Intervention de Nicole Borvo Cohen-Seat

Réunion du 19 janvier 2011 à 21h30
Orientation et programmation pour la performance de la sécurité intérieure — Article 24 quaterdecies, amendements 105 106 107

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

Ma présentation vaudra également pour les amendements n° 105, 106 et 107, monsieur le président.

En renforçant son arsenal législatif de répression des supporters, le Gouvernement ajoute dans l’urgence de nouveaux dispositifs extrêmement contraignants, sans en évaluer les effets, lesquels peuvent être pervers, et sans avoir au préalable utilisé de manière durable les dispositifs existants.

En effet, monsieur le ministre, vous ne tenez nullement compte de l’état des lieux dressé dans le Livre vert du supportérisme et des préconisations qu’il contient, livre remis en octobre 2010 à Mme la secrétaire d’État chargée des sports à la suite de l’organisation du congrès national des associations de supporters de football en janvier 2010. Alors que ce Livre vert préconise des mesures préventives, le projet de loi marque une étape supplémentaire dans le « tout-répressif ».

Le problème tient surtout au fait que les mesures existantes n’ont pas été régulièrement appliquées et que le Gouvernement n’a pas mis en œuvre une politique générale de prévention.

En l’état actuel, ce projet de loi constitue une atteinte supplémentaire aux libertés individuelles.

Les interdictions administratives de stade, prévues à l’article 24 septdecies, peuvent être prononcées par un préfet à partir d’un simple rapport de police et sans qu’une infraction ait été nécessairement commise. Ces interdictions administratives étaient initialement, en 2006, limitées à trois mois. Leur durée a été portée à six mois en mars 2010 et à douze mois en cas de récidive. Le projet de loi prévoit de les porter respectivement à douze mois et à vingt-quatre mois en cas de récidive.

Il est également inconcevable qu’un supporter puisse être interdit administrativement de stade du fait de son appartenance à une association de supporters dissoute ou suspendue, sachant que ces associations peuvent compter des centaines, voire des milliers de membres.

Dans le cas du Paris-Saint-Germain, des supporters n’ayant commis aucun fait de violence se sont récemment retrouvés fichés par les services de police, interdits de stade et obligés de pointer au commissariat pour avoir simplement manifesté leur opposition au plan Leproux.

Cet exemple montre bien l’arbitraire auquel ces dispositifs peuvent conduire. Il aurait sans doute mieux valu interpeller et sanctionner les auteurs d’actes violents ou racistes plutôt que de faire du chiffre en multipliant les interdictions pour des faits mineurs.

Par ailleurs, la mise en place d’une transmission automatique de la liste des personnes interdites de stade aux clubs et aux fédérations sportives n’est qu’une délégation des missions de service public de la police. Ces données sont personnelles et doivent par conséquent être sécurisées. Cette transmission ne se révèle d’ailleurs pas nécessaire tant l’arsenal « anti-hooligans » s’est récemment développé.

La lutte contre le hooliganisme est une nécessité absolue, je ne dirai pas le contraire, mais elle ne doit en aucun cas justifier des mesures attentatoires aux libertés individuelles, lesquelles s’appliquent à chacun.

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