Séance en hémicycle du 2 décembre 2008 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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  • délinquance
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La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

M. le Président du Sénat a été informé, par lettre en date du 1er décembre 2008, par M. le Président du Conseil constitutionnel que celui-ci a été saisi d’une demande d’examen de la conformité à la Constitution, par plus de soixante députés, de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.

Le texte de la saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de la distribution.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé à la Haute Assemblée de bien vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques et du Conseil supérieur de l’énergie.

La commission des affaires économiques a fait connaître qu’elle propose les candidatures de MM. Pierre Hérisson, Bruno Sido, Michel Teston et Philippe Darniche pour siéger au sein du premier de ces organismes extraparlementaires ; de MM. Ladislas Poniatowski, Roland Courteau, Jean-Claude Merceron et Daniel Raoul pour siéger, les deux premiers comme titulaires et les deux derniers comme suppléants, au sein du second organisme.

Ces candidatures ont été affichées et seront ratifiées, conformément à l’article 9 du règlement, s’il n’y a pas d’opposition à l’expiration du délai d’une heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale (nos 98 et 99).

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurité ».

La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Sécurité » est dotée de 16, 155 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 16, 226 milliards d’euros de crédits de paiement, soit une augmentation de 2, 2 % par rapport à 2008.

Avec 13, 877 milliards d’euros, les dépenses en personnel constituent 85, 5 % des crédits de la mission « Sécurité », qui est donc, avant tout, une mission de personnel. Cette caractéristique forte induit une rigidité qui rend plus difficile encore la recherche de bonne gouvernance.

La baisse de la délinquance, qui constitue le premier objectif de la mission, s’est poursuivie cette année, avec un nouveau recul compris entre 2 % et 3 %.

Ces bons résultats sont liés, notamment, à la montée en puissance de la police technique et scientifique, qui intervient en appui du travail d’investigation des services de police.

Le programme « Police nationale » comporte 8, 632 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une hausse de 2, 2 %.

Ce programme enregistre une réduction de ses effectifs de 2383 emplois en équivalent temps plein travaillé, ou ETPT, avec un plafond d’emplois fixé à 146 180 ETPT. Cette baisse s’inscrit dans une programmation triennale qui prévoit, à terme, la suppression de 4000 ETPT de policiers.

Il convient de relever que les crédits de paiement consacrés aux investissements fléchissent de 4, 5 %. La tendance est encore plus marquée s’agissant des autorisations d’engagement, qui chutent de 22, 2 %. Il faut souhaiter que les arbitrages nécessaires entre le fonctionnement et l’investissement ne mettent pas en péril la dynamique de modernisation de la police nationale.

Le programme « Gendarmerie nationale » s’appuie, pour sa part, sur 7, 626 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une hausse de 2, 2 %.

Comme la police, la gendarmerie connaîtra, en 2009, une réduction de ses effectifs : son plafond d’emploi est fixé à 99 509 ETPT, soit une baisse de 1625 emplois en équivalent temps plein travaillé. Là encore, ce mouvement s’inscrit dans une programmation triennale, qui prévoit la suppression de 3000 ETPT de gendarmes.

Il faut, néanmoins, souligner que le projet de loi de finances pour 2009 prévoit les mesures nécessaires pour assurer le même déroulement de carrière aux sous-officiers et aux officiers de gendarmerie qu’aux fonctionnaires des corps actifs de la police nationale.

Les dépenses de fonctionnement de la gendarmerie progressent de 4, 6 % ; ses dépenses d’investissement enregistrent en 2009 une chute de 23 % en crédits de paiement. En autorisations d’engagement, cette tendance est encore plus marquée, avec une réduction de 50, 2 %.

Cette chute de l’investissement peut susciter l’inquiétude, dès lors qu’elle serait de nature à entraver la nécessaire modernisation de la gendarmerie nationale et à entamer son potentiel opérationnel dans les années à venir.

Il faut préciser que cette évolution concerne essentiellement les véhicules blindés – mais ceux-ci peuvent être mis à disposition par l’armée de terre dans un souci de mutualisation des moyens – et le remplacement des hélicoptères Écureuil, pour lesquels il faudra veiller à ce que le coût de la maintenance ne dépasse pas celui de l’amortissement de nouveaux appareils.

La mission « Sécurité » sera marquée, en 2009, par une évolution notable, le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur.

Cette évolution a pu susciter des doutes, presque des inquiétudes. Aussi est-il bon de les dissiper et de préciser qu’elle ne remet pas en cause le statut militaire de la gendarmerie, ni le dualisme « policier » qui caractérise les forces de sécurité dans notre pays. Elle consiste, en revanche, en un rattachement organique et opérationnel, en vue d’améliorer l’efficacité de la politique de sécurité.

La mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, constituera un deuxième axe fort de l’année 2009 pour la mission.

Sur ce thème, d'ailleurs, je ne puis que regretter que tous les éléments relatifs à cette étude ne m’aient pas été communiqués, malgré des demandes répétées. Seules les principales conclusions m’ont été fournies. On peut émettre l’hypothèse qu’un journaliste aurait bénéficié des informations qui n’ont pas été accordées à un parlementaire.

Murmures.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Il m’aurait pourtant été précieux de disposer d’éléments chiffrés plus précis, ainsi que des diagnostics d’étape ayant abouti à ces conclusions, bref, si je peux qualifier ainsi ces informations, d’une « matière première » plus riche permettant d’alimenter mieux encore la réflexion de la commission des finances.

Faut-il rappeler que la Constitution révisée accorde une importance accrue au Parlement et incite à une coopération plus étroite encore entre les assemblées et le Gouvernement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

S’agissant de la RGPP, cette coopération n’est pas allée aussi loin que l’on aurait pu le souhaiter.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

L’incidence budgétaire de la RGPP reste, par ailleurs, bien modeste. Qu’on en juge : sa mise en œuvre se traduira par une diminution de 0, 88 % des emplois et une économie de 52 millions d’euros, soit 0, 39 % du budget de la mission, ce qui est très faible.

Si ces efforts doivent bien sûr être encore encouragés, ils ne sont pourtant pas de nature à changer fondamentalement l’équation budgétaire de la mission.

Or, dans un contexte budgétaire tendu, toutes les pistes méritent d’être explorées. Il s’agit, en particulier, d’exploiter toutes les potentialités offertes par la mutualisation entre les deux forces.

Car le dualisme « policier » peut être la meilleure ou la pire des choses. Il présente plusieurs risques : les doublons, la non-interopérabilité et la concurrence exacerbée.

Madame la ministre, mes chers collègues, passons donc en revue les différentes sources d’économies qui peuvent être exploitées.

Il faut, tout d'abord, reformater le dispositif de formation initiale pour l’adapter aux variations à court terme du flux d’élèves, qui ira en diminuant. L’annonce récente de la fermeture de quatre écoles de gendarmerie va dans ce sens.

De même, afin de développer l’expertise immobilière au sein du ministère et d’optimiser le coût financier des opérations, la création d’une agence, véritable « pôle de compétence immobilière » pour la police et la gendarmerie, paraît évidente.

La mutualisation des fichiers, facteur essentiel pour la coordination et l’efficacité des deux forces, existe d’ores et déjà, mais demeure encore trop partielle ; elle devrait être totale.

Malgré de louables efforts, l’interopérabilité des réseaux de communication des deux forces n’est pas pleinement assurée, sauf dans la région parisienne, ce qui est tout à fait insuffisant. D’importants progrès doivent encore être réalisés.

Au regard du rôle croissant de la police technique et scientifique, il est difficilement compréhensible que les laboratoires ne soient pas communs dans leur ensemble. Il y a là des économies d’échelle substantielles à réaliser.

La répartition des zones d’intervention respectives de la police et de la gendarmerie n’a pas, elle non plus, encore atteint son effet optimum. La police a vocation à s’inscrire dans une logique de police territoriale d’agglomération, tandis que la gendarmerie doit faire porter ses efforts afin d’avoir un meilleur contrôle des flux sur les territoires ruraux, qu’elle connaît très bien.

De nouvelles opérations de redéploiement pourraient donc être conduites, pour parvenir à des zones plus homogènes.

En région parisienne, le « particularisme » de la préfecture de police de Paris fait courir le risque de doublons, en particulier en matière de renseignement. Partout, les renseignements généraux, les RG, et la direction de la surveillance du territoire, la DST, ont été fusionnés au sein de la direction centrale du renseignement intérieur, la DCRI, sauf à la préfecture de police de Paris. Son positionnement doit donc être revu, notamment dans la perspective de la constitution d’un Grand Paris.

Comme on le sait, l’organisation actuelle des transfèrements impose un transfert de charges indues, de la mission « Justice » vers la mission « Sécurité ».

Cette situation n’est plus acceptable, alors même que des solutions existent : système de refacturation interne, déplacements de magistrats en prison, plutôt que mobilisation des effectifs de police et de gendarmerie pour assurer toute une journée la garde d’un détenu, vidéoconférence. Il n’est pas normal, entre autres, de déplacer un détenu sous escorte pour lui demander son identité.

La direction générale de la gendarmerie nationale a estimé à près de deux millions d’heures et 1 000 équivalents temps plein travaillé le poids de ces gardes et escortes en 2007.

Du côté de la police nationale, ce sont environ 2 700 équivalents temps plein travaillé qui sont mobilisés sur ces missions.

Sur la volonté de réformer le système des transfèrements, je souligne, d’ailleurs, la convergence de vues, au sein de la commission des finances, entre le rapporteur spécial de la mission « Sécurité » et celui de la mission « Justice ».

D’une manière générale, les forces mobiles doivent être recentrées sur leur cœur de métier.

En 2003, le rapport que j’avais commandé au cabinet Accenture concluait à un temps de travail moyen annuel pour les gendarmes de 1 731 heures. En 1998, un rapport de notre collègue M. Jean-Jacques Hyest aboutissait à une évaluation de 1 300 heures par an pour la police.

La baisse régulière de la délinquance au cours des dernières années impose aujourd’hui de revoir l’équation de notre politique de sécurité. Moins d’effectifs, travaillant plus grâce à une meilleure mutualisation et à un plus grand recours à la technique – à la vidéosurveillance et à la police scientifique, notamment –, telle me paraît être la direction à suivre.

Enfin, la dimension internationale de la mission « Sécurité », via le service de coopération technique internationale de police, le SCTIP, doit être optimisée.

Le savoir-faire, l’expérience et la maîtrise technologique des forces de sécurité françaises constituent un atout à valoriser.

La coopération en matière de sécurité permet un retour en sécurité intérieure, source d’économies. Elle permet aussi d’entretenir des relations avec des pays parfois en marge des relations internationales.

Sous les réserves que je viens d’exposer, la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation vous propose d’adopter les crédits de la mission « Sécurité » et de chacun de ses programmes.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP. – M. Jean-Louis Carrère applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avant tout, je tiens à témoigner de notre soutien le plus total aux membres des forces de police et de gendarmerie, qui, dans des conditions souvent difficiles, se dévouent au péril de leur vie pour assurer la sécurité de nos concitoyens : ainsi, en 2007, vingt-quatre policiers et gendarmes sont décédés dans l’exercice de leurs fonctions, dont cinq à la suite d’agressions. Qu’il me soit permis ici de leur rendre un hommage particulier !

Lors de l’examen du projet de budget pour 2008, j’avais attiré l’attention sur la nécessité de fixer rapidement un cap et de clarifier les principales réformes envisagées.

Les policiers et gendarmes étaient déstabilisés par les rumeurs circulant en permanence.

Un an plus tard, de nombreuses réponses ont été apportées. Les syndicats de policiers ainsi que les personnes entendues à l’occasion des travaux préparatoires à la discussion du projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie nationale ont indiqué que les personnels comprenaient la nécessité de participer à l’effort budgétaire demandé à l’ensemble des administrations de l’État.

Plusieurs grandes réformes structurelles sont désormais engagées ou se profilent, qu’il s’agisse du rattachement de la gendarmerie à votre ministère, madame la ministre, de la future loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, la LOPPSI, dont les grandes lignes sont désormais connues, ou de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, qui a déjà abouti à une série de décisions.

Après un budget pour 2008 de transition, le projet de loi de finances pour 2009 s’affirme comme la première étape de ce nouveau cycle de réformes.

Elles sont rendues nécessaires par le contexte budgétaire, qui incite les forces de police et de gendarmerie, plus encore que par le passé, à faire mieux à moyens constants.

Le budget de la police et de la gendarmerie apparaît durablement contraint, les crédits hors dépenses de personnel s’inscrivant à la baisse. Toutefois, la hausse des dépenses de personnel ne se traduit pas par une hausse ou une stabilisation des effectifs, au contraire, puisqu’il est prévu de supprimer 7 000 équivalents temps plein travaillé sur l’ensemble de la mission à l’horizon 2011, soit 4 000 policiers et 3 000 gendarmes environ.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Pour faire face à ces défis, il importe de procéder à de profondes réorganisations et à des arbitrages clairs.

À cet égard, ma première question portera sur l’avenir des adjoints de sécurité.

En baisse constante depuis 2001, l’effectif des adjoints de sécurité est passé de 15 761 en 2001 à 9 918 au 1er août 2008.

Cette évolution laisse à penser que les adjoints de sécurité jouent le rôle de variable d’ajustement. En effet, leur place exacte dans le dispositif de sécurité ne semble pas bien arrêtée, ce qui ne facilite pas, bien entendu, la définition d’objectifs de recrutement.

Certes, ce dispositif est souvent mis en avant comme un instrument d’intégration et de promotion de la diversité dans la police nationale. Toutefois, si cette fonction est importante, elle ne peut suffire seule à maintenir ce dispositif.

En conséquence, madame la ministre, pourriez-vous nous préciser votre projet pour l’avenir des adjoints de sécurité ? Leurs missions pourraient-elles être mieux définies ?

Mes autres questions porteront sur les grands chantiers à venir.

Chacun le sait, la police scientifique et technique et sa « démocratisation » pour des faits de la délinquance quotidienne constituent un défi essentiel.

Voilà un an et demi, j’ai visité les locaux de la police scientifique, à Paris, qui sont dans un état de vétusté et de délabrement indigne d’une police moderne.

Je sais que le projet de regrouper l’ensemble des laboratoires parisiens sur un site unique et moderne est en cours et figure à l’agenda de la future LOPPSI.

Pourriez-vous, madame la ministre, préciser le degré d’avancement de ce projet et la date réaliste de livraison de l’ouvrage ?

Toujours à propos de la police scientifique, je me réjouis que vous ayez confirmé devant la commission des lois que la fusion de l’Institut national de police scientifique et de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale n’était pas à l’ordre du jour. Dans ce domaine, conserver deux organismes me semble important.

Un autre chantier essentiel est celui de la réduction des charges dites indues.

Je ne m’attarderai pas sur la question des transfèrements et extractions. La discussion des amendements identiques de la commission des lois et de la commission des affaires étrangères permettra d’y revenir.

En revanche, la question de la réduction des gardes statiques, compte tenu des progrès timides obtenus jusqu’à présent, mérite des précisions.

Comme vous nous l’avez indiqué en commission, madame la ministre, des économies sont attendues grâce, en particulier, à des moyens techniques comme la vidéosurveillance.

Toutefois, pourriez-vous être plus précise et nous indiquer, notamment, des objectifs chiffrés en termes d’équivalents temps plein travaillé économisés en 2009 ?

En outre, à moyen et à long terme, disposez-vous d’une évaluation du nombre d’équivalents temps plein travaillé que requerra la garde du futur tribunal de grande instance de Paris ?

Peut-on espérer de ce déménagement des économies grâce â une meilleure conception du bâtiment ? Je rappelle que la protection du Palais de justice de Paris est le principal consommateur de gardes statiques pour la gendarmerie nationale, avec 540 équivalents temps plein travaillé.

Mes dernières interrogations porteront sur la réforme des forces mobiles. J’avais déjà eu l’occasion, l’année dernière, de faire un point particulier sur cette question. Un an plus tard, de nombreuses réformes ont été engagées, en particulier pour réduire le format des forces mobiles.

Ma première question porte sur les conséquences de la réduction du format de la gendarmerie mobile sur les missions de maintien de l’ordre outre-mer, au moment, d’ailleurs, où l’armée se désengage de plusieurs territoires ultra-marins.

Compte tenu du taux de rotation déjà élevé de la gendarmerie mobile, est-il envisagé d’étendre aux CRS les missions outre-mer ?

Ma seconde question porte sur le rapprochement des CRS et de la gendarmerie mobile.

Les marges de progression sont encore grandes, mais des mesures importantes ont déjà été prises, comme la mise en commun du centre de formation de Saint-Astier.

D’autres pistes peuvent être explorées. Pouvez-vous nous dire, ainsi, si celle d’un partage des cantonnements est envisagée et si la direction de la gendarmerie mobile et la direction centrale des CRS seront regroupées sur un même site ?

Au bénéfice de ces observations, la commission des lois vous propose, mes chers collègues, d’adopter les crédits de la mission « Sécurité ».

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’année 2009 sera marquée par de profondes mutations pour la gendarmerie nationale.

J’en mentionnerai trois.

Tout d’abord, la gendarmerie nationale sera, comme l’ont dit les deux rapporteurs qui m’ont précédé à cette tribune, rattachée organiquement et budgétairement au ministère de l’intérieur.

Le transfert de la tutelle de la gendarmerie nationale du ministre de la défense au ministre de l’intérieur est prévu par le projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie nationale, qui a été déposé en premier sur le bureau du Sénat.

Le projet de loi de finances pour 2009 vise, quant à lui, à organiser – par anticipation sur les prochaines décisions – le rattachement budgétaire de la gendarmerie au ministère de l’intérieur.

Ce rattachement devrait permettre de renforcer la coopération entre la police et la gendarmerie dans la lutte contre la criminalité et d’améliorer ainsi la protection des Français.

Il permettra aussi de développer les mutualisations de moyens entre les deux forces de sécurité et favorisera donc les économies d’échelle.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées aexaminé ce projet de loi, le 29 octobre dernier.

Sur ma proposition, elle a adopté dix-huit amendements, qui visent à préserver le statut militaire de la gendarmerie, conformément, d’ailleurs, au souhait exprimé avec beaucoup de vigueur par M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial de la commission des finances, à conforter ses missions et son ancrage territorial.

Vous le savez mieux que quiconque, madame la ministre, notre pays a besoin d’une force de sécurité à statut militaire capable en toutes circonstances de faire face à des situations de crise, en métropole, outre-mer ou sur les théâtres d’opérations extérieures.

La dualité des forces de sécurité et le statut militaire de la gendarmerie doivent donc être absolument préservés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

Nous en sommes tous convaincus.

Je tiens, d’ailleurs, à saluer ici le travail que la commission des affaires étrangères a effectué avec la commission des lois, notamment avec son rapporteur pour avis, M. Jean Patrick Courtois, et la convergence de vues entre elles deux.

Le budget de la gendarmerie s’inscrit dans un cadre pluriannuel, qui résulte à la fois du document de programmation triennale et de la future loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure.

Bien que je regrette, madame la ministre, que ce texte n’ait pas encore été présenté au Parlement, le budget de la gendarmerie pour 2009 intègre ainsi une première annuité de la future LOPPSI 2, ce qui permet de financer certaines priorités, notamment le recours aux nouvelles technologies.

Je m’inquiète toutefois, comme les deux rapporteurs qui m’ont précédé à cette tribune, de la forte diminution des crédits d’investissement sur les trois prochaines années et du report de plusieurs programmes d’équipements, comme le renouvellement des hélicoptères et des véhicules blindés.

Enfin, la gendarmerie n’échappe pas à la politique de maîtrise de la dépense publique et aux mesures d’économies prévues au titre de la révision générale des politiques publiques.

Ainsi, environ 3 000 postes pourraient être supprimés dans la gendarmerie sur les trois prochaines années, dont 1 625 dès 2009.

Je rappellerai pour mémoire simplement que, dans une note, un ancien conseiller du Premier ministre évoquait la suppression de 175 brigades territoriales et de 15 escadrons de gendarmerie mobile, provoquant ainsi l’émoi et l’inquiétude chez l’ensemble des élus locaux

Mais vous avez remis les choses en ordre, lors de votre audition devant la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, puisque vous nous avez déclaré que ces réductions d’effectifs devraient concerner principalement des personnes affectées dans des tâches annexes, et maintenir ainsi à la gendarmerie sa capacité opérationnelle sur les territoires.

La capacité opérationnelle de la gendarmerie et son ancrage territorial seront donc préservés, et j’espère que vous nous le redirez tout à l’heure, madame la ministre.

J’ai d’ailleurs proposé à la commission des affaires étrangères un amendement sur les transfèrements et les extractions judiciaires, qui a été adopté à l’unanimité de la commission ; je vous le présenterai tout à l’heure.

Sous réserve de l’adoption de cet amendement, la commission a émis un avis favorable sur les crédits de la mission sécurité pour 2009, en ce qui concerne la gendarmerie nationale.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste. – M. Jean-Louis Carrère applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je vous rappelle qu’en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt-cinq minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, c’est pour moi aujourd’hui tant un honneur qu’une épreuve d’intervenir sur la mission sécurité d’un ministère que j’ai servi avec passion, conviction et détermination.

C’est un honneur, s’agissant de l’une des missions régaliennes de l’État, garante des principes républicains et de l’indispensable équilibre entre prévention et répression.

C’est une épreuve, dès lors que, comme beaucoup d’entre nous ici, j’aurais voulu que ce projet de budget pour 2009 puisse venir à bout des retards, des dysfonctionnements et parfois des incohérences que l’on a pu relever dans la bonne marche des services en charge de la sécurité de notre pays.

Le sujet est d’autant plus délicat que la sécurité est une exigence partagée par tous les citoyens qui n’acceptent de l’État aucune exception à la notion de « risque zéro », alors qu’ils sont, à leur propre égard, d’une tolérance parfois coupable.

Il suffit pour s’en convaincre de voir le comportement de certains automobilistes qui n’hésitent pas à bafouer des règles élémentaires de conduite.

Satisfaire à cette exigence est donc un enjeu majeur, un défi que le Gouvernement entend relever.

J’ai bien lu, madame le ministre, et j’ai entendu votre volonté de mettre la sécurité publique au cœur de la démarche de modernisation de l’État, en augmentant les effectifs, en améliorant les rémunérations, en renforçant les moyens de fonctionnement et d’équipement des services de police et de gendarmerie.

J’ai suivi avec le plus grand intérêt la création, en juillet dernier, de la direction centrale du renseignement intérieur, née de la fusion de la direction de la surveillance du territoire et de la direction centrale des renseignements généraux.

J’ai adhéré au retour dans les quartiers difficiles des unités territoriales de quartier, qui, sous une nouvelle dénomination, ont remplacé la police de proximité, et tissent, avec des méthodes renouvelées, le lien social indispensable à certaines populations en déshérence au sein des quartiers difficiles.

J’ai salué les vertus du travail interministériel qui a permis, dans des formules totalement novatrices, de lutter avec efficacité contre l’économie souterraine.

J’ai relevé l’évolution favorable de certaines statistiques faisant état, là d’une réduction de la criminalité routière, ici d’une baisse de certaines formes de délinquance, ici encore de l’amélioration du taux d’élucidation des crimes et délits.

Tout cela va, assurément, dans le bon sens, même s’il nous faut analyser avec la plus grande prudence les résultats communiqués.

Car, nous le savons bien, madame le ministre, vous comme moi, les chiffres ne disent que ce que nous voulons bien leur faire dire.

Le nombre d’atteintes aux personnes a singulièrement décru à Clichy-sous-Bois, dès lors qu’a été fermée l’antenne du service de police.

Pour un chéquier volé, le nombre de plaintes peut aussi bien être d’une unité – le chéquier en question – que de vingt unités si ce chéquier comptait vingt chèques au moment du vol.

Le nombre des victimes de la route est en évolution toujours aléatoire sans qu’il soit possible d’imputer systématiquement des résultats favorables à la présence policière.

Je ne veux pas être, ici, le détracteur inconsidéré de la performance, de la quête du chiffre à tout prix, de la recherche de l’efficience idéale. Je m’interroge seulement sur les moyens de donner une meilleure efficacité à la fonction sécuritaire dont le ministère de l’intérieur a la charge.

La voie choisie est celle du rapprochement entre police et gendarmerie, placées sous la tutelle d’un même ministère. Au-delà du pilotage opérationnel, placé depuis 2002 sous l’autorité du ministre de l’intérieur, s’ajoute désormais le pilotage fonctionnel.

Ensemble, ils ont pour objet de concourir à une meilleure cohérence des deux forces, à une mise en synergie de leurs actions, à une mutualisation de leurs moyens, à une complémentarité de leurs modes d’intervention.

C’est sur ce double pilotage, madame le ministre, que je voudrais attirer votre intervention.

Comment ne pas relever, en premier lieu, un problème de calendrier ?

La particularité de la mission sécurité de ce budget tient au fait que nous examinons un texte qui doit s’appliquer à un système encore virtuel, puisque aussi bien la prochaine loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure ne pourra intervenir que dans les premiers mois de l’année prochaine.

On ne peut que regretter cette absence de « concordance des temps » qui, dans un tout autre domaine, celui de la grammaire, vaudrait une mauvaise note à l’élève défaillant ! §

Un tel retard n’est pas seulement gênant parce qu’il contraindra les deux administrations à envisager des modes de gestion provisoires, mais aussi parce qu’il est source d’inquiétude pour l’une et l’autre des deux forces.

Qui n’a pas côtoyé de très près police et gendarmerie aurait bien du mal à mesurer l’acuité de leur sensibilité. « La police marche à l’affectif », m’avait-on dit, et c’est vrai. Les policiers ont besoin de cette reconnaissance de leur autorité de tutelle pour la dangerosité et la pénibilité de leur métier ; ils sont certes, au quotidien, soumis à l’urgence, mais ils l’acceptent parce qu’elle s’inscrit dans des démarches encadrées et programmées.

Le général Gilles, directeur général de la gendarmerie, déclarait dans une récente communication : « Le gendarme, parce qu’il est fils des armées est un militaire ; parce qu’il est fils du territoire, il est toujours l’homme d’un terroir ; parce qu’il est fils de la loi, il en est le gardien intraitable ; parce qu’enfin il est fils du peuple, il en est le serviteur direct. »

Ces traits d’identité, les gendarmes veulent les conserver, coûte que coûte, et n’entendent pas les abandonner en intégrant une nouvelle administration.

M. Jean-Louis Carrère applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Escoffier

L’inquiétude des policiers et des gendarmes, que d’aucuns voudraient voir déjà gommée, tient assurément au choc de deux cultures qui, tant qu’elles étaient clairement distinctes, entraînaient peut-être des comparaisons revendicatives, mais jamais de heurts frontaux.

N’est-ce pas pour cela, madame le ministre, que les choix d’organisation future ont retenu des formules entre ombre et lumière ?

Le projet de budget pour 2009 de la mission « Sécurité » présente deux volets : le programme police est géré au niveau zonal, à travers les secrétariats généraux pour l’administration de la police, SGAP ; le programme gendarmerie reste du niveau central avec une gestion déconcentrée au niveau régional.

La gestion des carrières est rattachée au ministère de l’intérieur, sauf en ce qui concerne la discipline des gendarmes qui, à raison de leur statut militaire, implique un rattachement au ministère de la défense. Je veux sur ce point souligner que, s’agissant des procédures disciplinaires, il est de jurisprudence constante qu’un seul et unique dossier doit exister. Qu’en sera-t-il en fait ?

La formation continue est unique, mais la formation initiale est distincte, conséquence, une nouvelle fois, du statut militaire. Ne serait-il pas toutefois envisageable d’offrir, au moment de la formation initiale, un tronc commun de formation à des policiers et des gendarmes qui auront à exercer les mêmes missions globales dès leur prise de fonction ?

Enfin, il existe une parité globale des carrières, avec seulement un point de convergence au grade de brigadier, ce qui pourrait conduire à l’instauration des trop fameuses « échelles de perroquet ».

Sur ces différents points sensibles, je sais que vous vous attacherez à trouver les solutions les plus opérantes, comme vous l’avez d’ailleurs fait sur les moyens logistiques mutualisés.

Mais, dans ce domaine, où n’intervient que très peu la dimension humaine, les solutions sont aisées à trouver. C’est plus difficile, en revanche, dans tous les autres aspects touchant en particulier au respect des prérogatives fondamentales de la gendarmerie.

Je suis sensible, par exemple, aux arguments de deux anciens directeurs généraux de la gendarmerie nationale, anciens présidents de chambre à la Cour de cassation, qui dénoncent l’abandon de la procédure de réquisition de la force armée, fondant l’action de la gendarmerie, de statut militaire, depuis un décret de 1903.

Ils écrivaient : « Il est insupportable au regard des libertés publiques que la gendarmerie soit désormais laissée, dans les missions de maintien et de rétablissement de l’ordre public, à la disposition du ministre, ainsi qu’à la discrétion des préfets, sans la garantie fondamentale de la procédure de réquisition à force armée. »

J’examinerai, avec la plus grande attention, les dispositions qui seront prises, dans le contexte de la prochaine loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, pour donner à la police et à la gendarmerie les meilleures chances d’une parfaite complémentarité.

Je ne doute pas, madame le ministre, que votre détermination et votre volonté de dialogue trouveront les voies d’une amélioration d’un dispositif qui, pour trouver sa pleine et harmonieuse mesure, pourrait se mettre en place avec, au terme d’une période exploratoire, une évaluation des résultats.

En cette année 2008, où nous fêtons les cent ans des brigades du Tigre, comment ne pas former le vœu que, sur les pas de votre illustre prédécesseur Georges Clemenceau, vous ouvriez, madame le ministre, une ère nouvelle de pleine efficacité de la mission de sécurité au service de nos concitoyens !

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Gautier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis 2002, première fois que j’intervenais dans ce débat sur le budget de la sécurité, mon discours a été très souvent à peu près le même, actualisé par les drames et les affirmations osées ou extrapolations de l’année. Cela finissait même par en être un peu lassant !

Mais, après réflexion et analyse, je me suis aperçu que la politique du Président de la République, la vôtre, madame la ministre de l’intérieur, avait changé. M. Sarkozy Président de la République a oublié M. Sarkozy, ministre de l’intérieur.

Tout d’abord, les projets de loi sont continuellement annoncés, puis retardés.

Par exemple, le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure est annoncé depuis un an, mais sans cesse repoussé.

Compte tenu de la programmation triennale, le Parlement se retrouve dans la situation baroque de discuter de la première année d’exécution budgétaire d’une loi qui n’a même pas été adoptée en conseil des ministres.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Gautier

Quant à l’examen du projet de loi relatif à la gendarmerie, qui prévoit de placer la gendarmerie nationale sous la responsabilité du ministre de l’intérieur, il a été examiné en commission, puis reporté. Mais cela a été remarquablement dit par notre collègue tout à l’heure.

Comment pouvons-nous discuter d’un budget qui prend déjà en compte des modifications législatives non encore votées par le Parlement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Gautier

Ensuite, madame la ministre, les policiers sont les grands perdants de votre politique. Leurs syndicats nous ont saisis pour exprimer leur mécontentement face aux difficultés qu’ils rencontrent et déplorer la dégradation grandissante de leurs conditions de travail. Je les cite : « Jugez plutôt : 10 000 policiers sont blessés en service chaque année, soit 10 % de l’effectif total au sol. Aucune profession ne peut afficher de tels chiffres, démonstratifs de la violence au quotidien subie par les forces de l’ordre lors de l’exercice de leur mission. »

À cet égard, je me joins aux propos qui ont été tenus tout à l’heure par Jean-Patrick Courtois, pour remercier l'ensemble des agents et les féliciter de leur travail.

Sachez, madame la ministre, que la suppression d’une partie de leurs RTT, sur la base d’un accord avec un seul syndicat, dont la représentativité est contestée, est très mal perçue sur le terrain. Le Gouvernement se doit donc de rouvrir les négociations avec l'ensemble des organisations syndicales.

Bien sûr, toutes ces décisions se traduiront forcément par une baisse de l’efficacité opérationnelle et se répercuteront sur la sécurité des policiers. Et que dire de la fermeture annoncée des écoles de formation ?

Quant au retour de la police de proximité, nous vous le demandons depuis 2003. Vous remettez celle-ci en place sous le nom d’unités territoriales de quartier, certes, mais de manière bien trop limitée. Il n’en existe aujourd’hui que huit, réparties dans trois départements, ce qui est largement insuffisant !

Enfin, la baisse annoncée des effectifs annule, pour une bonne part, les prétendues créations de postes annoncées dans le cadre de la LOPSI 1 de 2002. Les syndicats de policiers contestent d’ailleurs vos chiffres et, démonstration à l’appui, ils affirment que la réduction des effectifs est bien plus importante que celle que vous annoncez.

La politique mise en place entre 2002 et 2004 affichait l’ambition de porter de 105 000 à 108 000 le nombre de policiers en 2012. À l’époque, souvenez-vous, nous nous étions montrés sceptiques. Aujourd’hui, vous revenez totalement sur cet objectif, puisque, selon le calcul effectué par les syndicats, les effectifs passeront en fait, à cette date, de 105 000 à 100 300.

Les policiers ne tolèrent plus de telles réductions d’effectifs. Ils ont d’ailleurs manifesté partout en France à ce sujet, conscients que ces mesures auront des conséquences sur la sécurité et, donc, sur le service rendu au citoyen.

Quelle solution leur apportez-vous ? Qu’ils travaillent plus pour en pâtir plus !

Plus grave encore, madame la ministre, les budgets sont réduits.

Vous annoncez une augmentation de 2, 2 % du budget de la mission « Sécurité », mais, pour la première fois depuis longtemps, les autorisations d’engagement resteront quasiment stables.

Si nous prenons en compte l’« arrivée » de la gendarmerie sous votre responsabilité, la baisse des effectifs de la police, les menaces terroristes sérieuses que vous nous citiez en commission, au bout du compte, nous avons toutes les raisons d’être très inquiets !

La vérité, c’est que la sécurité n’est plus du tout une priorité pour le Gouvernement. En matière de prévention, rien, non plus, n’a été entrepris. Le document de politique transversale Prévention de la délinquance ne permet pas de retracer une réelle volonté politique. Tout se reporte sur les collectivités locales.

En réalité, madame la ministre, vous êtes obligée de faire mieux avec moins, et l’on comprend que ce soit difficile ! Vous annoncez une baisse de 13 % de la délinquance générale, en vous fondant sur les données de l’état 4001, c’est-à-dire celles qui sont issues des enregistrements des services de police et de gendarmerie.

Les enquêtes de victimation établies par l’INSEE donnent des résultats plus complets et relativisent les données classiques. C’est ainsi que l’on apprend que, selon les estimations, le nombre d’atteintes subies en 2007 était de 4, 615 millions quand le nombre d’atteintes suivies d’une plainte n’était plus que de 1, 644 million. Autrement dit, les deux tiers des victimes ne déposent pas plainte auprès de vos services !

On y apprend aussi qu’un peu plus de 800 000 personnes âgées de 14 ans et plus ont déclaré avoir subi au moins un acte de violence physique en 2007, contre 736 000 en 2006, soit une augmentation de 9 %. Nous sommes loin des chiffres annoncés !

Mais foin de l’éternelle polémique sur les chiffres, et admettons – beau paradoxe ! – que la délinquance baisse en même temps que les moyens !

La réalité, je le répète, c’est que les communes se débrouillent toutes seules. Elles pallient le désengagement constant de l’État en matière de sécurité et de prévention. C’est tout à fait flagrant au regard du nombre croissant des communes qui se sont dotées d’une police municipale : on en comptabilise 4 040 aujourd'hui, contre 3 300 en 2005, soit 740 communes de plus en l’espace de trois ans ! Les collectivités ont recruté plus de 10 000 policiers municipaux. De votre côté, vous nous annoncez, pour 2009, une baisse de 7 000 policiers et gendarmes.

En termes de prévention, le Fonds interministériel pour la prévention de la délinquance, le FIPD, n’est plus affecté qu’aux opérations visant à mettre en place la vidéosurveillance. Les autres actions sont toutes abandonnées, on fait fi du travail en profondeur sur le terrain.

Or, si l’efficacité de la vidéosurveillance est prouvée pour les investigations des délits filmés, elle est beaucoup moins évidente pour ce qui est de la prévention de la délinquance, laquelle est au cœur de l’action municipale. La preuve est faite que, dans ce domaine également, vous utilisez les collectivités pour pallier vos insuffisances en matière de moyens.

À la lumière de toutes ces données, nous pouvons surtout féliciter les communes de leurs actions concernant la sécurité et la prévention de la délinquance.

En définitive, j’y insiste, les économies du ministère de l’intérieur se font au détriment des territoires.

Le groupe socialiste est donc inquiet pour l’avenir. Il ne votera pas votre projet de budget.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Madame la ministre, à l’occasion de l’examen de votre budget, je voudrais, à mon tour, faire une observation préalable sur la méthode employée. Vous demandez aux parlementaires de se prononcer sur vos crédits pour 2009, lesquels correspondent en fait à la première année d’exécution d’une loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure qu’ils n’ont même pas examinée !

Il y a donc de quoi s’interroger, surtout au moment où l’on nous ressasse que les droits du Parlement ont été renforcés grâce à la réforme constitutionnelle.

M. Jean-Louis Carrère applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Le projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie nationale appelle d’ailleurs les mêmes remarques. Alors que celui-ci n’a toujours pas été examiné par le Parlement, on nous demande tout de même de voter les crédits relatifs à l’organisation du rattachement organique et fonctionnel de la gendarmerie nationale à votre ministère.

Les gendarmes, auxquels je tiens à rendre hommage, sont eux-mêmes inquiets de cette réforme, dont le report de l’entrée en vigueur risque d’ailleurs de gêner, pendant plusieurs mois, la gestion quotidienne des gendarmeries.

Pour ma part, je m’interroge sur les raisons profondes d’un tel rattachement, car je ne vois rien qui le justifie, si ce n’est, bien évidemment, la volonté de réduire la dépense publique.

La présente mission « Sécurité » est, une fois de plus, la traduction budgétaire, pour l’année 2009, de la politique très sécuritaire que vous menez depuis 2002, avec des moyens en nette diminution. Elle illustre aussi, me semble-t-il, les choix imposés par la RGPP.

C’est ainsi que, d’ici à 2011, il est prévu de supprimer 7 000 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT, soit 4 000 policiers et 3 000 gendarmes.

C’est à se demander si la LOPPSI 2, dont la lecture du rapport pour avis de M. Courtois nous apprend qu’elle s’exécutera à moyens constants, voire en baisse, ne va pas défaire le peu qu’avait fait la version initiale.

Quel peut-être, dans ces conditions, l’avenir des brigades de gendarmerie ?

En outre, les effectifs des forces mobiles vont, eux aussi, diminuer.

Madame la ministre, dans la perspective de pallier toutes ces baisses d’effectifs chez les forces de l’ordre, prévoyez-vous de généraliser ce qu’il faut bien appeler – même si le terme n’est pas heureux – la « dénonciation anonyme » ? Nous en avons déjà un exemple concret dans le département de l’Isère, puisque l’on trouve sur le site internet de la préfecture une rubrique intitulée « Comment aider les forces de l’ordre ? »

Pour compenser ces baisses d’effectifs, vous prévoyez des réorganisations, en fait des redéploiements, sur le principe des vases communicants, qui ne pourront pourtant pas tout régler.

D’un côté, vous avez supprimé la police de proximité, les ADS – les adjoints de sécurité – et un certain nombre de postes de gardiens de la paix ; de l’autre, vous créez les UTeQ et les compagnies de sécurisation, qui plus est sur les mêmes territoires : comment tout cela va-t-il s’articuler ? Quelle visibilité pour la population ?

Au-delà des seules données budgétaires, j’ai la faiblesse de penser qu’on ne peut pas évoquer le thème de l’insécurité sans aborder la situation économique.

À cet égard, l’ensemble du projet de loi de finances pour 2009, en ne profitant qu’à une seule frange de la population, celle qui, paradoxalement, en a le moins besoin, tout en ignorant la plus grande partie des Français, est lui-même source d’insécurité. Parmi les nombreux exemples, je citerai le désengagement de l’État en faveur de la rénovation urbaine, la suppression des RASED, les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, le projet de suppression de l’école maternelle, votre politique du logement, la suppression de très nombreux postes dans la fonction publique, celle des services publics de proximité et du lien social qui y est attaché.

Croyez-vous que c’est avec ce genre de décision que vous allez améliorer la vie de nos concitoyens et leur permettre de vivre en toute sécurité et sérénité ?

Depuis les annonces faites en 2005 à la suite des émeutes, que s’est-il passé ? Rien ! Rien n’a en effet changé dans les quartiers dits « sensibles », à tel point que l’on peut se demander où est passé le plan Banlieue, pourtant si peu ambitieux !

La situation des populations écartées des centres urbains n’a guère évolué, que ce soit en matière de sécurité, d’éducation ou de transports. La précarité, le chômage, la misère, la crise du logement, la violence, le développement de l’économie parallèle qui gangrène des quartiers entiers : tout est là !

La question fondamentale est, bien sûr, celle des moyens et de l’utilisation de l’argent public.

On nous parle de restriction budgétaire, d’économie, de maîtrise des dépenses publiques, comme si la France, qui vient de débloquer des milliards d’euros en faveur des banques et du monde de la finance, était un pays pauvre.

Le problème, ce n’est pas que l’argent manque, c’est qu’il est très mal utilisé : les cadeaux fiscaux faits aux personnes les plus fortunées de France représentent autant de recettes en moins pour l’État.

M. Jean-Louis Carrère applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Il est grand temps d’utiliser les deniers publics de façon plus efficiente et plus équitable, afin qu’ils profitent à l’ensemble de la population, ce qui est loin, je le répète, d’être le cas.

Plutôt que d’investir dans des domaines qui coûtent très cher, mais dont l’efficacité reste à prouver, comme la vidéosurveillance, la biométrie, les fichiers, les scanners corporels, les Taser, mieux vaudrait investir dans l’éducation, l’emploi, la formation, l’habitat social, les services publics, l’accompagnement social, le financement des associations ou, encore, le déploiement d’une police de proximité, par le biais des UTeQ.

Bien sûr, il s’agit d’une politique de longue haleine, beaucoup moins spectaculaire et moins médiatique que les descentes de police filmées au petit matin dans les campagnes françaises.

La situation nécessite ainsi de mobiliser tous les secteurs de l’État, lequel doit jouer un rôle régulateur. Il est indispensable de débloquer des moyens considérables pour engager des actions dans la continuité. C’est non pas de moins d’État que nous avons besoin, mais bien au contraire de plus d’État !

Madame la ministre, tant que votre politique restera dénuée de toute réflexion de fond quant aux causes de la délinquance, à son indispensable traitement social et à sa nécessaire prévention, elle demeurera inefficace.

On le sait, la délinquance urbaine, juvénile, prend racine dans les difficultés sociales et économiques des Français. Quand l’écart se creuse, quand on constate, d’un côté, la dégradation des conditions de vie d’une partie de la population, et, de l’autre, l’explosion des richesses, la délinquance a tendance à augmenter.

Dire cela ne signifie ni excuser ni faire preuve de laxisme : il s’agit simplement de réfléchir, d’expliquer, de comprendre, pour mieux répondre à une situation donnée.

En effet, la réponse ne peut pas résider seulement dans l’allongement des peines d’emprisonnement, dans l’abaissement de l’âge pénal à douze ans, dans la construction de prisons et d’établissements supplémentaires pour mineurs, ces lieux d’enfermement dont on voit malheureusement, jour après jour, avec la multiplication des suicides, les effets détestables. Il s’agit là d’un raisonnement simpliste – pour ne pas dire populiste ! –, assurément réducteur et inévitablement dangereux, que nous ne pouvons suivre.

Or vos orientations budgétaires continuent de privilégier, d’une part, la culture du chiffre, du résultat, et, d’autre part, la répression et l’enfermement, au détriment de la prévention de la délinquance. Alors que les prisons n’ont jamais été aussi surpeuplées, le Gouvernement se targue tout de même d’être à l’origine de la baisse de la délinquance générale pour la sixième année consécutive.

Surveiller, punir et enfermer, tel est votre credo. À cette conception sécuritaire, il convient d’opposer la mise en œuvre du triptyque « prévention-dissuasion-répression ».

La lutte contre le terrorisme et la délinquance vous permet d’imposer votre projet de société : celui d’une surveillance et d’un contrôle généralisés de la population. Depuis le 11 septembre 2001, de très nombreuses mesures législatives ont effectivement été adoptées, toutes plus liberticides les unes que les autres. La dernière tentative en date a été la mise en place du fameux fichier EDVIGE, supprimé grâce à la très forte mobilisation de la société civile.

Avant de conclure, je tiens à dire ma totale opposition à l’usage par les forces de l’ordre des pistolets à impulsion électrique Taser X26, dont l’utilisation a récemment été étendue aux 17 000 policiers municipaux, alors même que le Comité contre la torture de l’ONU estime que la douleur aiguë provoquée par ces armes constitue une « forme de torture ».

À la lumière de ces observations, vous comprendrez que les sénateurs du groupe CRC-SPG ne votent pas les crédits de cette mission.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Couderc

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le budget qui nous est présenté aujourd’hui répond aux impératifs de sécurité publique de notre pays, et permet de juguler considérablement et durablement l’insécurité. En cela, ce budget est la concrétisation des engagements de campagne du Président de la République, engagements répondant à une attente forte des Français qui demandaient alors au candidat, devenu Président, de prolonger et d’amplifier sa lutte contre toutes les délinquances et toutes les insécurités.

Il est cependant indispensable de prendre en considération la répartition géographique des moyens, en fonction de l’effet constaté et de l’ensemble des projets de l’État dans les territoires.

Madame la ministre, permettez-moi, en tant que représentant des collectivités territoriales de mon département, l’Hérault, de porter à votre connaissance un certain nombre d’éléments de terrain observés, en particulier, dans la ville dont je préside les destinées, à la veille de l’ouverture d’une nouvelle prison de 820 places.

La police nationale de la circonscription de Béziers compte dans ses effectifs un peu moins de 200 agents, dont 175 agents actifs ou opérationnels. On peut regretter que l’ouverture de la prison n’ait pas été réellement anticipée. Certes, un renfort d’une trentaine de fonctionnaires est annoncé. Toutefois, ceux-ci seront mobilisés en grande partie pour d’autres tâches rattachées, comme les transferts, les présentations, ou encore les missions de police secours, dont les demandes sont d’ailleurs en augmentation constante.

Dans cette même circonscription de sécurité publique, on note malheureusement une augmentation de la délinquance de l’ordre de 5, 5 % entre les dix premiers mois de 2007 et ceux de 2008.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Couderc

Cette situation s’accompagne en particulier d’une forte augmentation du trafic de stupéfiants de près de 33 %. On ne peut donc que s’inquiéter de l’annonce d’une baisse, au niveau national, du budget de fonctionnement.

De même, la question des locaux du commissariat n’a pas été anticipée. Ces locaux sont d’ores et déjà sous-dimensionnés et le bâtiment, si l’on en croit le rapport de la dernière inspection, est en très mauvais état général. Les geôles étant trop peu nombreuses et occupées en permanence, on ne peut y faire de travaux. L’armurerie doit être sécurisée. Les vestiaires sont à la limite de l’insalubrité. Enfin, le stationnement des véhicules relève de l’exploit.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Couderc

En résumé, les locaux sont totalement inadaptés à l’activité contemporaine de ce commissariat. On ne sait donc pas vraiment où pourront être logés les renforts qui doivent arriver à l’occasion de l’ouverture du centre pénitentiaire.

En conclusion, je vous demanderai donc, madame la ministre, au-delà de ce budget, que je vais naturellement voter, de faire en sorte que les situations locales ne soient plus examinées selon une approche purement technocratique ou statistique et qu’une coordination soit mise en place avec le ministère de la justice, afin d’harmoniser les actions de l’État dans le domaine de la sécurité.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Madrelle

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, vous me permettrez avant toute chose de souligner, à l’instar de nombreux orateurs, le caractère quelque peu surprenant, voire paradoxal, de cette discussion budgétaire. En effet, nous examinons actuellement les crédits du programme « Gendarmerie nationale », alors que nous n’avons encore discuté ni du projet de loi qui prévoit le rattachement organique et budgétaire de la gendarmerie au ministère de l’intérieur au 1er janvier 2009, ni de la future loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, la LOPPSI.

II y a là un problème de fond : le Gouvernement donne ces réformes pour acquises, alors que le Parlement n’a pas encore été invité à se prononcer.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Madrelle

et des forces armées, je tiens à rendre un hommage sincère au travail effectué par le président de ce groupe, notre collègue et ami Jean Faure. Son rapport, adopté à l’unanimité par la commission, formule dix-sept recommandations résultant d’échanges et de travaux importants.

Pour en revenir à des considérations d’ordre plus strictement budgétaire, nous déplorons la diminution de près de 2 % – exactement 1, 8 % – des autorisations d’engagement, qui régressent pour la deuxième année consécutive. En 2009, la gendarmerie devrait perdre 1 625 emplois et passer ainsi sous la barre des 100 000 agents.

Le rapprochement entre gendarmerie et police suscite bien des interrogations parmi les gendarmes. Êtes-vous en mesure, madame la ministre, de nous apporter les précisions relatives à cette nouvelle organisation ? Il s’agit de redéfinir la place de la gendarmerie à l’égard tant des armées que de la police. Il paraît logique que les gendarmes attendent beaucoup des perspectives de mutualisation, qui devraient notamment favoriser une organisation cohérente et efficace des matériels et des formations.

Nous savons que ces deux forces tiennent à rester fondamentalement distinctes et à garder chacune leur identité propre. C’est la spécificité de la gendarmerie, c’est-à-dire son caractère militaire, qui fait son efficacité opérationnelle. Ces personnels attendent donc une parité globale de traitement et de carrière, ainsi que l’octroi d’une grille spécifique. Je veux d’ailleurs profiter de ce débat budgétaire pour rendre hommage aux efforts et au dévouement de cette arme.

A l’occasion du débat à l’Assemblée nationale, vous avez affirmé, madame la ministre, votre volonté de « moderniser la gendarmerie. » Moderniser veut-il dire « regrouper » ? Ainsi a été annoncée la fermeture de quatre écoles de gendarmerie, parmi lesquelles figure celle de Libourne, en Gironde, qui va perdre dès l’été prochain les retombées économiques de la présence de 130 cadres permanents et de 480 stagiaires répartis en quatre compagnies d’élèves sous-officiers. Il s’agit là d’un coup très dur pour le territoire libournais, déjà fragilisé.

Je sais que la mairie de Libourne a demandé à l’État de s’impliquer dans la reconversion de ce site en privilégiant l’installation du commissariat de police et de la brigade territoriale de gendarmerie. Êtes-vous en mesure, madame la ministre, de nous apporter des précisions sur cette nécessaire et urgente reconversion du site ? Je sais qu’à titre personnel vous n’étiez pas favorable à cette fermeture.

Lors de votre audition devant la commission, vous avez déclaré : « L’accent sera mis sur un recours accru aux nouvelles technologies avec des moyens de financement accrus pour le renforcement de la protection des gendarmes ». Ne pensez-vous pas que ces moyens peuvent paraître quelque peu ambitieux lorsque, dans trop de brigades, comme j’en ai été témoin, les agents doivent rivaliser d’imagination pour faire face à l’absence de photocopieurs, d’ordinateurs, etc ?

Ce manque de moyens matériels s’avère catastrophique pour le fonctionnement des brigades et contribue à accentuer l’inquiétude et le désarroi d’un grand nombre de gendarmes, qui déplorent le fait d’être privés de contact avec la population. Contraints de consacrer beaucoup de temps à l’élaboration de statistiques, les gendarmes ne peuvent assurer dans des conditions optimales le suivi procédural des enquêtes.

Madame la ministre, mes chers collègues, vous le savez, nous sommes particulièrement attachés à la présence des gendarmes, notamment en zone rurale. Le manque de moyens, la diminution des effectifs, la fermeture des brigades sont loin de favoriser l’ancrage territorial de la gendarmerie, condition indispensable à l’efficacité de ses missions.

C’est précisément pour toutes ces raisons, madame la ministre, que le groupe socialiste du Sénat ne votera pas votre budget !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je m’associe à l’hommage rendu par les précédents orateurs au dévouement et au courage de l’ensemble des gendarmes et des policiers, qui assurent au quotidien, au péril de leur vie, la sécurité des personnes et des biens.

Les chiffres cités par Jean-Patrick Courtois concernant les gendarmes et les policiers décédés en mission doivent nous interpeller. Dans le seul département des Ardennes, que je représente, en 2007 et 2008, deux motards de la gendarmerie sont décédés en service à cause de l’irresponsabilité et de l’inconscience de certains. Votre présence dans notre département et votre soutien, madame la ministre, ont été unanimement appréciés.

Vous l’avez souligné, madame la ministre : « La sécurité, ce sont d’abord des hommes et des femmes. Aucun matériel, aucune technologie ne saurait remplacer la compétence, le dévouement, le courage de celles et ceux qui servent la police, la gendarmerie, les services d’incendie et de secours ».

Dans son ensemble, la mission « Sécurité » progressera en 2009 de 2, 2 %, pour atteindre 16, 226 milliards d’euros de crédits de paiement.

Élu d’un département rural, les Ardennes, qui compte moins de 300 000 habitants, j’axerai plus particulièrement mon intervention sur le programme « Gendarmerie nationale », dont le montant global atteint 7, 6 milliards d’euros en crédits de paiement et qui représente 99 509 emplois équivalents temps plein travaillé.

Dans nos départements ruraux, nous restons très attentifs à l’évolution du statut de la gendarmerie nationale, qui souhaite conserver son identité et son statut militaire à part entière.

Des inquiétudes subsistent pour l’avenir des petites brigades regroupées au sein de communautés de brigades. Le maintien des brigades de proximité doit rester une priorité dans le monde rural, où l’habitat est très dispersé.

Les gendarmes sont des interlocuteurs indispensables pour soutenir l’action des maires, qui se sentent souvent bien seuls et sans moyens pour faire face à des actes d’incivilité de plus en plus nombreux et pour faire appliquer leurs pouvoirs de police. L’aspect humain doit être privilégié, c’est incontestable.

Parallèlement, des demandes légitimes portant sur leurs moyens de fonctionnement sont régulièrement formulées par les gendarmes.

Premièrement, la rénovation et l’entretien des casernements doivent demeurer des priorités, et ce malgré la taille, très vaste, du parc immobilier.

Deuxièmement, des crédits destinés à la maintenance et à l’entretien des véhicules et des matériels sont indispensables.

Troisièmement, la maintenance du parc informatique doit être soutenue régulièrement. Il en va de même s’agissant de l’adaptation de l’habillement à l’implantation géographique des brigades.

Par ailleurs, des tâches administratives parfois superflues retardent souvent l’efficacité des services de gendarmerie, qui souhaiteraient être beaucoup plus présents sur le terrain. Des dispositions pourraient être envisagées pour remédier à cette situation. Nous savons, madame la ministre, que nous pouvons compter sur votre écoute et votre détermination.

Au vu de l’ensemble de ces remarques, je m’associerai à la reconnaissance du combat permanent mené au quotidien par les gendarmes et les policiers pour lutter contre la délinquance et l’insécurité en général.

La sécurité routière reste une priorité forte du Gouvernement. Cette action, nous l’approuvons, bien évidemment.

Compte tenu de l’ensemble des dispositions prévues à ce titre, madame la ministre, je voterai naturellement les crédits de la mission « Sécurité » avec l’ensemble de mon groupe.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, faisant abstraction de la complexité et de l’originalité de la situation quant aux dates et calendriers déjà largement évoqués par mes collègues, j’ai porté mon attention, dans ce projet de budget, aux moyens consacrés au développement de la vidéosurveillance et au programme 152 concernant la gendarmerie nationale.

Je commencerai mon propos en évoquant les équipements de vidéosurveillance. De nature curieuse et ayant conservé d’un lointain passé de scientifique la méthodologie de l’expérimentation et de l’évaluation, je me suis interrogée, sans trouver de réponse précise et détaillée, sur la mise en place pratique et opérationnelle de ces équipements : où, quand, pourquoi, comment, avec qui ?

Les moyens financiers que vous envisagez de consacrer aux équipements de vidéosurveillance sont importants puisque le programme « Police nationale » a été doté d’un budget de 20 millions d’euros en autorisations d’engagement. De plus, le Fonds interministériel de prévention de la délinquance, le FIPD, lui consacrera 30 millions d’euros, soit la moitié de son budget global.

Pourquoi pas si ces sommes servent efficacement les objectifs poursuivis ! Mais quels sont ces objectifs : prévention de la délinquance ou élucidation et répression ? Quelle sera la nature des faits délictueux visés par ces dispositifs ? Sur quel type de territoire ? Quelle sera la surface à couvrir ? Quelles autres mesures de sécurité accompagneront cet équipement ? Le préalable à une expérimentation de qualité permettant de tirer de réelles et incontestables conclusions n’est pas au rendez-vous, ce que je regrette compte tenu des sommes concernées. J’estime, en effet, que nous en sommes encore au stade de l’expérimentation en la matière.

Sans entrer dans le débat.sur l’efficacité ou non de ces dispositifs de vidéosurveillance, je souhaite rappeler qu’une étude menée chez nos voisins britanniques – par Éric Heilmann, en 2003 – a fait apparaître tout à la fois une diminution, une stagnation, et même une augmentation de certains types d’infraction, et non des moindres – homicides, crimes sexuels, agressions violentes, délits liés à l’usage des drogues, des véhicules ou à l’atteinte à la paix publique – dans des zones équipées de vidéosurveillance. Ne nous gargarisons donc pas de chiffres généraux sur lesquels nous n’avons aucun recul, notamment en termes de déplacement éventuel de la délinquance hors des champs des caméras ou de l’apport d’autres dispositifs concomitants, y compris humains, ayant participé à une modification de la délinquance.

La vitesse et l’ampleur avec laquelle vous vous saisissez de ces moyens techniques me font craindre qu’il ne s’agisse d’abord pour le Gouvernement de mettre en œuvre, dans le domaine de la sécurité, la politique dogmatique de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, sans se poser au préalable la question de ses missions. Or il faudrait plutôt viser de réels objectifs d’efficacité.

Madame le ministre, en l’état actuel de notre méconnaissance de l’efficacité de la vidéosurveillance, il me semble préférable de concentrer les crédits sur le recrutement de personnel pour des missions couvrant des périmètres plus étendus qu’une caméra et apportant une véritable plus-value sociale.

À ce titre, je suis très inquiète de la baisse annoncée des effectifs de la police et de la gendarmerie, qui se traduira, d’ici à 2011, par la suppression d’environ 7 000 emplois : 4 000 pour la police et 3 000 pour la gendarmerie, laquelle joue pourtant un rôle essentiel dans le maintien d’un maillage territorial jusque dans les zones les plus rurales.

Le recentrage de l’activité des gendarmes sur leur corps de métier s’accompagne du renforcement des personnels civils de la gendarmerie, leur nombre devant passer d’environ 2 000 à environ 5 000 d’ici à 2013. L’opération pourrait être perçue comme un système de vases communicants, avec un bilan quantitatif finalement neutre, presque satisfaisant. Cependant, il faut se rappeler, tout d’abord, que les besoins de création de postes étaient estimés à 7 000 pour la période 2003-2007, mais que seulement 6 050 ont été dotés. J’ajoute que l’année 2008 s’est soldée par la suppression de 965 emplois et que les périodes considérées dans les deux cas ne sont pas les mêmes.

C’est dire que le compte n’y est pas ! Il y est même d’autant moins que la présentation stratégique annuelle de performances fait état d’un renforcement des activités auprès d’une population qui continuera d’augmenter dans la zone de responsabilité de la gendarmerie nationale. Cette dernière est, de surcroît, confrontée à des risques croissants : émergence de nouvelles formes de criminalité, progression des violences, radicalisation de la menace terroriste.

Et la livraison de nouveaux établissements pénitentiaires fera peser en zone urbaine des charges supplémentaires sur les gendarmes.

Vous comprendrez, madame le ministre, que ces perspectives m’amènent à m’interroger quant à la possibilité de maintenir un équilibre raisonnable et équitable sur l’ensemble du territoire, notamment hors des centres urbains. D’autant que, malgré les efforts consentis en matière de rémunération des gendarmes, notamment par le biais du PAGRE rénové, d’autres besoins semblent oubliés.

Le statut militaire des gendarmes, auquel nous sommes tous attachés, comporte l’obligation d’occuper un logement de fonction. Sur ce point, je regrette de constater la vétusté générale des locaux d’habitation, comme des casernes de gendarmerie. La remarque vaut pour le territoire que je représente, mais aucune raison objective ne me laisse penser que la communauté de brigade dudit territoire puisse être brimée par rapport aux autres.

Comment croire à une réelle volonté de maintenir un maillage territorial fort dans nos zones rurales devant une telle baisse des crédits par rapport à 2008 ? Ne faisons pas semblant d’ignorer que les projets de restructurations, rénovations ou constructions immobilières pour les petites structures, celles qui comptent moins de quarante gendarmes et sont implantées dans les zones rurales, font l’objet d’une décision unilatérale de transfert de la charge d’investissement aux collectivités locales.

Le retard pris pour le vote de la LOPPSI interdit aux collectivités locales concernées par un tel programme d’avoir ne serait-ce que le choix du montage juridico-financier d’un tel projet. Sans report ni délai complémentaire, celles-ci doivent, pour les programmes autorisés en 2007, s’engager avant le 31 décembre 2008 à réaliser un équipement répondant à un cahier des charges lourd et extrêmement précis. La maîtrise d’ouvrage leur est déléguée par l’État, selon la circulaire du Premier ministre et le décret 93-130 du 28 janvier 1993, qui prévoit une subvention généreuse de 18 %, un montant de travaux plafonné hors terrains et viabilisation et un loyer de 6 % invariable pendant neuf ans, calculé sur les bases locatives des domaines.

Ce qui reste à la charge des collectivités concernées, ce ne sont ni 10 %, ni 15 %, ni même 20 % : c’est plus encore, et ce pour le compte d’une compétence d’État !

D’autres montages plus favorables aux collectivités, de type partenariat public-privé ou bail emphytéotique avec l’État, sont devenus inenvisageables, puisque la LOPSI qui les autorisait est caduque. Ne peut-on espérer, à tout le moins, que l’État libère les collectivités de délais que lui-même ne tient pas, à défaut de prévoir un budget adapté aux besoins ?

Madame le ministre, mes doutes quant au maintien à long terme du maillage territorial de la gendarmerie nationale, dans des unités territoriales dotées d’effectifs suffisants et de locaux de travail et d’habitation au moins décents, sans même oser le mot « confortables », sont tout autant entretenus par le projet de budget dont nous discutons aujourd’hui que par le projet de loi visant au rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur.

Dans ces conditions, vous ne serez pas étonnée que nous ne votions pas ce budget.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, définir un budget n’est pas un simple travail de comptabilité. Au-delà des chiffres, un budget s’inscrit dans une perspective politique et stratégique. C’est encore plus vrai lorsque l’on parle de la sécurité des Français.

Le budget de 2008 a permis d’affirmer la volonté de faire du ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales un grand ministère moderne de la protection des Français, car c’est bien de cela qu’il s’agit. Le projet de loi de finances pour 2009 nous permet de relever un certain nombre de défis nouveaux et d’affermir notre ambition de toujours mieux protéger les Français.

Premier défi, notre action s’inscrira dans un périmètre élargi et un contexte exigeant.

En premier lieu, l’année 2009 verra l’intégration de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur. Vous avez eu raison de le souligner, monsieur de Montesquiou, monsieur Courtois, il s’agit d’une évolution importante : pour la première fois dans l’histoire de notre République, les deux services de sécurité – civile et militaire – seront placés sous la responsabilité pleine et entière du ministère de l’intérieur.

Je veux souligner, notamment à l’intention de M. de Montesquiou, de Mme Escoffier et de M. Laménie, que ce changement ne remet pas en cause le statut militaire de la gendarmerie auquel je suis très attachée. Dans ce projet de budget comme dans le projet de loi sur la gendarmerie sont réaffirmés et confortés tous les éléments du statut militaire de la gendarmerie. Ce rapprochement représente une opportunité fondamentale pour l’efficacité de la protection des Français.

J’ai bien entendu certains dire que cette évolution majeure allait intervenir avant l’examen du projet de loi sur la gendarmerie. Je tiens à faire remarquer à Mme Escoffier, à M. Madrelle, à M. Gautier et à Mme Mathon-Poinat qu’il ne me revient pas d’établir l’ordre du jour des assemblées. Sinon, le calendrier de discussion des textes aurait suivi un ordre plus logique, mais cela ne change pas grand-chose à la réalité.

Permettez-moi de rappeler que, de toute façon, dans le cadre de la LOLF, voilà plusieurs années que les crédits de la gendarmerie et de la police sont présentés et votés simultanément.

S’offusquer aujourd'hui de cet état de chose au motif que le projet de loi sur la gendarmerie n’a pas encore été examiné est quelque peu étonnant. Je note d'ailleurs que Mme Klès a été plus prudente en la matière.

Quoi qu’il en soit, sur le plan technique, le directeur général de la gendarmerie se voit déléguer la gestion des crédits du programme à partir du 1er janvier 2009. Cela ne pose pas la moindre difficulté.

En second lieu, ce budget s’inscrit dans un contexte de contraintes budgétaires réelles. Messieurs les rapporteurs, je constate avec vous que la situation générale de nos finances publiques et la conjoncture actuelle nous imposent, en effet, de diminuer globalement les déficits et la dette du pays.

Madame Mathon-Poinat, il est irresponsable de nier la réalité de la crise, les difficultés et l’endettement de la France et il est inexact de dire que l’on aurait fait je ne sais quels cadeaux aux banques.

D'ailleurs, je vous rappelle que c’est au moment où vos amis participaient au gouvernement de la France sans trop se soucier du déficit budgétaire que les forces de sécurité ont été les moins bien dotées. La conséquence a été immédiate : une augmentation très sensible de la délinquance entre 1997 et 2002, à savoir plus 16 %. Cet élément non négligeable n’a été rappelé à aucun moment sur vos travées !

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

Eh bien ! je considère qu’il est aussi de notre responsabilité de dire que le ministère de l’intérieur ne saurait rester en dehors d’une démarche d’intérêt national. C’est vrai pour aujourd'hui comme pour demain, car cette responsabilité s’étend à nos successeurs et à nos enfants.

Le deuxième défi que nous devons relever est celui de la protection des Français face à plusieurs menaces, en premier lieu la menace terroriste : nous le savons, les pays européens, dont la France, constituent une cible privilégiée pour certains mouvements terroristes.

Je rappelle que dans un communiqué du 22 septembre AQMI – Al Qaïda au Maghreb islamique – a, pour la première fois, menacé clairement le sol français. Ce qui est vrai sur le sol national l’est aussi pour nos compatriotes travaillant ou voyageant à l’étranger, comme le décès de deux Français lors des attentats de Bombay nous l’a tragiquement rappelé.

Dans ce contexte, nos services veillent avec détermination. Leur action vise en priorité à détecter les filières de recrutement et à surveiller Internet. La direction centrale du renseignement intérieur que j’ai mise en place le 1er juillet dernier est un maillon essentiel de cette protection préventive

Quatre-vingt-neuf activistes islamistes avaient été interpellés en France en 2007 ; ils sont soixante-cinq à l’avoir été depuis le début de l’année 2008. Nous avons démantelé des réseaux de financement du djihad et, je le précise, certaines arrestations ont eu lieu dans le cadre d’entraînements militaires pour le djihad conduits sur notre propre sol.

À ces menaces islamistes s’ajoutent d’autres types de menaces.

Même s’ils ont diminué de plus de la moitié, des attentats se produisent toujours en Corse. Nous devons également faire face aux menaces de l’ETA, y compris sur notre territoire : nul n’a ainsi oublié l’assassinat de deux gardes civils à côté d’Arcachon. Enfin, nous avons récemment été confrontés à des menaces d’attentat émanant de groupes anarcho-autonomes.

L’action que mènent les services de police pour assurer notre protection est donc indispensable, et elle doit être saluée.

Je souligne d’ailleurs que, dans le combat qu’ils mènent aujourd'hui, les services de police ne négligent pas les faits qui se sont déroulés dans le passé. L’arrestation d’un suspect dans l’attentat de la rue Copernic en 1980 démontre qu’ils n’oublient jamais et sont déterminés à retrouver les coupables d’actions criminelles.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs, comme la lutte contre le terrorisme, la lutte contre la délinquance au quotidien est une exigence totale.

Je vous remercie, messieurs les rapporteurs, d’avoir souligné que les résultats obtenus de 2003 à 2007 ont été remarquables. Cette orientation très favorable perdure et, dans certains domaines, s’amplifie.

De novembre 2007 à octobre 2008, la délinquance de proximité a baissé de 8, 2 %. J’en suis d’accord, les chiffres sont toujours abstraits, mais, en l’occurrence, cette baisse correspond très concrètement à 140 000 victimes potentielles en moins.

Monsieur Gautier, vous avez fait la comparaison entre statistique et enquête de victimisation. Je précise – Alain Bauer, qui a mené l’enquête de victimisation, le dit d’ailleurs lui-même – que les statistiques de la délinquance et les enquêtes de victimisation ne s’opposent pas, mais se complètent. Les statistiques de la délinquance s’appuient sur les mêmes paramètres depuis plus de trente ans.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

Au-delà des chiffres absolus, ces statistiques donnent des indications sur les évolutions, évolutions qui ont une signification.

Quant à l’enquête de victimisation, qui n’est qu’une enquête et qui a été menée sur 22 000 personnes, elle permet d’apprendre beaucoup sur les victimes et sur le contexte, et de faire apparaître une absence de plaintes dans certaines situations.

Cette absence de plaintes tient à des raisons extrêmement diverses. Certaines victimes considèrent que porter plainte ne vaut pas la peine parce que l’atteinte n’était pas très importante, notamment dans les cas de violences légères ne relevant que de contraventions. D’autres victimes de violences aux personnes, notamment en milieu intrafamilial, font la mesure entre, d’une part, ce qu’elles ressentent, d’autre part, ce qu’elles craignent.

Nous essayons aujourd'hui de faire « émerger » les violences intrafamiliales dans les plaintes, et cela se traduit d’ailleurs dans les résultats : les violences aux personnes se sont stabilisées, et ce malgré une hausse des plaintes liées à des violences intrafamiliales.

Cela signifie qu’il y a une baisse considérable des violences aux personnes, comme les vols avec violence, dans le « milieu extérieur ». En revanche, grâce, notamment, à la qualité de l’accueil et à l’action menée auprès des victimes, le nombre des violences intrafamiliales déclarées, jusque-là très faible, augmente progressivement.

La délinquance générale elle-même recule, malgré les variations qui se produisent dans notre société et qui se traduisent par l’apparition de nouveaux délits ou la hausse de certains délits, qui sont révélés du fait de l’initiative accrue des services, notamment en matière de stupéfiants ; dans ce dernier cas, il n’y a pas de victimes, et c’est parce que les services sont plus actifs, à la suite notamment de la demande très forte que j’ai exprimée en début d’année, que davantage de cas sont signalés.

Preuve de cette activité renforcée, le taux d’élucidation a été porté à 37, 7 % en 2008, contre 35, 7 % dans la période précédente, et je tiens à souligner que ce taux a même atteint 40, 7 % en octobre ! Je rappellerai juste qu’il était de 25 % en 2001…

Parallèlement, car il ne s’agit pas seulement d’interpellations, les gardes à vue progressent de 3 % et le nombre des personnes mises en cause de 4, 2 %.

Avec ces résultats, les objectifs qui m’avaient été fixés par le Président de la République sur deux années sont déjà atteints ou en voie de l’être.

Pour autant, je veux encore progresser dans la protection des Français, car certaines formes de délinquance augmentent, violences « gratuites » et escroqueries. Je n’ai pas l’intention de « camoufler » quoi que ce soit ; je veux au contraire continuer de dire la vérité, comme je l’ai toujours fait, car j’estime que c’est ce qui permet d’avancer.

Les violences gratuites aux personnes, en particulier dans le milieu intrafamilial, représentent un réel problème de société ; vous avez eu raison, monsieur Courtois, de le souligner.

Les violences dites crapuleuses, les vols à main armée et les vols avec violences ont diminué, en grande partie du fait de l’action des forces de l’ordre, diminution sensible puisque, sur douze mois, elle représente 11 000 victimes de moins, tandis que l’environnement familial a vu progresser les violences de 5, 3 %.

Il y a certes une tendance à davantage signaler ce type de violences, mais nous n’en sommes pas moins confrontés à un réel problème, dont le traitement ne relève d’ailleurs pas uniquement des services de police et de gendarmerie : à côté de l’action de ces derniers, la réponse à ce véritable défi de sécurité passe aussi par la prévention et par l’éducation.

Le nombre des faits d’escroquerie a augmenté de 30 000 par rapport à l’an passé, qu’il s’agisse de l’escroquerie sur Internet, qui progresse considérablement, ou de l’escroquerie classique. Il faut mener une action, en particulier auprès des populations les plus vulnérables à cette forme de délinquance. Je proposerai donc en tout début d’année un plan d’action très général, qui associera de nombreux partenaires, en direction du plus grand nombre, en particulier des personnes âgées et des personnes fragiles.

L’insécurité routière est également un défi majeur.

Sur les dix premiers mois de 2008, nous enregistrons une baisse de 7 % du nombre de tués, soit 267 personnes, et de 9, 2 % du nombre des blessés, soit 7 906 personnes. C’est bien, mais ce n’est pas suffisant.

Les efforts portant sur la réduction de la vitesse au volant ont permis, c’est vrai, de diminuer sensiblement – de près de la moitié – le nombre des accidents mortels, mais ceux-ci ont désormais pour première cause l’alcool, en liaison parfois avec la drogue.

J’ai donc demandé aux constructeurs et équipementiers automobiles de préparer la mise en œuvre d’éthylotests anti-démarrage et la LOPSI contient une disposition qui, si le Parlement la vote, fera de la conduite de véhicules équipés de ces éthylotests une peine complémentaire obligatoire.

Pour mieux lutter contre la conduite sous l’influence de stupéfiants, j’ai doté depuis cet été les forces de l’ordre de tests salivaires beaucoup plus faciles à mettre en œuvre et qui leur permettent donc de démultiplier régulièrement les opérations de contrôle.

La LOPPSI renforcera également notre action avec des sanctions plus dissuasives, notamment la confiscation des véhicules, en cas de récidive de grand excès de vitesse, de conduite sous l’influence de l’alcool ou de stupéfiants et en cas de conduite sans permis.

Tels sont les défis qu’il nous appartient de relever ; comme l’ont souligné plusieurs intervenants et notamment MM. les rapporteurs, le budget pour 2009 nous donne les moyens de le faire.

Sur la totalité des missions relevant de mes responsabilités gouvernementales, les crédits progressent en effet de 2 % en 2009.

J’ai tenu à ce que l’on nuance en fonction des missions l’effet de cette progression et à ce qu’une priorité toute particulière soit accordée à la sécurité. C'est la raison pour laquelle les crédits de la mission « Sécurité » augmentent davantage : ils progressent de 2, 5 %.

La RGPP, dont vous êtes nombreux à avoir parlé, n’a pas à mes yeux pour finalité première de réaliser des économies ; elle doit d’abord viser à améliorer, en la modernisant, l’action que nous menons et nous conduire à utiliser au mieux chacun des euros qui nous sont donnés pour protéger les Français.

Vous l’avez dit, monsieur de Montesquiou, la RGPP est un axe fort de l’année à venir. Je regrette que les éléments que vous aviez demandés au ministère de l’intérieur ne vous aient pas tous été communiqués. Pour certains, la nécessaire intervention du ministère du budget s’est malheureusement produite trop tard pour que nous puissions vous les transmettre en temps utile. Vous le savez, aussi bien la direction générale de la police nationale que la direction générale de la gendarmerie nationale ont toujours eu pour instruction de coopérer en pleine transparence avec les commissions parlementaires.

Nous n’avons en effet rien à gagner à dissimuler quoi que ce soit : l’action est commune et, même s’il y a des divergences, par exemple sur les moyens ou sur les priorités, nous partageons tous la même volonté de protéger les Français.

Les moyens prévus dans ce budget visent d’abord à moderniser l’action des forces de police et de gendarmerie, ce qui passe d’abord par la modernisation des moyens mis à leur disposition ; tout comme vous, monsieur de Montesquiou, je suis attachée à cette orientation nouvelle de sécurité.

La modernité, c’est d’abord la police technique et scientifique : 100 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 40 millions de crédits de paiement seront consacrés à son extension.

Je souhaite également, monsieur Courtois, une police scientifique de masse, destinée aussi à la lutte contre la délinquance quotidienne, notamment les vols, les cambriolages ou les attaques contre les personnes. La politique technique et scientifique nous permet aujourd'hui d’élucider plus de 85 % des crimes. Je veux donc que les traces, quand il y en a, soient systématiquement prélevées.

Certains éléments nous aident beaucoup. Ainsi, le fichier national des empreintes génétiques, qui comportait 3 000 traces en 2002 et 500 000 au printemps 2007, en comporte à l’heure actuelle 960 000.

Cette montée en puissance a permis d’effectuer 42 300 rapprochements de traces génétiques dans des enquêtes judiciaires, d’identifier des milliers d’auteurs ou d’attribuer plusieurs faits à un même individu. Quand il s’agit d’un violeur, c’est d’autant plus important que, pour chacune de ses victimes, la première des justices est de savoir que celui qui l’a agressée sera identifié, interpellé et déféré à la justice !

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

De même, le fichier automatisé des empreintes digitales comportait près de 1, 6 million d’individus en 2002 et 2, 5 millions d’individus au printemps 2007 ; aujourd'hui, 3 millions d’individus y sont inscrits. Cette année, en dix mois, 7 300 affaires ont été résolues grâce à ce dispositif.

Il n’en reste pas moins qu’il faut moderniser les technologies de ces deux fichiers et développer des modalités simples d’utilisation si nous voulons les étendre à toutes les infractions. C’est l’enjeu du plan « Police technique et scientifique de masse », dont le projet de budget pour 2009 constitue la première étape.

Il faut également des laboratoires dignes de ce nom dans la région d’Île-de-France. Pour les avoir visités, je partage votre sentiment, monsieur Courtois : la situation actuelle n’est pas acceptable. Les personnels de ces établissements ont un très haut niveau de compétence et disposent de matériels très sophistiqués ; pour autant, l’environnement n’est pas à la hauteur du travail qu’ils accomplissent.

C’est pourquoi je fais actuellement rechercher le site le plus approprié, à la fois sur un plan économique – vous le savez, des dizaines de millions d’euros sont en jeu – et en termes de rapidité de réalisation. En effet, je souhaite que ces personnels soient le plus rapidement possible installés dans des locaux appropriés. Plusieurs pistes sont actuellement examinées : à Ivry-sur-Seine, à Vélizy-Villacoublay ou à Rueil-Malmaison, notamment. Ce sont soit des terrains nus, soit des terrains qui comportent déjà des locaux ; des études et des comparaisons sont en cours. Je ne peux pas vous donner de date, car la situation est très différente selon qu’il s’agit de bâtiments à construire ou de locaux à réaménager.

La vidéoprotection a été au centre de plusieurs interventions : elle est à la fois un outil d’élucidation qui donne des résultats et un outil de prévention efficace, madame Klès, monsieur Gautier. Pour étayer mon propos, je me contenterai de vous donner des exemples concrets.

À Strasbourg, si la délinquance a diminué sur l’ensemble de la ville de 13 %, dans les quartiers équipés de caméras, ce recul est en moyenne de 50 %. Il s’agit bien là de prévention, qui s’appuie sur un mécanisme psychologique relativement simple : quand ils ont la certitude d’être repérés, les individus ont tendance à ne pas commettre d’infraction.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

À Orléans, où les installations de vidéosurveillance sont plus développées que dans d’autres villes, la délinquance a baissé de 60 % entre 2001 et 2007, et elle a encore diminué de 10 % sur les dix premiers mois de cette année. L’installation de caméras n’a donc pas seulement un effet dissuasif sur le moment : elle permet d’enclencher une inflexion qui s’accentue dans la durée. Il s’agit bien de prévention, car c’est un climat général qui s’instaure.

Ne m’appuyant pas sur une réflexion théorique, mais forte de ces exemples concrets, j’ai décidé de tripler le nombre de caméras sur la voie publique, de les généraliser dans les transports – nous nous rappelons tous l’assassinat d’une jeune femme dans le RER voilà un an –, de réaliser des raccordements entre les services de la police et ceux de la gendarmerie partout où c’est souhaité, en facilitant les démarches et en renforçant le respect des libertés individuelles. Car les systèmes utilisés permettent de garantir la non-pénétration des caméras sur les lieux privés.

À ce sujet, madame Klès, vous avez évoqué l’exemple britannique. Contrairement à ce que vous avez affirmé – je vous invite à lire les rapports en entier ! –, les services britanniques ne se plaignent pas d’avoir des caméras de surveillance en trop grand nombre ou qui ne fonctionnent pas : ils regrettent l’ancienneté de leur matériel ou l’absence de système centralisé. C’est pour ces raisons, disent-ils, que le dispositif n’est pas pleinement opérationnel.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

Je vous confirme que les crédits du fonds interministériel de prévention de la délinquance dévolus à la vidéoprotection s’élèveront, en 2009, à 30 millions d’euros, qui serviront surtout au plan « 1 000 caméras pour Paris » – dans le xixe arrondissement, l’attente est forte – et aux raccordements entre les centres de supervision urbains et les services de police ou de gendarmerie. Il va de soi que cela ne porte en rien atteinte aux autres actions de prévention de la délinquance, qui disposeront d’un budget équivalent.

Moderniser l’action des forces de l’ordre implique de moderniser leurs moyens de protection pour s’adapter aux nouvelles formes de menaces qui s’expriment contre elles, comme nous l’avons vu notamment à Villiers-le-Bel. Ainsi, 11 millions d’euros pour les policiers et 14 millions d’euros pour les gendarmes seront consacrés à l’acquisition de lunettes de protection, de gilets tactiques et de nouvelles tenues de maintien de l’ordre.

J’en viens à la modernisation de l’organisation des forces de sécurité.

Madame Escoffier, l’examen des crédits de la mission « Sécurité » n’est pas le moment opportun pour vous annoncer ce qui relèvera du projet de loi relatif à la gendarmerie et je ne répondrai pas aujourd'hui à vos questions sur la discipline ou sur la réquisition. Soyez assurée que notre préoccupation est bien de garantir aux gendarmes le statut militaire, tout en prenant en compte un certain nombre d’évolutions, notamment sur le plan juridique.

Moderniser l’organisation des forces de sécurité, c’est d’abord recentrer l’action des policiers et des gendarmes sur ce qui constitue le cœur de leur métier.

Je ne veux pas que les policiers et les gendarmes soient distraits de leurs missions principales par des activités secondaires, comme les gardes statiques ou les transfèrements de détenus. Vos remarques à ce sujet sont tout à fait légitimes, monsieur de Montesquiou, monsieur Courtois.

Le plan de développement de la vidéoprotection sur la voie publique doit naturellement s’accompagner d’un recours accru à cette technologie pour les bâtiments publics. Cela peut parfaitement remplacer les gardes statiques. Mes services travaillent en ce sens, aussi bien pour le ministère de l’intérieur que pour d’autres ministères.

Ainsi, en ce qui concerne la garde du palais de justice de Paris, un groupe de travail associant la direction générale de la gendarmerie nationale et la direction des affaires criminelles et des grâces recherche la solution la plus adaptée. Il s’agit non pas de supprimer complètement les gardes statiques, mais de faire baisser très sensiblement les effectifs mobilisés pour ce type de mission.

Pour ce qui est de certains programmes d’équipements, comme les véhicules blindés et les hélicoptères de la gendarmerie, M. Faure a eu raison de parler de report et non d’abandon. Je veux rassurer M. de Montesquiou : cette mesure ne portera pas atteinte à la capacité opérationnelle des unités. Elle permettra, en revanche, d’économiser 15 % du budget annuel de maintien en condition opérationnelle des hélicoptères.

L’immobilier de la gendarmerie n’est pas oublié, madame Klès, monsieur Laménie : 141 millions d’euros sont prévus pour la construction de 141 logements et des locaux de services associés. Si, dans les années 1997-2002, un effort avait été accompli en matière aussi bien de construction que d’entretien des locaux, nous aurions moins à faire aujourd'hui !

M. Jean-Louis Carrère s’exclame.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

En outre, 13 millions d’euros sont prévus en crédits de fonctionnement pour couvrir les dépenses de loyers de locaux qui sont construits par les collectivités.

Je ne partage pas le diagnostic que certains orateurs ont établi sur l’état déplorable de tous les locaux de gendarmerie. Je visite suffisamment de gendarmeries chaque semaine pour constater qu’il n’en est rien et que des efforts ont été fournis conjointement par l’État et par les collectivités locales, je vous en donne acte

Exclamations sur les travées du groupe socialiste

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

...afin que notre pays dispose de casernes de gendarmerie de grande qualité. Mais il faut que les loyers soient payés en temps utile et dans leur intégralité.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

C'est la raison pour laquelle le ministère dont j’ai la charge accomplit cet effort financier.

De même, monsieur Couderc, un effort sera entrepris pour les programmes immobiliers de la police qui s’imposent : 154 millions d’euros y seront consacrés.

Quatre projets relatifs au commissariat de Béziers ont été transmis au ministère de l’intérieur. L’un d’eux, une extension par l’acquisition d’une agence bancaire contiguë, est intéressant. Le coût total est estimé à environ 7, 5 millions d’euros. Je veillerai à ce qu’une étude de faisabilité approfondisse cette question en 2009, tout comme je serai attentive à l’apport de renforts pour accompagner l’ouverture du nouveau centre pénitentiaire à la fin de l’année 2009 et aux conditions d’accueil de ces renforts.

Concernant les transfèrements des prévenus et des condamnés, qui mobilisent plus de 3 500 policiers et gendarmes, je souhaite, en accord avec la Chancellerie, développer la visioconférence. Je proposerai également la facturation de ces transfèrements à la Chancellerie dès l’année prochaine, monsieur de Montesquiou ; mes services en étudient actuellement les modalités. Je ne doute pas que les transfèrements seront ainsi, par la suite, mieux ajustés aux besoins essentiels.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

De même, j’entends que les missions administratives et techniques qui sont aujourd'hui exercées par des personnels en uniforme, alors que ceux-ci ont été formés pour assurer la protection, le soient par des personnels administratifs et techniques. Je poursuivrai donc l’année prochaine le remplacement de 600 sous-officiers de gendarmerie et, comme cette année, de 500 fonctionnaires de police, par des personnels administratifs et techniques. Ce faisant, il me semble répondre au souci de recentrer les missions des gendarmes et des policiers sur ce qui constitue le cœur de leur métier.

Moderniser l’organisation, c’est également agir sur les structures pour les rendre plus performantes.

Oui, le rapprochement de la police et de la gendarmerie permettra de favoriser les mutualisations. D’ailleurs, le projet de LOPPSI concrétisera ce rapprochement. Ainsi seront concernées certaines formations – plongeurs, équipes cynophiles, perfectionnement du maintien de l’ordre – et diverses fonctions de soutien, telles que la réparation des véhicules ou des armes. Sont également prévues un certain nombre de mutualisations locales.

Monsieur le rapporteur spécial, la fonction immobilière elle-même sera progressivement regroupée pour répondre aux besoins des deux forces, tout en tenant compte d’un certain nombre de spécificités, puisque les systèmes immobiliers ne sont pas exactement les mêmes selon qu’il s’agisse des commissariats ou des casernes de gendarmerie.

La mise à disposition de la police des hélicoptères de la gendarmerie permettra d’éviter la création d’une nouvelle flotte, ce qui est très coûteux, ainsi que j’ai pu le constater en exerçant d’autres fonctions.

Sur le plan opérationnel, les fichiers de police criminelle, STIC et JUDEX, seront regroupés dans l’application ARIANE, et des convergences en police technique et scientifique seront recherchées.

Je ne doute pas que d’autres mutualisations démontrent leur logique par la suite. L’efficacité des groupes d’intervention régionale, les GIR, structures de mutualisation par excellence, nous y pousse. Je veillerai, bien entendu, à préserver la distinction de la police et de la gendarmerie, car, à mes yeux, il n’est pas question d’avoir, même à terme, une fusion entre ces deux corps.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Ce n’est pas vrai ! C’est comme le deuxième porte-avions !

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

Je le répète, nous avons besoin de deux forces de sécurité au statut différent, l’un civil, l’autre militaire. Il faut toujours garantir les savoir-faire et l’excellence de chacun, et non pas parvenir, par un jeu de rapprochements excessifs, au plus petit dénominateur commun. Je veux, au contraire, favoriser un enrichissement réciproque des deux corps, en préservant l’identité de chacun.

À l’intérieur de chaque force, j’ai demandé aux deux directions générales de lancer les ajustements nécessaires permettant le recentrage des forces mobiles sur leur vocation première, le réajustement de certains modes de fonctionnement internes et la modernisation des écoles de formation.

Monsieur Madrelle, j’ai reçu tous les élus concernés par les fermetures d’écoles de gendarmerie – vous avez eu la courtoisie de le rappeler – et j’ai désigné un expert auprès de chacune des collectivités concernées pour aider aux reconversions. J’ai pris un certain nombre d’engagements en la matière.

D’ailleurs, bien avant votre intervention, j’avais apporté des réponses positives à toutes les remarques qui vont vous conduire à émettre un vote négatif. Vous avez cependant toute liberté de vote !

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

Aussi bien pour ce qui concerne les objectifs, les écoles de gendarmerie, les effectifs, j’étais intervenue par anticipation.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

Toutes ces mesures, monsieur Faure, doivent être prises sans porter atteinte à la capacité opérationnelle des unités et en maintenant le service rendu à la population.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

C’est vrai pour la gendarmerie mobile comme pour la gendarmerie départementale.

Je ne doute pas que vous soyez tous de bonne foi, mesdames, messieurs les sénateurs

Sourires

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

Le maillage territorial de la gendarmerie sera maintenu, mesdames Klès et Mathon-Poinat, messieurs Laménie et Madrelle. Ce n’est pas incompatible avec des ajustements qui peuvent nous permettre d’améliorer l’efficacité des unités, notamment en matière de répartition entre police et gendarmerie.

C’est en ayant à l’esprit la couverture du territoire que j’ai étendu en métropole comme dans les collectivités d’outre-mer la présence des agents qui peuvent agir dans ce domaine. J’ai donné des instructions claires visant à recentrer leur action sur un certain nombre de priorités.

Monsieur de Montesquiou, toujours en ce qui concerne le rapprochement entre la police et la gendarmerie, vous m’avez interrogée sur le redéploiement. L’essentiel a déjà été fait : trois cent trente-sept communes et une soixantaine de départements sont d’ores et déjà concernés. Le coût immobilier, très important, a dépassé 15 millions d’euros. À l’avenir, des ajustements seront opérés, mais ils seront d’ampleur restreinte. Ils viseront à consolider les logiques d’agglomération en étendant des circonscriptions de police nationale et en transférant un certain nombre de petites circonscriptions à la gendarmerie, où celle-ci pourra exercer pleinement ses savoir-faire spécifiques.

Au terme des premières réflexions, purement techniques, entre les deux directions, une vingtaine d’opérations sont envisageables dans les années à venir. La mesure est donc extrêmement limitée. Quoi qu’il en soit, ces propositions n’ont pas encore été validées et devront, préalablement à leur application, faire l’objet d’une concertation avec les élus locaux. Lors de la prochaine réunion mensuelle des préfets, je rappellerai ce point.

Monsieur Courtois, le recentrage de la gendarmerie mobile sur son cœur de métier sera sans incidence sur les missions de maintien de l’ordre outre-mer. Il n’est donc pas nécessaire d’envisager la participation des CRS à ce type de missions.

Par ailleurs, vous savez que la gendarmerie n’est pas organisée en directions fonctionnelles, comme la police nationale. Ainsi, il n’existe pas de commandement ou de direction de la gendarmerie mobile. Il n’est donc pas à l’ordre du jour de regrouper sur un même site une telle direction et la direction centrale des CRS.

En revanche, l’emploi de ces deux forces sur le plan national est organisé par un bureau commun, mesure d’efficacité.

Enfin, les cantonnements utilisés par la gendarmerie mobile, essentiellement en Île-de-France, ne suffisent déjà pas aux besoins des unités déplacées. Un partage avec les CRS n’est donc pas envisageable, du moins à court terme.

Dans le domaine opérationnel, la création de compagnies de sécurisation dans les directions départementales de la sécurité publique s’inscrit dans la même logique de cœur de métier. Cette disposition permet de disposer d’effectifs entraînés, connaissant leur territoire d’exercice, capables d’intervenir en tout point du département. Ainsi, en Seine-Saint-Denis aujourd’hui, à Marseille, à Toulouse et dans une vingtaine d’autres villes demain, la police pourra compter sur une unité formée à des situations difficiles et connaissant véritablement son environnement.

Les unités territoriales de quartier seront beaucoup plus nombreuses. Au cours de l’année 2009, nous allons en déployer plusieurs dizaines.

La création de la Direction centrale du renseignement intérieur procède de la même logique qui conjugue efficacité renforcée et économie de moyens.

Je souligne à cette occasion, monsieur de Montesquiou, que la spécificité de la préfecture de police ne remet pas en cause l’efficacité du dispositif national. Sur le plan de l’information générale, le préfet de police de Paris exerce sa responsabilité zonale à l’égard des services d’information générale d’Île-de-France. Pour ce qui concerne le renseignement sensible, des protocoles précis existent entre sa direction du renseignement et la Direction centrale du renseignement intérieur.

La modernisation passe également par l’adaptation des ressources humaines

J’ai défendu l’idée que la règle du non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux ne pouvait pas s’appliquer aux forces de sécurité.

Au titre de l’effort général pour la réduction des effectifs de la fonction publique, 41 % des personnels du ministère partant à la retraite ne seront pas remplacés – je rappelle que la règle générale est un taux de non-remplacement de 50 % –, mais, dans le domaine de la sécurité, ce taux n’est que de 36 %, soit 1432 policiers et 771 gendarmes.

Monsieur Gautier, l’important, c’est la réalité des chiffres ; ce ne sont pas des considérations d’ordre général !

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

Les chiffres plus élevés qui ont été cités englobent des transferts d’effectifs vers d’autres programmes, avec les missions correspondantes. La gendarmerie de l’armement – donc les personnels concernés – est transférée à la défense. Ce fait explique la différence entre nos chiffres.

Le plafond d’emplois de la police nationale va diminuer de 2008 à 2011, donc sur trois ans, de 4544 fonctionnaires. Dans le même temps, je vais recruter 1485 personnels administratifs, techniques et scientifiques pour exempter les policiers des tâches administratives et les remettre au cœur de leur métier, ainsi que 132 adjoints de sécurité. Enfin, 3 000 équivalents temps plein travaillé seront récupérés parmi les gradés et les gardiens grâce à l’accord que je viens de signer avec le syndicat Alliance, parfaitement représentatif. Cet accord comporte des avancées attendues depuis des années en matière de rémunération et de statut. Au total, la capacité opérationnelle de la police est maintenue, voire améliorée, puisque les policiers sont davantage concentrés sur leur mission de protection et plus au contact de la population.

En contrepartie des non-remplacements, les rémunérations bénéficieront d’un taux de retour des économies réalisées, taux très satisfaisant pour le ministère de l’intérieur. Cela permettra non seulement de respecter les engagements pris, mais aussi d’engager de nouvelles étapes.

Monsieur Madrelle, je veillerai au strict respect de la parité entre policiers et gendarmes, en toute transparence, dans le cadre d’un dialogue permanent. Sur ce point, qui a fait l’objet de vos critiques, vous pouvez constater que des engagements ont été pris.

Le protocole de 2004 relatif aux corps et carrières de la police sera bien sûr intégralement mis en œuvre. Pour les gradés et gardiens, cela signifie la création de 2 300 postes de brigadiers, de 460 postes de brigadiers-majors et de 175 postes de responsables locaux d’unités locales de police.

De plus, je viens de signer deux protocoles additionnels qui aboutiront à augmenter de 20 % l’allocation de maîtrise, ainsi que de deux points le taux de l’indemnité de sujétion spéciale de police à partir de 2009. Les policiers souhaitaient une telle augmentation depuis une quinzaine d’années.

En contrepartie, quelque 3 000 équivalents temps plein travaillé seront récupérés par des changements apportés aux régimes horaires : cinq jours de RTT seront récupérés, les minutes et les heures supplémentaires seront comptabilisées avec exactitude, en lieu et place de l’ancienne règle de l’heure non sécable. Jusqu’à présent, lorsqu’un agent travaillait cinq minutes de plus, une heure entière lui était comptée. Vous admettrez que ce n’était pas très normal !

Enfin, dans le cadre de ce protocole, des efforts particuliers seront consentis au bénéfice des agents affectés en Île-de-France. Une véritable politique de fidélisation sera mise en place, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent. Il est prévu d’organiser dès l’année prochaine un concours national à vocation francilienne, lequel s’accompagnera de plusieurs mesures concrètes : le déplafonnement au-delà de cinq ans de l’actuelle prime de fidélisation ; le versement de trois primes, au début, au milieu et à la fin de l’affectation ; des avancements accélérés ; des aides renforcées à la vie personnelle, pour le logement, l’emploi du conjoint ou les crèches.

Vous m’avez interrogée, monsieur Courtois, sur l’avenir des adjoints de sécurité. En 2009, effectivement, 920 contrats ne seront pas reconduits. Mais il ne s’agira que d’une parenthèse, car les recrutements en la matière permettent de disposer d’un personnel adapté à des missions d’exécution. Tel est bien l’objectif : exécuter des missions élémentaires qui ne justifient pas la formation de plus en plus affinée des gardiens de la paix et permettre à des jeunes sans diplôme d’accéder à la vie active.

Comme vous, monsieur le sénateur, je veux développer ce véritable ascenseur social grâce auquel aujourd’hui 70 % des adjoints de sécurité n’ayant pas obtenu le baccalauréat peuvent devenir gardien de la paix après avoir réussi le concours qui leur est réservé.

Dès 2010, le nombre d’adjoints de sécurité repartira à la hausse pour atteindre 12 000 en 2013. J’ai demandé à mes services de revoir leur statut pour allonger la durée des contrats et, conséquence logique, les ouvrir à des personnes plus âgées.

Pour la gendarmerie, les engagements du plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées seront également tenus. Ainsi, 900 postes d’adjudants et 1 000 postes de majors seront créés.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie de bien vouloir excuser la durée un peu longue de mon intervention, mais j’ai tenu à répondre à toutes les questions qui m’ont été posées

Le projet de budget pour 2009 permettra d’atteindre les objectifs que je me suis fixés et qui sous-tendent la mise en place d’un grand ministère moderne consacré à la protection des Français. Il intègre d’ores et déjà, par anticipation et logiquement, la première tranche de la LOPPSI. Ce n’est pas parce que certaines mesures normatives figurent dans cette loi que l’ensemble du dispositif financier doit être gelé. D’ailleurs, c’est ce qui s’est passé les années précédentes et, en tant que ministre de la défense, je n’avais alors noté aucune protestation de votre part, mesdames, messieurs les sénateurs de gauche !

En tout cas, l’adoption des crédits de la mission « Sécurité » sera un signe fort adressé aux policiers et aux gendarmes de la reconnaissance que chacun d’entre nous leur porte et de l’intérêt que nous manifestons à la protection de la France.

Je ne doute pas, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous aurez cela à l’esprit lors de votre vote.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Sécurité » figurant à l’état B.

En euros

Sécurité

Police nationale

Dont titre 2

Gendarmerie nationale

Dont titre 2

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Je n’ai été saisi d’aucune explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de cette mission.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

J’appelle en discussion les amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 73 qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Sécurité ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° II-84 est présenté par M. Faure, au nom de la commission des affaires étrangères.

L'amendement n° II-98 est présenté par M. Courtois, au nom de la commission des lois.

Tous deux sont ainsi libellés :

I. - Après l'article 73, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les frais occasionnés par les transfèrements et les extractions judiciaires effectués par la police nationale ou la gendarmerie nationale, y compris les dépenses de personnels affectés à ces tâches, font l'objet d'un rapport comprenant une évaluation chiffrée transmis aux commissions compétentes des deux assemblées. Ce rapport comprend également l'examen des modalités d'un transfert progressif de cette charge au ministère de la justice.

II.- En conséquence, faire précéder cet article de la mention :

Sécurité

Le sous-amendement n° II-178, présenté par MM. Rebsamen, C. Gautier et Madrelle, Mme Klès et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'amendement n° II-84, remplacer les mots :

effectués

par les mots :

ainsi que les charges consécutives aux gardes statiques assurées

II. - À la fin de la seconde phrase du même alinéa, remplacer les mots :

au ministère de la justice

par les mots :

aux services consommateurs

La parole est à M. Jean Faure, rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° II-84.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

Mes chers collègues, vous n’êtes pas sans savoir que les extractions et les transfèrements judiciaires représentent entre 1 000 et 1 100 emplois à plein temps dans la gendarmerie ; j’ai entendu parler du double pour la police. Il serait donc intéressant de connaître les chiffres exacts.

Il serait tout aussi intéressant d’encourager la justice à utiliser des méthodes modernes pour obtenir un résultat identique ; je pense en particulier à la visioconférence.

En vertu du principe « qui commande paie », il aurait été légitime que la charge des transfèrements et des extractions judiciaires incombe au ministère de la justice, même si ce dernier ne dispose pas, dans l’immédiat, des moyens de se substituer à la gendarmerie et à la police ni de rembourser, pour l’instant en tout cas, les sommes engagées par le ministère de l’intérieur.

Le présent amendement vise donc à demander un rapport comprenant une évaluation chiffrée de ces opérations, présentant une étude des modalités de transfert de ces charges et dégageant des pistes pour résoudre ce problème. Dans le cadre d’une politique de réduction des dépenses publiques, il convient de savoir qui fait quoi.

Cet amendement n’est absolument pas contraire à une politique de réduction des dépenses et s’inscrit parfaitement dans la politique de la révision générale des politiques publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. François Rebsamen, pour présenter le sous-amendement n° II-178.

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

Ce sous-amendement vise à prolonger la réflexion de nos collègues Jean Faure et Jean-Patrick Courtois sur les charges consécutives aux gardes statiques. Cela pose, en filigrane, la question lancinante des charges indues que supportent la police nationale et la gendarmerie.

Selon la révision générale des politiques publiques, à laquelle on se réfère volontiers, il convient de concentrer l’action de la police et de la gendarmerie « sur leur cœur de métier », pour reprendre une expression à la mode tant dans le public que dans le privé.

Dans ces conditions, les missions périphériques ou annexes doivent être reconsidérées. En clair, elles doivent être supprimées ou remises à la charge d’autres donneurs d’ordres. Cela concerne la protection des personnes, les escortes et transfèrements judiciaires, mais aussi les gardes statiques.

La mesure proposée avait été adoptée à l’unanimité de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et elle n’avait soulevé aucune objection de la part de la commission des lois.

Un premier amendement avait été déposé afin de procéder à ces déplacements de crédits au sein de la mission « Sécurité ». La commission des finances a considéré qu’il était irrecevable au titre de l’article 40, au motif qu’il organisait dans les faits un transfert de charges entre deux missions en prévoyant une convention entre le ministère de l’intérieur et le ministère de la justice.

Aujourd’hui, il s’agit d’une déclaration d’intention qui prend la forme d’un renvoi à l’établissement d’un rapport. Nous souhaitons que ce rapport concerne également les gardes statiques.

On ne peut toutefois qu’être perplexe ! En effet, la LOLF encourage une culture de l’évaluation soumise au contrôle du législateur, évaluation qui reste en état de gestation le temps d’un nouveau rapport. On pourrait d’ailleurs s’interroger sur l’utilité de tous ces rapports budgétaires.

La commission des finances s’est montrée restrictive, mais il serait regrettable que cela fasse jurisprudence.

Comme l’a indiqué Charles Gautier, nous discutons de la première année d’exécution budgétaire de la LOPPSI, finalisée depuis plus d’un an et demi, alors que nous n’en connaissons pas le contenu. Il s’agit, selon nous, d’un contresens et d’un manque de considération pour la représentation nationale.

Madame la ministre, en ce qui concerne l’absence de synchronisation entre le dépôt de la LOPPSI et l’examen du projet de budget et le retard pris pour la discussion du projet de loi relatif à la gendarmerie, qui devrait avoir lieu au mois de février, vous avez répondu, à juste titre, sur le plan de la technique budgétaire.

Toutefois, il s’agit pour nous d’une question de principe. Nous avons adopté une réforme constitutionnelle dont l’objet est de renforcer et de revaloriser les droits du Parlement. Ces retards ne sont pas de votre fait, j’en conviens. Faut-il en déduire que, pour le Gouvernement, un débat clair sur la sécurité des Français n’est plus à l’ordre du jour ? Un tel débat est pourtant nécessaire.

Nous sommes tous favorables au développement d’outils modernes d’investigation. Mais nous devons être cohérents. En abordant uniquement les transfèrements et les extractions de prisonniers, on oublie, même si vous l’avez évoqué dans votre intervention, madame la ministre, l’allégement des gardes statiques qui relève de la même problématique. Et ce n’est pas nouveau !

L’allégement des gardes statiques doit lui aussi être analysé, en prenant en compte la sécurité des institutions publiques ; ce n’est pas contradictoire avec la demande de rapport que souhaitent MM. Faure et Courtois. Tel est l’objet du sous-amendement que nous avons déposé.

Madame la ministre, vous mettez systématiquement en avant la modernisation de l’action des forces de police, et vous avez raison, ainsi que la nécessité de recourir aux nouvelles technologies, telles que la visioconférence et la vidéosurveillance. Cela masque la réalité sur la compression des dépenses et le ralentissement des dépenses d’investissement.

Comment la vidéosurveillance, appliquée à des espaces publics, par exemple, permettra-t-elle concrètement de redonner aux policiers l’occasion d’être plus présents sur la voie publique ? Ce qui nous guide, c’est la préoccupation d’assurer une meilleure offre de sécurité et non la réalisation d’un gain maximum de personnels.

Je vous remercie de l’attention que vous voudrez bien porter à ce sous-amendement. Nous constatons avec inquiétude que, malgré les dispositifs de vidéoprotection et de vidéosurveillance qui ont été mis en place, par exemple devant un grand nombre de préfectures, les gardes statiques de policiers sont toujours aussi nombreuses, pour ne pas dire plus.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° II-98.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Bien que les transfèrements et les extractions judiciaires relèvent des missions de sécurité incombant aux forces de sécurité intérieure, ces tâches détournent les policiers et les gendarmes de leurs principales missions que sont la surveillance de la voie publique et l’investigation. En outre, elles sont peu valorisantes pour les personnels et très consommatrices d’équivalents temps plein travaillé.

Enfin, les concours apportés à la justice sont à l’origine d’un agacement des personnels à l’encontre des magistrats qui n’ont pas toujours conscience de désorganiser les brigades de gendarmerie ou les services de police.

Cette charge de travail va particulièrement peser sur la police et la gendarmerie, alors que leurs moyens vont être durablement contraints.

Pourtant, des solutions existent ; je pense notamment à la vidéoconférence. L’ensemble des établissements pénitentiaires et des tribunaux en sont désormais équipés, mais personne ne s’en sert.

En outre, il pourrait être utile de revoir la liste des actes qui doivent être notifiés en présence d’un magistrat.

Enfin, des économies pourraient être réalisées grâce à une meilleure organisation des transfèrements et extractions. Cela supposerait un minimum de coordination entre les magistrats d’un même tribunal.

Pour toutes ces raisons, le principe prescripteur-payeur devrait être appliqué en l’espèce, conformément à l’esprit de la LOLF. Une responsabilisation financière des magistrats serait le levier le plus sûr pour obtenir enfin des résultats significatifs.

Sur le modèle de la réforme des frais de justice, et après conclusion d’une convention entre le ministère de la justice et celui de l’intérieur, un droit de tirage pourrait être défini au profit du ministère de la justice, lequel le répartirait ensuite entre les juridictions. En cas de dépassement, chaque juridiction rembourserait au ministère de l’intérieur tout ou partie des frais correspondants pour responsabiliser les magistrats.

J’avais initialement envisagé avec Jean Faure de présenter un amendement prévoyant que le ministère de l’intérieur et celui de la justice concluraient une convention pour définir les modalités de ce remboursement en cas de dépassement. Toutefois, la commission des finances a rejeté un amendement similaire présenté par mon collègue Jean Faure, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Selon la commission des finances, un tel amendement serait équivalent à un transfert de crédits entre deux missions, ce que la LOLF interdit. Cette interprétation est très stricte, mais j’en prends acte.

En conséquence, en concertation avec Jean Faure, je vous propose d’adopter le présent amendement qui a simplement pour objet de demander au Gouvernement un rapport sur le sujet. Il n’a naturellement pas la même portée que l’amendement envisagé initialement, mais il obligera le Gouvernement, notamment le ministère de la justice, à réfléchir enfin sérieusement à un mécanisme de responsabilisation financière du ministère de la justice et des magistrats.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Le sous-amendement n° II-178 est trop imprécis en ce qui concerne les services consommateurs.

Par ailleurs, il recèle un vrai risque de confusion entre les gardes statiques, d’une part, les transfèrements et extractions judiciaires, d’autre part.

La commission des finances a donc émis un avis défavorable sur ce sous-amendement.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

Monsieur Rebsamen, nous avons commencé à réduire sensiblement le nombre des gardes statiques de plusieurs ministères.

Des ministères nouveaux présentant une certaine sensibilité avaient demandé des gardes statiques. Nous leur avons proposé une autre formule.

Je n’ai pas les chiffres sous les yeux, mais je pourrai vous les transmettre rapidement.

Je ne pense pas qu’il soit nécessaire de demander un rapport sur ce point dans la mesure où je peux vous fournir les informations que vous demandez. Fort de ces éléments, vous pourrez vous forger une opinion avant la discussion de la LOPPSI ou de la loi relative à la gendarmerie. Ce sera, me semble-t-il, le bon moment de revenir sur ces sujets.

Pour toutes ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre sous-amendement. Vous aurez toute latitude de le déposer à nouveau lors de la discussion de l’un des deux textes que je viens d’évoquer.

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

Non, je le retire, monsieur le président. Nous le redéposerons éventuellement lors de la discussion des textes qu’a mentionnés Mme la ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le sous-amendement n° II-178 est retiré.

La parole est à M. Jean Faure, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

Je comprends le souci de nos collègues de faire le point sur l’ensemble des tâches abusives. Dans son rapport sur le futur texte de loi, la commission a dénombré une quinzaine de tâches indues ou abusives.

Nous nous sommes intéressés aux transfèrements et aux extractions judiciaires, parce qu’il s’agit des tâches les plus importantes et que celles-ci présentent un caractère spécifique.

Sur une liste de quinze tâches, on risque de n’en retenir que deux. Je souhaite que les transfèrements et les évaluations judiciaires fassent l’objet d’une évaluation chiffrée publiée dans un rapport.

Les deux assemblées du Parlement bénéficient de gardes statiques. Mais elles ne dépendent d’aucun ministère et n’ont pas les moyens de se protéger.

Pour toutes ces raisons, je suis hostile au sous-amendement n° II-178.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Je remercie M. Rebsamen d’avoir retiré son sous-amendement.

Je puis vous assurer que M. le rapporteur spécial est particulièrement attentif à la richesse des informations qui nous sont transmises par le ministère.

Madame la ministre, nous souhaitons que vous puissiez mettre à notre disposition tous renseignements utiles, notamment le nombre d’heures consacrées aux gardes statiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Nous disposerons ainsi d’une évaluation réaliste.

Ce travail doit pouvoir être l’objet de discussions à l’occasion de l’examen du projet de loi de règlement. C’est alors que nous sollicitons Mme la ministre pour qu’elle nous confirme qu’il a été fait bon usage des crédits mis à sa disposition.

Je voudrais remercier nos collègues Jean-Patrick Courtois et Jean Faure d’avoir manifesté autant de bienveillance et de compréhension à l’égard de la commission des finances. Ils avaient initialement prévu des transferts de crédits d’une mission vers l’autre, ce qui n’entre pas dans les prérogatives du Parlement : nous pouvons amender; nous pouvons, au sein d’une mission, affecter à un programme des crédits attribués à un autre, mais nous ne pouvons pas les transférer d’une mission vers une autre. Le risque était donc que nous amputions la mission « Sécurité » d’une partie de ses moyens sans pouvoir restituer ceux-ci à la mission « Justice ». C’est pourquoi j’ai souhaité, mes chers collègues, que vous renonciez à la rédaction initiale de votre amendement.

Cela étant, je tiens à indiquer que la commission des finances est totalement solidaire de votre préoccupation. Nous voudrions maintenant, madame la ministre, entrer dans une démarche active. D’après l’évaluation très sommaire à laquelle nous nous sommes livrés, le coût du transfèrement dépasse probablement 150 millions d’euros par an. Si nous voulons aller jusqu’au bout de la logique, cette somme doit être mise à la disposition de la justice, de telle sorte que ce soient les magistrats qui gèrent ce budget de transfèrement et tirent le profit des économies qu’ils pourraient réaliser : ils feront des économies s’ils mettent en place des équipements de visioconférence, s’ils gèrent autrement les transfèrements, car il peut arriver que tel transfèrement ait un caractère quelque peu formel alors qu’il est extrêmement coûteux. C’est donc à eux qu’il revient de gérer ces 150 millions d’euros, dont l’évaluation reste bien sûr à parfaire.

Cela ne sera pas sans conséquence sur votre propre budget, madame la ministre, car il se peut que, dans ces conditions, les magistrats recourent moins souvent à vos services et vous versent des sommes moindres !

Mme le ministre approuve.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Nous savons que les magistrats sont des gestionnaires ; ils en ont fait la brillante démonstration à propos des frais de justice. Nous attendons qu’ils relèvent ce nouveau défi que représentent les transfèrements.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

Je le souhaite aussi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Mais cela suppose que nous passions rapidement à l’acte, madame la ministre ! Nous nous sommes lancés sur cette piste des transfèrements depuis quelque temps déjà ; il nous faut maintenant aller jusqu’au bout.

La logique de la LOLF voudrait que les crédits concernés soient retirés à votre ministère et mis à la disposition de la justice, cette dernière s’acquittant auprès de vous, au titre des transfèrements qu’elle vous demanderait, de sommes qui seraient inscrites dans vos recettes. Il faut bien entendu s’attendre à ce que, dans ces conditions, elle essaie de payer le moins possible en organisant les transfèrements différemment.

Le système actuel n’est pas piloté : les magistrats vous demandent des transfèrements qui ne leur coûtent rien et que vous devez exécuter sans aucune régulation possible. C’est la négation de la gestion et de la maîtrise de la dépense publique !

Il est impératif d’en sortir, et nous comptons sur vous, madame la ministre, pour qu’il en soit ainsi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

J’approuve tout à fait la démarche que traduisent les amendements de nos collègues Jean Faure et Jean-Patrick Courtois. Elle n’est pas l’expression, au détour de la session budgétaire, d’une volonté politique : elle reflète une réflexion issue de travaux ayant abouti à la présentation d’un rapport. La procédure me semble être de bonne méthode, et je partage les propos qu’a tenus à l’instant le président de la commission des finances au sujet de cette incitation à la vertu qui permettrait à la fois que ceux qui réalisent des économies bénéficient des crédits et que le budget de la sécurité ne se trouve pas, par une forme de gaspillage, amputé. C’est là un point clef, et la commission des affaires étrangères en a discuté.

Je voudrais néanmoins vous expliquer, madame la ministre, pourquoi, tout en approuvant ces amendements, j’ai voté contre en commission.

Je vous ai entendue, et vous savez que vous pouvez compter sur ma confiance et mon amitié. Je vous ai vue au ministère de la défense, je vous vois au ministère de l’intérieur, et je connais vos convictions : je ne doute en rien de la sincérité de vos propos sur les deux programmes de la mission « Sécurité » et sur leur indépendance.

Cependant, au-delà de votre personne, au-delà de votre politique, je reste inquiet sur les systèmes. À un moment ou à un autre, de procédure de gestion en procédure de gestion, on finira par rapprocher la police et la gendarmerie pour, finalement, aboutir à terme à n’avoir qu’une seule force de sécurité. De mon point de vue, compte tenu des responsabilités qui ont été les miennes, je vous le dis : ce serait, pour la République, dangereux. Je suis très attaché à l’existence de deux forces de sécurité et, quel que soit le goût des hauts responsables à écrire ici ou là des petits carnets et à faire quelquefois de la politique, il est heureux que cette séparation soit un fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Nous sommes d’accord ! Nous verrons comment vous voterez !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Pour l’équilibre de notre République, il nous faut veiller avec la plus grande attention à ce que la gendarmerie, avec ses qualités propres, avec l’ensemble de sa formation, de son orientation, et la police, avec également toutes ses qualités spécifiques, continuent de coexister.

Je vous fais confiance, madame la ministre, parce que je sais qui vous êtes, parce que je sais que vous portez cette conviction au plus profond de vous-même, une conviction de professionnelle sur la sécurité, une conviction de républicaine sur la protection de nos équilibres. Pour cette raison, je vous suivrai. Pour autant, le sujet est très important, et j’attire l’attention de nos collègues sur l’orientation que nous sommes en train de prendre.

Ce qui me paraît le plus malheureux, c’est la suppression, ou tout au moins le ralentissement de l’effort de formation de la gendarmerie. Car, mes chers collègues, où se crée la culture des deux forces de sécurité ? Dans la formation !

Et ne croyez pas, mes chers collègues, que c’est à cause de la suppression de l’école de Châtellerault que je monte au créneau avec tant d’énergie ! Oui, la suppression de l’école de Châtellerault est une erreur ! Mais c’est une erreur plus grande encore que de diviser par deux le nombre des écoles de gendarmerie, car c’est affaiblir la formation de la gendarmerie ! À terme, quand les écoles se rassembleront, les corps se rassembleront, et la République sera affaiblie.

Restons conscients de ce qu’il faut faire pour l’avenir. Croyez-moi, c’est un travail permanent !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Mais cela dépasse tous les clivages, monsieur Carrère ! Nous devons, nous politiques, faire en sorte que les systèmes ne nous dominent pas. Or les systèmes de rapprochement et de parité pourraient finir par nous dominer.

Aujourd’hui, dans cette assemblée, la volonté politique est claire. Je l’approuve, je m’en félicite, et je remercie la ministre. Mais je voudrais vraiment que nous restions très vigilants, car il se pourrait qu’un jour les procédures l’emportent sur les convictions.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je me limiterai à une très brève observation : quand le général Gilles a été auditionné par la commission des affaires étrangères, il a tenu à souligner, abondant dans le sens de la vertu recommandée par la commission des finances, que le Conseil constitutionnel prenait déjà en charge ses propres gardes statiques. C’est assurément un exemple que les autres institutions pourraient suivre pour entrer dans ce cercle vertueux, et Mme Rachida Dati, hier, était parfaitement d’accord.

Je voterai les deux amendements identiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

J’ai longtemps été avocat – je l’étais encore il y a peu –, ce qui me conduit à penser que la réforme proposée est indispensable. Les magistrats immobilisent des heures entières les forces de police ou de gendarmerie pour des tâches qui pourraient fort bien être assumées par le budget de la justice. Au demeurant, si les juges les géraient, sans doute y seraient-ils beaucoup plus attentifs, et ce serait beaucoup mieux.

Par ailleurs, je pense moi aussi nécessaire que coexistent dans notre pays deux forces de sécurité importantes, avec chacune un système de formation fort.

Il ne vous aura pas échappé, mes chers collègues, que je suis moi aussi un élu du département de la Vienne. L’école de gendarmerie de Châtellerault a été supprimée alors que le Premier ministre s’était formellement engagé à la maintenir. C’est la raison pour laquelle, tout à l’heure, je n’ai pas voté les crédits. Mes chers collègues, il nous faut donc à l’avenir être très vigilants pour ce qui concerne les formations.

Très bien ! sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Jean-Louis Carrère, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Nous voterons ces amendements, mais nous avons un problème d’entendement dans cet hémicycle.

Nous sommes très sensibles aux arguments de M. Raffarin et, comme lui, nous souhaitons conserver deux forces distinctes. Concrètement, cela signifie que nous irons jusqu’à voter contre la loi d’annexion de la gendarmerie par le ministère de l’intérieur ! La question que je pose à mes collègues de l’UMP est donc de savoir s’ils iront eux aussi au bout de la logique, comme je les y invite vivement.

Monsieur Raffarin, je partage vos craintes. Vous avez fort bien décrit le risque que court cette force républicaine qu’est la gendarmerie de ne plus irriguer les territoires ruraux, ce qui posera un problème à la République. La logique voudrait que, par nos votes, nous nous opposions à cette fusion-annexion avec le ministère de l’intérieur : je vous demande, mes chers collègues, de suivre cette logique et je vous invite à vous joindre à nous pour que, ensemble, nous mettions un terme à cette loi qui n’est pas une bonne loi pour la République.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 73.

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Sécurité ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Je rappelle que la commission des affaires économiques a proposé plusieurs candidatures pour deux organismes extraparlementaires.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame MM. Pierre Hérisson, Bruno Sido, Michel Teston et Philippe Darniche membres de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques ; MM. Ladislas Poniatowski et Roland Courteau, membres titulaires, et MM. Jean-Claude Merceron et Daniel Raoul, membres suppléants du Conseil supérieur de l’énergie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sécurité civile ».

La parole est à M. le rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Haut

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à féliciter l’ensemble des acteurs de la sécurité civile. En 2007, la saison des feux n’a touché qu’une superficie de 6 440 hectares, ce qui est inférieur au quart de la moyenne établie sur les dix dernières années.

Je relève également l’efficacité de la sécurité civile lors de ses nombreuses interventions à l’étranger, qu’il s’agisse des missions d’évacuation au Tchad ou encore de l’envoi de détachements en Inde et en Chine à la suite de catastrophes naturelles.

Je me félicite par ailleurs de la mise en place d’indicateurs nationaux des SDIS, les services d’incendie et de secours, au cours de l’année 2007. Ils permettront la mise en place, à partir de 2009, d’une stratégie transversale de la performance au sein des SDIS.

Cependant, je regrette une fois de plus que le périmètre de la mission « Sécurité civile » reste inchangé malgré la révision générale des politiques publiques. La mission continue d’être artificiellement divisée en deux programmes très imbriqués, et son périmètre budgétaire reste étroit, avec moins de 500 millions d’euros de crédits.

Le montant des crédits de la mission doit être comparé avec les dépenses des SDIS, qui s’élèvent à 5, 3 milliards d’euros dans les budgets prévisionnels pour l’année 2008. En hausse prévisionnelle de 6, 15 % en 2008, le budget des SDIS représente ainsi plus de dix fois celui de la mission.

La part relative des départements dans les recettes de fonctionnement des SDIS tend à s’accroître pour représenter, en 2008, un peu plus de 2 milliards d’euros, soit 53, 4 % du total, ce qui correspond à près de 5 % des dépenses totales de fonctionnement des départements.

Ce constat me conduit à regretter très vivement la nouvelle diminution des crédits du Fonds d’aide à l’investissement, le FAI, des SDIS : 24, 4 millions d’euros en 2009, soit moins 12, 8 %. Le FAI est censé matérialiser l’aide de l’État aux dépenses d’investissements des SDIS, actuellement largement prises en charge par les collectivités territoriales. Je regrette d’autant plus vivement cette baisse continue – en trois ans, les crédits du FAI ont été divisés par trois – que les SDIS sont demandeurs de plus d’aides à l’investissement, notamment pour la mise en place du réseau ANTARES.

Les arguments présentés par le Gouvernement, selon lesquels les SDIS ne consomment pas la totalité des crédits du FAI, ne me paraissent donc pas recevables et ne sauraient justifier cette diminution. Il convient, au contraire, de modifier les règles d’utilisation des crédits du FAI afin de faire en sorte qu’ils profitent réellement aux SDIS, dans un moment où ceux-ci en ont réellement besoin.

En ce qui concerne les crédits de la mission pour 2009, si on constate une diminution de 38, 4 % des autorisations d’engagement et une augmentation de 1, 6 % des crédits de paiement, cela résulte d’un « retour à la normale », les autorisations d’engagement pour 2008 ayant été augmentées en vue de la passation de nouveaux marchés pluriannuels de maintenance des aéronefs en 2008. Les marchés concernant les deux derniers lots ont été passés le 31 octobre dernier, comme me l’a indiqué le directeur de la défense et de la sécurité civile.

Par ailleurs, je me félicite de la vente de l’ancien site de l’École nationale des officiers de sapeurs-pompiers à Nainville-les-Roches. Là aussi, le feuilleton s’est terminé récemment.

J’avais souligné, à l’occasion d’un contrôle sur pièces et sur place, les difficultés rencontrées dans le processus de cession de ce site eu égard aux coûts de maintenance particulièrement élevés et j’avais préconisé la vente rapide du site. Nous y sommes aujourd'hui et même si le produit de la vente – 3, 5 millions d’euros – peut sembler satisfaisant, on aurait peut-être pu réaliser une meilleure vente si cette cession était intervenue plus tôt.

Madame la ministre, j’aimerais savoir dans quelle mesure cette cession pourrait contribuer à résoudre les problèmes fonciers rencontrés par l’ENSOSP à Aix-les-Milles, car de véritables questions se posent aujourd'hui pour cette école.

Je signalerai également que la programmation triennale 2009-2011 prévoit une rationalisation des flottes d’hélicoptères de la sécurité civile. Les objectifs poursuivis sont, conjointement avec la gendarmerie et la police nationales, de rationaliser leurs fonctions support et d’optimiser l’implantation des bases d’hélicoptères. C’est une très bonne chose et cette mutualisation pourrait d’ailleurs être élargie au SAMU.

Mes chers collègues, sous réserve des réponses aux questions que j’ai formulées, notamment sur les crédits du FAI, la commission des finances vous propose l’adoption des crédits de la mission « Sécurité civile ».

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, en introduction à mes propos relatifs à la mission « Sécurité civile », je voudrais rendre hommage à l’ensemble des personnels de la sécurité civile, aux sapeurs-pompiers volontaires et professionnels, à tous les secouristes, des acteurs incontournables, fortement sollicités et qui paient encore, chaque année, un tribut trop lourd dans l’exercice de leurs missions ; je pense tout particulièrement aux six sapeurs-pompiers qui ont perdu la vie au cours de l’année 2008.

Madame le ministre, je ne reviendrai pas sur les éléments strictement budgétaires qui ont été très précisément exposés par l’excellent rapporteur spécial, notre collègue Claude Haut. Mon intervention portera plus particulièrement sur deux problématiques qui méritent, à mon sens, une attention toute particulière. Enfin, deux remarques compléteront mon intervention.

Le premier sujet portera sur l’encadrement de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris.

Madame le ministre, je souhaiterais attirer votre attention et celle de l’ensemble de mes collègues sur le taux d’encadrement de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris. Mais permettez-moi au préalable de rendre hommage à cette brigade exceptionnelle à statut militaire, créée en 1811, dont l’activité en matière de secours à personnes est, à l’heure actuelle, cinq fois plus importante que celle des SDIS de première catégorie : pour la première fois, le cap des 500 000 interventions annuelles globales, toutes interventions confondues, va être dépassé.

J’en viens à la structure de l’encadrement de la brigade : elle a peu évolué depuis 1967, date à laquelle les trois départements de la petite couronne ont été intégrés dans sa zone d’intervention. Or, à l’heure où l’activité opérationnelle de la brigade « explose » et où les tâches administratives telles que l’élaboration des marchés publics mobilisent des effectifs toujours plus nombreux, son taux d’encadrement, qui compte 3, 98 % d’officiers et 18, 32 % de sous-officiers, semble aujourd’hui trop faible pour lui permettre d’assurer sereinement ses missions.

Si, durant de nombreuses années, ce taux d’encadrement ne posait pas trop de problèmes, les nouveaux concepts opérationnels ont fondamentalement changé la donne.

En effet, à la suite des attentats de Madrid et de Londres, le préfet de police de Paris a demandé à la brigade de quadrupler sa capacité dans les contextes d’attentats terroristes, afin d’assurer une capacité opérationnelle des secours dans l’hypothèse de quatre attentats simultanés touchant la capitale, avec une capacité supplémentaire de gérer au moins un site touché par un risque NRBC, nucléaire, radiologique, bactériologique et chimique.

Si la brigade est en mesure de répondre à ces contraintes, grâce au recrutement, notamment, de spécialistes qui constitueront une compagnie NRBC spécifique, la partie commandement ne peut être assurée, faute de moyens financiers.

Compte tenu de ces éléments, madame le ministre, la problématique du taux d’encadrement de cette brigade mériterait une attention toute particulière. Assurer l’efficacité des interventions doit être notre priorité.

La seconde problématique est relative à l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés dans la fonction publique territoriale pour les métiers soumis à des conditions d’aptitudes physiques particulières, dont les sapeurs-pompiers.

La loi du 11 février 2005 relative à l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés dans la fonction publique territoriale instaure une différence de traitement entre les entreprises privées et publiques dans l’application de cette disposition.

Ainsi, selon l’article L.323-1 du code du travail, tout employeur occupant au moins vingt salariés est tenu d’employer, à temps plein ou à temps partiel, des travailleurs handicapés dans la proportion de 6 % de l’effectif total de ses salariés. Cet article est applicable aux SDIS.

Compte tenu du critère d’aptitude physique particulière exigée pour exercer les missions des sapeurs-pompiers, les SDIS ne pourront atteindre ce taux de 6 % et sont, par conséquent, assujettis au versement d’une contribution annuelle au fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.

Or les entreprises privées peuvent, elles, bénéficier d’un régime modérateur spécifique, à savoir un coefficient de minoration au titre de certains métiers exercés au sein de leurs établissements. C’est ainsi lorsqu’elles comptent des sapeurs-pompiers dans leurs effectifs.

Exclure les SDIS de ce dispositif crée une réelle distorsion et les cotisations compensatoires grèvent lourdement le budget de nombreux SDIS.

En décembre 2006, dans une réponse à une question écrite de M. Pierre Bordier, M. Christian Jacob, ministre de la fonction publique, avait souligné l’opportunité de dresser un tel bilan. Deux ans après cette annonce, est-on en mesure de juger de ce bilan qui pourrait conduire, le cas échéant, à des modifications de la loi du 11 février 2005 ?

Enfin, je formulerai deux remarques.

La première portera sur l’École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers.

Pour avoir accompagné le rapporteur spécial, M. Claude Haut, lors d’une visite de cette école implantée sur son nouveau site à Aix-les-Milles, je ne peux que partager les inquiétudes de mon collègue sur les difficultés de l’école pour attirer des formateurs et lancer la construction de ses bâtiments de formation et d’hébergement.

Cette école mérite tous nos encouragements, car elle doit devenir incontournable dans le futur réseau européen des instituts de formation de sécurité civile qui va regrouper l’ensemble des écoles nationales de formation des acteurs des secours.

Madame le ministre, dans ce contexte, la France doit promouvoir cette école.

La seconde remarque porte sur le thème de la culture et de la sécurité civile. Pour avoir abordé ce sujet plus explicitement dans le contexte du projet de loi de finances de 2008, je m’en tiendrai, comme convenu, à une simple remarque.

La loi du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile a imposé une obligation claire de formation scolaire à la prévention des risques et aux missions des services de secours.

Madame le ministre, vous connaissez mon attachement au principe de cette formation scolaire. Je dois constater, quatre ans après le vote de la loi précitée, que l’application de l’obligation scolaire n’est toujours pas effective dans l’ensemble des établissements scolaires du territoire national.

Vous allez me dire qu’elle dépend de la bonne volonté et de l’engagement des acteurs locaux des secours et de l’éducation nationale. Pourtant, il me semble urgent, madame le ministre, de rendre effective cette obligation au plus vite, en particulier dans les établissements scolaires situés dans des bassins à risques.

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, ces observations formulées, je vous indique que la commission des lois a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits de la mission « Sécurité civile » pour 2009.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé pour cette discussion à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose et à trois minutes celui dont dispose la réunion des sénateurs n’appartenant à aucun groupe.

Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec le budget de la sécurité civile, nous sommes dans un cas d’école de délestage de l’État au détriment des collectivités locales. Ce n’est pas un fait nouveau, mais, cette année, cela prend une ampleur accrue en raison du contexte général très défavorable aux finances des collectivités territoriales.

Il y a beau temps que je dénonce les risques du double pilotage de la sécurité civile en France : l’État édicte et impose des normes ; elles ne sont pas toujours pertinentes.

Madame le rapporteur pour avis, j’ai été intéressé, lors d’une visite à vos côtés dans un établissement prestigieux de Paris, d’apprendre que les vêtements en tissu ignifugé, dont nous avons doté à grand prix nos sapeurs-pompiers, ne sont guère plus protecteurs, voire quelquefois moins – ils présentent des inconvénients soulignés par les professionnels –, que les vêtements en cuir qu’ils portaient auparavant. Si ce nouvel équipement a été imposé, c’est parce que les États-Unis l’avaient adopté, et ce sous la pression du lobby textile. M. le président de la commission était témoin.

Il y a là matière à réflexion pour notre État et pour les institutions européennes. Il y a surtout matière à trouver un moyen pour que les avis des élus soient pris en compte, notamment sur le rapport efficacité-coût des mesures proposées, en particulier des nouvelles normes.

Concernant le budget de cette année, l’augmentation de 1, 66 % des crédits alloués à la mission me semble largement en trompe-l’œil. Je remarque d’abord qu’elle est nettement inférieure à l’inflation, qui est l’ordre de 3 %.

Ensuite, les exigences de nos concitoyens, notamment en termes de secours aux personnes, sont quasi-exponentielles : c’est là une évolution qui n’avait pas du tout été prévue lors de la départementalisation des SDIS et qui grève lourdement les budgets des collectivités pour une mission dont on peut difficilement dire qu’elle ne soit pas d’intérêt national.

Enfin, la modicité de la part de l’État, 420 millions d’euros sur les 4, 2 milliards d’euros des dépenses des SDIS en 2007, fait que cette part est dix fois plus importante pour les SDIS que pour l’État. Il est vrai que l’on peut ajouter à la part de l’État les financements relatifs aux sapeurs-pompiers de Paris, aux marins-pompiers et les crédits d’autres ministères.

Mais le résultat est là et la part des collectivités dans ce financement a augmenté de 50 % depuis 2000.

On sait à quoi est due cette situation : la croissance incontrôlée du secours à personne, qui représente désormais 65 % des interventions.

Avec 8 % des sorties consacrées au feu, voire moins de 2 % affectés aux incendies d’immeubles, les « soldats du feu » portent de moins en moins bien leur qualificatif, et sont de plus en plus des auxiliaires de santé qui devraient être de plus en plus financés par la sécurité sociale.

Il est, de ce point de vue, tout à fait satisfaisant de constater que le travail de la commission quadripartite mise en place au début de l’année a été très positif pour fixer les responsabilités de chacun et reconnaître les services de la sécurité civile comme maillon indispensable de la chaîne sanitaire. En clair, si les SDIS n’existaient pas dans nombre de départements, les SAMU ne pourraient pas fonctionner.

Mais, dans le même temps, le montant versé par les établissements de santé au titre du défaut de disponibilité des transporteurs sanitaires privés reste fixé à 105 euros, sans revalorisation, et est très inférieur à ce que touchent les ambulanciers privés.

Par ailleurs, l’indemnisation des SDIS par les hôpitaux pour les interventions médicales d’urgence à domicile appelle un financement adapté, qui n’est toujours pas établi. Je le répète, si l’adoption d’un référentiel de l’organisation des secours, qui permet d’assurer une sécurité accrue de nos concitoyens, est satisfaisante, l’œuvre ne sera achevée que lorsque les collectivités territoriales seront justement indemnisées pour cette tâche d’intérêt national.

Je passe sur le désengagement de l’État concernant les investissements. Certes, le montant ne décroît pas, mais, depuis deux ans, le FAI est essentiellement orienté vers les investissements du réseau de transmission ANTARES, et les montants annuels des dotations en autorisations de programme ne cessent de diminuer, pour ne plus représenter aujourd’hui que le tiers du montant initial.

Je terminerai cette courte intervention en évoquant une situation pour le moins incongrue, qui a connu des évolutions récentes et que le Gouvernement ne manquera pas de corriger dans les meilleurs délais ; je veux parler des règles applicables à l’administration comme aux entreprises pour l’emploi des travailleurs handicapés.

Dans le public comme dans le privé, obligation est faite, on le sait, d’employer 6 % de personnes handicapées. Il se trouve que les SDIS sont soumis à cette mesure, alors même que les pompiers doivent être aptes à l’exercice physique. Si l’on voulait transférer l’obligation d’emploi de ces personnes handicapées sur les seuls services administratifs et techniques, on atteindrait des pourcentages peu raisonnables, soit, pour le SDIS de mon département, près de 40 % de l’effectif desdits services.

Pour le secteur privé, un certain nombre de professions sont exclues du calcul de l’effectif assujetti : une trentaine de métiers sont concernés, tels les maçons qualifiés, les ambulanciers, les couvreurs qualifiés et les pompiers. Pourquoi les pompiers professionnels employés par les SDIS ne bénéficient-ils pas d’une telle dérogation ? Voilà une anomalie à corriger le plus rapidement possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, je veux dire d’emblée que je m’associe aux hommages qui ont été très légitimement rendus à toutes ces femmes et tous ces hommes qui assument des missions de sécurité civile tant sur notre territoire qu’à l’extérieur.

Bien que la sécurité civile soit une mission régalienne de l’État, son budget reste modeste. Il l’est d’autant plus si on le compare avec l’ensemble de la mission « Sécurité », qui s’élève à 16, 6 milliards d’euros, ou encore avec le budget des SDIS, qui est de 4, 2 milliards d’euros. Il est regrettable que la présente mission occulte l’effort financier consenti par les collectivités territoriales en la matière, elles qui prennent en charge une part beaucoup plus importante que l’État dans les missions de secours, donc des dépenses qui en découlent.

Loin de le reconnaître, vous préférez stigmatiser les collectivités territoriales et les SDIS, qui dépenseraient trop par rapport à l’État, lequel serait vertueux et maîtriserait ses dépenses.

Depuis 2001, date de l’achèvement de la départementalisation, les dépenses des SDIS ont augmenté de 45, 8 %, alors que le nombre de leurs interventions a crû de 8, 4 %. Ainsi, le budget primitif des SDIS a dépassé 5 milliards d’euros en 2007. Ce montant représente une hausse de 20 % par rapport au compte administratif pour 2006 et une hausse cumulée de près de 40 % par rapport à celui pour 2004.

N’est-ce pas là la conséquence de la loi du 3 mai 1996 relative aux services d’incendie et de secours et de la loi du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, qui a entraîné une mise à niveau des SDIS, dont l’impact financier se fait ressentir depuis ?

N’est-ce pas dû au désengagement de l’État, qui se décharge de ses compétences sur les collectivités territoriales sans en assumer la compensation à un niveau suffisant ?

L’État a le devoir d’assurer ses missions régaliennes de sécurité civile sur tout le territoire et de manière équitable. Il s’agit là d’une question d’égalité des citoyens devant le service public.

Alors que le Gouvernement prône la pause dans les dépenses publiques et vante les bienfaits de la RGPP, le tout dans un contexte de crise financière et économique, les dépenses des SDIS vous apparaissent alors comme une provocation. Mais les SDIS ne comblent-ils pas les insuffisances de l’État, qui ont été relevées dans le rapport spécial de M. Ginesta ou encore dans le rapport pour avis de Mme Troendle ?

Pour réaliser des économies, vous évoquez le regroupement des casernes, des SDIS, voire des centres de formation. Mais qui dit regroupements, dit fermetures, lesquelles ne sont pas sans nous rappeler les fermetures de casernes militaires, de tribunaux ou encore d’hôpitaux de proximité, le tout bien entendu dans la perspective d’engager la réforme des territoires que le Gouvernement prépare et qui ne présage rien de bon pour l’avenir.

Si une large majorité des actions des SDIS – 65 % d’entre elles – concerne le secours à la victime et l’aide à la personne hors cas d’incendie, cette tendance est certainement plus à mettre sur le compte de l’insuffisance de la présence médicale dans certains secteurs de France, singulièrement ruraux, que sur celui d’appels abusifs. Cette situation est plus la conséquence de la réforme de la permanence des soins qui amène les populations, singulièrement en milieu rural où la démographie médicale est en chute libre, à appeler systématiquement les services de secours d’urgence. Il est à craindre que cette situation ne perdure, et ce malgré votre projet de « référentiel commun », qui vient d’être rejeté par la Conférence nationale des services d’incendie et de secours.

Concernant le Fonds d’aide à l’investissement, créé par la loi de finances de 2003 afin de soutenir les SDIS dans leurs efforts d’investissements en matière d’équipements et de matériels, il sera doté, pour 2009, de 24, 4 millions d’euros en autorisations d’engagement. Prenant prétexte de la faible consommation des crédits de ce fonds, de la libération tardive des montants perçus, de l’absence de transparence et du saupoudrage des crédits, le Gouvernement diminue progressivement, année après année, l’enveloppe prévue en sa faveur.

Cette situation démontre, là encore, non seulement le désengagement de l’État en matière de sécurité civile, mais également sa volonté de reprendre ses deniers pour maîtriser la dépense publique.

Par ailleurs, au regard de la situation de la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris, dont Mme Troendle, qui s’est rendue sur place, dresse un tableau assez noir dans son rapport pour avis, …

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

… que comptez-vous faire, madame le ministre ?

Je ne peux pas terminer mon propos sans évoquer la situation des sapeurs-pompiers volontaires, qui représentent près de 80 % des effectifs de sapeurs-pompiers, mais dont le nombre ne cesse de baisser depuis 2004, alors que celui de leurs interventions augmente.

À cet égard, il conviendrait de conforter le volontariat, en poursuivant notamment les efforts sur le statut, la formation et la disponibilité.

À la lumière de ces observations, les sénateurs du groupe CRC-SPG voteront contre ce budget qui ne permettra toujours pas de répondre aux enjeux fixés en matière de sécurité civile ni aux attentes de la population, laquelle reste pourtant très attachée à un service public gratuit et de qualité.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le rapporteur spécial, madame le rapporteur pour avis, mes chers collègues, comme mes autres collègues, je ne dispose que de cinq minutes pour parler d’un budget dont la discussion ne doit pas occuper notre assemblée plus d’une heure. Dans ces conditions, vous me permettrez d’être direct et d’aborder les quelques sujets qui me paraissent importants à traiter pour éviter que notre système de sécurité civile ne dérape ou ne se grippe.

Dans le projet de loi de finances pour 2009, l’État supporte 415 millions d’euros au titre de la mission « Sécurité civile ». Si l’on y ajoute la BSPP, le BMPM, le bataillon de marins-pompiers de Marseille– cher à notre président de séance ! –, et les crédits d’autres ministères, nous arrivons à un total de 1, 365 milliard d’euros, à comparer aux 5, 3 milliards d’euros dépensés par les SDIS.

Le rapport des dépenses entre la mission première « Sécurité civile » et celle des SDIS est donc de un à dix. Pourtant, l’État n’a toujours pas véritablement intégré la nécessité de reconnaître les exécutifs des SDIS comme des partenaires majeurs.

Je me permettrai de vous préciser l’état d’esprit des présidents de conseils généraux et des présidents de conseil d’administration des SDIS et d’exposer leur conception de la gouvernance de leur établissement public, qui doit reposer sur des relations de bonne intelligence entre l’État et les représentants des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires.

Madame le ministre, vous avez dû avoir quelques échos de notre dernière conférence nationale des services d’incendie et de secours, au cours de laquelle sa composante « élus » s’est largement exprimée pour préciser avec force que la méthode utilisée devait être remise à plat.

Dans cette partition à trois mains – SDIS, État et sapeurs-pompiers –, il faut garder à l’esprit que les élus occupent une place à part entière, surtout dans un système d’essence démocratique. En tant que premiers financeurs au travers de leur collectivité de rattachement, ils doivent avoir la main pour décider ; ils n’accepteront plus de se la voir forcer.

Je puis malheureusement vous donner quelques exemples de ce qu’il ne faudra plus faire.

Il ne faudra plus lancer l’idée d’un texte réglementaire revalorisant la fonction de sapeur-pompier volontaire avec un impact financier important – 60 millions d’euros, selon les premières estimations de l’époque – sans qu’il y ait eu d’échanges prospectifs et techniques avec les élus.

Il ne faudra plus rendre, à la veille de l’été, des arbitrages confidentiels sur les contingents communaux augmentant la pression sur les finances départementales. Le Premier ministre a tranché la question sans aucune information des présidents de SDIS.

Il ne faudra plus non plus négocier des référentiels relatifs au secours à personnes sans engager le moindre échange avec ceux qui auront à en assumer le financement, lequel ne peut qu’exploser en raison de la désertification médicale et des carences des SAMU.

Il faudra stopper la prolifération des textes statutaires et des normes. À titre d’exemple, le fait de changer la norme fixée pour les gants entraîne un coût de 3 millions d’euros.

Il faudra fournir des études d’impact financier des mesures envisagées avant de mettre les arrêtés à la signature.

II ne faudra pas réfléchir dans le secret des cabinets sur la création de « généraux civils ». Si certains ont à l’esprit une telle mesure, celle-ci ne passera pas ! Nous ne connaissons que trop les glissements pyramidaux et leur impact financier. Si l’État veut nommer des généraux, qu’il les finance !

Les commissions de sécurité, totalement indépendantes du fonctionnement des SDIS, qui sont sous l’entière responsabilité de l’État pour leur gestion, mais sont financées à 100 % par les collectivités, doivent être prises en charge par l’État. Le SDIS paie et l’État dispose !

Le FAI doit devenir transparent. Actuellement, ses moyens fondent comme neige au soleil, probablement sous l’effet du réchauffement de la planète ! Le prétexte avancé par l’État d’une mauvaise utilisation de ce fonds par les collectivités n’est pas intellectuellement honnête. Nous ne pouvons appliquer la règle qui nous impose d’utiliser ces crédits sur l’année d’attribution, puisque les contraintes des marchés publics font que les achats ne peuvent se solder pendant cette même année.

Nous vivons également l’anomalie d’un service bicéphale, exception française : les élus financent et gèrent, tandis que l’État prend la main dès que les pompiers deviennent opérationnels hors de leur caserne.

Pour un esprit cartésien, à l’heure de la RGPP, le système en vertu duquel celui qui gère n’est pas celui qui utilise doit être revu.

Acceptez, madame le ministre, d’examiner au fond le problème de la dualité, afin de voir s’il est possible de le clarifier. Sur plus de 3 millions de sorties, savez-vous combien de fois les préfets ou maires ont pris la tête des opérations hors leur très rare présence en tant que spectateur ? À mon avis, ce doit être de l’ordre de un pour cent mille, voire de un pour un million.

L’État doit faire des choix !

Il doit choisir son interlocuteur direct : l’employeur ou l’employé. Actuellement, l’État s’adresse à l’employeur après avoir négocié les réformes envisagées avec les employés. Transférer ce mode opératoire dans les collectivités n’est pas imaginable. Le patron d’une collectivité est l’élu, c'est-à-dire le maire, par exemple, et non le directeur des services. L’État doit accepter que celui qui paie commande et décide.

Dans la mesure où la loi nous a confié la responsabilité des services départementaux d’incendie et de secours, nous avons besoin que l’État nous communique des expertises et des analyses de prospective susceptibles de nous permettre d’anticiper l’évolution des métiers liés à la sécurité civile.

II faut que la direction de la sécurité civile joue auprès des élus des SDIS le rôle qu’elle jouait auprès de l’État avant la départementalisation. La problématique « pompiers » doit être traitée transversalement au niveau de l’État, afin d’éviter les effets collatéraux des dispositions de portée générale, à l’instar de la NBI, la nouvelle bonification indiciaire, dont les conséquences ont été très sensibles sur nos finances.

Bien entendu, si l’État considère qu’il doit garder la main – à la limite, pourquoi pas ? –, alors que les élus ont consenti des efforts considérables pour remettre les SDIS à niveau en dix ans – les chiffres sont éloquents –, ceux-ci sont prêts à confier à l’État la responsabilité pleine et entière des SDIS : financement, gestion et mode opérationnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

C’est le cas à Paris : l’État assume cette responsabilité, et dans des conditions exemplaires ! Je me permets de rappeler que les sapeurs-pompiers de Paris sont des militaires.

Comme vous pouvez le constater, madame le ministre, je vous ai indiqué très directement l’état de nos réflexions.

Quoi qu’il en soit, je voterai les crédits de la mission « Sécurité civile ». Il se peut d’ailleurs que ceux-ci soient portés à 5 milliards d’euros dans le projet de loi de finances pour 2010 si l’État décide de reprendre à sa charge la totalité de cette mission, que d’autres assument actuellement pour lui, sans en tenir véritablement les rennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

M. Éric Doligé. En tant que ministre chargée des collectivités territoriales, vous connaissez nos contraintes budgétaires, ainsi que l’impact des décisions de l’État sur nos finances, madame le ministre. Aussi aimerions-nous ne pas être soumis à des pressions financières insupportables au niveau des SDIS. Nous vous laissons le choix, madame le ministre.

Applaudissements sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Monsieur le président, madame le rapporteur pour avis, monsieur le rapporteur spécial, mesdames, messieurs les sénateurs, les menaces qui pèsent sur la sécurité de nos concitoyens sont aujourd’hui globales, protéiformes et multiples. C’est la raison pour laquelle nous abordons en même temps les questions de la sécurité et de la protection civile.

Les forces de sécurité civile ont pour mission de protéger les Français en tout temps, en tout lieu, contre tous les risques, qu’ils soient quotidiens ou exceptionnels, naturels ou industriels.

Il est de ma responsabilité de moderniser les forces de sécurité civile pour qu’elles répondent aux nouvelles formes de menaces. C’est ma première priorité !

Le projet de budget de la mission « Sécurité civile » repose sur deux exigences : répondre aux préconisations du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale et mieux coordonner les moyens de secours.

Le Livre blanc place en effet la sécurité civile au cœur de la nouvelle stratégie nationale de sécurité, exactement au même titre que la sécurité intérieure. C’est pourquoi je me réjouis de la convergence temporelle de l’examen des projets de budget de ces deux missions.

Néanmoins, vous n’êtes pas sans savoir, mesdames, messieurs les sénateurs, que je n’ai pas attendu le Livre blanc pour réorganiser les services du ministère de l’intérieur selon cette vision prospective. Ainsi que je vous l’avais annoncé l’an dernier, j’ai créé une délégation à la prospective et à la stratégie au sein du ministère, pour renforcer nos capacités d’anticipation et d’adaptation face à l’évolution des grands enjeux nationaux et internationaux, de l’état des menaces et des vulnérabilités.

J’ai bien compris, monsieur Doligé, que vous souhaitiez participer à la réflexion menée sur ces points. Je suis évidemment favorable à ce que les rapports de cette délégation concernant la sécurité civile puissent vous être remis. C’est une bonne façon de travailler et de réfléchir ensemble sur les besoins.

Par ailleurs, la direction de la planification de sécurité nationale, que j’ai également créée auprès du secrétaire général, aura pour mission d’élaborer, d’actualiser et de suivre les plans qui relèvent de ma responsabilité directe. Outre la planification de défense civile, la sécurité des systèmes d’information et l’intelligence économique, cette nouvelle direction animera aussi le réseau des préfets de zone dans l’exercice de leur mission de défense civile.

Les préfets de zone ne se déplacent pas, au quotidien, sur tous les incidents, mais ils jouent pleinement leur rôle dans les événements majeurs. Nous avons pu encore le constater récemment, lorsque des inondations ont frappé le sud-est de la France, ou, l’été dernier, quand une tornade a touché le département du Nord.

De plus, un centre interministériel de crise sera mis en place à la fin de l’été 2009 dans les locaux mêmes du ministère, place Beauvau. Il pourra accueillir en permanence toutes les composantes interministérielles concernées et les plus hautes autorités de l’État en cas de catastrophe nationale majeure.

Le projet de budget pour 2009 donne les moyens opérationnels et immobiliers nécessaires pour poursuivre la mission de protection des Français dans le cadre de la responsabilité de l’État.

S’agissant, en premier lieu, des moyens opérationnels, vous n’êtes pas sans connaître, mesdames, messieurs les sénateurs, le risque NRBC, qui peut provenir soit d’attentats terroristes, soit de catastrophes industrielles.

Deux avancées portent spécifiquement sur ce risque NRBC.

D’une part, des moyens de protection contre cette menace doivent être acquis et mis à la disposition des SDIS. Les capacités de décontamination seront triplées jusqu’à deux cents chaînes, de façon à répondre à un événement qui concernerait un grand nombre de personnes ou à plusieurs événements qui se produiraient simultanément en plusieurs endroits sur le territoire national. De la même façon, un parc de seize « véhicules » de détection, de prélèvement et d’identification biologique et chimique sera constitué. Il est évident que de tels investissements doivent être réalisés au niveau de l’État.

D’autre part, les équipements des services opérationnels de la direction de la sécurité civile, la DSC, – les formations militaires et le service du déminage en matière de lutte contre la menace NRBC – seront renforcés.

Face à cette menace nouvelle, à laquelle nous ne songions pas voilà encore quelques années, nous devons faire preuve d’anticipation et nous tenir prêts à agir.

Au-delà de la menace NRBC, d’autres moyens d’intervention, plus classiques, seront confortés. Ainsi, les transports héliportés d’urgence seront renforcés avec l’acquisition de deux hélicoptères EC-145 et d’un hélicoptère EC-225 pour la Martinique et La Réunion, ainsi que de deux hélicoptères Dauphin pour la Polynésie Française, de façon à accompagner l’outre-mer qui, de par son isolement, a davantage besoin de notre soutien pour accompagner le désengagement de certaines forces militaires.

En matière de lutte contre les feux de forêt, les flottes de camions-citernes de l’Unité d’instruction et d’intervention de la sécurité civile seront progressivement renouvelées et dimensionnées aux différents terrains d’emploi ; je pense notamment à la Corse. Il faut, à chaque fois, avoir des retours d’expérience, afin d’adapter au mieux nos moyens.

S’agissant des moyens immobiliers, les efforts de réhabilitation et de sécurisation des infrastructures immobilières de la direction de la sécurité civile seront poursuivis.

Cinq opérations de mise aux normes et de sécurisation des sites de stockage des munitions récupérées avant destruction sont prévues à Caen, Vimy, Suippes, Laon et Bordeaux. Le bâtiment d’hébergement de l’Unité d’instruction et d’intervention de la sécurité civile de Nogent-le-Rotrou sera, quant à lui, restructuré.

Ma seconde priorité consiste à mieux coordonner les moyens de secours relevant de la politique interministérielle de sécurité civile.

La loi de modernisation de la sécurité civile de 2004 charge l’État de garantir la cohérence de la sécurité civile sur le plan national, d’en définir la doctrine et d’en coordonner les moyens.

Il ne s’agit pas ici de nier ou de minimiser le rôle joué par les SDIS, pas plus que l’effort financier qu’ils accomplissent. Mais, que je sache, le Parlement n’a pas à se prononcer sur les budgets des SDIS !

J’ai d’ailleurs entendu un certain nombre d’inexactitudes. Madame Assassi, je n’ai jamais envisagé la fermeture de casernes de sapeurs-pompiers, d’autant que ces décisions relèvent de la compétence des conseils généraux… Quand on examine un projet de budget, il faut se concentrer sur les éléments qu’il contient ! Je vous ai également entendue dire, madame la sénatrice, que la Conférence nationale des services d’incendie et de secours, la CNIS, aurait désapprouvé le rapport. C’est faux : il a été approuvé ! Un arrêté ministériel doit être soumis à la CNIS en février 2009. Vous devriez veiller à ne pas énoncer des contre-vérités.

Revenons-en aux moyens de secours relevant de la politique interministérielle. De nouvelles interventions structurantes sont prévues par le projet de budget pour 2009.

Tout d’abord, une action de modernisation de l’alerte aux populations sera menée sur cinq ans. Bien entendu, les sirènes seront conservées, mais les systèmes d’alerte seront modernisés, notamment grâce aux téléphones portables, aux ordinateurs de poche ou encore aux panneaux urbains électroniques d’information, qui constituent des moyens rapides et efficaces d’alerte en cas de crise.

De la même façon, pour la prévention et l’alerte des aléas marins, et en particulier des tsunamis – même s’il est moins important chez nous que dans d’autres régions du globe, le risque de tsunami existe également sur nos côtes –, un Centre régional d’alerte aux tsunamis pour l’atlantique nord-est et la méditerranée occidentale, le CRATANEM, sera créé et connecté au système rénové d’alerte des populations.

Enfin, la migration de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris vers l’infrastructure nationale partagée de transmission ANTARES renforcera l’interopérabilité de cette unité avec l’ensemble des SDIS de France. Ainsi, 25 % des pompiers utilisent déjà ce réseau numérique partagé avec les forces de sécurité. Son infrastructure, financée par l’État, remplace progressivement les réseaux des départements.

Madame Troendle, je partage l’attention que vous portez à la BSPP. Je souhaite rappeler que, compte tenu des fortes sollicitations que connaît cette unité, des efforts de rattrapage importants ont été consentis dans le cadre du plan de modernisation : 750 militaires ont été recrutés, dont 20 officiers et 144 sous-officiers.

Au-delà, et pour répondre à des préoccupations exprimées sur toutes les travées de cette assemblée, j’ai décidé de créer une commission « Ambition volontariat ». Le volontariat est en effet au cœur du dispositif de sécurité civile, puisque trois interventions sur cinq sont assurées par des volontaires.

Les mesures du plan d’action en faveur de la disponibilité des volontaires commencent à porter leurs fruits : 8 000 conventions ont été signées avec les employeurs des volontaires et 2 millions d’euros de crédit d’impôt ont été affectés par l’État à l’application de la loi relative au mécénat. Ces conventions sont importantes et j’ai d’ailleurs veillé à ce que le ministère de l’intérieur, à l’instar du ministère de la défense, d’autres ministères et de grands organismes publics comme La Poste, y participent également.

Cette commission conduira également une réflexion pragmatique et prospective pour encourager et consolider le volontariat dont nous avons absolument besoin.

C’est aussi une meilleure coordination qui doit nous permettre de gagner en rationalisation et en performance : des outils de pilotage ont été mis en œuvre par l’État au titre de la loi de finances pour 2007. Ils commencent aujourd’hui à porter également leurs fruits. Ainsi, les élus locaux ont pu ramener l’an dernier à 2 % la progression des budgets des SDIS. L’augmentation des dépenses devient donc plus raisonnable, d’autant que des efforts très importants ont été accomplis en la matière dans les années précédentes.

Soyez assurés, mesdames, messieurs les sénateurs, que l’État, quant à lui, assumera ses responsabilités financières, au moyen du fonds d’aide à l’investissement des SDIS, de la prestation fidélisation-reconnaissance, du régime d’indemnisation des sapeurs-pompiers et de la participation au financement de l’ENSOSP.

Au-delà du domaine financier, l’État assumera également ses responsabilités « en nature », par un certain nombre de moyens nationaux, la prise en charge des renforts interdépartementaux, qui jouent un grand rôle en cas de catastrophe exceptionnelle, les crédits des autres programmes ministériels.

Je voudrais souligner que les crédits de la mission ne traduisent que partiellement l’engagement de l’État. Si l’on intègre l’apport de la participation des autres ministères, l’engagement de l’État s’élève à plus de 972 millions d’euros. Et si l’on inclut la BSPP et la Brigade des marins-pompiers de Marseille, nous arrivons même à 1, 365 milliard d’euros.

S’agissant plus particulièrement du FAI, je rappelle qu’aux crédits inscrits s’ajoutent ceux qui sont consacrés à la réalisation de l’infrastructure ANTARES.

En outre, en pérennisant les contingents communaux, comme nous venons de le faire, c’est le lien entre les SDIS et les collectivités territoriales, en particulier les communes, qui se trouve réaffirmé.

Je comprends que l’évolution du financement des SDIS soit une préoccupation. Je rappelle simplement à ceux qui l’auraient oublié que l’État ne doit compenser que les seuls crédits qu’il consacrait à une mission au moment où celle-ci est décentralisée. C’est la règle constitutionnelle ! Il est vrai que, le plus souvent, des événements futurs ou la volonté de perfectionnement des départements, que je salue, font que des dépenses supplémentaires sont engagées. Mais la compensation du transfert est assurée à l’euro près.

L’État souhaite accompagner la rationalisation engagée en permettant, justement, que l’évolution du financement des SDIS ne soit pas supérieure à l’inflation.

Je veux rassurer M. Doligé, que je félicite de sa brillante réélection à la présidence de la Conférence nationale des services d’incendie et de secours : l’État entend donner un nouveau souffle au dialogue, indispensable, qui a été engagé avec les élus départementaux en 2004. C’est pourquoi j’ai souhaité que tout projet réglementaire ou normatif soit étudié le plus en amont possible de son application. Cela relève d’ailleurs de la compétence de la Commission consultative d’évaluation des normes.

Mme Troendle a évoqué les difficultés que rencontrent les SDIS pour atteindre le taux d’emploi légal de 6 % de travailleurs handicapés. J’ai demandé à mon collègue chargé de la fonction publique d’examiner les conditions dans lesquelles l’exonération applicable aux entreprises privées soumises aux mêmes contraintes pourrait être étendue aux SDIS.

Par ailleurs, une réflexion globale portant sur la déclinaison du fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans les trois fonctions publiques est en cours.

S’agissant de l’ENSOSP, j’indiquerai à M. Haut et à Mme Troendle que la première phase d’installation de l’école sera bien achevée à la fin de 2009, conformément au calendrier retenu. Le cadre budgétaire sera respecté, ce qui nous permettra même d’acquérir l’emprise foncière supplémentaire nécessaire à la seconde phase prévue par le contrat d’établissement.

Enfin, madame Troendle, vous estimez que la culture de sécurité civile est insuffisamment diffusée auprès des élèves. Je puis vous assurer que mes services sont pleinement mobilisés à cet égard. Outre leur rôle d’expert auprès du ministère de l’éducation nationale, ils participent à des actions de sensibilisation à l’occasion de rencontres nationales, telles que le salon Kidexpo, le salon des maires et des collectivités locales ou les journées de la sécurité intérieure, ou locales, par exemple la sensibilisation de 8 500 élèves par le SDIS du Haut-Rhin. Ces actions ont suscité un grand intérêt, notamment chez les jeunes. En outre, de nouveaux outils pédagogiques apparaîtront au premier semestre de 2009 : la revue Risques et Savoirs et un DVD ludo-pédagogique.

J’ai bien noté votre souhait que les actions de sensibilisation s’adressent plus spécifiquement aux départements ou aux localités à risques. Votre observation est tout à fait judicieuse, et je ne manquerai pas de lui faire donner une traduction concrète.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur spécial, madame le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de budget pour 2009 vise à renforcer nos capacités de réponse à des risques toujours plus nombreux, diversifiés et globaux, et de garantir, en tout temps et en tout lieu, la qualité des secours en permettant l’intégration de tous les acteurs dans la chaîne de sécurité civile, pour une plus grande efficacité. Nous pourrons ainsi accomplir notre mission fondamentale au service des Français : protéger la vie de nos concitoyens, secourir les plus fragiles d’entre eux.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Madame le ministre, je vous remercie des précisions que vous nous avez apportées.

La crise économique et financière à laquelle nous devons faire face évoluera certainement en une crise sociale. Dans ce contexte, les budgets sont extrêmement contraints. Néanmoins, il n’est pas question de restreindre les moyens mis à la disposition des sapeurs-pompiers.

Cela étant, ainsi que me l’a confié le président du conseil d’administration d’un SDIS, les très nombreux textes réglementaires qui ont été pris ou qui le seront prochainement se traduisent tous, immanquablement, par des dépenses supplémentaires. À tout le moins, je souhaiterais que soit observée une pause en la matière, car nous ne pouvons continuer ainsi. Je me permets d’insister sur ce point, madame le ministre.

Dans cet esprit, je salue la décision que vous avez prise s’agissant du projet de décret sur lequel j’avais attiré votre attention, mais je voudrais pouvoir être certain qu’il ne ressortira pas d’un tiroir dans les prochaines semaines. Je fais confiance à la Conférence nationale des services d’incendie et de secours : prenons garde de trop réglementer ! En effet, les innovations sont incessantes. Ainsi, récemment, il était question d’imposer un nouveau type de chaussures. Je suis convaincu que les conseils d’administration des SDIS font le maximum, mais il arrive un moment où il faut savoir se modérer.

S’agissant maintenant des personnes handicapées, il n’est pas aisé d’en recruter au sein des SDIS. Cependant, il est fréquent que, parvenus à un certain âge, les sapeurs-pompiers éprouvent des difficultés à s’acquitter de leurs missions. Il convient alors de leur attribuer des fonctions plus adaptées à leur état de santé et à leur condition physique. Dès lors, ne serait-il pas possible – pour le coup, je demande un texte normatif, madame le ministre ! – de considérer qu’un certain nombre de sapeurs-pompiers « seniors » souffrent d’une forme de handicap au regard de la profession qu’ils exercent ? Les SDIS continuent à les rémunérer, mais leurs capacités physiques ne sont plus tout à fait ce qu’elles ont été.

Je voudrais qu’il en soit tenu compte. Hier, notre collègue Michel Mercier indiquait que le SDIS du Rhône, dont il préside le conseil d’administration, devait acquitter une somme de plus de 1 million d’euros, faute d’employer un nombre suffisant de salariés handicapés. Faisons là aussi preuve de modération ! J’estime qu’il faut prendre en compte, dans le calcul des cotisations appelées à ce titre, le fait qu’un certain nombre de sapeurs-pompiers éprouvent des difficultés à exercer leurs missions.

Enfin, je crains que, à l’avenir, les coûts de fonctionnement de l’ENSOSP ne se révèlent élevés. Or, immanquablement, il reviendra aux SDIS de les supporter. Là encore, madame le ministre, je forme le souhait que la gestion de cette école soit parfaitement maîtrisée.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Sécurité civile » figurant à l’état B.

En euros

Sécurité civile

Intervention des services opérationnels

Dont titre 2

Coordination des moyens de secours

Dont titre 2

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.

Je mets aux voix les crédits de la mission.

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Sécurité civile ».

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures quinze.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quinze heures quinze, sous la présidence de M. Roger Romani.