à une expérimentation qui ne pourra excéder six mois. Tel est le sens de l’amendement n° 93.
L'amendement n° 27, présenté par M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 4
1° Première phrase
Remplacer les mots :
par des opérateurs
par les mots :
dans des locaux non ouverts au public par des opérateurs dont les personnels sont spécialement habilités à cette tâche,
2° Après la première phrase :
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Cette analyse doit être accomplie par une personne du même sexe que la personne qui en fait l'objet.
II. - Alinéa 7
Remplacer les mots :
de trois années
par les mots :
d'une année
La parole est à M. Alain Anziani.
Le présent article traite des scanners corporels. On pourrait d’ailleurs penser que le débat est aujourd'hui clos puisque le Sénat a apporté au texte des modifications heureuses qui ont été acceptées par l’Assemblée nationale.
Pourtant, un gisement de progrès demeure, qui trouve son origine dans les propos tenus par notre collègue Alex Türk, par ailleurs président de la CNIL, en première lecture.
Il me semble que nous ne pouvons tourner la page aussi vite ; on n’a d’ailleurs pas repris la totalité des recommandations que la CNIL nous a fait parvenir par la voix de son président.
Celle-ci recommande notamment que la visualisation des images se fasse dans des locaux interdits au public et soit circonscrite à des personnels habilités. Considérant que cette préconisation est importante, nous la reprenons dans le présent amendement.
La CNIL a également précisé que l’analyse des images doit être opérée par une personne de même sexe que celle qui en fait l’objet. Une telle disposition existe déjà concernant les palpations de sécurité.
Nous vous proposons également de réduire le délai d’expérimentation, ce qui semble tout à fait possible puisque des expérimentations sont menées localement qui permettent aujourd’hui de réduire de trois années à une année la durée prévue dans le texte.
Les auteurs de l’amendement n° 91 proposent de modifier à nouveau le dispositif relatif aux scanners corporels.
Le texte adopté par la commission est équilibré et il n’est donc pas souhaitable de le remettre en cause.
La commission émet donc un avis défavorable.
L’amendement n° 27 a pour objet, entre autres, de réduire la durée d’expérimentation des scanners corporels à un an, au lieu de trois ans, ce qui semble insuffisant.
Il vise également à apporter de nouvelles précisions quant aux modalités d’utilisation des scanners, ce qui ne semble pas utile dans la mesure où la rédaction actuelle offre les garanties nécessaires.
La commission émet donc un avis défavorable.
L’amendement n° 93 tend à limiter à une durée de six mois l’expérimentation des scanners corporels, ce qui est manifestement insuffisant.
L’avis de la commission est donc également défavorable.
Le Gouvernement partage l’avis défavorable de la commission, madame la présidente.
Je préciserai simplement à M. Anziani que, si la durée de l’expérimentation est ramenée de trois ans à un an, aucune donnée stable ne pourra concrètement être utilisée après un temps d’exploitation aussi réduit. Surtout, aucune comparaison fiable avec les données des autres États de l’Union européenne ne pourra être faite et exploitée.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 73 rectifié, présenté par M. J. Gautier, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Un arrêté conjoint du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de l'intérieur détermine les aéroports dans lesquels le recours au contrôle par dispositif d'imagerie utilisant les ondes millimétriques est autorisé. »
La parole est à M. Jacques Gautier.
L’article 18 bis renvoie à un décret en Conseil d’État pour déterminer, d’une part, les aéroports et, d’autre part, les destinations pour lesquels est autorisé le recours au contrôle par dispositifs d’imagerie utilisant les ondes millimétriques, c’est-à-dire les dispositifs de détection corporelle ou scanners dont il vient d’être question.
Il me semblerait plus pratique de rédiger différemment l’alinéa 5 de l’article, et ce pour deux raisons.
Premièrement, dans un aéroport, ce sont les mêmes postes de filtrage et d’inspection qui sont utilisés, et ce quelle que soit la destination. Si l’on voulait appliquer le texte dans sa rédaction actuelle et donc distinguer suivant les destinations, il faudrait multiplier les équipements et les personnels ; le présent libellé me semble par conséquent inadapté. Je vous propose donc de supprimer la référence aux destinations, le filtrage étant de toute façon effectué en amont.
Deuxièmement, l’alinéa prévoit dans sa rédaction actuelle un décret en Conseil d’État, ce qui me semble quelque peu disproportionné, puisqu’il s’agit simplement d’énumérer des aéroports.
Je vous proposerai donc un simple arrêté interministériel qui ne porterait que sur la liste de ces aéroports sachant que – je tiens à rassurer nos collègues – la Direction générale de l’aviation civile, la DGAC, conserve le contrôle précis sur ces dispositifs.
Alors que le texte de la commission prévoit qu’un décret en Conseil d’État détermine la liste des aéroports et destinations pour lesquels le scanner millimétrique sera autorisé, l’auteur du présent amendement propose qu’un simple arrêté du ministre chargé de l’aviation civile et du ministre de l’intérieur fixe cette liste.
Cette simplification semble pertinente, des garanties nécessaires étant en tout état de cause fixées par la loi.
La commission a donc émis un avis favorable.
Le groupe socialiste votera contre cet amendement, bien entendu, car ce dernier tend à introduire un dispositif qui, bien que justifié, met en cause les libertés individuelles.
Qui peut décider des aéroports et des destinations ? C’est la juridiction administrative, et non un ministre, fût-ce par arrêté interministériel, car le ministre serait alors juge et partie. Or tout ce qui concerne les libertés publiques doit faire l’objet d’une décision prise par les juridictions administratives ou judiciaires.
Le groupe socialiste est donc radicalement opposé à cet amendement, qui montre encore la dérive de nos libertés publiques.
L'amendement est adopté.
L'article 18 bis est adopté.
(Non modifié)
Après l’article L. 1332-2 du code de la défense, il est inséré un article L. 1332-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1332 -2 -1. – L’accès à tout ou partie des établissements, installations et ouvrages désignés en application du présent chapitre est autorisé par l’opérateur qui peut demander l’avis de l’autorité administrative compétente dans les conditions et selon les modalités définies par décret en Conseil d’État.
« L’avis est rendu à la suite d’une enquête administrative qui peut donner lieu à la consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire et de traitements automatisés de données à caractère personnel relevant de l’article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, à l’exception des fichiers d’identification.
« La personne concernée est informée de l’enquête administrative dont elle fait l’objet. »
L'amendement n° 28, présenté par M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.
La parole est à M. Alain Anziani.
Je suis en effet saisie d’un amendement n° 29, également présenté par M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, et ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
et du sens de l'avis rendu
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
Il s’agit des fichiers, encore et toujours ! C’est dire s’il importe d’être attentif au contrôle de l’utilisation qui en est faite et de leur contenu.
Nous proposons de revenir à l’intention qui avait été celle du Sénat en première lecture en prévoyant qu’un décret en Conseil d’État, après avis de la CNIL, précisera les fichiers pouvant être consultés dans le cadre des enquêtes administratives prévues pour autoriser l’accès aux points d’importance vitale.
Au travers de l’amendement n° 28, il est proposé de préciser que la liste des traitements de données personnelles pouvant être consultés dans le cadre d’enquêtes administratives sur les personnes souhaitant accéder aux points d’importance vitale est fixée par décret en Conseil d’État après avis de la CNIL.
Or cette procédure est inutile puisque les décrets portant création des fichiers devront eux-mêmes être modifiés après avis de la CNIL pour pouvoir être utilisés dans des enquêtes administratives.
La commission émet donc un avis défavorable.
L’amendement n° 29 tend à rétablir le texte adopté par le Sénat en première lecture, qui prévoyait que la personne faisant l’objet d’une enquête administrative était informée non seulement de l’existence de cette enquête mais également du sens de l’avis rendu.
Une telle information peut effectivement permettre à la personne concernée de s’apercevoir qu’elle fait l’objet d’une mention erronée dans un fichier de police.
L’avis de la commission est donc favorable.
Les points d’importance vitale sont des lieux où s’exercent des activités qui ont trait à la production ou à la distribution de biens ou de services indispensables pour notre pays. Pour le dire clairement, je pense notamment aux centrales nucléaires.
Pour des raisons de sécurité nationale, il faut définir très strictement les conditions d’accès et prévoir une procédure offrant aux opérateurs un certain nombre d’assurances. Par conséquent, dans l’exemple que je viens de citer, il va de soi qu’une telle procédure doit être entourée d’une grande discrétion.
L’enquête administrative réalisée dans ce cadre se fonde sur la consultation de traitements informatisés d’informations qui relèvent de la loi Informatique et libertés. Le régime de protection des données à caractère personnel, le droit d’accès à ces données et les conditions de recours sont donc très clairement d’ores et déjà prévus par le droit actuel.
Pour le Gouvernement, il n’est par conséquent pas utile de définir un régime différent pour la communication des informations qui concernent les personnes demandant à avoir accès à un point d’importance vitale.
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
L'article 19 est adopté.
(Non modifié)
I. – La loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 réglementant les activités privées de sécurité est ainsi modifiée :
1° Après l’article 33, il est inséré un titre II bis ainsi rédigé :
« TITRE II bis
« DU CONSEIL NATIONAL DES ACTIVITÉS PRIVÉES DE SÉCURITÉ
« Art. 33 -1 A. – Sont soumises aux dispositions du présent titre, dès lors qu’elles ne sont pas exercées par un service public administratif, les activités visées aux titres Ier et II exercées par les personnes physiques ou morales, opérant pour le compte d’un tiers ou pour leur propre compte.
« Art. 33 -1 B. – Le Conseil national des activités privées de sécurité, personne morale de droit public, est chargé :
« 1°
Supprimé
« 2° D’une mission de police administrative. Il délivre, suspend ou retire les différents agréments, autorisations et cartes professionnelles prévus par la présente loi ;
« 3° D’une mission disciplinaire. Il assure la discipline de la profession et prépare un code de déontologie de la profession approuvé par décret en Conseil d’État. Ce code s’applique à l’ensemble des activités visées aux titres Ier et II ;
« 4° D’une mission de conseil et d’assistance à la profession.
« Le Conseil national des activités privées de sécurité remet au ministre de l’intérieur un rapport annuel dans lequel est établi le bilan de son activité. Il peut émettre des avis et formuler des propositions concernant les métiers de la sécurité privée et les politiques publiques qui leur sont applicables.
« Art. 33 -1 C. – Le Conseil national des activités privées de sécurité est administré par un collège composé :
« – de représentants de l’État, de magistrats de l’ordre judiciaire et de membres des juridictions administratives ;
« – de personnes issues des activités privées de sécurité visées aux titres Ier et II ;
« – de personnalités qualifiées.
« La répartition des sièges, qui assure une majorité aux représentants de l’État, aux magistrats de l’ordre judiciaire et aux membres des juridictions administratives, ainsi que le mode de désignation des membres sont déterminés par un décret en Conseil d’État.
« Le président du collège est élu par les membres de ce collège. Il dispose d’une voix prépondérante en cas de partage. Il représente le Conseil national des activités privées de sécurité.
« Le collège comprend en son sein une formation spécialisée, la commission nationale d’agrément et de contrôle. Elle est composée, pour au moins trois quarts de ses membres, de représentants de l’État, de magistrats de l’ordre judiciaire et de membres des juridictions administratives. Elle élit son président parmi les membres mentionnés au deuxième alinéa du présent article.
« Art. 33 -1 D. – Le financement du conseil est assuré par une cotisation dont le taux et l’assiette sont fixés par la loi de finances.
« Le collège arrête son règlement intérieur qui fixe les modalités de fonctionnement du conseil.
« Art. 33 -1 E. – Dans chaque région, une commission régionale d’agrément et de contrôle est chargée, au nom du Conseil national des activités privées de sécurité :
« 1° De délivrer les autorisations, agréments et cartes professionnelles prévus aux articles 3-2, 5, 6, 6-1, 7, 11, 22, 23, 23-1 et 25 ;
« 2° De refuser, retirer ou suspendre les agréments, autorisations et cartes professionnelles pour exercer ces activités dans les conditions prévues aux articles 5, 6, 12, 22, 23 et 26 ;
« 3° De prononcer les sanctions disciplinaires prévues à l’article 33-1 F.
« Elle est composée selon les mêmes modalités que la commission nationale d’agrément et de contrôle. Elle élit son président parmi les représentants de l’État, les magistrats de l’ordre judiciaire ou les membres des juridictions administratives. Son président exerce les décisions qu’appelle l’urgence.
« Les commissions régionales d’agrément et de contrôle peuvent être regroupées en commissions interrégionales.
« Art. 33 -1 F. – Tout manquement aux lois, règlements et obligations professionnelles et déontologiques applicables aux activités privées de sécurité peut donner lieu à sanction disciplinaire. Le conseil ne peut être saisi de faits remontant à plus de trois ans s’il n’a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction.
« Les sanctions disciplinaires applicables aux personnes physiques et morales exerçant les activités définies aux titres Ier et II sont, compte tenu de la gravité des faits reprochés : l’avertissement, le blâme et l’interdiction d’exercice de l’activité privée de sécurité à titre temporaire pour une durée qui ne peut excéder cinq ans. En outre, les personnes morales et les personnes physiques non salariées peuvent se voir infliger des pénalités financières. Le montant des pénalités financières doit être fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages tirés du manquement, sans pouvoir excéder 3 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos calculé sur une période de douze mois. Ce maximum est porté à 5 % en cas de nouvelle violation de la même obligation.
« Art. 33 -1 G. – Tout recours contentieux formé par une personne physique ou morale à l’encontre d’actes pris par une commission régionale d’agrément et de contrôle est précédé d’un recours administratif préalable devant la commission nationale d’agrément et de contrôle, à peine d’irrecevabilité du recours contentieux.
« Art. 33 -1 H. – I. – Les membres et les agents du Conseil national des activités privées de sécurité ainsi que les membres des commissions régionales assurent le contrôle des personnes exerçant les activités visées aux titres Ier et II. Ils peuvent, entre six heures et vingt et une heures, pour l’exercice de leurs missions, accéder aux locaux à usage professionnel de l’employeur ou du donneur d’ordres, à l’exclusion des locaux affectés au domicile privé, ainsi qu’à tout site d’intervention des agents exerçant les activités visées aux mêmes titres Ier et II, en présence de l’occupant des lieux ou de son représentant. Le procureur de la République territorialement compétent en est préalablement informé.
« II. – En cas d’opposition du responsable des lieux ou de son représentant, la visite ne peut se dérouler qu’avec l’autorisation du juge des libertés et de la détention statuant au siège du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les locaux à visiter.
« Ce magistrat est saisi à la requête du président de la commission nationale ou de la commission régionale d’agrément et de contrôle. Il statue par une ordonnance motivée, conformément aux dispositions des articles 493 à 498 du code de procédure civile. La procédure est sans représentation obligatoire.
« La visite s’effectue sous l’autorité et le contrôle du juge qui l’a autorisée. Celui-ci peut se rendre dans les locaux durant l’intervention. À tout moment, il peut décider de l’arrêt ou de la suspension de la visite.
« Le responsable des lieux ou son représentant est informé de la faculté de refuser cette visite et du fait qu’en ce cas elle ne peut intervenir qu’avec l’autorisation du juge des libertés et de la détention.
« III. – Les membres et les agents des commissions nationale et régionales d’agrément et de contrôle peuvent demander communication de tout document nécessaire à l’accomplissement de leur mission, quel qu’en soit le support, et en prendre copie ; ils peuvent recueillir, sur place ou sur convocation, tout renseignement et toute justification utiles. Ils peuvent consulter le registre unique du personnel prévu à l’article L. 1221-13 du code du travail. Ils peuvent, à la demande du président de la commission nationale ou de la commission régionale d’agrément et de contrôle, être assistés par des experts désignés par l’autorité dont ceux-ci dépendent. Il est dressé contradictoirement un compte rendu de visite en application du présent article dont une copie est remise immédiatement au responsable de l’entreprise.
« Art. 33 -1 I. – Les membres et le personnel du Conseil national des activités privées de sécurité sont tenus au secret professionnel.
« Art. 33 -1 J. – Le Conseil national des activités privées de sécurité peut recruter des salariés soumis aux dispositions du code du travail, des agents contractuels de droit public ou des fonctionnaires détachés auprès de lui. Le directeur du Conseil national des activités privées de sécurité est nommé par décret, sur proposition du ministre de l’intérieur.
« Art. 33 -1 K. – Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent titre. » ;
2° L’article 3-2 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « le préfet » sont remplacés, deux fois, par les mots : « la commission régionale d’agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité » ;
b) Le dernier alinéa est supprimé ;
3° L’article 5 est ainsi modifié :
a) Au 1°, les mots : « la Communauté » sont remplacés par les mots : « l’Union » ;
b) Au 4°, la référence : « chapitre V du titre II » est remplacée par la référence : « chapitre III du titre V » et les mots : « la Communauté » sont remplacés par les mots : « l’Union » ;
c) À l’avant-dernier alinéa, après le mot : « consultation », sont insérés les mots : «, par des agents des commissions nationale et régionales d’agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité spécialement habilités par le représentant de l’État territorialement compétent et individuellement désignés, » ;
d) La seconde phrase du dernier alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« En cas d’urgence, le président de la commission régionale d’agrément et de contrôle peut suspendre l’agrément. En outre, le représentant de l’État peut suspendre l’agrément en cas de nécessité tenant à l’ordre public. » ;
4° L’article 6 est ainsi modifié :
a) Au 2°, après le mot : « consultation », sont insérés les mots : «, par des agents des commissions nationale et régionales d’agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité spécialement habilités par le représentant de l’État territorialement compétent et individuellement désignés, » ;
b) Après le 3°, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
« 3° bis Pour un ressortissant étranger, s’il ne dispose pas d’un titre de séjour lui permettant d’exercer une activité sur le territoire national après consultation des traitements de données à caractère personnel relevant des dispositions de l’article D. 611-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile par des agents des commissions nationale et régionales d’agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité spécialement habilités par le représentant de l’État territorialement compétent et individuellement désignés ; » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d’urgence, le président de la commission régionale d’agrément et de contrôle peut retirer la carte professionnelle. En outre, le représentant de l’État peut retirer la carte professionnelle en cas de nécessité tenant à l’ordre public. » ;
5° Les articles 7 et 25 sont ainsi modifiés :
a) Aux première et seconde phrases du premier alinéa du I, les mots : « du préfet du département » sont remplacés par les mots : « de la commission régionale d’agrément et de contrôle » et les mots : « ou, à Paris, auprès du préfet de police » sont supprimés ;
b) Au premier alinéa du II, les mots : « du préfet de police » sont remplacés par les mots : « de la commission régionale d’agrément et de contrôle d’Île-de-France » ;
c) Au IV, les mots : « du préfet ou, à Paris, auprès du préfet de police » sont remplacés par les mots : « de la commission régionale d’agrément et de contrôle » ;
6° Les articles 9-1 et 28 sont ainsi modifiés :
a) Au premier alinéa, les mots : « l’autorité administrative » sont remplacés par les mots : « la commission régionale d’agrément et de contrôle » ;
b) Aux premier et second alinéas, les mots : « la Communauté » sont remplacés par les mots : « l’Union » ;
7° À la seconde phrase du second alinéa du II des articles 12 et 26, après les mots : « autorité administrative », sont insérés les mots : « ou la commission régionale d’agrément et de contrôle » ;
8° Le dernier alinéa des articles 13 et 30 est complété par les mots : «, ainsi qu’à la commission régionale d’agrément et de contrôle » ;
9° Après le 1° du II de l’article 14, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis Le fait de sous-traiter l’exercice d’une activité mentionnée à l’article 1er à une entreprise employant des personnes dépourvues de la carte professionnelle visée à l’article 6 ; » ;
10° Après le 1° du II de l’article 14-1, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis De sous-traiter l’exercice d’une activité mentionnée à l’article 1er à une entreprise employant des personnes dépourvues de la carte professionnelle visée à l’article 6 ; » ;
11° L’article 17 est ainsi rétabli :
« Art. 17. – Les entreprises individuelles ou les personnes morales exerçant les activités mentionnées au présent titre justifient d’une assurance couvrant leur responsabilité professionnelle, préalablement à leur entrée. » ;
12° L’article 22 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « délivré », sont insérés les mots : « par la commission régionale d’agrément et de contrôle » ;
b) Au 1°, les mots : « la Communauté » sont remplacés par les mots : « l’Union » ;
c) Au 4°, la référence : « chapitre V du titre II » est remplacée par la référence : « chapitre III du titre V » et les mots : « la Communauté » sont remplacés par les mots : « l’Union » ;
d) À l’avant-dernier alinéa du 7°, après le mot : «, consultation, », sont insérés les mots : «, par des agents des commissions nationale et régionales d’agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité spécialement habilités par le représentant de l’État territorialement compétent et individuellement désignés, » ;
e) La seconde phrase du dernier alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« En cas d’urgence, le président de la commission régionale d’agrément et de contrôle peut retirer la carte professionnelle. En outre, le représentant de l’État peut retirer la carte professionnelle en cas de nécessité tenant à l’ordre public. » ;
13° L’article 23 est ainsi modifié :
a) Le 1° est abrogé ;
b) Après le 2°, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis Pour un ressortissant étranger, s’il ne dispose pas d’un titre de séjour lui permettant d’exercer une activité sur le territoire national après consultation des traitements de données à caractère personnel relevant des dispositions de l’article D. 611-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile par des agents des commissions nationale et régionales d’agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité spécialement habilités par le représentant de l’État territorialement compétent et individuellement désignés ; » ;
c) Au 4°, après le mot : «, consultation, », sont insérés les mots : «, par des agents des commissions nationale et régionales d’agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité spécialement habilités par le représentant de l’État territorialement compétent et individuellement désignés, » ;
d) Le dernier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le respect de ces conditions est attesté par la détention d’une carte professionnelle délivrée par la commission régionale d’agrément et de contrôle selon des modalités définies par décret en Conseil d’État. La carte professionnelle peut être retirée lorsque son titulaire cesse de remplir l’une des conditions prévues aux 2°, 4° ou 5°.
« En cas d’urgence, le président de la commission régionale d’agrément et de contrôle peut retirer la carte professionnelle. En outre, le représentant de l’État peut retirer la carte professionnelle en cas de nécessité tenant à l’ordre public. » ;
14° Après l’article 23, il est inséré un article 23-1 ainsi rédigé :
« Art. 23 -1. – I. – L’accès à une formation en vue d’acquérir l’aptitude professionnelle est soumis à la délivrance d’une autorisation préalable, fondée sur le respect des conditions fixées aux 2°, 4° et 5° de l’article 23.
« II. – Par dérogation à l’article 23, une autorisation provisoire d’être employé pour participer à une activité mentionnée à l’article 20 est délivrée à la personne non titulaire de la carte professionnelle, sur sa demande, au vu des conditions fixées aux 2°, 4° et 5° de l’article 23. Toute personne physique ou morale exerçant une activité mentionnée à l’article 20 concluant un contrat de travail avec une personne titulaire de cette autorisation lui assure la délivrance sans délai d’une formation en vue de justifier de l’aptitude professionnelle. La personne titulaire de l’autorisation provisoire susvisée ne peut pas être affectée à un poste correspondant à une activité mentionnée au même article 20.
« La période d’essai du salarié est prolongée d’une durée égale à celle de la période de formation visée au premier alinéa du présent II, dans la limite maximale d’un mois, à défaut de stipulation particulière d’une convention ou d’un accord collectifs étendus. » ;
15° Après l’article 30, il est inséré un article 30-1 ainsi rédigé :
« Art. 30 -1. – Les entreprises individuelles ou les personnes morales exerçant les activités mentionnées au présent titre justifient d’une assurance couvrant leur responsabilité professionnelle, préalablement à leur entrée. » ;
16° L’article 31 est ainsi modifié :
a) Le II est ainsi rédigé :
« II. – Est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende :
« 1° Le fait d’exercer l’activité mentionnée à l’article 20 en méconnaissance de l’article 21 ;
« 2° Le fait d’employer une personne non titulaire de la carte professionnelle visée à l’article 23 en vue de la faire participer à l’activité mentionnée à l’article 20. » ;
a bis) Au 1° du III, les mots : « ou la déclaration prévue au 1° de l’article 23 » sont supprimés ;
b) Au 3° du III, les mots : « des dispositions des 2° à 5° » sont supprimés ;
c) Il est ajouté un V ainsi rédigé :
« V. – Est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende le fait de conclure un contrat de travail en tant que salarié d’une entreprise exerçant l’activité mentionnée à l’article 20 en vue de participer à cette activité sans être titulaire de la carte professionnelle visée à l’article 23. » ;
17° L’article 35 est ainsi modifié :
a) Au début du premier alinéa, les mots : « Les dispositions du titre Ier » sont remplacés par les références : « Les titres Ier, II bis et III » ;
b) Après le 2°, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis En Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, la commission régionale d’agrément et de contrôle est dénommée “commission locale d’agrément et de contrôle” ; ».
II. – Les agréments et autorisations délivrés en application des articles 5, 7, 11, 22 et 25 de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 réglementant les activités privées de sécurité, en cours de validité au jour de la publication du décret d’application du présent article, restent valables, sous réserve du dépôt d’un dossier de demande d’agrément ou d’autorisation dans les trois mois suivant cette publication.
Les cartes professionnelles délivrées en application de l’article 6 et les agréments délivrés en application de l’article 3-2 de la même loi, en cours de validité au jour de la publication du décret d’application du présent article, restent valables jusqu’à leur expiration.
Les personnes autorisées à exercer l’activité visée au titre II en application de l’article 23 de la même loi, au jour de la publication du décret d’application du présent article, sont autorisées à poursuivre leur activité, sous réserve du dépôt d’un dossier de demande de carte professionnelle dans un délai d’un an suivant la publication du même décret d’application.
III. –
Supprimé
L'amendement n° 94, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Nous proposons la suppression de l’article, car nous sommes résolument défavorables à la création d’un conseil national des activités privées de sécurité.
On nous opposera sans doute que la création d’un tel conseil vise à surveiller les activités de sécurité privées ; certes.
Mais force est de constater que, selon le cadre que vous avez défini, ce conseil est en réalité destiné à légitimer, à développer, à favoriser ou, en tout cas, à accompagner la substitution de la sécurité privée à la sécurité publique que vous souhaitez.
Et, de fait, les activités de sécurité privées prolifèrent et s’étoffent.
Évidemment, nous ne pouvons pas entrer dans votre jeu et faire comme si cette initiative était positive. Nous sommes au contraire très sceptiques devant l’extension de la sécurité privée. Faut-il, mes chers collègues, vous rappeler le reportage somme toute assez divertissant qu’a diffusé France 2 le mois dernier, dans lequel on nous montrait deux journalistes s’embarquer sans aucune difficulté dans un avion alors qu’ils avaient une arme dans leurs bagages ? Or la sécurité aéroportuaire, ô combien nécessaire, comme chacun le sait, est assurée par des sociétés privées…
En fait, l’objectif numéro un de telles entreprises est d’obtenir des marchés et de paraître performantes, tandis que leur objectif numéro un bis est de réaliser des profits ! Un boulevard peut donc séparer leurs promesses et leurs actions effectives. Et un conseil national n’y changera rien.
Se pose également une question de principe, sans parler des risques gravissimes de marchandage des données personnelles de nos concitoyens. Aujourd’hui, seules les personnes publiques peuvent consulter les fichiers STIC, JUDEX, CRISTINA ou autres. On nous a expliqué que l’existence du CNAPS devrait permettre de savoir si un candidat à un emploi dans la sécurité privée répond aux conditions fixées par la loi. Il s’agit donc bel et bien de réaliser une enquête de police administrative. Or nous maintenons que les prérogatives en ce domaine ne peuvent être déléguées à des opérateurs privés.
Au terme de cette externalisation que vous ne cessez de vouloir pousser toujours un peu plus avant, que se passera-t-il ?
Telles sont les raisons pour lesquelles nous disons d’ores et déjà : « Stop ! ». Nous sommes opposés à la création de ce conseil.
La commission des lois considère que la création du CNAPS constitue une avancée importante. Elle est donc défavorable à cet amendement de suppression.
Le Gouvernement émet le même avis que la commission.
Je souhaite cependant apporter quelques précisions.
Depuis plusieurs années, les entreprises privées de sécurité sont devenues des acteurs à part entière de la protection de nos concitoyens. Aujourd’hui, environ 120 000 salariés travaillent dans ce secteur. Selon l’organisme professionnel qui les fédère, ces entreprises recruteront près de 10 000 agents chaque année d’ici à dix ans. C’est dire l’importance de cette activité.
Depuis longtemps, dans le champ de la sécurité, certaines compétences sont partagées, voire déléguées. Tel est le cas pour ce qui concerne la surveillance des stades et de bâtiments publics, le transport de personnes et de fonds. Une réglementation assez précise, issue notamment de la loi de 1983, existe déjà.
Aujourd’hui, compte tenu du rôle croissant des activités privées de sécurité – sur ce point, vous avez raison, madame le sénateur –, les professionnels eux-mêmes veulent que la qualité et la déontologie de leur métier soient améliorées, sous le contrôle de l’État. Il faut donc renforcer les contrôles, doter la profession d’un véritable code de déontologie, tout en améliorant la formation professionnelle des salariés.
Il est proposé de créer un conseil national des activités privées de sécurité, autorité unique qui aura un rôle à la fois de régulation, de contrôle et un rôle disciplinaire à l’égard des salariés et des entreprises. Il prendra en charge notamment l’instruction et la délivrance des différents agréments et des cartes professionnelles, et, par conséquent, leur retrait éventuel.
Ce conseil sera administré par un collège au sein duquel l’État, qui ne se désengage donc pas, sera majoritaire. Il sera financé par les cotisations des membres de la profession. Les modalités de son financement seront définies lors de l’examen d’un prochain projet de loi de finances rectificative.
Vous le voyez, il n’y a là aucun abandon de la part de l’État.
Par ailleurs, anticipant quelque peu sur la suite de la discussion, je vous présenterai d’ores et déjà, mesdames, messieurs les sénateurs, les amendements n° 56 rectifié et 58 que le Gouvernement a déposés.
Afin de prendre en compte les observations des représentants des agents de sécurité privée, l’amendement n° 56 rectifié a pour objet de préciser que ceux-ci seront consultés sur toute proposition relative aux conditions de travail que pourrait formuler le CNAPS.
L’amendement n° 58, quant à lui, tend à supprimer la plage horaire limitative des contrôles prévue par le présent projet de loi.
Vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, les entreprises de sécurité privées et leurs personnels exercent très fréquemment leur activité de nuit ou à des heures tardives. Par conséquent, compte tenu de leur rythme de travail, les contrôles doivent pouvoir avoir lieu à ce moment.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 30, présenté par M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéas 8, 22 et 23
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Alain Anziani.
Nous sommes en présence d’une délégation de missions de police administrative au profit d’un organisme privé, délégation qui n’est pas sans poser des problèmes de principe et d’éthique. Les agents du CNAPS vont pouvoir consulter les fichiers, en particulier STIC et JUDEX, sans cependant disposer de la même formation, ni relever des mêmes obligations, et sans être éventuellement soumis aux mêmes contrôles que les agents assermentés appartenant aux forces de police ou concourant à ce type de missions. Il existe donc une incertitude.
On risque d’ouvrir une brèche dans la nécessaire protection des données personnelles.
Par ailleurs, monsieur le ministre, comment le CNAPS va-t-il coexister avec la délégation interministérielle à la sécurité privée, mise en place sous la tutelle du ministère de l’intérieur ?
Le présent amendement tend à supprimer les missions de police administrative du CNAPS.
Or celui-ci sera un établissement public dirigé notamment par des représentants de l’État et des magistrats, qui présenteront toutes les garanties pour remplir ces missions.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 134 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet, Chevènement et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 11, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Ce rapport est rendu public.
La parole est à M. Jacques Mézard.
Avec cet amendement, nous souhaitons que le rapport prévu à l’alinéa 11 de l’article 20 quinquies soit rendu public.
Monsieur le ministre, je vous ai écouté avec attention. Vous nous avez indiqué que, dans les années qui viennent, 10 000 emplois allaient être créés dans les sociétés de sécurité privées. Pour notre part, nous aurions préféré qu’ils le soient dans le secteur de l’industrie… C’est une évolution, et nous la constatons.
Du point de vue des principes, nous ne sommes pas favorables à un transfert systématique vers des prestataires privés de missions qui relèvent en grande partie du service public.
Mais, à partir du moment où cette évolution est de plus en plus prégnante, nous pouvons espérer que la création d’un conseil national des activités privées de sécurité permettra de mieux réguler une profession qui connaît de nombreuses parts d’ombre et dont la réputation est sulfureuse, souvent à juste titre, d’ailleurs.
L’opacité qui règne dans ce milieu fait encore la part belle aux officines privées ou aux conflits d’intérêts douteux entre puissance publique et intérêts privés très lucratifs.
C’est donc dans le souci d’améliorer la transparence d’une profession qui aura de toute façon tout à y gagner que nous souhaitons que le rapport remis par le CNAPS au ministre de l’intérieur soit rendu public, afin de renforcer l’information des citoyens et de leurs représentants.
En tout état de cause, on voit mal ce qui pourrait s’opposer à une telle publication dès lors que le rapport en question établit le bilan annuel des activités du futur conseil et que d’autres autorités de régulation procèdent à une telle publicité.
Le présent amendement a pour objet de rendre public le rapport annuel que remet le CNAPS au ministre de l’intérieur.
La commission est partagée entre deux sentiments.
D’une part, une telle publicité serait intéressante, et, au titre de la recherche de la transparence, on ne peut qu’y souscrire, mais, d’autre part, elle risquerait d’aboutir à la remise d’un rapport moins complet, ne comportant que des éléments statistiques, un rapport qui ne serait donc plus qu’une simple coquille vide.
C’est pourquoi la commission s’en remet à la sagesse… du Gouvernement !
Tout d’abord, je souhaite revenir sur l’amendement n° 30, afin d’apporter une réponse à la question posée par M. Anziani. Le CNAPS va gérer des situations individuelles – la délivrance et le retrait d’agréments – et le délégué interministériel à la sécurité privée, que j’ai nommé au mois de septembre et qui connaît bien les questions aéroportuaires, va coordonner les moyens et les actions des administrations. Par conséquent, les deux entités coexisteront.
J’en viens à l’amendement n° 134 rectifié.
Monsieur Mézard, je vais sans doute vous conforter dans votre idée selon laquelle le Gouvernement n’émet le plus souvent que des avis négatifs sur vos propositions. Je remarque cependant que, hier soir, vous avez remporté un véritable triomphe, car plusieurs de vos amendements, après avoir reçu un double avis favorable et de la commission et du Gouvernement, ont été adoptés. De grâce, ne vous plaignez pas trop !
Sourires.
Plus sérieusement, je vous fais observer que le rapport remis par le CNAPS est susceptible de comporter des informations concernant les employeurs et les salariés des entreprises de sécurité qui, selon moi, ne doivent pas être portées à la connaissance de tous. Il s’agit non pas de cacher quoi que ce soit en ne rendant pas un rapport public, mais de respecter une certaine discrétion.
C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable.
Je reste interloqué devant les explications de M. le rapporteur, animé, d’une part, par le souci de la transparence et, d’autre part, par la crainte d’une autocensure qui viderait le rapport de sa substance.
Le dossier est très sensible, et il mérite que nous relisions ensemble l’alinéa 11 de l’article 20 quinquies : « Le Conseil national des activités privées de sécurité remet au ministre de l’intérieur un rapport annuel dans lequel est établi le bilan de son activité. Il peut émettre des avis et formuler des propositions concernant les métiers de la sécurité privée et les politiques publiques qui leur sont applicables. » Il faut donc distinguer le bilan, dont on ne voit pas pourquoi, contrairement à ce que pensent la commission et le Gouvernement, il devrait rester secret, et les avis et propositions, dont je n’ai jamais demandé qu’ils soient rendus publics.
Monsieur le ministre, autant je peux comprendre que les avis et propositions transmis au ministre de l’intérieur ne soient pas divulgués, autant j’estime que l’absence de publication d’un rapport établissant le bilan de l’activité de ce conseil traduit une méfiance injustifiée et contraire à la nécessaire transparence en la matière.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 56 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Toute proposition relative aux conditions de travail des agents de sécurité privée est préalablement soumise à la concertation avec les organisations professionnelles.
Cet amendement a été précédemment défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Le présent amendement prévoit que, lorsque le CNAPS formule des propositions relatives aux conditions de travail des agents de sécurité privée, ces propositions sont soumises à la consultation des organisations professionnelles.
Autant ces dernières ne peuvent avoir vocation à participer aux missions de police administrative du CNAPS, autant il semble utile qu’elles soient consultées lorsqu’il s’agit de faire des propositions en matière de conditions de travail des agents de sécurité.
La commission a donc émis un avis favorable.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 32, présenté par M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Après le mot :
majorité
insérer le mot :
qualifiée
La parole est à M. Alain Anziani.
Cet amendement vise à préciser que la répartition des sièges au sein du collège assure une majorité qualifiée aux représentants de l'État, aux magistrats de l'ordre judiciaire et aux membres des juridictions administratives.
Le présent amendement tend à prévoir que le collège qui administre le CNAPS comprend une majorité qualifiée, et non une majorité simple, de représentants de l’État, de magistrats de l’ordre judiciaire et de membres des juridictions.
Toutefois, le terme de « majorité qualifiée » n’est pas défini s’agissant de la composition d’un conseil.
L’avis est donc défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 31 est présenté par M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 69 rectifié est présenté par M. Vial, Mme Procaccia et M. P. Dominati.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 14
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« - de représentants des organisations patronales représentatives issues des activités privées de sécurité visées aux titres I et II ;
« - de représentants des salariés ;
La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l’amendement n° 31.
L’amendement n° 56 rectifié, nous a dit M. le ministre, a pour objet d’associer les partenaires sociaux, notamment au rapport annuel que le CNAPS remettra au ministère de l’intérieur.
Mais pourquoi ne pas aller plus loin et ne pas prévoir, comme la commission des lois l’avait d’ailleurs fait en première lecture, que les représentants des salariés entrent également dans la composition du collège ?
Il est tout de même paradoxal qu’ils ne fassent pas partie d’un collège qui a été ouvert, et c’est une bonne chose, notamment aux représentants des organisations patronales. Il fallait, nous a-t-on expliqué, éviter un collège pléthorique. Certes, mais j’ai le sentiment que les seuls perdants ont été les représentants des organisations de salariés, ce qui ne me paraît pas justifié.
Cet amendement a donc pour objet de redonner leur place aux représentants des salariés dans les organes de décision.
La parole est à M. Jean-Pierre Vial, pour présenter l'amendement n° 69 rectifié.
Le Gouvernement a fait adopter en deuxième lecture à l’Assemblée nationale un amendement supprimant le texte adopté par la commission des lois de l’Assemblée et revenant à la formulation initiale du projet de loi.
Cette rédaction ambiguë et imprécise ne mentionne pas explicitement les représentants des organisations, patronales ou salariales, représentatives de la sécurité privée. Pis, cette rédaction évasive ouvre la porte à de multiples interprétations et possibilités.
Monsieur le ministre, s’agissant d’une activité récente et particulièrement sensible qui a fait un gros effort de restructuration – je « rebondis » là sur les propos qui ont pu être tenus tout à l’heure –, il convient de préciser que les organisations patronales comme les salariés seront représentés au sein du CNAPS pour garantir l’équilibre de celui-ci. Il y va de l’efficacité et de la pérennité de ce nouvel organisme.
Les entreprises du secteur sont, pour l’essentiel, regroupées dans deux syndicats, l’un auquel sont affiliées les très grosses sociétés et notamment les sociétés « internationales », l’autre qui représente un peu plus de 150 sociétés de taille moyenne, très liées au territoire sur lequel s’exerce leur activité. Il est donc indispensable que ces syndicats puissent faire valoir leurs particularités au sein du CNAPS et notamment participer aux échanges sur l’implantation des activités de la profession.
Ces deux amendements tendent à préciser que les représentants des organisations patronales et syndicales des activités privées de sécurité sont membres du collège du Conseil national des activités privées de sécurité créé par l’article 20 quinquies.
Cette mention ne paraît pas souhaitable.
En effet, le CNAPS n’est pas un conseil de l’ordre. Il a, avant tout, une mission de police administrative, puisqu’il délivrera les agréments et les autorisations en matière de professions de sécurité.
En outre, ses missions comprendront des enquêtes administratives et la consultation de fichiers de police, qui ne sont pour le moment autorisées que pour les policiers et les gendarmes.
Il s’agit donc, j’y insiste, non d’un organisme de représentation professionnelle, mais d’un établissement public qui assurera des missions pour le compte de l’État. On ne passe pas d’une gestion par le préfet à une gestion par la profession, mais à une gestion par un établissement public.
Dès lors, il ne serait pas logique que soient représentés au sein du CNAPS les syndicats patronaux ou de salariés. La rédaction actuelle de l’article 20 quinquies, qui prévoit seulement que « des personnes issues des activités privées de sécurité » feront partie du collège du CNAPS afin d’apporter l’éclairage de la profession, est préférable.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Je crois en outre pouvoir dire, monsieur Vial, que le président du syndicat des entreprises privées de sécurité, que j’ai reçu récemment et à qui j’ai exposé ces différences, va se rallier à notre position.
Le détail de la composition du collège administrant le CNAPS relève, naturellement, du pouvoir réglementaire.
L’article 20 quinquies prévoit qu’entreront dans cette composition des « personnes issues des activités privées de sécurité ». Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, sont bien sûr appelés à faire partie du collège les représentants des organisations patronales représentatives.
Si l’on veut que le CNAPS soit efficace, c'est-à-dire capable de prendre des décisions aussi rapides qu’utiles à la profession, il faut, c’est vrai, éviter de créer un collège pléthorique. La composition de son collège doit être adaptée aux objectifs assignés au CNAPS, à savoir, la moralisation, la professionnalisation et, finalement, la protection de tout un chacun. Pour autant, cela ne signifie pas qu’il a vocation à traiter l’ensemble des questions relatives au secteur de la sécurité privée.
Le Gouvernement a entendu les préoccupations des auteurs des amendements puisque, on l’a vu, l’amendement n° 56 rectifié prévoit que les organisations professionnelles des salariés du secteur de la sécurité privée sont, au même titre que les organisations syndicales représentatives, obligatoirement consultées sur toute proposition relative aux conditions de travail des agents préalablement à la remise du rapport annuel d’activité.
J’estime donc que ces amendements sont satisfaits par celui du Gouvernement et je suggère leur retrait.
Non, madame la présidente, je le retire, compte tenu des explications et des garanties apportées par M. le ministre.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 135 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet, Chevènement et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 28, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Elles ne peuvent être prononcées qu’au terme d’une procédure contradictoire.
La parole est à M. Jacques Mézard.
L’article 20 quinquies fait du CNAPS et de ses commissions régionales les instances disciplinaires de la profession, les sanctions prononcées étant applicables tant aux personnes physiques qu’aux personnes morales.
Il est prévu que tout manquement aux lois, règlements, obligations professionnelles ou déontologiques puisse donner lieu à une sanction disciplinaire.
Ces sanctions sont listées et subordonnées au principe de proportionnalité. Elles recouvrent la gamme habituelle : avertissement, blâme et interdiction d’exercice de l’activité privée de sécurité.
Il importe que les droits de la défense soient préservés de manière systématique et en toutes circonstances. C’est pourquoi nous souhaitons préciser dans la loi que les sanctions prises à l’encontre d’une personne physique ou d’une personne morale ne peuvent être prononcées qu’au terme d’une procédure contradictoire.
Je note d’ailleurs que le texte proposé pour l’article 33 -1 F de la loi du 12 juillet 1983 précise que « le conseil ne peut être saisi de faits remontant à plus de trois ans », ce qui, par assimilation, signifie que les manquements considérés relèvent de la catégorie des délits, ce qui n’est pas mineur, alors que nous sommes dans le cadre disciplinaire.
Il est donc indispensable que la loi prévoie expressément une procédure contradictoire.
Le présent amendement tend à préciser que les commissions régionales d’agrément et de contrôle ne peuvent prononcer les sanctions prévues qu’au terme d’une procédure contradictoire.
Cette précision n’est pas nécessaire : une telle procédure contradictoire est toujours requise, sous peine d’annulation juridictionnelle.
Cet amendement étant satisfait, j’en demande le retrait. À défaut, l’avis serait défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements n° 33 et 136 rectifié sont identiques.
L'amendement n° 33 est présenté par M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 136 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Detcheverry, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 30 à 35
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l’amendement n° 33.
Les alinéas 30 à 35 de l’article 20 quinquies étendent considérablement les pouvoirs d’investigation des membres et agents du CNAPS et de ses commissions régionales.
Ils organisent un droit de visite entre six heures et vingt et une heures dans les locaux affectés aux activités privées de sécurité pour l’exercice de leurs missions en présence de l’occupant des lieux ou de son représentant.
Le procureur de la République est préalablement informé de la visite.
L’occupant doit être informé de sa faculté de s’opposer à la visite.
En cas d’opposition du responsable des lieux, la visite doit être autorisée par le juge des libertés et de la détention et se dérouler sous son autorité et son contrôle.
Les membres et agents du CNAPS ont également le pouvoir de demander communication de tout document utile à l’accomplissement de leurs missions, quel qu’en soit le support.
Nous proposons la suppression de ces dispositions, car nous considérons que le CNAPS doit rester simplement un organisme ordinal de la profession et non être une instance dotée de pouvoirs d’enquête, pouvoirs qui relèvent de l’autorité judiciaire ou qui sont attribués généralement aux autorités administratives indépendantes.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 136 rectifié.
Au-delà de la suppression des alinéas 30 à 35 de l’article 20 quinquies, nous entendons soulever la question de la nature juridique du CNAPS, lequel est simplement qualifié par la loi de personne morale de droit public.
Or, de la lecture de l’article 20 quinquies, il ressort que le CNAPS est une personne morale hybride, à la fois juridiction ordinale chargée de la discipline de la profession et autorité administrative indépendante dotée de pouvoirs de police administrative et même d’un quasi-pouvoir de perquisition dont le champ s’étend bien au-delà des simples diligences nécessaires dans le cadre d’enquêtes professionnelles et administratives.
Certes, le contrôle du juge des libertés et de la détention s’exerce, mais, de fait, cet article prévoit de ne requérir ce dernier, en tant que de besoin, que dans le cas où la personne inspectée refuse d’ouvrir ses locaux. Nous nous rapprochons de la sorte, purement et simplement, d’une enquête judiciaire, ce qui n’a pas lieu d’être en l’espèce.
Est ainsi introduite une confusion, à notre sens regrettable, entre deux missions qu’une personne morale simplement chargée de contrôler une activité privée ne devrait pas concentrer entre ses mains.
Les activités du CNAPS et de ses commissions régionales doivent donc rester dans le champ purement administratif. La comparaison qui a été faite avec d’autres autorités administratives indépendantes investies d’une compétence de perquisition, comme la CNIL, n’est pas pertinente.
Ces amendements tendent à supprimer les pouvoirs de contrôle et d’investigation du CNAPS, et notamment la possibilité d’effectuer des perquisitions.
Ces pouvoirs sont cependant nécessaires pour assurer l’effectivité du contrôle de la profession par cet organisme, en même temps qu’ils sont légitimes s’agissant d’une autorité dotée de certains pouvoirs de police et administrée par une majorité de représentants de l’État.
L’avis est donc défavorable.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n° 58, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 30, deuxième phrase
Supprimer les mots :
, entre six heures et vingt et une heures,
Cet amendement a été précédemment présenté.
Quel est l’avis de la commission ?
Le présent amendement tend à supprimer la plage horaire limitative pour les contrôles effectués par le CNAPS. En effet, cette plage horaire n’est pas pertinente compte tenu de l’amplitude horaire de nombreuses activités de sécurité.
La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 137 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 35, première phrase
Après les mots :
de contrôle
insérer les mots :
dûment agréés à cet effet
La parole est à M. Jacques Mézard.
Dans la rédaction actuelle, le droit accordé à l’ensemble des membres et agents d’une commission régionale de disposer de tous les documents nécessaires à l’accomplissement de leurs fonctions paraît excessivement étendu, d’autant que ces documents peuvent être confidentiels ou concerner des personnes.
Dans les instances ordinales, ce pouvoir n’appartient, en général, qu’au responsable du conseil de l’ordre. Nous proposons donc, à tout le moins, que les membres et agents disposant de ce pouvoir soient agréés à cet effet.
Le présent amendement tend à préciser que les agents du CNAPS ayant compétence pour demander tout document dans l’exercice de leurs missions de contrôle soient dûment agréés à cet effet.
Cette précision ne paraît pas indispensable. En effet, tous les membres du CNAPS seront tenus au secret professionnel.
La commission émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 20 quinquies est adopté.
Chapitre V
Renforcement de la lutte contre la criminalité et de l’efficacité des moyens de répression
I. – Après l’article 132-19-1 du code pénal, il est inséré un article 132-19-2 ainsi rédigé :
« Art. 132-19-2. – Pour les délits de violences volontaires aggravées pour lesquels la peine encourue est égale à dix ans d’emprisonnement et ayant entraîné une incapacité de travail supérieure à quinze jours, la peine d’emprisonnement ne peut être inférieure à deux ans.
« Ce même seuil s’applique également pour les délits commis avec la circonstance aggravante de violences dès lors que la peine encourue est égale à dix ans d’emprisonnement et que les violences ont entraîné une incapacité de travail supérieure à quinze jours.
« Toutefois, la juridiction peut prononcer, par une décision spécialement motivée, une peine inférieure à ce seuil ou une peine autre que l’emprisonnement en considération des circonstances de l’infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d’insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci. »
II. –
Non modifié
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 34 est présenté par M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 95 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.
L'amendement n° 138 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet, Chevènement et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l’amendement n° 34.
Nous entamons la série des articles qui ont été inspirés par les déclarations du Président de la République de cet été. Le principe en est simple : toujours plus de répression, même en l’absence de toute évaluation qui permettrait de savoir si plus de répression aboutit à moins de délinquance. Et y a-t-il un lien direct entre l’empilement continu de textes répressifs et une diminution des infractions dans ce pays !
Cette réflexion n’est pas la mienne ; c’est celle de la commission des lois qui, avec sa circonspection habituelle, sa sagesse, sa distance par rapport à ces questions, sa connaissance souvent excellente des questions pénales et pénitentiaires – nous l’avons d’ailleurs démontré lors de l’examen de la loi pénitentiaire –, a souvent beaucoup de réticences devant cette politique maximaliste du « tout sécuritaire ».
Souvent, une véritable philosophie se dégage de notre commission, et je tiens à la saluer.
Sur la question des peines planchers, notre commission a fait son travail habituel. En première lecture, elle avait repoussé l’amendement gouvernemental qui instaurait une peine minimale pour les délits de violences volontaires aggravées ou les délits commis avec des circonstances aggravantes de violence, sans que leurs auteurs – c’est là le point important – soient en état de récidive légale. Voilà ce qui s’était passé en commission. Mais, en séance, chacun est tenu par ses options politiques, et nous le comprenons, et chacun a donc examiné cette question sous la houlette de son chef de file.
M. Gérard Longuet a faitadopter un sous-amendement pour tenter de rendre plus acceptable la proposition du Gouvernement – ce qui signifie, entre nous, qu’elle ne l’était pas, au départ ! Notre collègue a ainsi réussi à aménager un peu ce texte, en lui apportant quelques correctifs.
Nous restons farouchement opposés à cet article, sur la forme et sur le fond.
Sur la forme, d’abord : on peut faire beaucoup, mais pourquoi ne pas le faire bien ? Pourquoi une disposition de cette importance est-elle proposée par voie d’amendement alors qu’elle mériterait d’ouvrir la discussion sur la nature même de notre droit pénal, une discussion qui ne serait pas seulement un moment dans l’examen d’un texte ?
Sur le fond, surtout, peut-on nous apporter quelques éléments chiffrés pour montrer que les peines planchers ont un effet dissuasif ? Peut-on faire la démonstration avec des chiffres fiables et une étude d’impact objective ? Je pense que non !
En revanche, nous savons que le principe de base de notre droit pénal est la personnalisation des peines. Une peine doit être une sanction, nous en sommes bien d’accord, mais ce doit être aussi une sanction adaptée aux circonstances et à la personnalité de l’auteur qui ménage la possibilité d’une réinsertion, comme le Conseil constitutionnel nous l’a souvent rappelé.
Au surplus, imagine-t-on les conséquences de ce texte pour les mineurs ? Dans certains cas et avec certaines infractions, pour les mineurs, le principe devient la prison et l’exception, les mesures alternatives.
Tout cela est absolument contraire à l’ordonnance de 1945, qui précise que le juge des enfants ou le tribunal pour enfants doivent toujours motiver et personnaliser les peines d’emprisonnement, qui ne sauraient être automatiques.
Nous allons à l’encontre de ce principe. Franchement, nous ruinons l’esprit de notre droit pénal !
Je suivrai le même chemin que M. Alain Anziani.
L’article 23 bis est inspiré par le discours du Président de la République prononcé à Grenoble, en juillet dernier, mais aussi par les propos particulièrement grotesques d’un ancien ministre, aujourd’hui élu dans le midi de la France, à l’encontre des mineurs…
Aujourd’hui, nous ne disposons d’aucune évaluation sur la demi-douzaine de lois qui, depuis 2002, ont réformé le traitement de la délinquance des mineurs. Avec le texte qui nous occupe aujourd’hui, vous choisissez, monsieur le ministre, de les durcir encore !
J’insiste, les peines planchers ont largement fait la démonstration de leur absurdité, particulièrement au cours des trois années passées. Elles ont, notamment, mis à mal le principe de la proportionnalité des peines.
La loi du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs avait mis en place ce système permettant d’entraver ou du moins d’orienter grandement le travail des juges, en laissant la loi dicter le prononcé de la sanction sans tenir compte des circonstances de l’infraction ni de la personnalité de l’auteur.
Et voilà que vous nous présentez cet article comme une simple « extension » du dispositif des peines planchers aux mineurs auteurs de violences aggravées. En réalité, il s’agit surtout d’un radical changement de cap qui mériterait un autre débat que celui qui nous occupe aujourd’hui avec la LOPPSI 2.
Vous persistez à vouloir inscrire ces dispositions dans le code pénal, ce qui signifie, d’une manière symbolique, qu’il n’y aura bientôt plus de textes spécifiques sur les mineurs. C’est absurde, aussi absurde que les arguments de M. Christian Estrosi, que je n’ai pas cité tout à l’heure, pour justifier que les mineurs soient jugés par les tribunaux de droit commun !
C’est la raison pour laquelle, chers collègues, nous vous demandons de supprimer cet article.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 138 rectifié.
Nous avons le même objectif ici.
En réalité, avec cet article, il s’agit moins de code pénal que d’affichage purement médiatique. D’ailleurs, la volonté des auteurs de cet article découle d’une méfiance à l’égard des magistrats dont on peut lire de très fréquentes illustrations dans la presse.
Et les efforts déployés par la commission des lois du Sénat démontrent très clairement qu’il ne s’agit que d’affichage, le but étant de montrer à l’opinion que, en cas de violences volontaires aggravées, avec un risque de plus de dix ans d’emprisonnement et une incapacité de travail supérieure à quinze jours, la peine d’emprisonnement ne saurait être inférieure à deux ans.
Ceux, et ils sont nombreux ici, qui ont la pratique ou l’expérience de nos juridictions, connaissent l’importance du certificat médical. Or ici c’est l’incapacité totale de travail de quinze jours qui est l’élément déclencheur de la condamnation à la peine plancher de deux ans : tout découle de l’existence de ce certificat médical. C’est extrêmement grave !
Heureusement, l’alinéa 4 prévoit que « la juridiction peut prononcer, par une décision spécialement motivée, une peine inférieure à ce seuil ». Mais c’est du même coup reconnaître que la peine plancher de deux ans pour les violences volontaires avec une ITT de quinze jours est absolument inapplicable !
Non, vraiment, il s’agit purement et simplement d’affichage médiatique.
Selon les statistiques dont nous disposons, au 31 décembre 2010, les personnes détenues dans les prisons françaises étaient au nombre de 60 544. Mes chers collègues, si les magistrats devaient vraiment appliquer demain le présent dispositif, il faudrait construire des milliers et des milliers de places de prison supplémentaires, et, dans certains cas, consentir à un abandon total du principe de la proportionnalité des peines !
Voilà pourquoi, d’un côté, on propose cette peine plancher mais, de l’autre, on décide de laisser les magistrats faire leur travail, quitte à alourdir encore un peu plus leurs tâches, puisqu’ils devront spécialement motiver leur décision de ne pas prononcer la peine plancher ! Et pourtant, les dossiers s’empilent dans les audiences correctionnelles…
Certes, la motivation est une bonne chose pour l’information du justiciable, des victimes et des prévenus qui seront condamnés, mais rien de tout cela n’est raisonnable. Ce n’est qu’une démonstration de plus de ce que nous ne cessons de dénoncer.
Alors, non, il n’y a pas, d’un côté, les laxistes et, de l’autre, ceux qui protègent les citoyens. Il y a des élus conscients d’un certain nombre de réalités. Mais ici, on dépasse les bornes !
Tout cela n’est ni raisonnable ni conforme à ce que doit être véritablement une politique pénale digne de notre pays.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Au regard des risques évoqués par les auteurs de l’amendement, le Sénat a souhaité réserver le dispositif des peines planchers hors récidive aux violences les plus graves, c’est-à-dire aux délits punis de dix ans d’emprisonnement et ayant entraîné une ITT de plus de quinze jours.
Le pouvoir d’individualisation des juridictions n’est pas remis en cause, car celles-ci pourront toujours prononcer une peine inférieure à deux ans, à condition, naturellement, de motiver leur décision.
Nous avons débattu de cette question en commission des lois et avons décidé d’émettre un avis défavorable sur ces trois amendements identiques de suppression de l’article.
Je voudrais répondre à M. Anziani, qui a demandé si quelqu’un pouvait démontrer l’efficacité des peines planchers ; Mme Assassi a d'ailleurs tenu à peu près les mêmes propos.
Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, je vous invite à examiner l’évolution tout à fait officielle des données non moins officielles sur la délinquance !
De façon presque unanime sur ces travées, on reconnaît, à juste titre d'ailleurs, que nous avons obtenu des résultats dans le combat contre les atteintes aux biens, mais qu’il subsiste un point noir, à savoir les violences aux personnes. Je l’admets d'ailleurs très volontiers : celles-ci constituent un défi pour nos sociétés. Toutefois, le rythme de leur augmentation a été divisé par cinq. Entre 1997 et 2002, elles s’accroissaient d’environ 11 % par an ; l’année dernière, elles progressaient de 3 % ; c’était encore trop, mais ce n’était plus le même rythme d’augmentation que précédemment. Enfin, dans les heures qui viennent j’aurai l’occasion de donner les chiffres de l’année 2010, qui confirmeront que la spirale infernale de la hausse des violences aux personnes est cassée.
Or ce résultat n’a pas été obtenu par l’opération du Saint-Esprit ! Il est dû aux mesures, aux actions, aux réorganisations que nous avons décidées et aux initiatives que nous avons prises, par exemple, madame Assassi, au travers de la loi de 2007.
M. Anziani souhaite que nous lui démontrions que les peines planchers servent à quelque chose. Il sera donc obligé de faire un immense effort sur lui-même pour se maîtriser et ne pas voter avec enthousiasme cet article.
Sourires sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
En effet, la démonstration est faite : ces peines sont l’un des outils de la panoplie qui permet de lutter contre la délinquance. Monsieur le sénateur, malheureusement pour vous, car le fait n’est pas contestable, l’augmentation des violences aux personnes décélère. Même si elle est encore trop importante, elle n’a rien à voir avec ce que nous avons connu.
Je le répète, les statistiques montrent que les peines planchers sont efficaces. La meilleure preuve de leur utilité, c’est que les magistrats, que vous avez les uns et les autres évoqués à plusieurs reprises, ne s’y opposent, quand elles peuvent être appliquées, que dans un cas sur deux. Les magistrats eux-mêmes considèrent donc que cette initiative était utile, constructive et même indispensable dans le combat contre la délinquance et l’insécurité.
Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur ces trois amendements.
Comme en première lecture, la commission des lois a estimé tout d’abord qu’il fallait tenir compte des décisions du Conseil constitutionnel, selon lesquelles les peines planchers ne peuvent s’appliquer que dans des cas ayant un caractère de gravité exceptionnelle, la récidive légale nouvelle étant elle-même une circonstance d’une particulière gravité. Je vous rappelle d'ailleurs, chers collègues, que la loi de 2007 a été validée par le Conseil constitutionnel.
À mon avis, le texte voté par le Sénat répond parfaitement aux critères posés par le Conseil constitutionnel, ce qui ne serait pas le cas, monsieur le ministre – nous avons une petite divergence sur ce point –, si nous abaissions trop les exigences en matière de gravité de la peine.
Chers collègues de l’opposition, je vous rappelle tout de même que, parmi les faits visés ici – les violences volontaires aggravées et les délits commis avec la circonstance aggravante de violences – figurent notamment les violences intraconjugales.
Or je ne suis pas certain que, dans ce domaine, les peines soient toujours à la mesure de la gravité des atteintes. On nous dit qu’il faut agir contre les violences intraconjugales, mais celles-ci font précisément partie des cas les plus graves, qui sont visés ici et qui sont punissables de dix ans d’emprisonnement.
Toutefois, monsieur le ministre, il y a ici une autre difficulté. Si nous avons complété le projet de loi en précisant que les juges pourront toujours prononcer une peine d’emprisonnement inférieure à deux ans, c’est parce que se pose le problème de l’aménagement de peines – je le mentionne, car il faut être objectif.
Or, d’après les dernières statistiques du ministère de la justice dont nous disposons, il y a, dans les prisons françaises, 60 000 personnes, prévenus et détenus, et quelque 8 000 personnes sous écrou bénéficient d’un aménagement de peine, ce chiffre étant en augmentation. Je pense d'ailleurs que ce dispositif est globalement une réussite, notamment pour les courtes peines.
En matière d’aménagement de peines, nous avons fixé des règles dans la loi pénitentiaire et nous y sommes attachés. Le dispositif commence à peine à s’appliquer : quand une disposition a été adoptée, il faut l’évaluer avant de la modifier ! Peut-être serons-nous amenés à faire évoluer ce régime, mais, jusqu’à présent, il a tout de même permis à la fois de diminuer le nombre des incarcérations et de mieux aménager les peines.
Du reste, monsieur le ministre, les dispositifs mis en œuvre sont multiples. L’aménagement de peines peut aussi passer par la semi-liberté, et les mesures décidées sont parfois contraignantes. Il ne s'agit pas uniquement du bracelet électronique !
Nous avons donc essayé de trouver un équilibre, encore que, nous le reconnaissons, les peines planchers, qui visent à donner au juge une indication, ne devraient même pas exister : si les auteurs de violences ayant entraîné quinze jours d’ITT et ayant été commises avec des circonstances aggravantes sont passibles de dix ans d’emprisonnement mais se trouvent condamnés à des durées de prison très faibles, c’est vraiment qu’il y a un problème d’échelle des peines !
Nous augmentons sans cesse le quantum, mais, si les peines ne sont pas prononcées, cela n’a plus aucun sens !
Monsieur le ministre, nous aurons l’occasion d’en discuter, mais je crois qu’il s'agit ici d’une question de proportion. Nous reconnaissons que les peines planchers peuvent être une indication forte, mais le juge est toujours libre de ne pas les prononcer, bien sûr, sinon cette disposition serait à l’évidence censurée par le Conseil constitutionnel.
Je tenais à faire ces quelques observations pour recadrer un peu notre débat.
Monsieur le ministre, le Sénat, dans sa sagesse, s’efforce habituellement de faire en sorte que la répression soit efficace. Toutefois, nous considérons qu’il faut pour cela s’appuyer aussi sur l’institution judiciaire. Toute la chaîne, depuis la police jusqu’aux juridictions, doit être efficace et homogène. En effet, s’il est nécessaire de permettre la répression, celle-ci n’est pas tout : il faut aussi envisager ce qui se passera après.
Monsieur le président de la commission, vous m’avez ôté les mots de la bouche : comme nous l’avons rappelé ici même hier, plus du quart des violences aux personnes ont lieu dans la sphère conjugale, en effet. Si on leur ajoute toutes les violences intrafamiliales qui ne sont pas comptées dans cette catégorie et que j’ai évoquées hier, c'est-à-dire celles qui s’exercent sur les personnes vulnérables, …
… comme les ascendants ou les collatéraux, j’ignore quel pourcentage des violences faites aux personnes on atteint !
Pour autant, il est tout de même exceptionnel que ces violences entraînent une ITT de quinze jours.
Si l’on voulait vraiment lutter contre ces violences, qui sont un fléau pour notre société – je le répète, elles représentent 25 %, peut-être même 30 %, des violences aux personnes –, il fallait émettre un avis favorable sur les amendements à la loi de juillet 2010 que nous avions déposés et qui étaient relatifs à la médiation pénale. Il vaudrait mieux en effet éviter que cette dernière procédure ne soit trop systématiquement utilisée dans les cas de violences conjugales plutôt que prévoir des peines planchers comme vous le faites aujourd'hui, chers collègues de la majorité.
Monsieur le ministre, vous affirmez vous-même que les magistrats appliquent des peines sévères. Laissez-les donc travailler, sans, en permanence, leur demander de justifier de leur sévérité ou de leur indulgence, car c’est là un signe de défiance vis-à-vis de l’institution judiciaire. Ce n’est pas de cette façon que nous mettrons en place une véritable prévention et que nous ferons reculer la délinquance.
J’ai tenu à intervenir dans ce débat parce que la question qui nous est soumise au travers de cet article ne peut être détachée du dispositif de la loi de 2007.
On considérait à l’époque – Mme Dati était fort éloquente à cet égard
Sourires sur les travées du groupe socialiste
Les peines planchers, en effet, ne sont pas compatibles avec l’individualisation des peines, qui est la première mission du magistrat. L’intérêt d’un dispositif qui entravait pourtant la liberté d’appréciation des magistrats était donc, nous disait-on, de favoriser la nécessaire lutte contre la récidive. Comment ? En avertissant le délinquant, au moment de sa première condamnation, que si d’aventure il se laissait aller à récidiver, les peines qui l’attendaient seraient aggravées, bien sûr au titre de la récidive, mais aussi du fait de la peine plancher.
Le condamné quittait donc le tribunal en ayant reçu de l’autorité judiciaire l’avis que, en cas de récidive, il encourait une peine plancher. Il avait été prévenu et, s’il méconnaissait cet avertissement, on pouvait nous dire que la sanction était justifiée – on retrouve ici la dialectique du sursis, et la peine plancher trouvait son équilibre.
Mais, ici, on supprime cette justification. Il ne s'agit plus du tout de prévenir le délinquant, qui d'ailleurs, croyez-moi, mes chers collègues, n’est pas un lecteur assidu du Journal officiel ou du code pénal. Du reste, il lui faudrait disposer d’éditions constamment révisées, compte tenu du torrent législatif qui s’abat sur nous.
Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Laissons donc cet aspect de côté, et disons-le brutalement, ce dispositif n’est plus un instrument de lutte contre la récidive, mais c’est, purement et simplement, un moyen d’aggravation de la peine. Dès lors, toutes les explications que l’on nous avait données perdent d’un coup leur sens.
Je rappelle pourtant que Mme Dati avait suivi avec beaucoup d’énergie la mise en œuvre des peines planchers par la magistrature. Chacun sait les convocations de procureurs généraux qui eurent lieu ou les réunions qui furent organisées pour que les magistrats rendent des comptes sur l’application de ce dispositif.
Les peines planchers étaient le remède miracle contre la récidive. Hélas, on en mesure aujourd'hui l’échec au travers des statistiques que nous connaissons.
Pourquoi sommes-nous passés d’une philosophie à une autre ? Parce que cette réforme, outre qu’elle traduit un durcissement brutal, dont on ne justifie pas la nécessité, constitue, il faut le rappeler, un acte de défiance à l’encontre des magistrats.
Chers collègues de la majorité, vous justifiiez naguère ces mesures en affirmant qu’il n’était plus possible de ne rien faire, qu’il fallait absolument lutter contre le fléau de la récidive. Désormais, votre discours peut se résumer en ces termes : « Je vous impose de prononcer des peines planchers parce que je n’ai pas confiance en vous ». Voilà tout !
Je le dis clairement : ce mouvement de défiance à l’encontre de la magistrature marquera les esprits et restera le symbole de la politique judiciaire conduite depuis 2007.
Jamais, au sommet de l’État, on ne manque une occasion de rappeler que les magistrats ne font pas, semble-t-il, leur devoir. Jamais, monsieur le ministre de l’intérieur, vous ne manquez vous-même une occasion d’interpeller les juges pour telle ou telle de leurs décisions qui vous paraît inadmissible. Que dirait-on si le garde des sceaux en faisait autant quand des procédures sont annulées parce que les officiers de police judiciaire ne se sont pas conformés à la loi ?
Ici même, à cet instant, vous commettez un nouvel acte de défiance envers la magistrature, car cette disposition vise uniquement – j’y insiste – à ne pas laisser les juges apprécier pleinement les peines selon la personnalité de l’auteur et les circonstances de l’affaire.
J’appelle cela, tout simplement, une régression de notre droit, une mise en échec du principe de la personnalisation des peines et un acte de défiance à l’encontre des magistrats. En cette période où la magistrature est accablée de tâches et d’obligations, et alors qu’elle fait l’objet de dures critiques, ce texte n’est absolument pas le bienvenu. C'est la raison pour laquelle nous voterons ces amendements identiques de suppression.
Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur Badinter, je vous ai écouté très attentivement. Votre intervention est, au-delà des envolées lyriques, talentueuse par définition, et nous nous inclinons tous devant votre compétence.
Permettez-moi cependant de souligner des réalités.
D’abord, vous avez dit très honnêtement, et je l’ai noté avec beaucoup d’intérêt, que la loi de 2007 était finalement une bonne loi.
Vous en avez pris la défense trois ans après, par comparaison avec le présent projet de loi. J’imagine que, dans quelques années, votre raisonnement sera le même pour la loi qui sortira du présent débat !
Vous aviez voté contre, mais vous vous êtes appuyé dessus aujourd'hui !
Trois ans après, bien sûr ! Donc, on reparlera dans trois ans de votre position concernant le texte qui vous est proposé aujourd'hui.
Ensuite, vous commentez des textes et des mots qui ne figurent pas dans l’article 23 bis tel qu’il vous est soumis.
Ainsi, l’alinéa 4 dispose très précisément : « Toutefois, la juridiction peut prononcer… » – il n’y a là aucune obligation ; où la voyez-vous ? – « … par une décision spécialement motivée une peine inférieure à ce seuil ou une peine autre que l’emprisonnement en considération des circonstances de l’infraction, de la personnalité de son auteur… » – vous avez dit exactement l’inverse – « … ou des garanties d’insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci ».
Pardonnez-moi de vous le dire, mais vous n’aviez pas lu cet article !
La parole est à M. Robert Badinter, pour répondre rapidement à M. le ministre.
Premièrement, monsieur le ministre, je n’ai jamais dit que je m’appuyais sur la loi de 2007. Elle fait partie aujourd'hui de notre droit positif, je ne veux pas faire comme si elle n’existait pas. Cela ne veut pas dire que nous la maintiendrons, en son état, en tout cas.
Deuxièmement, s’agissant du fait que les magistrats sont libres de prononcer ou de ne pas prononcer la peine plancher, je n’ai pas besoin de vous rappeler que le principe même du texte repose précisément sur l’obligation de prononcer la peine plancher. C’est à titre d’exception, motivée par le magistrat, affaire par affaire, qu’en considération des circonstances on écartera la peine plancher.
Ce que vous avez dit tout à l’heure est la marque profonde de l’échec de ce dispositif, compte tenu précisément du fait que, dans la moitié des décisions rendues, les magistrats écartent, par une motivation spéciale, cette peine plancher. Cela veut bien dire que cette dernière n’a pas de raison d’être : une fois sur deux, alors que l’on parle de circonstances exceptionnelles, on l’écarte, il est vrai sans que cela soit bien vu en haut lieu !
M. Alain Anziani. Monsieur le ministre, je n’ai pas apprécié le ton de votre réponse à l’intervention de notre collègue Robert Badinter. Des « envolées lyriques » ? Pour ma part, je n’ai rien entendu de tel.
M. le président de la commission des lois s’exclame.
En revanche, j’ai entendu un constat précis, argumenté, explicite, auquel vous n’avez pas répondu, à savoir que cette peine plancher, qui était prévue pour être l’exception, devient aujourd'hui le droit commun.
Vous n’avez absolument pas répondu sur ce point, monsieur le ministre. La raison en est simple : il n’y avait sans doute rien à répondre… En l’occurrence, c’est, de votre part, de la pure politique politicienne qui n’a rien à voir avec la sécurité !
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'article 23 bis est adopté.
Le code pénal est ainsi modifié :
1° À la seconde phrase du second alinéa de l’article 221-3, après le mot : « barbarie », sont insérés les mots : « ou lorsque l’assassinat a été commis en bande organisée ou avec guet-apens sur un magistrat, un fonctionnaire de la police nationale, un militaire de la gendarmerie, un membre du personnel de l’administration pénitentiaire ou toute autre personne dépositaire de l’autorité publique, à l’occasion de l’exercice ou en raison de ses fonctions » ;
2° À la seconde phrase du dernier alinéa de l’article 221-4, après le mot : « barbarie », sont insérés les mots : « ou lorsque le meurtre a été commis en bande organisée ou avec guet-apens sur un magistrat, un fonctionnaire de la police nationale, un militaire de la gendarmerie, un membre du personnel de l’administration pénitentiaire ou toute autre personne dépositaire de l’autorité publique, à l’occasion de l’exercice ou en raison de ses fonctions ».
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 35 est présenté par M. Anziani, Mme Klès, MM. Frimat, C. Gautier et Peyronnet, Mmes M. André et Bonnefoy, M. Yung, Mme Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Guérini, Ries, Courteau et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 96 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 139 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l'amendement n° 35.
Monsieur le ministre, que nous proposez-vous dans cet article ? Vous voulez allonger la peine de sûreté en la faisant passer de vingt-deux ans à trente ans pour, dites-vous, accroître la sécurité, augmenter l’efficacité de la peine et dissuader la délinquance.
Franchement, pensez-vous sincèrement que le délinquant qui apprendra que le ministre de l’intérieur a allongé la peine de sûreté pour la porter de vingt-deux ans à trente ans sera amené à réfléchir avant de commettre son acte, voire à s’abstenir ? Je vous pose la question et j’aimerais bien obtenir une réponse, mais, pour moi, à l’évidence, elle ne peut être que négative. Chacun de vous en conviendra, mes chers collègues, le délinquant ne modifiera malheureusement pas son comportement en considération de cet allongement de la peine de sûreté.
Dès lors, si cette mesure n’est pas destinée à dissuader le délinquant, quel est son but ? Il s’agit sans doute de rassurer les forces de police, et nous comprenons que ce soit nécessaire. Mais il s’agit avant tout de séduire l’opinion, disons-le franchement.
Cela signifie que ce texte, au fond, a tout à voir avec la politique et rien à voir avec la sécurité. Un texte de cette nature relève de la pure et simple démagogie !
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 96.
Cette mesure présente-t-elle un caractère dissuasif ? On peut réellement en douter !
Vous refusez surtout d’établir une corrélation, pourtant évidente, entre les chiffres de la délinquance et la situation économique de notre pays, une situation difficile, voire désastreuse, conséquence de votre politique, qui a appauvri des pans entiers de la population.
Dans les quartiers difficiles, la seule intervention de l’État se résume à celle de la police. Il en résulte une tension, l’État n’étant perçu qu’au travers de ce prisme. Cette tension, vous semblez l’entretenir plus que de raison, en soutenant des agents reconnus coupables de faux témoignages.
Vous voulez l’entretenir, car la majorité présidentielle, pour rester la majorité, compte bien gonfler les chiffres de la délinquance et agiter le chiffon rouge de l’insécurité – ce n’est pas nouveau, et la ficelle est un peu grosse. En supprimant la police de proximité, Nicolas Sarkozy voulait rompre avec la doctrine de l’emploi de la police et de la gendarmerie propre à une autre politique, celle de la gauche. Cette doctrine reposait sur l’idée que la police puisait une partie de son efficacité dans la connaissance précise des lieux où elle intervenait, des personnes qu’elle rencontrait et dans le lien de confiance qu’elle tissait avec la population.
En prenant modèle sur les méthodes militaires où l’on projette des forces d’un centre vers une périphérie, vous construisez la défiance entre la police et la population, vous coupez cette même police des informations de terrain. Vous donnez la priorité au maintien de l’ordre par rapport au travail d’investigation.
Si bien que l’opposition contre les forces de l’ordre est devenue une sorte de rite initiatique à l’entrée dans l’adolescence pour bon nombre de jeunes.
Nous aussi, nous écoutons ce que demandent les policiers : ils réclament des effectifs et des conditions de travail décentes.
Ce n’est certainement pas en instaurant de manière démagogique des peines incompressibles pour les assassins de personnes dépositaires de l’autorité publique, de façon d’ailleurs plus hypocrite qu’efficace - ce sont toujours les mêmes méthodes à l’œuvre -, que vous réglerez le problème.
Cette mesure, dont nous demandons la suppression, est donc parfaitement démagogique et uniquement utilisée dans un but de communication publique.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour défendre l’amendement n° 139 rectifié.
Là encore, nous sommes face à une mesure d’affichage.
Notre collègue Alain Anziani a très justement posé la question : pensez-vous sérieusement que le délinquant sur le point de commettre ce type d’action criminelle sera freiné par l’allongement de la peine de sûreté de vingt-deux ans à trente ans ?
Mon cher collègue, quand vous vous poserez sérieusement la question, vous aurez la réponse !
Je rappelle aussi, très simplement, les propos que l’on a souvent entendus sur un enjeu de société considérable : la peine de mort. Depuis l’abolition, avons-nous assisté à une augmentation du nombre des crimes de sang, des crimes les plus abominables ?
Nous sommes là dans un processus d’affichage au travers duquel il faut absolument montrer que l’augmentation au fil des mois et des années du quantum des peines permettra de lutter contre la délinquance.
Le vrai problème est celui du fonctionnement de nos institutions, qu’il s’agisse de la police, de la gendarmerie ou de la justice. Cette dernière, qui fait ce qu’elle peut dans les circonstances actuelles, doit pouvoir bien faire son travail.
Nous sommes dans une fuite en avant perpétuelle. Je note, comme vous, les efforts considérables déployés par la commission des lois du Sénat, tant en première lecture qu’en deuxième lecture avant la discussion d’aujourd'hui, pour freiner véritablement la course invraisemblable à laquelle se livre la majorité de l’Assemblée nationale, dans un but – nous l’avons dit et redit – d’affichage médiatique lamentable.
Croyez-vous que vous allez rassurer les forces de police et de gendarmerie avec ce type de proposition ? Nous le savons tous, leurs réactions majoritaires montrent que ce n’est pas le cas.
En outre, ce dispositif sera totalement inefficace.
D’ailleurs, ne vous faites pas d’illusions : si un jury populaire, accompagné des trois magistrats professionnels, décide de ne pas prononcer la réclusion à perpétuité, il a toujours la possibilité, par exemple, de condamner à une peine de vingt-cinq ans ; il n’hésitera pas à le faire s’il considère que la personnalité de l’accusé ou les circonstances particulières de l’affaire le justifient.
Voilà une nouvelle preuve de cette politique de l’affichage, une nouvelle preuve du processus dans lequel nous sommes. Mais il faudra bien y mettre un terme, sinon, jusqu’où ira-t-il ? Nous verrons, demain ou après-demain, l’un des membres de cette majorité, en particulier à l’Assemblée nationale, demander, et l’on a déjà entendu des discours dans ce sens, le rétablissement de la peine de mort. Pourquoi la majorité s’arrêterait-elle en si bon chemin ?
M. Jacques Mézard. Monsieur le ministre, en la matière, il faut savoir raison garder, mais le Gouvernement n’en semble plus capable !
Protestations sur les travées de l ’ UMP.
L’article 23 ter prévoit l’allongement de la période de sûreté pour les auteurs de meurtre aggravé commis à l’encontre de personnes dépositaires de l’autorité publique.
Compte tenu de l’extrême gravité de tels actes, cette disposition paraît justifiée.
En outre, la commission des lois l’a encadrée par rapport au texte issu de la deuxième lecture à l’Assemblée nationale en prévoyant que l’allongement de la période de sûreté ne pourra s’appliquer qu’en cas de circonstances aggravantes, par exemple la bande organisée.
Dans ces conditions, il ne semble pas qu’il y ait disproportion entre l’acte commis et l’aggravation de la peine.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques de suppression n° 35, 96 et 139 rectifié.
Permettez-moi de rappeler ce qu’est la période de sûreté. En fait, elle a deux conséquences.
La première, c’est que, pendant un certain temps, le condamné ne sortira pas de prison.
La seconde conséquence, très regrettable, est contraire à la loi pénitentiaire que nous avons votée, et je m’étonne que ce ne soit pas dit sur ces travées
L’orateur désigne la droite de l’hémicycle
C’est donc une disposition extrêmement grave, qui va à l’encontre à la fois de la réinsertion et de la lutte contre la récidive.
Par ailleurs, s’agissant de mesures aussi exceptionnelles, qui modifient totalement, on l’a vu, notre code pénal, je suis tout de même étonné de constater, même si tout ministre peut représenter l’ensemble du Gouvernement, que le garde des sceaux ne soit pas présent au banc du Gouvernement, en tout cas pour la discussion de ces articles.
M. Jean-Pierre Michel. À l’occasion de l’examen d’autres textes concernant, notamment, l’environnement ou l’agriculture, nous avons vu les ministres compétents se succéder au banc du Gouvernement lors de la discussion d’articles les concernant plus particulièrement.
Marques d’approbation sur certaines travées du groupe CRC-SPG et du RDSE.
Je serais curieux de savoir si le ministre de la justice cautionne la mesure qui nous est soumise.
Récemment, au cours d’une audition menée dans le cadre des travaux préparatoires à un rapport d’information que j’ai cosigné, Mme la directrice des affaires criminelles et des grâces a affirmé – je ne crois pas déformer ses propos ; il n’est qu’à lire le procès-verbal – que le fondement de notre politique pénale, c’était la liberté totale d’appréciation du juge pour fixer les peines en fonction de la personnalité du délinquant. Sur le moment, et je le lui ai dit, j’ai pensé qu’elle plaisantait. Aujourd'hui, on voit bien que c’était le cas. Malheureusement, ni elle ni son ministre ne sont là pour le confirmer, ce qui est tout à fait regrettable.
Nous voyons bien que le Gouvernement n’a pas de politique pénale : il accepte une loi pénitentiaire et, ensuite, valide des dispositions contraires. Sa politique pénale est totalement médiatisée : elle n’existe que pour l’opinion publique, pour la télévision, pour les déclarations du Président de la République. Pour le reste, elle est totalement contradictoire et contre-productive.
Quelle sera l’attitude d’un condamné, à l’issue d’une peine de trente ans d’emprisonnement, qui sortira – car il sortira un jour – sans jamais avoir bénéficié, durant tout ce temps, de mesures facilitant sa réinsertion et propres à éviter aussi une récidive ?
Pour toutes ces raisons, nous voterons ces amendements identiques de suppression.
Je souscris tout à fait aux propos qui ont été tenus sur cet article. Je n’y reviens donc pas.
Pour ma part, je remarque que cet article justifiera à merveille la déchéance de la nationalité pour les étrangers qui commettent ce type de crime. Certes, il s’agit là d’un autre sujet, mais, dans ce domaine, l’affichage compte pour beaucoup, et ici c’est assez désastreux.
Il faut une certaine cohérence : on ne pourrait pas imaginer que la déchéance de la nationalité ne soit autre chose qu’une double peine pour un crime déjà très lourdement puni par les jurés.
La peine de mort n’a jamais empêché le crime et son abolition n’a pas entraîné d’augmentation de la criminalité. Il faut toujours garder cela à l’esprit.
L'article 23 ter porte sur les crimes commis contre des personnes dépositaires de l’autorité publique. Cette précision soulève d’autres questions. Il convient tout d’abord de savoir précisément qui cela concerne.
Ce matin, lors de l’examen en commission du projet de loi dit « Besson », alors que certains commissaires faisaient remarquer que les parlementaires ne rentraient pas dans le champ de la loi, il s’est trouvé de nos collègues pour ironiser : on ne va pas condamner l’assassin d’un représentant du peuple qui donne ainsi l’occasion à certains de se réjouir…Mais c’est le genre de plaisanteries dont on est coutumier au sein de la commission des lois !
Si l’on suit votre logique, puisque vous précisez quelles sont les personnes concernées, un médecin hospitalier qui serait victime d’un assassinat doit-il être considéré comme un détenteur de l’autorité publique ?
À mes yeux, l'article 23 ter est typiquement une mesure d’affichage. Il vise à répondre à certaines sollicitations et à justifier ce débat désastreux sur la déchéance de la nationalité pour des Français qui ne le seraient pas encore tout à fait, même s’ils le sont depuis neuf ans et demi.
Sur le plan du droit, cet article pose d’épineuses questions. En effet, vont pouvoir entrer dans son champ d’application des quantités de personnes qui ne sont pas forcément dépositaires de l’autorité publique et dont l’assassinat pourra être ainsi très lourdement sanctionné, car les magistrats ne manqueront pas d’appliquer la loi.
Il est assez détestable de voir comment on manie l’échelle des peines, la perpétuité, la pseudo-perpétuité - alors que la perpétuité, normalement, n’existe plus – et tout cela pour de simples raisons d’affichage !
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n° 55, présenté par M. Longuet et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Remplacer les mots :
guet-apens
par le mot :
préméditation
La parole est à M. Dominique de Legge.
La notion de « guet-apens » n’existe pas en droit pénal, contrairement à celle de « préméditation », qui est ici plus adaptée.
Le Gouvernement émet également un avis favorable.
Quel est l’état du droit aujourd'hui ? L’assassin d’une personne dépositaire de l’autorité publique peut être condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, peine que la cour d’assises peut assortir d’une période de sûreté de vingt-deux ans.
Il nous est proposé de porter cette période de sûreté à trente ans : nous avons eu ce débat en première lecture. À ce jour, une période de sûreté de trente ans ne peut être prononcée que dans un seul cas, pour les assassinats ou meurtres d’enfants précédés ou accompagnés de viols, de tortures ou d’actes de barbarie, soit des circonstances aggravantes pour des crimes totalement odieux.
Lors de la discussion générale, j’ai souligné qu’il ne s’agissait pas d’entrer dans une comparaison de ces crimes qui se fonderait sur leur caractère plus ou moins odieux : tous sont odieux. Néanmoins, nous devons avoir présents à l’esprit qu’une échelle des peines est nécessaire : les circonstances aggravantes que nous avons relevées pour les assassins d’enfants et qui permettent le prononcé d’une période de sûreté de trente ans doivent se retrouver pour les assassins de personnes dépositaires de l’autorité publique.
C'est la raison pour laquelle la commission des lois, son président, son rapporteur, les présidents du groupe de l’UMP et du groupe de l’Union centriste avaient proposé en première lecture que soit considéré comme circonstance aggravante le fait que le crime soit commis en bande organisée ou avec guet-apens. Si nous remplaçons le terme « guet-apens » par celui de « préméditation », nous en revenons à la définition pure et simple de l’assassinat, dont je rappelle qu’il est un meurtre commis avec préméditation.
Pour ma part, je suis opposé à cet amendement dont l’adoption constituerait un recul tout à fait important par rapport à la décision que nous avons prise en première lecture. Par conséquent, je ne le voterai pas.
Nous devons conserver ici des circonstances aggravantes, comme pour les assassins d’enfants. Faute de quoi, ceux-ci, quand bien même ils auraient commis leurs crimes en les faisant précéder ou en les accompagnant de viols, de tortures ou d’actes de barbarie, n’encourraient pas de peines supérieures à celles qui pourraient être prononcées à l’encontre d’assassins de personnes dépositaires de l’autorité publique. Cela ne me paraît pas normal.
Certes, le « guet-apens » en tant que tel n’a pas encore sa place dans le code pénal ou dans le code de procédure pénale, néanmoins, le terme figure dans le dictionnaire de la langue française et il n’est pas interdit de l’introduire dans le domaine pénal. D’ailleurs, cette notion se trouve déjà dans de nombreuses jurisprudences. C’est pourquoi je la défends.
M. Jean-Pierre Michel. Mon groupe s’abstiendra. Nous ne voudrions pas que le président du groupe UMP, M. Longuet, voie tout l’hémicycle voter contre son amendement !
Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
L'amendement est adopté.
L'article 23 ter est adopté.
(Non modifié)
L’article 706-154 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« Art. 706 -154. – Par dérogation aux dispositions de l’article 706-153, l’officier de police judiciaire peut être autorisé, par tout moyen, par le procureur de la République ou le juge d’instruction à procéder, aux frais avancés du Trésor, à la saisie d’une somme d’argent versée sur un compte ouvert auprès d’un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôts. Le juge des libertés et de la détention, saisi par le procureur de la République, ou le juge d’instruction se prononce par ordonnance motivée sur le maintien ou la mainlevée de la saisie dans un délai de dix jours à compter de sa réalisation.
« L’ordonnance prise en application du premier alinéa est notifiée au ministère public, au titulaire du compte et, s’ils sont connus, aux tiers ayant des droits sur ce compte, qui peuvent la déférer à la chambre de l’instruction par déclaration au greffe du tribunal dans un délai de dix jours à compter de la notification de l’ordonnance. Cet appel n’est pas suspensif. Le titulaire du compte et les tiers peuvent être entendus par la chambre de l’instruction. Les tiers ne peuvent pas prétendre à la mise à disposition de la procédure.
« Lorsque la saisie porte sur une somme d’argent versée sur un compte ouvert auprès d’un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôts, elle s’applique indifféremment à l’ensemble des sommes inscrites au crédit de ce compte au moment de la saisie et à concurrence, le cas échéant, du montant indiqué dans la décision de saisie. » –
Adopté.
En application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution et des lois organiques n° 2010-837 et n° 2010-838 du 23 juillet 2010 prises pour son application :
- la commission des affaires sociales a émis un vote favorable - 16 voix pour, 11 voix contre - pour la nomination de M. Jean-Luc Harousseau à la présidence de la Haute Autorité de santé ;
- et la commission des finances a émis un vote favorable - 13 voix pour, 0 voix contre et 1 abstention - pour la reconduction de M. François Drouin à la présidence du conseil d’administration de l’établissement public OSEO.
Je rappelle que la commission des affaires sociales a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Jean-Louis Lorrain membre titulaire du conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine, en remplacement de M. Jean-Claude Etienne.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Bernard Frimat.