Intervention de Jean-Claude Peyronnet

Réunion du 2 décembre 2008 à 9h30
Loi de finances pour 2009 — Sécurité civile

Photo de Jean-Claude PeyronnetJean-Claude Peyronnet :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec le budget de la sécurité civile, nous sommes dans un cas d’école de délestage de l’État au détriment des collectivités locales. Ce n’est pas un fait nouveau, mais, cette année, cela prend une ampleur accrue en raison du contexte général très défavorable aux finances des collectivités territoriales.

Il y a beau temps que je dénonce les risques du double pilotage de la sécurité civile en France : l’État édicte et impose des normes ; elles ne sont pas toujours pertinentes.

Madame le rapporteur pour avis, j’ai été intéressé, lors d’une visite à vos côtés dans un établissement prestigieux de Paris, d’apprendre que les vêtements en tissu ignifugé, dont nous avons doté à grand prix nos sapeurs-pompiers, ne sont guère plus protecteurs, voire quelquefois moins – ils présentent des inconvénients soulignés par les professionnels –, que les vêtements en cuir qu’ils portaient auparavant. Si ce nouvel équipement a été imposé, c’est parce que les États-Unis l’avaient adopté, et ce sous la pression du lobby textile. M. le président de la commission était témoin.

Il y a là matière à réflexion pour notre État et pour les institutions européennes. Il y a surtout matière à trouver un moyen pour que les avis des élus soient pris en compte, notamment sur le rapport efficacité-coût des mesures proposées, en particulier des nouvelles normes.

Concernant le budget de cette année, l’augmentation de 1, 66 % des crédits alloués à la mission me semble largement en trompe-l’œil. Je remarque d’abord qu’elle est nettement inférieure à l’inflation, qui est l’ordre de 3 %.

Ensuite, les exigences de nos concitoyens, notamment en termes de secours aux personnes, sont quasi-exponentielles : c’est là une évolution qui n’avait pas du tout été prévue lors de la départementalisation des SDIS et qui grève lourdement les budgets des collectivités pour une mission dont on peut difficilement dire qu’elle ne soit pas d’intérêt national.

Enfin, la modicité de la part de l’État, 420 millions d’euros sur les 4, 2 milliards d’euros des dépenses des SDIS en 2007, fait que cette part est dix fois plus importante pour les SDIS que pour l’État. Il est vrai que l’on peut ajouter à la part de l’État les financements relatifs aux sapeurs-pompiers de Paris, aux marins-pompiers et les crédits d’autres ministères.

Mais le résultat est là et la part des collectivités dans ce financement a augmenté de 50 % depuis 2000.

On sait à quoi est due cette situation : la croissance incontrôlée du secours à personne, qui représente désormais 65 % des interventions.

Avec 8 % des sorties consacrées au feu, voire moins de 2 % affectés aux incendies d’immeubles, les « soldats du feu » portent de moins en moins bien leur qualificatif, et sont de plus en plus des auxiliaires de santé qui devraient être de plus en plus financés par la sécurité sociale.

Il est, de ce point de vue, tout à fait satisfaisant de constater que le travail de la commission quadripartite mise en place au début de l’année a été très positif pour fixer les responsabilités de chacun et reconnaître les services de la sécurité civile comme maillon indispensable de la chaîne sanitaire. En clair, si les SDIS n’existaient pas dans nombre de départements, les SAMU ne pourraient pas fonctionner.

Mais, dans le même temps, le montant versé par les établissements de santé au titre du défaut de disponibilité des transporteurs sanitaires privés reste fixé à 105 euros, sans revalorisation, et est très inférieur à ce que touchent les ambulanciers privés.

Par ailleurs, l’indemnisation des SDIS par les hôpitaux pour les interventions médicales d’urgence à domicile appelle un financement adapté, qui n’est toujours pas établi. Je le répète, si l’adoption d’un référentiel de l’organisation des secours, qui permet d’assurer une sécurité accrue de nos concitoyens, est satisfaisante, l’œuvre ne sera achevée que lorsque les collectivités territoriales seront justement indemnisées pour cette tâche d’intérêt national.

Je passe sur le désengagement de l’État concernant les investissements. Certes, le montant ne décroît pas, mais, depuis deux ans, le FAI est essentiellement orienté vers les investissements du réseau de transmission ANTARES, et les montants annuels des dotations en autorisations de programme ne cessent de diminuer, pour ne plus représenter aujourd’hui que le tiers du montant initial.

Je terminerai cette courte intervention en évoquant une situation pour le moins incongrue, qui a connu des évolutions récentes et que le Gouvernement ne manquera pas de corriger dans les meilleurs délais ; je veux parler des règles applicables à l’administration comme aux entreprises pour l’emploi des travailleurs handicapés.

Dans le public comme dans le privé, obligation est faite, on le sait, d’employer 6 % de personnes handicapées. Il se trouve que les SDIS sont soumis à cette mesure, alors même que les pompiers doivent être aptes à l’exercice physique. Si l’on voulait transférer l’obligation d’emploi de ces personnes handicapées sur les seuls services administratifs et techniques, on atteindrait des pourcentages peu raisonnables, soit, pour le SDIS de mon département, près de 40 % de l’effectif desdits services.

Pour le secteur privé, un certain nombre de professions sont exclues du calcul de l’effectif assujetti : une trentaine de métiers sont concernés, tels les maçons qualifiés, les ambulanciers, les couvreurs qualifiés et les pompiers. Pourquoi les pompiers professionnels employés par les SDIS ne bénéficient-ils pas d’une telle dérogation ? Voilà une anomalie à corriger le plus rapidement possible.

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