Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le vote des crédits de la mission « Outre-mer » est l’occasion, chaque année, de rappeler que l’outre-mer est non pas un boulet pour la France, mais bien un atout précieux, en raison de sa diversité culturelle, de ses potentiels en termes de ressources naturelles, de son environnement géographique et des possibilités qu’il offre sur le plan des échanges et des relations géostratégiques.
Monsieur le secrétaire d'État, dès votre prise de fonction, vous vous êtes attelé avec efficacité aux dossiers en cours, et la tâche n’était pas aisée, notamment la préparation du projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer, la question du chlordécone ou encore les mesures d’urgence nécessitées par la crise financière actuelle, dont les effets pourraient être encore plus dévastateurs dans nos contrées qu’en métropole.
À périmètre constant, les autorisations d’engagement de la mission « Outre-mer », d’un montant de 1, 97 milliard d’euros, progressent de 19, 2 %, tandis que les crédits de paiement, d’un montant de 1, 88 milliard d’euros, progressent quant à eux de 16 % par rapport à 2008. Cet effort est appréciable, même si, ici ou là, quelques interrogations subsistent.
Avant de m’intéresser plus avant aux programmes composant cette mission, je ferai quelques remarques d’ordre général.
D’une part, je suis conscient que ce budget ne représente pas l’effort financier global de l’État en faveur de l’outre-mer, mais qu’il n’en retrace qu’une petite partie. Cet effort global, qui se monte à 13, 4 milliards d’euros, est considérable, même s’il a tendance à stagner.
Toutefois, si l’on prend en compte les 3, 3 milliards d’euros consacrés, en 2009, aux exonérations fiscales, cet effort financier global augmente de 6 %, ce qui est appréciable dans le contexte financier actuel.
D’autre part, on ne peut que prendre acte de la volonté de rationalisation qui s’est manifestée à travers la révision générale des politiques publiques. Celle-ci a conduit à la mise en place de la délégation générale à l’outre-mer, dont on ne peut qu’espérer qu’elle ne compromettra pas l’efficacité de l’action de l’État, compte tenu des enjeux majeurs de la période qui s’ouvre.
J’en viens maintenant à la mission « Outre-mer » proprement dite.
Tout d’abord, les ajustements réguliers de périmètre, si judicieux et nécessaires soient-ils, rendent toujours plus difficiles l’étude et l’appréciation de l’évolution de l’ensemble des crédits consacrés à cette mission.
Nous espérons que ce périmètre finira par se stabiliser, ce qui facilitera la tâche des uns et des autres.
J’en viens maintenant aux détails des programmes composant la mission « Outre-mer ».
Tout d’abord, le programme « Emploi outre-mer », qui représente la plus grosse part des crédits alloués à cette mission, soit 63, 40 %, connaît une hausse de 19, 42 % en crédits de paiement et de 20, 26 % en autorisations d’engagement. Je m’en félicite.
Il convient de noter que les crédits de l’action « Soutien aux entreprises » de ce programme enregistrent une forte hausse, de 21, 1 %.
Soulignons également la nouvelle ligne de crédits destinés à soutenir le fret. Cet effort budgétaire important montre que le Gouvernement est décidé à aider les entreprises, afin que celles-ci puissent créer des emplois.
Si ces avancées sont tout à fait notables, en revanche certaines questions se posent en matière d’exonérations de charges sociales, monsieur le secrétaire d'État, notamment à cause de l’article 65 du projet de loi de finances, qui est rattaché à la mission « Outre-mer ».
Comme d’autres intervenants avant moi, je regrette que cet article soit discuté avant l’examen du projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer, qui se trouve sur le bureau du Sénat depuis le 28 juillet dernier !
C'est pourquoi je soumettrai deux amendements à notre assemblée, l’un visant à conditionner l’application des dispositions de cet article à l’entrée en vigueur de la future loi, l’autre tendant à prendre en compte l’existence de zones franches urbaines outre-mer.
Monsieur le secrétaire d'État, je voudrais également vous faire part de nos interrogations sur les conséquences prévisibles que les dates butoirs et les paliers prévus par l’article 65 en matière d’exonérations de charges sociales entraîneront sur l’emploi qualifié.
Nous souhaitons tous que se développent dans nos régions des entreprises à forte valeur ajoutée, notamment dans les secteurs de l’environnement et des nouvelles technologies. Espérons donc que l’impact de cet article sur l’emploi qualifié ne sera pas négatif !
J’en viens à un sujet vital pour les petits entrepreneurs ultramarins. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner, ceux-ci bénéficiaient jusqu’à présent de la défiscalisation dite « en interne », qui leur permettait d’autofinancer leurs investissements et d’assurer leur trésorerie par le refinancement de leurs créances sur l’État.
Or, en l’état actuel du projet de loi de finances pour 2009, cette disposition semble remise en cause. Monsieur le secrétaire d'État, comptez-vous rétablir la situation antérieure, au bénéfice de ces petites entreprises ?
En ce qui concerne l’action n° 2 « Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle », nous constatons également une augmentation des crédits de paiement, de l’ordre de 8, 74%. Je me réjouis de cette hausse, qui sert essentiellement à financer le SMA, le service militaire adapté. En effet, ce dispositif a rencontré un véritable succès, comme le soulignait à l’instant Mme Lucette Michaux-Chevry, et il mérite d’être développé.
Pour autant, les autres aides à la qualification ou à la formation me semblent nettement en deçà des énormes besoins en la matière.
Monsieur le secrétaire d'État, je m’interrogeais tout à l’heure sur l’application du RSA outre-mer, mais votre collègue Martin Hirsch m’a rassuré, en soulignant, d'une part, que la taxe de 1, 1 % ne serait pas prélevée outre-mer tant que le RSA n’y serait pas en vigueur, et, d'autre part, que le dispositif du RSA s’appliquerait outre-mer dès que les départements y seraient prêts.
J’en viens maintenant au programme « Conditions de vie outre-mer ». Celui-ci représente 39, 51 % des crédits de la mission et connaît une hausse substantielle, dont il convient de se réjouir. Au sein de ce programme, mon propos va cibler trois actions en particulier.
Tout d’abord, j’évoquerai l’action « Logement ». Même si les crédits ici ont légèrement augmenté, je regrette que les dotations prévues ne puissent « éponger » entièrement la dette de l’État envers les bailleurs sociaux. Mes chers collègues, nous devons conforter la situation financière de ces derniers – j’y insiste – si nous voulons qu’ils réalisent les importants programmes de construction de logements sociaux qui leur incombent et qui induisent d’importants effets positifs sur le bâtiment et sur l’emploi.
De même, à la suite de Mme Anne-Marie Payet, j’aimerais attirer l’attention sur la nécessaire réactualisation des paramètres retenus pour le financement du logement social. Monsieur le secrétaire d'État, où en est ce dossier ? Ces paramètres étant figés depuis un certain temps, une action résolue s’impose à cet égard, me semble-t-il, afin de favoriser la réalisation de ces programmes de construction que nous attendons tous.
Ensuite, je veux insister sur l’action permettant la création du Fonds exceptionnel d’investissement. Le principe, monsieur le secrétaire d'État, en est tout à fait excellent, et je vous en félicite. Mais encore faut-il y mettre les moyens ! Seuls 16 millions d’euros en crédits de paiement et 40 millions d’euros en autorisations d’engagement sont alloués pour 2009, ce qui est bien peu.
Je me demande d'ailleurs si nous ne devrons pas procéder en cours d’année à certains arbitrages pour abonder cette ligne budgétaire, car, compte tenu des besoins énormes de l’outre-mer, la demande sera sans doute extrêmement forte. Avez-vous d'ores et déjà quelques idées sur cette question, monsieur le secrétaire d'État ?
Enfin, j’évoquerai l’action « Continuité territoriale ». Ses crédits n’ont pas évolué de façon très positive alors que, vous le savez comme moi, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, nos compatriotes de l’outre-mer sont très attachés au principe fondamental de la continuité territoriale, qui assure le lien entre tous les citoyens.
À l’évidence, les crédits sont insuffisants quand on sait combien le passeport mobilité et les actions menées dans le cadre du projet initiative jeune, qui rencontre d'ailleurs un grand succès, sont essentiels, pour les étudiants comme pour les jeunes en parcours d’insertion.
À propos, monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous éclairer sur l’état d’avancement du dossier des tarifs aériens low cost pour les vols longs courriers, au sujet desquels, je le sais, vous menez des discussions ? Les résultats de ces négociations sont-ils favorables ? Sommes-nous proches de la fin du quasi-monopole d’Air France ?
Ne serait-il pas judicieux d’envisager la mise en place de « tarifs résidents », qui, comme ce fut le cas entre la Corse et le continent, entraîneraient une baisse substantielle des tarifs entre l’outre-mer et la métropole ?
Enfin, monsieur le secrétaire d'État, quelles actions avez-vous entreprises pour traiter le problème de la pollution des sols par le chlordécone, qui est toujours d’actualité ? Vous savez combien cette question est importante pour l’image de l’outre-mer, et singulièrement de la Guadeloupe et de la Martinique.
Pour conclure, monsieur le secrétaire d'État, faire de l’outre mer un pôle d’excellence et de croissance économique est une mission difficile, mais pas impossible !
C’est en tout cas la tâche que vous vous êtes fixée, et j’ai envie de vous encourager. Pour cela, le mieux serait sans doute de voter votre budget