Le projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie nationale appelle d’ailleurs les mêmes remarques. Alors que celui-ci n’a toujours pas été examiné par le Parlement, on nous demande tout de même de voter les crédits relatifs à l’organisation du rattachement organique et fonctionnel de la gendarmerie nationale à votre ministère.
Les gendarmes, auxquels je tiens à rendre hommage, sont eux-mêmes inquiets de cette réforme, dont le report de l’entrée en vigueur risque d’ailleurs de gêner, pendant plusieurs mois, la gestion quotidienne des gendarmeries.
Pour ma part, je m’interroge sur les raisons profondes d’un tel rattachement, car je ne vois rien qui le justifie, si ce n’est, bien évidemment, la volonté de réduire la dépense publique.
La présente mission « Sécurité » est, une fois de plus, la traduction budgétaire, pour l’année 2009, de la politique très sécuritaire que vous menez depuis 2002, avec des moyens en nette diminution. Elle illustre aussi, me semble-t-il, les choix imposés par la RGPP.
C’est ainsi que, d’ici à 2011, il est prévu de supprimer 7 000 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT, soit 4 000 policiers et 3 000 gendarmes.
C’est à se demander si la LOPPSI 2, dont la lecture du rapport pour avis de M. Courtois nous apprend qu’elle s’exécutera à moyens constants, voire en baisse, ne va pas défaire le peu qu’avait fait la version initiale.
Quel peut-être, dans ces conditions, l’avenir des brigades de gendarmerie ?
En outre, les effectifs des forces mobiles vont, eux aussi, diminuer.
Madame la ministre, dans la perspective de pallier toutes ces baisses d’effectifs chez les forces de l’ordre, prévoyez-vous de généraliser ce qu’il faut bien appeler – même si le terme n’est pas heureux – la « dénonciation anonyme » ? Nous en avons déjà un exemple concret dans le département de l’Isère, puisque l’on trouve sur le site internet de la préfecture une rubrique intitulée « Comment aider les forces de l’ordre ? »
Pour compenser ces baisses d’effectifs, vous prévoyez des réorganisations, en fait des redéploiements, sur le principe des vases communicants, qui ne pourront pourtant pas tout régler.
D’un côté, vous avez supprimé la police de proximité, les ADS – les adjoints de sécurité – et un certain nombre de postes de gardiens de la paix ; de l’autre, vous créez les UTeQ et les compagnies de sécurisation, qui plus est sur les mêmes territoires : comment tout cela va-t-il s’articuler ? Quelle visibilité pour la population ?
Au-delà des seules données budgétaires, j’ai la faiblesse de penser qu’on ne peut pas évoquer le thème de l’insécurité sans aborder la situation économique.
À cet égard, l’ensemble du projet de loi de finances pour 2009, en ne profitant qu’à une seule frange de la population, celle qui, paradoxalement, en a le moins besoin, tout en ignorant la plus grande partie des Français, est lui-même source d’insécurité. Parmi les nombreux exemples, je citerai le désengagement de l’État en faveur de la rénovation urbaine, la suppression des RASED, les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, le projet de suppression de l’école maternelle, votre politique du logement, la suppression de très nombreux postes dans la fonction publique, celle des services publics de proximité et du lien social qui y est attaché.
Croyez-vous que c’est avec ce genre de décision que vous allez améliorer la vie de nos concitoyens et leur permettre de vivre en toute sécurité et sérénité ?
Depuis les annonces faites en 2005 à la suite des émeutes, que s’est-il passé ? Rien ! Rien n’a en effet changé dans les quartiers dits « sensibles », à tel point que l’on peut se demander où est passé le plan Banlieue, pourtant si peu ambitieux !
La situation des populations écartées des centres urbains n’a guère évolué, que ce soit en matière de sécurité, d’éducation ou de transports. La précarité, le chômage, la misère, la crise du logement, la violence, le développement de l’économie parallèle qui gangrène des quartiers entiers : tout est là !
La question fondamentale est, bien sûr, celle des moyens et de l’utilisation de l’argent public.
On nous parle de restriction budgétaire, d’économie, de maîtrise des dépenses publiques, comme si la France, qui vient de débloquer des milliards d’euros en faveur des banques et du monde de la finance, était un pays pauvre.
Le problème, ce n’est pas que l’argent manque, c’est qu’il est très mal utilisé : les cadeaux fiscaux faits aux personnes les plus fortunées de France représentent autant de recettes en moins pour l’État.