Séance en hémicycle du 2 décembre 2008 à 15h15

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • RSA
  • handicapée
  • logement
  • l’outre-mer
  • outre-mer

La séance

Source

La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quinze heures quinze, sous la présidence de M. Roger Romani.

Photo de Roger Romani

La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2009, adopté par l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » (et articles 74, 75, 76 et 76 bis).

La parole est à M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Auguste Cazalet

Monsieur le président, mesdames les secrétaires d'État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, les autorisations d’engagement et les crédits de paiement de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » représentent près de 11, 2 milliards d’euros, répartis en cinq programmes de poids très différents.

En effet, le plus petit programme de la mission, intitulé « Égalité entre les hommes et les femmes », mobilise 29, 2 millions d’euros de crédits, alors que le programme « Handicap et dépendance » est doté de plus de 8, 6 milliards d’euros.

L’architecture de cette mission a évolué entre 2008 et 2009. Deux changements doivent être relevés.

Tout d'abord, le programme « Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables » est transféré vers la mission « Ville et logement ».

Ensuite, le programme « Protection maladie » se trouve désormais rattaché à la mission « Santé ».

Ainsi, la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » perd largement son caractère interministériel. Elle est placée sous la responsabilité du ministre chargé du travail, même si le programme consacré à la mise en œuvre du revenu de solidarité active, ou RSA, relève du Premier ministre et du haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.

Par ailleurs, le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » constitue le support de plusieurs missions, en particulier de la mission « Santé ».

C’est un programme « à part », qui rassemble la quasi-totalité des crédits de personnel. Il mobilise plus de 1 milliard d’euros, dont moins de 119 millions d'euros toutefois concourent à des actions propres à ce programme, le reste des fonds s’apparentant à des crédits de soutien à d’autres programmes.

On constate une dynamique des dépenses très différente suivant les programmes considérés. En particulier, on observe, entre les programmes « Actions en faveur des familles vulnérables » et « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales », un rééquilibrage qui s’explique par le remplacement de l’allocation de parent isolé, ou API, par le RSA.

Des priorités budgétaires apparaissent également, comme l’allocation aux adultes handicapés, ou AAH, qui fera l’objet d’une revalorisation de 25 % en cinq ans, ainsi que l’a annoncé le Président de la République. En contrepartie, nous notons une stagnation ou une diminution de crédits jugés moins essentiels.

Je voudrais enfin indiquer que les crédits budgétaires ne donnent pas une vision exhaustive de cette mission. En effet, les dépenses fiscales qui contribuent à titre principal aux actions menées dans le cadre de ces programmes sont de même ampleur que les crédits budgétaires ; elles devraient atteindre 11, 8 milliards d’euros en 2009.

Mes chers collègues, je vais à présent céder la parole à M. Albéric de Montgolfier, qui analysera les différents programmes de cette mission.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Monsieur le président, mesdames les secrétaires d'État, monsieur le haut-commissaire, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, je souhaiterais formuler quelques remarques concernant les différents programmes.

Le programme « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales », tout d'abord, mobilise 582, 4 millions d’euros. Il sert désormais essentiellement à financer la contribution de l’État au financement du RSA « chapeau », ainsi que notre collège Éric Doligé l’avait indiqué lors de la présentation du projet de loi généralisant le RSA et réformant les politiques d’insertion.

Cette contribution passe par une dotation au Fonds national des solidarités actives, qui est fixée à 555 millions d’euros en 2009. Elle est supérieure aux besoins prévus au cours de cet exercice, mais elle s’intègre dans une perspective d’équilibre pluriannuel, sur trois ans, de ce fonds.

A contrario, les crédits en faveur du Fonds d’innovation et d’expérimentation sociale sont réduits de 5 millions d’euros pour 2009, ce qui apparaît d’autant plus justifié que le projet annuel de performances reste lacunaire quant à l’intérêt des actions menées dans ce cadre.

En contrepoint, on observe une diminution des crédits du programme « Actions en faveur des familles vulnérables », qui supporte essentiellement le financement de l’allocation de parent isolé. En effet, comme vous le savez, mes chers collègues, celle-ci sera remplacée à compter du 1er juin 2009 par le RSA. Je souhaite néanmoins, madame la secrétaire d'État, que vous justifiiez davantage les hypothèses d’évolution du nombre de bénéficiaires retenues pour 2009.

Par ailleurs, des besoins de financement complémentaires sont apparus en 2007 et en 2008, les crédits inscrits en loi de finances initiale s’étant révélés insuffisants.

J’observe que le projet de loi de finances rectificative prévoit l’ouverture de 36, 5 millions d’euros de crédits au titre de l’API, ce qui permettra de couvrir les dettes de 2007 mais ne devrait pas suffire à satisfaire l’ensemble des besoins. Je souhaite que vous nous précisiez ce point, madame la secrétaire d'État.

En outre, le présent projet de loi de finances comporte une rationalisation de certaines dépenses, comme celles dites « de soutien à la parentalité ».

Enfin, l’entrée en vigueur de la loi portant réforme de la protection juridique des majeurs permettra d’alléger les dépenses supportées par l’État au titre des tutelles et curatelles, et cela de près de 55 millions d’euros par rapport à la tendance des dépenses avant la réforme. Je note que le collectif budgétaire prévoit l’ouverture de 5, 5 millions d’euros de crédits au titre des tutelles et curatelles, ce qui devrait permettre d’apurer les dettes de l’État.

Le programme « Handicap et dépendance » est de loin le plus lourd de la mission, puisque l’allocation aux adultes handicapés représente, à elle seule, 5, 8 milliards d’euros. Dans le cadre de ce projet de budget, un effort significatif est consenti, découlant du plan de revalorisation de 25 % de l’AAH sur cinq ans, annoncé par le Président de la République. Ce sont ainsi 114, 6 millions d’euros supplémentaires qui sont inscrits pour financer les deux revalorisations prévues au cours de l’exercice 2009.

Si les crédits prévus pour 2009 semblent correctement évalués, je souhaiterais, madame la secrétaire d'État, que vous précisiez les mesures concrètes permettant de réaliser certaines économies qui sont intégrées dans les prévisions de dépenses. Le projet annuel de performances indique qu’elles découleront « d’actions de meilleure gestion » de l’AAH, mais je souhaite que vous nous apportiez des informations complémentaires et chiffrées.

Cet aspect est d’autant plus important que nous avons régulièrement relevé des dérapages au cours des dernières années. L’exercice 2008 n’échappe d’ailleurs pas à ce constat, puisque les besoins complémentaires s’élèvent, selon les données transmises par vos services, à 148, 5 millions d’euros.

J’observe toutefois que le projet de loi de finances rectificative pour 2008 prévoit l’ouverture de 236 millions d’euros de crédits supplémentaires au titre de l’AAH, ce qui devrait permettre, je l'espère, d’assainir la situation.

Le programme « Égalité entre les hommes et les femmes » est de loin le plus faible de la mission, puisqu’il représente 29, 2 millions d’euros de crédits. La commission des finances s’est souvent interrogée sur l’efficacité et la valeur ajoutée de certaines dépenses, compte tenu de la faiblesse des sommes prévues au regard non seulement des enjeux, mais également des moyens engagés par d’autres acteurs : je pense, en particulier, à la Caisse nationale d’allocations familiales, la CNAF.

En tout état de cause, les crédits d’intervention connaîtront en 2009 une diminution qui affectera l’ensemble des actions menées, même si les principales associations d’envergure nationale verront leurs subventions maintenues.

Quant au programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales », je voudrais souligner que l’année 2009 sera marquée par une baisse du plafond d’emplois allant au-delà de la simple compensation d’un départ à la retraite sur deux. Cela traduit, d'une part, le transfert d’un certain nombre d’emplois aux conseils généraux, et, d'autre part, des efforts de gestion dont il convient de se féliciter.

En conclusion, mesdames les secrétaires d'État, monsieur le haut-commissaire, je souhaite saluer l’effort budgétaire qui a été réalisé en faveur des handicapés, au travers de la revalorisation de l’AAH, et des travailleurs les plus pauvres, grâce au RSA.

Mes chers collègues, sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances vous propose d’adopter les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » pour 2009.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Blanc

Monsieur le président, mesdames les secrétaires d'État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, le périmètre de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » a été sensiblement modifié, puisque, à la suite du transfert de deux programmes vers d’autres missions, elle ne comporte plus que cinq programmes au lieu de sept.

Cela étant, à périmètre constant, les crédits pour 2009 augmentent de 6 % par rapport à 2008, pour atteindre 11, 2 milliards d’euros, auxquels s’ajoutent 11, 8 milliards d’euros d’exonérations ou de déductions fiscales accordées aux familles modestes, aux personnes âgées ou aux handicapés.

Cette progression permettra la mise en œuvre de plusieurs réformes : la généralisation du RSA, la réforme des tutelles, la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés et le pacte national pour l’emploi des personnes handicapées.

Le principal objet du programme « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales » est, bien sûr, la mise en œuvre du RSA, ce dernier devant être généralisé au second semestre de 2009.

En ajoutant le produit de la nouvelle taxe de 1, 1 % sur les revenus du capital, celui du plafonnement des niches fiscales et la dotation de l’État au Fonds national des solidarités actives, le FNSA, ce sont plus de 2 milliards d’euros qui seront injectés dans l’économie dès le 1er juin, contribuant ainsi à la politique de relance souhaitée par le Président de la République.

Cette action s’accompagnera de la poursuite des expérimentations du RSA et de la création d’un fonds d’expérimentations en faveur de l’insertion professionnelle des jeunes les plus défavorisés, doté, dès 2008, de 10 millions d’euros, puis de 4 millions d’euros en 2009 et en 2010. La commission des affaires sociales est bien sûr favorable à la création de ce fonds et aimerait connaître plus précisément le contenu des actions au profit des jeunes qu’il financera.

J’en viens aux crédits consacrés aux familles vulnérables. Ils sont en forte baisse, ce qui est logique, puisque l’allocation de parent isolé disparaîtra au profit du RSA à compter du 1er juin 2009, mais aussi parce que la mise en œuvre de la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs permettra de contenir l’augmentation du nombre de mesures de protection, due au vieillissement de la population.

La commission des affaires sociales s’interroge, en revanche, sur les raisons qui ont conduit le Gouvernement à réduire les crédits consacrés à l’accompagnement des familles. Elle demande que les actions menées dans ce domaine soient mieux évaluées et fassent l’objet de recommandations pour 2010.

S’agissant de la politique en faveur du handicap, qui me tient particulièrement à cœur, le bilan est contrasté.

Ce projet de budget permet de tenir les engagements pris par le Président de la République lors de la conférence nationale du handicap du 10 juin dernier : revalorisation de l’AAH de 25 % en cinq ans et création de 50 000 places en établissements d’ici à 2012, ainsi que plusieurs mesures incitatives en faveur de l’activité des personnes handicapées.

La commission des affaires sociales soutient, bien évidemment, la double démarche tendant à favoriser l’emploi des personnes handicapées qui sont en mesure de travailler et à garantir la dignité de celles qui sont durablement éloignées de l’emploi.

J’éprouve néanmoins plusieurs inquiétudes ou regrets.

Je regrette que la nouvelle participation du fonds « fonction publique » au financement du réseau Cap emploi se traduise, dans le même temps, par la diminution de la contribution de l’AGEFIPH, l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des handicapés. À propos de ce fonds « fonction publique », nous avons eu, monsieur le président de la commission des finances, un débat fort intéressant hier, qui doit se poursuivre au sujet de la formation professionnelle.

J’ai des inquiétudes en ce qui concerne la prestation de compensation du handicap, la PCH, dont le modeste succès me conduit à suggérer, d’une part, que la contribution versée à chaque département par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, soit modulée en fonction de la dépense constatée, certains conseils généraux ayant pratiquement épuisé leurs provisions budgétaires, et, d’autre part, que la PCH intègre une part forfaitaire pour mieux prendre en compte les aides ménagères.

Un autre sujet d’inquiétude tient aux dysfonctionnements des maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH.

Leurs effectifs et la formation du personnel sont insuffisants pour traiter, dans des délais raisonnables, l’ensemble des demandes. Il est, je crois, nécessaire de simplifier les procédures et d’envisager une évolution du statut de ces maisons, ainsi que de celui des personnels mis à disposition par l’État, qui bénéficient encore d’un droit d’option préjudiciable à la qualité du service.

Enfin, la commission des affaires sociales déplore que, pour la deuxième année consécutive, aucun crédit ne soit versé au fonds interministériel pour l’accessibilité aux personnes handicapées, alors que l’échéance de 2015 est désormais très proche.

J’évoquerai en quelques mots les mesures en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes, dont la présentation budgétaire me paraît trop dispersée pour être facilement compréhensible. Pourquoi ne pas regrouper certains crédits dans l’action « Égalité professionnelle », ce qui serait plus lisible ?

Je souligne, au passage, les actions remarquables menées en faveur de la lutte contre les violences faites aux femmes, qui, grâce aux crédits prévus, pourront fort heureusement être poursuivies en 2009.

Marques de scepticisme sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Blanc

Je terminerai par le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales », qui regroupe les moyens humains et matériels des administrations de la santé et du secteur médicosocial, dont l’organisation devrait être profondément bouleversée du fait de la révision générale des politiques publiques et de la prochaine mise en place des agences régionales de santé, les fameuses ARS. Je signale au passage que nous aurions aimé voir apparaître le terme « médicosocial » dans leur dénomination.

De nombreuses associations ont manifesté leur inquiétude, selon moi avec juste raison, sur les conséquences de cette restructuration pour le secteur médicosocial.

À ce titre, plusieurs points méritent notre vigilance.

Tout d’abord, les conditions d’application du principe de fongibilité asymétrique devront garantir une préservation des places en établissements sociaux et médicosociaux.

Ensuite, le passage à une logique d’appels à projets ne doit pas se traduire par des contraintes trop lourdes pour les associations qui gèrent ces établissements et qui font la richesse de ce secteur.

Par ailleurs, il faudra veiller à l’équilibre des instances chargées de piloter les ARS, qui devront inclure des représentants du secteur médicosocial.

Enfin, le principe de convergence tarifaire devra être appliqué aux établissements et services médicosociaux, ce par analogie avec les mesures qui ont été prises dans ce domaine pour les établissements de santé.

Sous réserve de ces observations, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de cette mission et aux articles 74 à 76 bis, qui lui sont rattachés.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je rappelle également qu’en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de trente minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Christiane Demontès.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Monsieur le président, mesdames les secrétaires d'État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, cela a déjà été dit à cette tribune, notamment par des orateurs de mon groupe, lors de l’examen des crédits d’autres missions : le contexte dans lequel s’inscrit ce projet de loi de finances, plus spécifiquement cette mission, est marqué par une crise sociale et économique qui ne cesse de s’aggraver.

Nous devons bien garder à l’esprit que la croissance française a commencé à faiblir dès la fin de l’année 2007. Malgré cela, le Gouvernement et sa majorité ont préféré accentuer la déréglementation, la précarisation des services publics, la remise en cause des acquis sociaux et se priver de toute marge de manœuvre en finançant le bouclier fiscal plutôt qu’un indispensable bouclier social.

Le bilan de cette politique est sans appel : aggravation de la crise financière, accélération de l’inflation, forte dégradation des investissements des entreprises, déficit de la balance commerciale de plus de 6, 2 milliards d’euros…

De fait, les derniers moteurs de l’activité ont été purement et simplement étouffés et, avec une dette publique qui pourrait atteindre 70 % du PIB en 2010, tout espoir d’un rebond rapide est désormais malheureusement à écarter.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

M. Alain Vasselle. Vous ne parlez pas de l’effet désastreux des 35 heures !

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Ça suffit, avec les 35 heures ! C’est de la provocation, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Seule Mme Demontès a la parole, mes chers collègues !

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Mme Christiane Demontès. Monsieur Vasselle, heureusement que les RTT existent ! En effet, dans le département dont je suis élue, toutes les entreprises vont fermer entre Noël et le jour de l’An : elles demandent à leurs salariés de prendre leurs jours de RTT. Alors merci aux 35 heures, monsieur Vasselle !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

M. Alain Vasselle. Il ne faut pas s’étonner que les entreprises françaises perdent de la compétitivité !

Nouvelles protestations sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Monsieur Vasselle, laissez Mme Demontès s’exprimer !

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Vous savez bien que ce n’est pas vrai, monsieur Vasselle !

Le ralentissement de l’activité, ou plutôt son effondrement, pèse sur le marché de l’emploi. Depuis le mois de mai, le nombre de demandeurs d’emploi augmente. Au mois d’octobre, plus de 45 000 salariés ont perdu leur emploi. Pas un jour ne passe sans que soient annoncées de nouvelles fermetures d’entreprises. Aux licenciements massifs des grandes entreprises s’ajoute la cohorte impressionnante des fermetures d’entreprises, TPE ou PME. Désormais, plus de 2 millions de nos concitoyens sont à la recherche d’un emploi. Ce chiffre atteint 2, 42 millions sur la base de l’ancienne définition. D’ici à la fin de l’année, le taux de chômage dépassera à nouveau 7, 5 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Je regrette, d’ailleurs, que M. Éric Woerth, ministre chargé du budget, ne soit pas là : il avait affirmé, lors de son audition par la commission des affaires sociales, que le chômage ne cessait de refluer et que le nombre des demandeurs d’emploi était bien inférieur à ce qu’il était voilà trois ans. Certes ! Cependant, aujourd’hui, malheureusement, la situation se dégrade.

Dans cette situation, la droite, qui, hier, vouait aux gémonies la réglementation et la puissance publique comme autant de freins à la liberté, à la croissance, à la création d’emplois, découvre que la toute-puissante logique du marché mène à la catastrophe.

Le politique redevient un acteur central, et c’est tant mieux. Dès lors, cette mission, notamment son volet relatif à l’insertion, prend encore plus d’importance. L’insertion devient, plus que jamais, un impératif de premier plan.

Concernant la forme, l’architecture de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » a été redéfinie cette année : l’insertion procède in fine d’une vision duale de la société.

En effet, deux catégories distinctes sont mises en lumière : les personnes en situation de reprendre un emploi rapidement – elles relèvent de la mission « Travail et emploi », qui a été examinée hier – et les autres.

Bien loin de permettre la mise en œuvre d’une politique d’insertion, nécessairement transversale, ce projet de budget occulte toute dimension autre que celle qui est directement liée à l’emploi.

Or, nous le savons bien, et la loi d’orientation relative à la lutte contre les exclusions en était une parfaite illustration, œuvrer pour l’insertion nécessite le concours de divers secteurs.

Ainsi, comment parler d’insertion sans prendre en compte la question du logement, notamment social ? Comment avoir une analyse globale de l’insertion quand le programme « Accès et retour à l’emploi », qui perd plus de 300 millions d’euros de crédits cette année, se trouve rattaché à la mission « Travail et emploi » ? Il en va de même de la formation, qui, comme chacun le sait, est un facteur déterminant de l’insertion.

À ce propos, je me permets d’ouvrir une parenthèse : qu’est-il advenu du projet de loi relatif à la formation professionnelle, dont Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, nous avait annoncé en début d’année, lors du débat sur la fusion entre l’ANPE et les ASSEDIC, qu’il serait soumis au Parlement à l’automne 2008 ? Il n’apparaît pas dans notre programme de travail pour les prochains mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Pour illustrer mon propos, je soulignerai que l’action 2 de la mission, intitulée « Autres expériences en matière sociale et d’économie sociale », ne représente que 1, 7 % des crédits du programme 304 « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales », consacrés à plus de 98 % au seul RSA.

En lieu et place d’une politique d’insertion, le Gouvernement nous propose un projet de budget centré sur le RSA. Dans ces conditions, parler d’insertion apparaît comme trompeur ou, pour le moins, restrictif.

Les crédits de paiement inscrits au titre du RSA dans le programme 304 dépassent 555 millions d’euros. Or, quand nous procédons à une lecture transversale, nous constatons que ce montant résulte de l’absorption d’autres dispositifs, notamment l’API.

Qui plus est, les crédits consacrés à la prime pour l’emploi sont ramenés à 500 millions d’euros. Si l’on ajoute qu’une économie de 150 millions d’euros est réalisée au titre de l’exonération de la taxe d’habitation et de la redevance télévisuelle, l’augmentation des crédits qualifiée d’« exceptionnelle » par M. le ministre du budget devient au mieux résiduelle, pour ne pas dire virtuelle.

Par ailleurs, monsieur le haut-commissaire, eu égard aux informations parues récemment dans la presse économique, qu’en est-il d’une mise en œuvre du RSA sous forme d’à-valoir dès le 1er janvier prochain ? Le cas échéant, lesquels de nos concitoyens seront concernés en priorité ? Les RMIstes, les allocataires de l’API, les bénéficiaires des allocations logement ? Tous ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Quels seront les critères retenus? Quid du financement, estimé à 300 millions d’euros et qui proviendrait d’un surplus de recettes du prélèvement opéré sur les revenus du patrimoine pour financer le RSA ? Qu’en est-il du versement d’une prime de 100 euros, qui serait, nous dit-on, allouée pendant un semestre à 2 millions ou 3 millions de nos concitoyens ?

Le 25 novembre dernier, contredisant l’annonce par vos soins de la fin des contrats aidés, le Président de la République déclarait que le champ d’application des contrats de transition professionnelle passerait de sept à vingt-cinq bassins d’emploi. Au sein de la mission, nous ne trouvons aucune traduction budgétaire d’une telle disposition, qui relève pourtant directement de la mission d’insertion. Alors, qui en assurera le financement ? La question vaut d’être posée, d’autant que les crédits de l’emploi ont été considérablement diminués.

Au-delà de ces interrogations, qui appellent, bien sûr, des réponses, il apparaît très clairement que le Gouvernement et le chef de l’État, pris de court par la violence de la crise, agissent dans la plus grande précipitation et la plus totale improvisation. Seule certitude, les crédits consacrés à l’insertion, notamment au financement du RSA, seront largement insuffisants pour faire face à la dégradation constante de la situation et au défi que représente pour nous –je sais que vous êtes très sensible à cette réalité, monsieur le haut-commissaire – le fait que 7, 8 millions de personnes, dont 2 millions d’enfants, vivent au-dessous du seuil de pauvreté.

Mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, nous ne sommes pas dupes ! Dans le meilleur des cas, les hausses de crédits annoncées procèdent de redéploiements budgétaires ; dans le pire, vous réalisez des coupes claires dans les budgets, qui plongeront mécaniquement une partie de notre population dans des difficultés plus grandes encore : je pense, notamment, à l’API, mais également à toutes les diminutions, voire suppressions, de subventions à des associations œuvrant dans le secteur de l’insertion. Nous verrons très rapidement les effets néfastes de ces décisions dans nos territoires.

Vous invoquez le pragmatisme pour justifier le revirement de votre politique. Les Français ne sont pas dupes. Ils savent que votre socle idéologique reste intact : désireux de diminuer le coût du travail, vous précarisez sans fin la condition salariale, vous diminuez le pouvoir d’achat des salariés et, in fine, en faites l’unique variable d’ajustement d’une politique libérale aux effets désastreux. Dans ces conditions, parler d’insertion est une supercherie, que nous dénonçons !

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire

C’est un peu fort !

Debut de section - Permalien
Nadine Morano, secrétaire d’État

C’est vraiment fort !

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Demontès

Mme Christiane Demontès. C’est pourquoi nous voterons contre ce projet de budget !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Monsieur le président, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, au sein de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », je me suis tout particulièrement intéressée au programme 137 consacré aux actions publiques en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes. Doté de 29, 3 millions d’euros de crédits, il est le plus modeste de cette mission, d’autant que les crédits d’intervention connaissent une baisse par rapport à 2008.

Toutefois, madame la secrétaire d’État chargée de la solidarité, j’ai été éclairée, dans mon analyse des données chiffrées brutes, d’abord par le rapport public de la Cour des comptes, qui comporte notamment une étude de l’action du service des droits des femmes et de l’égalité, directement rattaché à votre secrétariat d’État, ensuite par votre audition devant la commission des affaires sociales du Sénat.

Cette analyse m’a permis de dégager deux caractéristiques capitales de ce projet de budget : le cadre interministériel et transversal de la politique en faveur des femmes ; le redéploiement des crédits vers les associations « têtes de réseau » et les grandes structures nationales.

À l’évidence, madame la secrétaire d’État, la politique relative aux droits des femmes et à l’égalité entre les hommes et les femmes ne se résume pas aux seuls crédits du programme 137. Vous l’avez vous-même réaffirmé à maintes reprises, celle-ci repose non seulement sur plusieurs départements ministériels, chargés de la santé, du sport, de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur ou de la politique de la ville, mais également sur les collectivités locales, les organismes de sécurité sociale, les partenaires sociaux, les associations et les entreprises.

À mes yeux, deux actions illustrent le caractère interministériel et transversal de la politique en faveur des femmes.

La première est la promotion d’une véritable mixité dans le choix des filières scolaires.

Une convention pour la promotion de l’égalité des chances entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes dans le système éducatif, signée pour la période 2006-2011, vise à associer les efforts de huit ministères.

Cette convention affirme, en premier lieu, la nécessité de développer une approche globale dans l’ensemble de la démarche éducative, notamment dans le cadre de l’orientation et de l’éducation à la citoyenneté.

C’est en effet à l’école, et dès le plus jeune âge, que s’apprend l’égalité entre les sexes. Cet apprentissage de l’égalité entre les garçons et les filles est une condition nécessaire pour que, progressivement, les stéréotypes s’estompent et que d’autres modèles de comportement se construisent.

Fondée sur le respect de l’autre sexe, cette éducation à l’égalité, partie intégrante de l’éducation civique, implique notamment la prévention des comportements et violences sexistes.

La convention affiche, en second lieu, l’objectif ambitieux « de sortir de tout déterminisme sexué de l’orientation ».

Malgré quelques signes d’évolution favorable, filles et garçons continuent à se conformer dans leur orientation, puis dans leur choix de métier, à des schémas socioprofessionnels archaïques : dans les filières littéraires, on compte 80 % de filles ; dans le domaine de la production, les filières sont presque exclusivement masculines.

De même, à niveau égal dans les disciplines scientifiques, les filles ne s’engagent pas autant que les garçons : 64 % des filles avec un très bon niveau en mathématiques en fin de collège sont allées en terminale S, contre 78 % des garçons ayant le même profil.

Cette prévention persistante des filles à l’égard des sciences et techniques les détourne de branches professionnelles porteuses d’emplois et prive la société de ressources indispensables à son développement.

Pour souligner clairement la nécessité d’une modification des comportements, l’un des indicateurs de performance retenu dans le cadre de la LOLF assigne à l’enseignement scolaire un objectif ambitieux : la proportion de jeunes filles dans les classes terminales des séries scientifiques générales et technologiques doit augmenter de 20 % avant 2010. À cette échéance, la proportion de filles dans ces classes doit atteindre 44, 6 %. Au regard de la progression de 2, 6 % enregistrée pour cet indicateur entre 1997 et 2003, on mesure le chemin qui reste à parcourir !

Pouvez-vous nous assurer, madame la secrétaire d’État, que tout sera réellement mis en œuvre pour que cette convention soit suivie d’effet ?

L’information sur la contraception est la seconde illustration que je souhaitais évoquer de la politique volontariste qu’il nous faut mener de façon transversale.

Avec 14, 6 avortements pour 1 000 femmes, la France dépasse largement la moyenne européenne de 11, 2 pour 1 000. Chez les jeunes filles âgées de moins de 18 ans, trois grossesses sur cinq aboutissent à une interruption. On dénombre 11 500 IVG chez les 15-17 ans, soit une hausse de 32 % en quatorze ans. Mais ce sont les femmes âgées de 20 à 24 ans qui, proportionnellement, recourent le plus aux interruptions volontaires de grossesse.

Or, nous le savons, il est possible d’apporter, au moins en partie, une réponse à ce problème en assurant une meilleure communication sur la diversité de l’offre contraceptive et en améliorant l’éducation sexuelle, en particulier celle des jeunes filles, dans le cadre scolaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Cela étant dit, madame la secrétaire d’État, vous avez annoncé la mise en place d’un document de politique transversale en la matière, qui offrira une vision globale des mesures consacrées à ce champ de l’action publique. J’espère qu’il pourra avoir un effet bénéfique. J’ai d’ailleurs bien noté que ce document déterminera des objectifs communs et partagés entre l’ensemble des ministères concernés et que des indicateurs y seront associés.

C’est une initiative que je tiens à saluer, parce qu’elle permettra aux parlementaires que nous sommes d’évaluer correctement l’effort financier global en faveur des femmes, d’une part, et de mesurer l’efficience de la politique publique d’égalité au travers de l’évolution de la situation des femmes dans les principaux domaines où des progrès doivent être accomplis, d’autre part.

Venons-en maintenant à votre décision de concentrer les crédits de ce programme sur les associations « têtes de réseau » et les grandes structures nationales. Cette décision était attendue !

Dans son rapport précité, la Cour des comptes met en exergue, comme le fit avant elle l’Inspection générale des affaires sociales, la dispersion des actions et le saupoudrage des crédits entre de multiples associations. Elle recommande, tout d’abord, la hiérarchisation des actions en fonction des évolutions sociales et la planification de leur mise en œuvre. Elle plaide, ensuite, en faveur de la définition et de l’organisation d’une politique de financement des associations intervenant dans ce domaine par le service des droits des femmes et de l’égalité.

Pour ma part, la remise en cause des subventions « historiques », accordées année après année aux mêmes acteurs, sans réelle évaluation de leur efficacité, et la généralisation de démarches d’objectifs et de moyens effectivement contrôlées me paraissent également essentielles.

Madame la secrétaire d’État, votre projet de budget semble être une réponse à toutes ces observations. Le nombre de subventions accordées pour de faibles montants est fortement réduit. Surtout, la rationalisation des crédits d’intervention, qui privilégie la relation avec les associations « têtes de réseau » et les grandes structures nationales, permet de mettre l’accent sur les priorités en matière d’égalité professionnelle et de lutte contre les violences faites aux femmes.

De plus, lors de vos différentes auditions, vous nous avez précisé que ces mesures s’accompagneraient d’un recours régulier à des conventions pluriannuelles d’objectifs qui, tout en donnant des garanties financières aux associations, sous réserve qu’elles réalisent les actions prévues, prévoient une évaluation de leur intervention.

Par conséquent, madame la secrétaire d'État, le groupe de l’Union centriste se réjouit de votre détermination sur toutes ces questions essentielles. Nous voterons donc les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Monsieur le président, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, en début de semaine dernière, un juge de proximité parisien a condamné l’association « Droit au logement », le DAL, à une peine d’amende de 12 000 euros, au motif que des objets non autorisés auraient été déposés sur la voie publique. Il s’agissait, pour être précis, de 319 tentes, de sacs de couchage et de couvertures destinés à protéger du froid des familles rassemblées pour obtenir un logement.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Cette formidable mobilisation a contraint Mme Boutin, ministre du logement et de la ville, à signer un accord de relogement en faveur des familles concernées.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Vous vous êtes trompée de mission budgétaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

C’est pourquoi la décision de justice que j’évoquais, qui est venue sanctionner une action dont le Gouvernement lui-même reconnaît la légitimité, puisqu’elle a débouché sur un accord de relogement, s’apparente à une véritable sanction politique qui semble constituer, avec celle qui frappe une autre association, « Les enfants de Don Quichotte », une criminalisation du mouvement associatif.

Je demande donc au Gouvernement, comme l’a fait l’un de ses membres ici présents, M. Martin Hirsch, de « passer l’éponge », considérant avec lui qu’il n’était « pas normal » d’infliger une amende à l’association « Droit au logement » pour avoir installé des tentes rue de la Banque.

Mme Gisèle Printz applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Ce propos liminaire n’est pas sans lien avec l’examen des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », qui nous réunit aujourd’hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Je sais bien qu’il existe une mission « Ville et logement », mais personne ici ne doute que la lutte contre la pauvreté appelle une mobilisation bien plus large, qui dépasse le seul champ de ce budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Les associations qui viennent d’être condamnées le disent elles-mêmes, la lutte contre l’exclusion et la pauvreté passe par une politique ambitieuse en matière de santé, de travail, de logement ou encore d’éducation.

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » se résume en fait à trois grands axes : la généralisation du RSA, le handicap et la dépendance, l’égalité entre hommes et femmes, ce dernier programme subissant une sévère réduction de crédits, comme d’ailleurs la quasi-totalité des actions, à l’exception de la généralisation du RSA.

Ainsi, le programme 106, intitulé « Actions en faveur des familles vulnérables », connaît une diminution très importante de ses moyens, à hauteur de 32 % pour ce qui concerne l’action « Accompagnement des familles dans leur rôle de parents ». Autant dire que nous sommes inquiets, particulièrement pour deux sous-actions relevant de cette dernière.

Il s’agit, d'une part, de l’aide à l’apprentissage de l’enfant lorsque les parents, en raison d’accidents de la vie ou d’une rupture conjugale, ont besoin d’un soutien, qu’ils pouvaient jusqu’alors trouver auprès des associations.

Il s’agit, d'autre part, de l’information sur l’IVG dans les établissements scolaires, rendue obligatoire par la loi du 4 juillet 2001 relative à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception.

Quant à l’action « Protection des enfants et des familles », censée permettre de lutter contre la maltraitance des enfants, ses crédits connaissent une baisse légèrement supérieure à 12 %. Cette compétence est partagée avec le ministère de la justice et les départements. C’est à ces derniers, nous le savons, qu’il reviendra de compenser les désengagements successifs de l’État.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Comment ne pas faire le lien entre cette baisse des crédits et l’annonce récente, par Mme la ministre de la justice, de l’autorisation des sanctions à l’encontre des mineurs de plus de douze ans ?

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

On sait pourtant que les violences en appellent d’autres !

En outre, vous diminuez les crédits alloués à quatre des cinq actions du programme 137 « Égalité entre les hommes et les femmes ».

Pourtant, vous en conviendrez, l’objectif visé au travers de ce programme, à savoir promouvoir l’égal accès des femmes et des hommes aux postes à responsabilités tant dans le secteur privé que dans le public, est loin d’avoir été atteint.

Je regrette, par exemple, que les crédits destinés à subventionner les associations intervenant dans ce domaine diminuent. Je déplore également la réduction des crédits alloués à l’action « Égalité professionnelle », dont l’une des finalités est tout de même d’adapter l’offre de formation initiale et de sensibiliser aux situations d’inégalité au travail entre les hommes et les femmes.

Certes, les écarts tendent à se réduire, …

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

… mais la réalité est toujours la même : à travail égal, les femmes sont moins bien rémunérées que les hommes ! De véritables blocages existent même, rendant certains postes de direction inaccessibles aux femmes, soit parce que certains présupposés sexistes persistent, soit parce que l’organisation du travail et des dispositifs de garde d’enfants ne facilite pas la conjugaison de la vie professionnelle et de la vie personnelle.

C’est pourquoi, plutôt que de les restreindre, il aurait fallu au contraire renforcer les crédits de ce programme, en privilégiant la participation des associations.

Par ailleurs, je voudrais vous faire part de mon regret, partagé par mes collègues du groupe CRC-SPG, devant la disparition programmée, au nom des économies budgétaires, du service des droits des femmes et de l’égalité. De la part d’un Gouvernement qui ne compte même pas, en son sein, un secrétariat d’État aux droits des femmes, cette décision apparaît comme un très mauvais signal.

Si l’État lui-même ne montre pas l’exemple et diminue les crédits qu’il accorde à ce programme, on voit mal comment il pourrait se montrer réellement exigeant envers les entreprises publiques et privées en matière d’accession des femmes aux postes à responsabilités, ou encore envers les entreprises et les médias sur la construction d’une autre représentation des femmes, débarrassée des vieux concepts sur lesquels s’édifient les inégalités.

En outre, concernant le sort réservé au programme « Handicap et dépendance », il s’agit certes d’un des rares budgets en hausse. Toutefois, cette progression est à peine supérieure à l’inflation constatée durant l’année 2008. C’est tout à fait insuffisant, notamment pour répondre aux besoins des maisons départementales des personnes handicapées, d’autant que, lors de l’examen de la mission « Travail et emploi », vous avez ponctionné les crédits de l’AGEFIPH à hauteur de 50 millions d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Vous réduisez donc d’autant la participation financière directe de l’État à la rémunération des stagiaires en situation de handicap.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Pour conclure, j’évoquerai la principale action de cette mission : la généralisation du revenu de solidarité active. Sans elle, les crédits de la mission auraient été en très forte baisse.

En décidant de rendre incontournable le RSA, de le généraliser et d’en faire l’axe majeur de votre politique de lutte contre la pauvreté et l’exclusion, vous indiquez clairement qu’il n’y aura pas d’aide de l’État pour ceux qui ne le mériteront pas. Vous entendez en effet conditionner le versement de ces aides à la reprise d’une activité professionnelle par le bénéficiaire.

Au regard de la crise financière, de l’éclatement de la bulle spéculative et des dramatiques conséquences que cela entraîne sur l’emploi, on voit mal comment vous pouvez continuer à tenir un tel discours !

Comment conditionner l’aide de l’État à la reprise d’une activité professionnelle quand le chômage explose, quand on comptera bientôt plus de 2 millions de salariés privés d’emploi et quand le chômage partiel se répand ?

Devant cette situation, vous auriez pu inventer d’autres pistes pour garantir une réelle solidarité. Vous auriez pu supprimer le bouclier fiscal et instaurer un véritable bouclier social.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

En effet, s’il existe, depuis l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République, une forme nouvelle de solidarité, elle s’adresse à ceux qui en ont le moins besoin : les plus riches, les banques ou encore les entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Les pauvres et les personnes en situation précaire, quant à eux, ne peuvent plus compter que sur eux-mêmes et sur un éventuel contrat de travail à temps partiel, parfois de quelques heures, permettant de bénéficier du dispositif que vous instaurez.

Je ne recommencerai pas le débat sur le RSA et sur les raisons de notre opposition à ce mécanisme de subvention à l’emploi précaire, mais, alors que vous réduisez tous les budgets alloués à la solidarité, je ne peux que dénoncer, une nouvelle fois, son mode de financement.

Plutôt que sur les revenus issus de la spéculation, celui-ci reposera sur une taxation assise sur l’épargne, qui sera proportionnelle alors que la justice sociale aurait voulu qu’elle soit progressive afin de solliciter davantage les plus riches, qui peuvent d’ailleurs s’abriter derrière le bouclier fiscal.

Ainsi, l’effort de l’État se réduit en réalité à un seul dispositif : le RSA ! Et encore, vous faites des économies sur les droits connexes, par exemple avec la suppression de l’exonération de taxe d’habitation ou de redevance télévisuelle…

Quant au partage des compétences, il est très favorable à l’État. En effet, ce sont bien les départements qui devront assumer la majeure partie des dépenses de solidarité, l’État se bornant à prendre en charge les rares cas de RSA complémentaire.

C’est pourquoi les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG, considérant que la situation économique actuelle aurait dû susciter une tout autre expression de la solidarité nationale et, par voie de conséquence, un tout autre projet de budget, voteront contre les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

M. Guy Fischer. Les pauvres vont se révolter ! Voici le grand capital !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

M. Alain Vasselle. J’espérais des applaudissements de la part de M. Fischer. Quelle déception…

Nouveaux sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Monsieur le président, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, peut-être vous étonnerez-vous qu’un membre du groupe de l’UMP intervienne dans cette discussion, tant les excellentes contributions des rapporteurs auraient pu suffire à exprimer le point de vue de la majorité du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Cependant, je souhaiterais obtenir des éclaircissements sur certains points de la part des membres du Gouvernement ici présents.

Monsieur le haut-commissaire, je commencerai par vous, qui « pesez », avec la généralisation du RSA, quelque 10 milliard d’euros, ce qui n’est pas rien !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Pour financer cette dépense, vous avez prévu un certain nombre de recettes : 6, 7 milliards d’euros devraient provenir de l’affectation d’une fraction du produit de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP, et 3, 2 milliards d’euros seraient apportés par l’État, via le Fonds national des solidarités actives, dont 1, 5 milliard d’euros au titre de la nouvelle contribution de 1, 1 % sur les revenus du patrimoine, dont vous savez tout le bien que je pense… Le solde devrait être couvert par une dotation financée par redéploiement de la prime pour l’emploi, la PPE, et des dispositifs temporaires d’intéressement.

La question que j’ai posée en commission des affaires sociales est la suivante : le RSA semblant promis au succès, les recettes connaîtront-elles la même dynamique que les dépenses ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Je crois que, dans la conjoncture présente, nous pouvons nous interroger sur ce point, eu égard à la crise financière et, surtout, à l’évolution future du produit de la TIPP. En effet, M. Borloo met tout en œuvre pour faire diminuer la consommation d’énergie, donc celle de fioul et de pétrole, ce qui entraînera immanquablement une réduction du produit de la TIPP.

Par conséquent, les recettes seront-elles suffisantes ? Bien entendu, une solution de facilité serait de décider l’an prochain de relever de 1, 1 % à 1, 5 % ou à 2 % le taux de la contribution assise sur les revenus du patrimoine. J’aimerais, monsieur le haut-commissaire, que vous puissiez nous rassurer sur ce point et nous confirmer que vous n’envisagez nullement de procéder de la sorte.

Ma deuxième question, qui concerne les personnes handicapées, s’adresse à Mme Valérie Létard.

J’ai pris bonne note de l’effort sans précédent que consentira le Gouvernement en actualisant l’allocation aux adultes handicapés de 25 % sur cinq ans, à raison de 5 % par an. Cette décision va dans le bon sens, et nous ne pouvons que nous en réjouir.

Cela étant rappelé, comment le reste à vivre est-il calculé ? Son montant doit représenter quelque 20 % de l’allocation, mais est-il calculé mensuellement ou annuellement ? Qui effectue ce calcul et décide éventuellement de l’atténuation du paiement du forfait journalier dans le cas où le prix de journée est financé par le conseil général ?

Je n’ai pu obtenir de réponse sur ce point en commission et je vous saurais gré, madame la secrétaire d’État, de nous éclairer.

En outre, dans le calcul de ce reste à vivre, intégrez-vous l’aide personnalisée au logement, l’APL, dans les ressources ? Pour décider de l’octroi de la couverture maladie universelle complémentaire, la CMU-C, on prend en compte à la fois les ressources propres du demandeur et l’APL, ce qui aboutit à priver toutes les personnes handicapées et tous les bénéficiaires des minima sociaux de cette prestation. Je voudrais donc savoir s’il en va de même pour le reste à vivre. Prend-on en compte dans le calcul la seule AAH ou y ajoute-t-on l’APL ? Je souhaiterais que vous précisiez les choses à cet égard.

Par ailleurs, s’agissant toujours des handicapés, je relève qu’il est aujourd’hui permis à une personne handicapée physique de cumuler un revenu d’activité et l’AAH, de façon temporaire et dégressive, dans la limite de 104 % du SMIC. Mais qu’en est-il d’une personne handicapée mentale hébergée dans un foyer de vie ou un foyer occupationnel et ne bénéficiant pour toutes ressources que de l’AAH et de la prestation de compensation, parce qu’elle est dans l’incapacité de travailler ? Dispose-t-elle du même pouvoir d’achat que la personne handicapée physique que j’évoquais ? Existe-t-il des études montrant qu’il y a équité de traitement entre ces deux catégories de handicapés ?

Je voudrais également vous interroger, madame Létard, sur les maisons départementales des personnes handicapées.

Il est prévu un abondement complémentaire de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, qui portera son concours annuel aux MDPH à 180 millions d’euros. Madame la secrétaire d’État, vous avez, à plusieurs reprises, dénoncé le fait que nous ne consacrions pas suffisamment de moyens à la formation des éducateurs des établissements accueillant des personnes handicapées. Or si une forme de maltraitance passive sévit aujourd’hui dans bon nombre de structures, cela est souvent dû à l’insuffisance de la formation des intervenants auprès des personnes handicapées.

Dans ces conditions, pourquoi ne pas renforcer les moyens humains et la formation du personnel, plutôt que de consacrer la totalité des crédits non consommés à des opérations d’investissement ou de réhabilitation des établissements d’accueil pour personnes âgées ou pour handicapés ?

La dernière question que je vous adresserai portera sur le financement des foyers de vie et des foyers occupationnels, qui est estimé à 8 milliards d’euros, dont 7, 7 milliards d’euros à la charge de l’ONDAM, l’objectif national des dépenses de l’assurance maladie, et 0, 3 milliard d’euros à la charge de la CNSA.

À quoi correspondent ces différentes dépenses ? Quelle est leur nature ? S’agit-il de dépenses de soins ? Si l’on peut comprendre que l’assurance maladie finance des foyers médicalisés, comment justifier le financement par l’ONDAM des foyers de vie, des foyers d’hébergement ou des foyers occupationnels ? Quelles sont les parts affectées respectivement, dans ces 8 milliards d’euros, à la perte d’autonomie et au financement des établissements pour handicapés, notamment dans le cadre des programmes interdépartementaux d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie, les PRIAC ? J’aimerais obtenir des réponses aussi précises que possible sur ce point.

Enfin, je voudrais poser une question à Mme Morano.

Madame la secrétaire d’État, je vous avais interpellée, lors de votre audition par la commission des affaires sociales, sur la politique du Gouvernement en faveur des adolescents.

Les contrats « petite enfance » que signent les collectivités territoriales, notamment les intercommunalités, avec les caisses d’allocations familiales sont en voie de disparition. De nouveaux contrats vont s’y substituer, couvrant un champ bien plus large que celui de la petite enfance puisqu’ils concerneront les adolescents.

À mon sens, les adolescents constituent, au sein de notre société, la population de jeunes la plus fragile, celle qui doit bénéficier de l’encadrement le plus attentif, de la part tant de la famille, bien entendu, que de l’éducation nationale ou des intervenants sociaux.

Or, hier, au cours d’une réunion de l’exécutif de la communauté de communes que j’ai l’honneur de présider, a été évoquée la signature prochaine avec la CAF de ce nouveau contrat. Il nous a été indiqué que le soutien financier de la CAF serait très nettement inférieur à celui dont bénéficiait le contrat « petite enfance ».

Cela va à l’inverse de ce qu’il faudrait faire ! En effet, il convient d’investir massivement en faveur des jeunes adolescents, afin d’éviter que ceux-ci, comme c’est trop souvent le cas aujourd’hui, ne tombent dans la petite délinquance, ce dont pâtissent nos collectivités.

Tels sont les quelques points, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, sur lesquels je souhaitais obtenir des éclaircissements de votre part. Bien entendu, n’ayez aucune inquiétude quant au soutien du groupe de l’UMP : il vous est acquis d’avance !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Toutefois, ce n’est pas une raison pour ne pas répondre à nos questions !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Marsin

Monsieur le président, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, la pauvreté est un véritable fléau : un nombre de plus en plus important de familles, outre-mer et en métropole, se trouvent en situation de vulnérabilité et de précarité, et plus de 7 millions de personnes dans notre pays vivent sous le seuil de pauvreté.

La crise économique mondiale que nous traversons touche de plein fouet les plus démunis et risque de paupériser ceux qui, jusqu’à présent, ne rencontraient pas de difficultés majeures. La situation est donc difficile, avec le ralentissement sévère de la croissance, le chômage, la vie chère… Le Président de la République se veut rassurant, mais nous savons que nos concitoyens sont inquiets.

Vous avez donc, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, la lourde tâche de réduire la pauvreté d’un tiers en cinq ans, conformément à l’annonce du Président de la République, en encourageant la réinsertion par le travail et en combattant les inégalités.

Pour donner sens et contenu à votre mission, vous n’avez pas hésité à promouvoir d’importantes mesures, notamment la généralisation du revenu de solidarité active et le pacte national pour l’emploi des personnes handicapées, dont les crédits relèvent de la présente mission.

Dans ce contexte, j’ai tenu à participer à cette discussion pour vous signifier que nombre de nos compatriotes ultramarins attendent beaucoup de l’expression de ces valeurs fortes que sont la solidarité, l’insertion et l’égalité des chances.

En effet, vous le savez, l’outre-mer n’a malheureusement pas attendu la crise, tant s’en faut, pour connaître un chômage quasiment endémique et son corollaire, la pauvreté. Mais avec le tremblement de terre financier que nous vivons et le tsunami économique qui s’annonce, la situation risque de s’aggraver sérieusement.

La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » s’inscrit dans un cadre budgétaire pluriannuel. L’anticipation que cela suppose devrait nous permettre d’adopter une approche plus constructive de la politique à conduire en la matière, compte tenu des périls qui nous guettent.

Ce projet de budget, comme beaucoup d’autres, a vu son périmètre évoluer. Ainsi, sur les sept programmes qui relevaient de la mission en 2008, deux ont été transférés, vers la mission « Ville et logement » pour le programme « Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables », et vers la mission « Santé » pour le programme « Protection maladie ».

Même si ces ajustements de périmètre peuvent se justifier, il n’en demeure pas moins qu’ils conduisent à restreindre notre vision de la globalité de l’action de l’État en matière de solidarité, d’insertion et d’égalité des chances.

Quoi qu’il en soit, à première vue, les crédits de paiement de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » progresseront en 2009 de plus de 6, 2 %, pour s’établir à 11, 17 milliards d’euros, une prévision de croissance annuelle d’environ 4, 89 % jusqu’en 2011 ayant été retenue. Cela est appréciable, mais, avec les temps qui s’annoncent, je crains qu’il ne faille très vite se donner des moyens beaucoup plus massifs – soit dit pour paraphraser quelqu’un ! – afin de répondre aux besoins réels de nos compatriotes, en métropole comme outre-mer.

Je voudrais à présent évoquer plus particulièrement le RSA

M. Alain Vasselle s’exclame

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Marsin

Le RSA regroupe deux des principaux minima sociaux : le RMI et l’allocation de parent isolé. Il est donc tout à fait judicieux que les crédits du programme « Actions en faveur des familles vulnérables » soient graduellement affectés au programme « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales ».

Cependant, monsieur le haut-commissaire, une interrogation subsiste quant à la mise en œuvre progressive du RSA.

Vous le savez, la situation sociale est autrement plus sensible outre-mer qu’en métropole. En effet, même si le taux de chômage connaît une baisse significative depuis quelques années, il demeure deux à trois fois plus élevé qu’en métropole, s’établissant par exemple à 22, 7 % en Guadeloupe, contre 8, 3 % dans l’hexagone, ce qui est déjà trop. Et ce n’est pas la pire des situations outre-mer !

De même, on relève une proportion particulièrement élevée de RMIstes outre-mer, puisqu’ils y représentent 17, 8 % de la population, contre 3, 1 % en métropole au 31 décembre 2007.

Malheureusement, l’application du RSA n’est pas imminente outre-mer, comme c’est le cas en France hexagonale, et nous le regrettons vivement.

Je vous demande donc, monsieur le haut-commissaire, de rassurer nos compatriotes ultramarins à propos de cette réforme : quand et comment comptez-vous mettre en place le RSA outre-mer ? Devrons-nous attendre la date butoir de 2011 ? Devrons-nous acquitter les taxes prévues avant que nos territoires, déjà si affectés par la pauvreté, puissent bénéficier du dispositif ?

Par ailleurs, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, pour en revenir à l’objectif assigné, envisagez-vous de réduire la pauvreté d’un tiers en cinq ans outre-mer aussi ? Nos compatriotes ultramarins sont particulièrement attentifs à votre engagement pour respecter cette obligation de résultat.

S’agissant du programme « Handicap et dépendance », une progression de 7 % des crédits de paiement est à enregistrer pour 2009. Nous saluons cette amélioration, tout à fait louable.

Madame la secrétaire d’État chargée de la solidarité, l’engagement pris par le Président de la République lors de la conférence nationale du handicap de juin dernier est, en principe, de nature à nous rassurer : revalorisation de 25 % de l’allocation aux adultes handicapés entre 2008 et 2012, création de 1 400 places dans les établissements et services d’aide par le travail, mise en place du plan pluriannuel sur cinq ans visant à créer 50 000 places dans des établissements et services spécialisés dans l’accueil des personnes handicapées.

Je voudrais savoir comment ces mesures seront mises en œuvre outre-mer, où presque tout reste à faire dans ce domaine. Combien de places, sur celles dont la création a été annoncée, seront réservées à nos territoires ultramarins ?

S’agissant du programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales », j’ai noté la perspective d’une réorganisation des administrations de santé et de solidarité. Pouvez-vous nous éclairer sur les formes que prendra cette réforme outre-mer ?

Enfin, on peut bien sûr regretter que les crédits du programme « Égalité entre les hommes et les femmes » ne connaissent pas le même hausse que ceux des programmes précédents. Pouvez-vous nous préciser les objectifs du Gouvernement dans ce domaine, en métropole et outre-mer ?

En conclusion, ce projet de budget va être voté à un moment crucial de la lutte contre la pauvreté et l’exclusion. Je suis persuadé que ces crédits sont en deçà de ce que vous auriez souhaité, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire. Cependant, connaissant votre engagement dans ce domaine, j’ai tout de même envie de les voter, afin de vous encourager dans votre mission. J’attends néanmoins avec impatience les réponses et les assurances que vous pourrez me donner sur les points que j’ai soulevés.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire

Elles vous satisferont !

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Monsieur le président, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, mon intervention portera sur le programme « Égalité entre les hommes et les femmes », dont les crédits s’élèvent à 29 millions d’euros seulement. Autant le dire d’emblée : ils ne sont pas à la hauteur des attentes. L’État ne se donne pas vraiment les moyens d’instaurer rapidement une réelle égalité entre les deux sexes.

Tout d’abord, concernant la prévention des violences faites aux femmes, dont les crédits figurent à l’action « Égalité en droit et en dignité » de ce programme, je rappelle que, en France, 10 % des femmes sont victimes de violences au sein du couple et qu’une femme meurt tous les deux jours sous les coups de son conjoint ou ex-conjoint. Le plan global 2008-2010 que vous avez présenté en novembre 2007, madame la secrétaire d’État, comportait des mesures intéressantes pour lutter efficacement contre ce fléau, mais sa mise en œuvre tarde sur différents points.

L’image de la femme dans les médias, par exemple, devait être davantage respectée. Or force est de constater que tel n’est toujours pas le cas. Je pense notamment au « porno chic » dans la presse « féminine » et aux mannequins présentés en couverture, qui incitent les adolescentes à l’anorexie.

Par ailleurs, le dispositif de prévention de la récidive chez les hommes violents devait être renforcé. Qu’en est-il exactement à cet égard ?

Le gouvernement espagnol a décidé de mener une politique volontariste de lutte contre la récidive en finançant l’utilisation d’un bracelet électronique doté d’un système de navigation GPS pour contrôler les déplacements des hommes faisant l’objet de mesures d’éloignement de leur compagne ou ex-compagne à la suite de mauvais traitements. La France ne pourrait-elle se donner les moyens de mettre en place un tel dispositif ?

À l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, le 25 novembre 2008, le mouvement « Ni putes, ni soumises » a interpellé le Président de la République, afin que la lutte contre les violences faites aux femmes soit décrétée grande cause nationale de l’année 2009. Nous soutenons cet appel.

Je souhaite maintenant souligner l’importance de l’effort qu’il convient de consentir au bénéfice des associations qui œuvrent à la promotion de la contraception et au suivi des dispositions relatives à l’IVG.

Deux grossesses non prévues sur trois surviennent chez des femmes qui déclarent utiliser un moyen contraceptif. Par ailleurs, les pilules dites « de troisième génération » ne sont pas remboursées, alors qu’elles sont largement utilisées. Il est important qu’une réflexion d’ensemble soit menée sur un meilleur remboursement de la contraception, pour élargir au maximum et mieux adapter son utilisation, afin d’éviter les « accidents ».

De plus, une meilleure information doit être diffusée dans les collèges et les lycées. Nous comptons sur vous pour y veiller, madame la secrétaire d’État.

La situation en matière d’accès des femmes aux responsabilités et à la prise de décisions est amenée à évoluer favorablement grâce à l’adoption, lors de la dernière révision constitutionnelle, d’un amendement favorisant l’égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales.

Toutefois, dans l’immédiat, nous ne pouvons que regretter que, dans le cadre des actions favorisant la connaissance et la valorisation de la place et du rôle des femmes dans la société, il ne soit pas fait référence à leur représentation dans les manuels scolaires. En effet, d’après une étude de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, la HALDE, réalisée de juin 2007 à mars 2008, l’image des hommes et celle des femmes continuent de faire l’objet d’un traitement différencié, l’image des femmes étant moins valorisante.

De manière générale, l’étude relève la présence de stéréotypes dans les manuels scolaires, et ce quelles que soient les disciplines enseignées, y compris l’éducation civique. Madame la secrétaire d’État, en véhiculant parmi les enfants, dès le plus jeune âge, des représentations stéréotypées de la société, ces manuels peuvent être à l’origine des discriminations dont sont victimes les femmes ; il est important de s’en préoccuper.

Concernant l’égalité professionnelle, dont le développement correspond à l’objectif 1, nous pensons que l’instauration de la parité au sein des filières de formation initiale scientifiques et techniques est essentielle pour parvenir un jour à une réelle égalité professionnelle.

Je note que si les indicateurs de performance prévoient une augmentation du nombre de filles dans ces filières à l’horizon de 2010, cette augmentation est très insuffisante. En terminale STI, la proportion de filles atteignait 9 % en 2007 ; il est prévu que ce taux s’élève à 9, 2 % en 2008 et à 9, 6 % en 2010 : à ce rythme, il faudra deux siècles pour arriver à 50 % de filles en terminale STI ! Mais comment pourrait-il en être autrement avec si peu de moyens ?

Par ailleurs, l’égalité salariale entre hommes et femmes est une composante essentielle de l’égalité professionnelle. On nous rappelle les termes de la loi du 23 mars 2006 relative à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes et on nous propose « des incitations financières pour les actions qui contribuent à l’atteinte de cet objectif ».

De telles mesures s’inscrivent dans le droit fil de cette loi, qui présentait des objectifs louables, mais dont les dispositions demeuraient simplement incitatives.

J’avais dénoncé, à l’époque, son caractère non persuasif et l’absence voulue de sanctions dans le cas où les négociations n’aboutiraient pas à la réduction des écarts de rémunération. Du côté du Gouvernement, on préfère rester prudent, ce que nous regrettons.

Pour ce qui est de l’action « Articulation des temps de vie », elle est, avec moins de 200 000 euros de dépenses d’intervention, le parent pauvre de ce programme. Pourtant, l’enjeu est important, car les schémas traditionnels évoluent peu. Les femmes consacrent toujours deux fois plus de temps que les hommes aux tâches domestiques, les hommes consacrant trois fois moins de temps que les femmes aux enfants.

Il s’agit de donner des droits et des devoirs égaux aux femmes et aux hommes dans la vie privée, avec notamment un partage équilibré de la prise en charge des enfants. Hier, Ségolène Royal §avait ouvert la voie avec le congé de paternité. Nous pensons aujourd’hui que celui-ci peut évoluer vers un véritable congé parental alterné, comme en Suède. Bien entendu, cela ne doit pas se faire au détriment de l’ouverture de nouvelles crèches, pour laquelle un soutien financier du Gouvernement est souhaitable.

En conclusion, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, pour mener une politique volontariste en direction des femmes, il faut s’en donner les moyens.

Ces moyens sont financiers, d’une part. Or ils sont en l’occurrence insuffisants, comme nous venons de le voir en examinant les crédits de la mission.

Ces moyens sont politiques, d’autre part. En particulier, nous ne cessons de le répéter, la création d’un secrétariat d’État dédié aux droits des femmes est nécessaire. Il convient aussi de mettre en place une politique efficace à l’échelon régional. À ce propos, nous nous méfions du rattachement opéré, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, des déléguées régionales aux droits des femmes aux secrétariats généraux pour les affaires régionales. Faire des économies ne signifie pas forcément gagner en efficacité, bien au contraire.

Nous ne pourrons donc voter ce projet de budget, qui manque singulièrement d’ambition.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Chevé

Monsieur le président, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, avant d’exposer les deux volets de mon intervention sur la politique du handicap, je tenais à évoquer les interrogations, pour ne pas dire les inquiétudes, que suscite la nouvelle organisation de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

La nouvelle architecture des politiques publiques tournées vers la pauvreté laisse en effet à penser que l’emploi est le remède unique et ultime à toutes les pathologies sociales. Or celui-ci doit être un objectif accessible, mais non un impératif catégorique.

De même, le renversement de la logique de financement, lequel se fonde désormais sur les modes de ressources, et non sur les besoins des publics accompagnés, pose de sérieux problèmes en termes de gouvernance et de prise en compte de la pluralité des demandes.

Je m’inquiète, en outre, de la baisse des crédits touchant deux actions relatives aux familles vulnérables. En effet, les crédits du dispositif de conseil conjugal et familial vont baisser de 40 %, et ceux du soutien à la parentalité de près de 48 %. Cette réduction des moyens met en péril les partenariats et les dispositifs préventifs déployés par les réseaux d’appui et d’accompagnement des parents, dispositifs qui ont pourtant montré toute leur pertinence et leur efficacité au fil des années.

Il faut avoir le courage de reconnaître que la question sociale est complexe et que son traitement peut prendre du temps. En la matière, les mécanismes curatifs doivent nécessairement aller de pair avec des mesures préventives. En ne prenant pas en considération la singularité et la cohérence des différentes approches de la question sociale, les politiques menées en direction des plus démunis peuvent s’avérer inefficaces et même devenir contre-productives. En matière de politique sociale, l’adage « mieux vaut prévenir que guérir » garde toute sa pertinence.

J’évoquerai maintenant le programme « Handicap et dépendance », qui représente plus des trois quarts des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». Doté de 8, 6 milliards d’euros, son financement est en hausse, conformément aux orientations issues de la conférence nationale du handicap du 10 juin dernier.

Ce programme comporte deux enjeux qui me semblent particulièrement cruciaux : le financement des maisons départementales des personnes handicapées et l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap.

Créées par la loi du 11 février 2005, les MDPH sont chargées d’offrir un accès unifié aux droits et aux prestations des personnes handicapées, sur la base d’une évaluation personnalisée des besoins et des capacités des intéressés. Elles jouent donc un rôle pivot pour les politiques du handicap.

Cependant, quatre ans après leur création, leur financement pose un certain nombre de problèmes qui ne sont toujours pas réglés.

Dans mon département, les Côtes-d’Armor, la MDPH suit près de 15 000 adultes en situation de handicap. Entre 2006 et 2007, elle a enregistré une hausse de 7 % du nombre des dossiers en cours d’instruction, et cette évolution ne risque pas de ralentir puisque la structure, encore relativement jeune, gagne en notoriété d’année en année.

Dans le projet de loi de finances, les crédits ouverts pour ces structures s’établissent à 14, 1 millions d’euros pour 2009. Leur montant reste inchangé par rapport à 2008, alors que cette dotation se révèle très insuffisante chaque année depuis 2005.

Toutefois, le principal problème réside dans la prise en charge des besoins de compensation des personnes en situation de handicap.

C’est le fonds départemental de compensation, également créé par la loi du 11 février 2005, qui est censé l’assurer. Or les fonds départementaux de compensation ne peuvent tenir leurs engagements, puisque leur financement repose sur le principe d’une participation facultative pour un champ d’intervention obligatoire. Il apparaît que seuls l’État et les conseils généraux les abondent régulièrement, les autres acteurs apportant leur contribution au cas par cas, selon des conditions qui leur sont propres. Les MDPH doivent ainsi solliciter les financeurs les uns après les autres.

Aussi, étant donné les lourdeurs administratives du traitement des dossiers et la complexité du dispositif de prise en charge de la compensation, les MDPH ne peuvent, en raison d’un évident manque de moyens humains, élaborer comme il se doit les plans personnalisés de compensation. Comme les contributeurs appliquent des critères de prise en charge spécifiques, le dispositif va à l’encontre de toute logique de mutualisation, d’universalité et d’égalité de traitement.

Je voudrais terminer mon propos en évoquant l’action 2 « Incitation à l’activité professionnelle ». Il s’agit d’une urgence politique et sociale alors que le taux de chômage des personnes handicapées est quatre fois supérieur à celui de la population active valide.

Cette action, dotée de 2, 5 milliards d’euros, représente près de 29 % des crédits du programme. Elle s’appuie également sur les financements du programme « Accès à l’emploi » de la mission « Travail et emploi », de l’AGEFIPH et du Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, le FIPHFP.

Cette action s’articule autour de deux axes : le financement des établissements et services d’aide par le travail, les ESAT, pour un montant supérieur à 1, 3 milliard d’euros, ce qui devrait permettre de financer 114 000 places d’accueil ; le financement de l’aide au poste dans le cadre de la garantie de ressources pour travailleurs handicapés, la GRTH, entrée en vigueur le 1er janvier 2007.

Cette garantie vise à faire en sorte que l’essentiel des ressources disponibles des travailleurs soit lié à leur activité, et non à leur taux d’incapacité. De ce fait, en conditionnant l’attribution des ressources à l’employabilité, le Gouvernement compromet l’avenir des personnes handicapées, qui souffrent souvent de leur faible niveau de qualification et des réticences des employeurs. La logique retenue me semble pour le moins contre-productive.

Le secteur protégé représente sans doute, et c’est encore plus vrai en temps de crise, le milieu optimal pour l’accès à l’emploi des personnes handicapées. En effet, le constat est alarmant : en dépit des efforts accomplis depuis vingt ans par des structures telles que l’AGEFIPH, près de 200 000 personnes handicapées restent aujourd’hui sans travail ni perspectives de formation.

Au-delà de leur vocation médicosociale, les ESAT jouent un rôle majeur dans l’insertion : ils rendent les personnes handicapées plus autonomes et responsables, et donc plus aptes à exercer une activité, par des actions de soutien personnalisées et individualisées.

Malheureusement, l’augmentation prévue de 1, 5 % des crédits, inférieure à l’inflation, ne suffira pas pour financer les 1 400 places nouvelles qui seront créées en ESAT d’ici à la fin de l’année prochaine et pour atteindre les objectifs qualitatifs de professionnalisation des personnels et d’amélioration de la qualité de l’accueil.

Les ESAT seront d’autant plus fragilisés que, en 2009, il manquera plus de 130 millions d’euros pour le financement de l’aide au poste, dont l’objet est pourtant de permettre aux travailleurs handicapés de bénéficier d’une garantie de ressources. Au nom des familles qui attendent une place pour l’un des leurs, nous ne pouvons l’accepter.

Je veux, enfin, redire l’importance du développement de l’emploi en milieu ordinaire ; c’était déjà l’un des objectifs visés au travers de la loi du 11 février 2005.

Il faut poursuivre la mobilisation des partenaires sociaux autour de cet enjeu dans le cadre de la négociation collective et continuer à imposer des aménagements raisonnables des postes et du milieu de travail. L’augmentation des cotisations prélevées sur les entreprises ne respectant pas l’obligation d’emploi de 6 % de travailleurs handicapés et sur les employeurs publics va donc dans le bon sens. Je regrette néanmoins que la nouvelle participation du FIPHFP au financement de ce réseau se traduise dans le même temps par la diminution de la contribution de l’AGEFIPH.

Je veux le réaffirmer ici, l’emploi des personnes handicapées a tendance à se détériorer. Je demande donc au Gouvernement d’accroître, en étroite collaboration avec la HALDE, les sanctions contre toutes les entreprises qui ne respectent pas les critères fixés par la loi. Vous le savez, la concurrence entre demandeurs d’emploi sera rude dans l’avenir, particulièrement pour les publics en difficulté.

En conclusion, je voudrais m’associer aux propos tenus par Gisèle Printz concernant l’égalité entre les hommes et les femmes. Il me paraît particulièrement important que l’État s’engage dans la lutte contre toutes les formes de discrimination, et ce de manière transversale, dans toutes ses politiques. Il est plus que temps de passer, comme c’est le cas pour la région Bretagne, d’une égalité de droits à une égalité de fait.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Claire-Lise Campion

Monsieur le président, mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, alors que nous pouvions espérer, pour la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », des crédits à la hauteur de la situation économique et sociale actuelle et des risques de détérioration de la situation des personnes et des familles vulnérables, ces crédits se résument en fait à un budget pour la généralisation du RSA.

Je ne partage pas l’idée que les politiques sociales puissent se réduire au seul retour à l’emploi. En réalité, le RSA masque l’ampleur du désengagement de l’État au titre des autres programmes qui relèvent de la présente mission.

Ainsi, l’action « Accompagnement des familles dans leur rôle de parents », relevant du programme 106, voit ses crédits diminuer de 32 %.

Est-il nécessaire de rappeler l’importance des « points info famille » et des réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents que finance cette ligne budgétaire ? Ils sont autant de lieux de soutien, d’aide, d’échange et d’information pour les familles.

Ces structures légères sont relativement bien réparties sur le territoire. Elles jouent un rôle essentiel, que ce soit dans les zones urbaines sensibles ou dans les zones rurales, car elles sont facilement accessibles. En agissant comme il le fait, le Gouvernement met en jeu leur pérennité. La rationalisation des dépenses opérée aurait au moins dû être précédée d’une évaluation précise des besoins.

Dans le même ordre d’idées, la protection des enfants et des familles est dotée, pour 2009, de 220, 8 millions d’euros, soit une diminution de 12 % des crédits par rapport à 2008.

Le Gouvernement mise sur une baisse du coût des tutelles et curatelles avec l’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007. L’économie est même estimée à 90 millions d’euros en 2011, puisque l’on table sur un ralentissement du nombre des mesures et sur les nouvelles responsabilités des départements en la matière, dont la charge financière se trouvera accrue.

Le soutien apporté par l’État à la protection de l’enfance est donc marginal. L’effort pour 2009 est de 6 millions d’euros. Pour mémoire, la loi sur la protection de l’enfance du 5 mars 2007 estimait à 150 millions d’euros le coût global des seules mesures nouvelles qu’elle instaurait. Or je déplore une fois de plus qu’aucun financement ne soit prévu à ce jour pour alimenter le fonds national de financement de la protection de l’enfance.

Certes, la prévention et la lutte contre la maltraitance des enfants, que la loi du 5 mars 2007 a réformées et renforcées, relèvent de la responsabilité partagée des départements, qui assument l’essentiel de la dépense, et de l’État. Mais le fonds national de financement de la protection de l’enfance doit compenser le coût de l’ensemble des mesures nouvelles mises à la charge des départements qui découlent de la réforme. Ses ressources sont constituées par un versement de la CNAF et une dotation annuelle de l’État.

C’est la mise en œuvre des dispositions de la loi qui est ainsi compromise. Il ne suffit pas que nous ayons légiféré, encore faut-il aller jusqu’au terme du parcours législatif en publiant les décrets et en prévoyant les financements. Sinon, nous tombons dans des situations qui ne sont plus compréhensibles ni acceptables pour nos concitoyens.

Ainsi, si je déplore l’absence d’engagement financier, je regrette plus encore l’absence de publication du décret portant création du fonds. Un projet a été soumis au comité des finances locales, qui a rendu un avis le 8 février 2008 : cela fait maintenant plus de dix mois !

Madame la secrétaire d’État, peut-être pourrez-vous nous annoncer une bonne nouvelle, en nous précisant à quelle hauteur et quand l’État a l’intention de s’engager.

En 2007, la somme de 30 millions d’euros devait être affectée au fonds par la CNAF. Depuis, ces crédits ont été redéployés.

Contrairement à ce qu’avait affirmé Mme la secrétaire d’État chargée de la solidarité en 2008 dans le cadre de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale à l’Assemblée nationale, l’État n’est toujours pas, hélas ! au rendez-vous.

Nous n’avons que trop perdu de temps, et je vous remercie donc par avance, madame la secrétaire d'État, des réponses et des assurances que vous pourrez nous apporter cet après-midi.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité

Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de budget pour 2009 intervient, en ce qui concerne les personnes handicapées, dans un contexte particulier : il doit en effet donner un contenu aux mesures annoncées par le Président de la République lors de la conférence nationale du handicap du 10 juin dernier.

Plusieurs orateurs, en particulier MM. Auguste Cazalet et Paul Blanc, ont salué le respect de l’engagement relatif à la revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés, laquelle représente 1, 4 milliard d’euros sur cinq ans. C’est là un effort sans précédent de la solidarité nationale.

M. de Montgolfier a eu raison de relever que cette revalorisation entraîne des besoins supplémentaires. C'est pourquoi les crédits de l’AAH seront augmentés de 236 millions d’euros en loi de finances rectificative.

Cependant, revaloriser l’AAH n’est pas suffisant. Mme Demontès a souligné à juste titre qu’il n’était pas normal qu’une personne handicapée accédant à un emploi subisse une perte financière. C’est la raison pour laquelle nous améliorons le mécanisme de cumul entre allocation et salaire, afin de le rendre plus simple, plus équitable et plus incitatif.

Désormais, une personne handicapée touchant un salaire de 400 euros percevra une AAH de 573 euros, soit 118 euros de plus qu’aujourd'hui ; au SMIC à temps plein, elle conservera une AAH de 213 euros, alors qu’elle perd actuellement tous ses droits.

Nous allons également mettre en place les conditions d’un véritable accompagnement vers l’emploi des allocataires : dès 2009, ils bénéficieront systématiquement d’un bilan professionnel, et les personnes en capacité d’accéder à l’emploi seront automatiquement reconnues travailleurs handicapés.

Sur ce dernier point, je veux dissiper un malentendu, madame Chevé.

Il ne s’agit pas, à travers cette mesure, d’exclure les demandeurs qui seraient reconnus travailleurs handicapés du bénéfice de l’AAH sous prétexte qu’ils seraient employables. L’existence d’un handicap et un niveau de ressources faible resteront les seuls critères d’accès à l’AAH. Il s’agit seulement de nous donner les moyens de mieux orienter les personnes, en fonction de leur projet de vie.

Cette mesure n’est d’ailleurs qu’une première étape. Nous avons lancé une mission d’experts pour concevoir un nouvel outil d’évaluation de la situation des personnes handicapées au regard de l’emploi. Cette mission aboutira à une réforme des compléments d’AAH, qui viendront désormais alimenter en priorité les revenus des personnes dans l’incapacité complète de travailler.

J’ai bien entendu, monsieur Vasselle, vos questions sur les financements apportés par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.

S’agissant de la formation, la section IV du budget de la CNSA permet d’aider les établissements à envoyer en formation leurs personnels. C’est un élément essentiel alors que l’on veut renforcer les qualifications de nos professionnels et améliorer l’accueil des personnes hébergées.

S’agissant du financement des établissements, l’ONDAM, renforcé par une partie des recettes de la journée de solidarité, ne finance que les soins. Foyers de vie et foyers d’hébergement restent bien à la charge des conseils généraux.

Monsieur Marsin, vous avez bien voulu saluer le plan de création de places d’hébergement pour personnes handicapées annoncé par le Président de la République le 10 juin dernier.

Je suis tout à fait attentive à sa mise en œuvre dans les départements d’outre-mer. Je me rendrai ainsi la semaine prochaine aux Antilles pour présenter un plan de rattrapage de l’offre médicosociale dans ces départements : l’annonce faite voilà quelques mois par mon collègue Xavier Bertrand se concrétisera donc dès la semaine prochaine.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Monsieur le rapporteur pour avis, madame Chevé, vous avez souligné la place centrale des maisons départementales des personnes handicapées dans la réforme de 2005. Je vous rejoins tout à fait : il faut à tout prix éviter que les difficultés actuelles des MDPH ne viennent jeter le doute sur leur utilité.

L’État s’est engagé à compenser financièrement les postes devenus vacants à la suite de départs à la retraite ou de mutations. Cet engagement sera tenu.

Les sommes correspondantes, soit 7, 6 millions d’euros, ont été notifiées cette semaine aux MDPH. Au total, madame Chevé, ce sont plus de 380 millions d’euros qui ont été consacrés au financement des MDPH depuis leur création par l’État et la CNSA.

À plus long terme, il nous faut certainement faire évoluer le statut des MDPH et de leurs personnels pour leur permettre de remplir pleinement leurs missions. Vous avez eu raison, monsieur le rapporteur pour avis, d’insister sur ce point.

La solution retenue devra respecter quatre principes : confirmer le département dans son rôle de responsable de la MDPH et lui donner toute la souplesse de gestion nécessaire ; permettre à l’État de remplir son rôle de garant de l’équité territoriale et mettre fin aux difficultés liées aux mises à disposition ; préserver l’innovation que constitue la participation des associations de personnes handicapées à la gouvernance des MDPH ; poser les bases d’une évolution vers des maisons départementales de l’autonomie dans le cadre du cinquième risque.

Tous ces aspects seront envisagés lorsque nous débattrons de la création du cinquième risque. Nous définirons alors les outils permettant de faire évoluer le cadre des MDPH.

Monsieur le rapporteur pour avis, je suis tout comme vous attachée au respect des objectifs que nous nous sommes fixés en matière d’accessibilité. La mise aux normes des bâtiments est une obligation qui s’impose à chacun et à chaque échelon de responsabilité institutionnelle.

Pour 2009, nous souhaitons changer de braquet et mettre l’accent sur la mise aux normes des locaux professionnels pour accompagner l’accès à l’emploi des personnes handicapées. C’est la raison pour laquelle nous allons demander au FIPHFP de cofinancer, comme le fait déjà l’AGEFIPH pour le secteur privé, les travaux d’accessibilité des employeurs publics qui s’engagent dans un plan pluriannuel de recrutement.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Tout à fait.

J’ai également bien entendu vos interrogations concernant la prestation de compensation du handicap et ses évolutions possibles dans la perspective du cinquième risque.

Il s’agit d’un acquis essentiel, mais quelques-uns de ses aspects doivent certainement encore être ajustés.

Vous avez évoqué la question des aides ménagères : c’est un sujet sur lequel nous voulons engager une concertation, dans le cadre du cinquième risque, avec les associations et les conseils généraux.

Enfin, vous avez raison, monsieur le rapporteur pour avis, de souligner qu’il nous faut réfléchir à une meilleure répartition des dotations attribuées aux départements par la CNSA en fonction de l’effort qu’ils consentent.

Plusieurs intervenants se sont fait l’écho des inquiétudes du monde médicosocial quant à sa place dans les futures ARS. Je connais ces inquiétudes et je tiens à les dissiper.

Tout d’abord, je crois fermement que l’inclusion du médicosocial dans le champ d’action des ARS est une occasion unique de décloisonner les politiques.

Une approche commune est indispensable pour reconvertir à plus grande échelle les lits d’hôpital en lits médicosociaux chaque fois que nécessaire. Une des premières tâches des ARS sera d’ailleurs de mettre en œuvre le principe de fongibilité asymétrique, selon lequel les moyens vont du secteur sanitaire vers le secteur médicosocial et non l’inverse.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Par ailleurs, les ARS doivent permettre d’améliorer et d’accélérer les procédures de création de places nouvelles. La procédure actuelle est trop lourde, et le comité régional de l’organisation sociale et médicosociale, le CROSMS, ne joue pas son rôle de filtre : la grande majorité des projets recueille un avis positif, le filtre réel n’intervenant que plus tard avec l’attribution des financements.

Nous allons donc supprimer les CROSMS dans leur format actuel. À la place, nous instituerons une procédure d’appels à projets, que nous calibrerons, monsieur le rapporteur pour avis, pour que les projets innovants puissent être pris en compte.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Les associations seront naturellement associées à la définition de ces appels à projets.

Je voudrais enfin m’arrêter quelques instants sur la question du droit des femmes. Elle fera désormais l’objet d’un document de politique transversale, ce qui, vous l’avez souligné, madame Dini, est une réelle avancée.

Ce document constitue en effet l’outil qui va nous permettre de mesurer pour la première fois, dans le prochain budget, l’effort précisément consenti par chaque ministère et sa progression année après année, ainsi que de contrôler la transversalité et la cohérence de la politique en faveur du droit des femmes.

Je veux rassurer les intervenants qui m’ont interrogée sur l’avenir du SDFE, le service du droit des femmes et de l’égalité, et de ses déléguées à l’échelon local.

La meilleure preuve de notre volonté de continuer à mener une politique interministérielle ambitieuse en la matière, c’est que nous allons créer une délégation interministérielle aux droits des femmes et que les déléguées régionales aux droits des femmes seront placées directement auprès des SGAR, les secrétariats généraux pour les affaires régionales, ce qui garantira le caractère interministériel dans la proximité de la politique en faveur du droit des femmes et permettra de conserver l’approche transversale sur le plan local.

Je réponds ainsi à la question de M de Montgolfier sur la place du SDFE : sans ce service, monsieur le rapporteur spécial, il n’y aurait ni d’effet de levier grâce aux crédits qu’il gère ni de politique interministérielle digne de ce nom en faveur du droit des femmes et de l’égalité.

Une telle politique commence en effet dès l’école, par la lutte contre les stéréotypes, comme l’ont souligné Mmes Dini et Printz, mais j’insiste sur le fait que le SDFE et son réseau de déléguées régionales et départementales au droit des femmes constituent l’outil déconcentré de nos politiques nationales en assurant la transversalité et la mobilisation de l’ensemble des services pour mettre en œuvre le droit des femmes.

Doté de 29 millions d’euros, le SDFE n’a pas, c’est vrai, un budget important, mais il permet de structurer le caractère interministériel de l’action que nous devons mener auprès de la moitié de notre population. C’est pourquoi le document de politique transversale est essentiel, car, je le répète, il permettra de mesurer à quelle hauteur chaque ministère s’associe à cette mission interministérielle.

Un an après le lancement du plan contre les violences faites aux femmes, la plupart des mesures ont été mises en œuvre.

Je citerai l’installation des référents locaux, interlocuteurs uniques de proximité pour garantir l’accompagnement des femmes victimes de violences, les familles d’accueil ou l’amélioration, grâce au numéro d’appel dédié, de la prise en compte et de l’orientation des victimes.

En outre, le 2 octobre dernier, nous avons lancé, comme cela a été rappelé, la campagne de communication à destination des femmes victimes de violences, des témoins et des auteurs de tels actes et la création d’une plateforme internet.

Si la mobilisation générale de tous les niveaux institutionnels est, j’en suis convaincue, essentielle, nous avons un effort particulier à mener en matière de sensibilisation et d’information. À cet égard, un numéro d’appel constitue un excellent outil pour orienter vers les bons services et coordonner ensuite la prise en charge.

Cela étant, nous irons plus loin, madame Printz : le Premier ministre l’a annoncé le 25 novembre dernier, l’année prochaine, la lutte contre les violences faites aux femmes bénéficiera du label « campagne d’intérêt général ».

Il a également invité les associations à s’organiser en comité pour ouvrir la voie à une déclaration en tant que grande cause nationale en 2010. Une telle démarche a conduit, dans un autre domaine, à l’instauration du plan Alzheimer : elle signifie la mobilisation de tous les ministères. C’est donc un geste fort, qui montre la détermination du Gouvernement à accompagner cette politique publique.

Enfin, mesdames Pasquet et Printz, vous avez évoqué la création d’un secrétariat d’État entièrement dédié aux droits des femmes. Je comprends cette demande, mais, à une ou deux exceptions près, aucun des vingt-sept pays de l’Union européenne ne dispose d’un ministère exclusivement chargé de promouvoir ces droits.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Ce qui nous paraît essentiel, c’est de s’assurer du caractère interministériel de notre action et de la mobilisation des moyens de chaque ministère.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Il faut que tous les ministères se sentent concernés par les actions en faveur des droits des femmes.

Par exemple, en matière d’égalité dans le système éducatif, nous entendons appliquer la convention interministérielle qui a été évoquée par Mme Dini pour lutter contre les stéréotypes et encourager l’orientation des jeunes filles vers des filières scientifiques ou techniques. Les droits des femmes, sous tous leurs aspects, ne peuvent être promus que dans un cadre interministériel.

Vous l’avez compris, en dépit des difficultés économiques, ce projet de budget pour 2009 est ambitieux et volontariste. Il s’inscrit dans une véritable feuille de route pour l’accompagnement des plus fragiles de nos concitoyens et démontre que, en ces temps de crise financière et économique, cet accompagnement, loin d’être négligé, est au contraire amplifié. Il manifeste la détermination de l’ensemble des membres du Gouvernement.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - Permalien
Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille

Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, 837, 7 millions d’euros seront consacrés aux actions en faveur des familles vulnérables au titre du programme 106.

Vous avez eu raison de rappeler, monsieur le rapporteur pour avis, que cet exercice n’est pas comparable au précédent : il s’agit d’un projet de budget de transition. Vous l’avez expliqué fort justement en soulignant deux points.

Tout d’abord, nous avons décidé de ne pas nous satisfaire de la réalité quotidienne des familles vivant avec le RMI. Nous avons choisi de faire bouger les choses et de construire le RSA. Certains m’ont fait observer que mon département ministériel allait y perdre une ligne budgétaire importante, ou du moins voir ses crédits largement amputés. Mais, comme je l’ai indiqué devant la commission des affaires sociales, si l’on veut servir son pays, et notamment les plus fragiles de ses concitoyens, il convient d’accepter de telles évolutions.

En effet, une ligne budgétaire appartient non pas à un membre du Gouvernement, mais au peuple français !

Murmures sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Nadine Morano, secrétaire d'État

Nous avons une seule mission : gérer au mieux les crédits pour que nos concitoyens constatent, dans leur quotidien, la réalité des changements.

Debut de section - Permalien
Nadine Morano, secrétaire d'État

Lorsque Martin Hirsch et moi-même avons œuvré ensemble à la création du revenu de solidarité active, nous nous sommes très vite mis d’accord : intégrer l’API dans le RSA nous semblait logique.

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire

Exactement !

Debut de section - Permalien
Nadine Morano, secrétaire d'État

Vous l’aurez compris, notre objectif, celui du Gouvernement, celui qui a été affiché par le Président de la République, est bien de faire bouger les lignes budgétaires. C’est ce que nous vous proposons au travers de ce projet de loi de finances qui, évidemment, ne sera comparable à aucun autre en ce qui concerne mon département ministériel, puisqu’il marque une transition.

Par ailleurs, vous avez également eu raison de rappeler, monsieur le rapporteur pour avis, que la réforme des tutelles et curatelles mise en œuvre cette année implique des choix de réallocation dictés par une volonté d’efficacité dans la gestion des deniers publics et dans le déploiement des programmes.

Ce projet de budget traduit donc une ambition de renforcer l’efficacité d’actions qui nous imposent des devoirs tout particuliers, car il s’agit de la solidarité nationale.

Le programme 106 se décline en trois actions dotées chacune d’un budget propre : l’accompagnement des familles dans leur rôle de parents, auquel sont consacrés 15, 5 millions d’euros ; le soutien en faveur des familles monoparentales, pour lequel sont alloués 601, 5 millions d’euros de crédits ; la protection des enfants et des familles, dotée de 220, 8 millions d’euros.

C’est à la Caisse nationale d’allocations familiales qu’incombe, pour l’essentiel, la mission de garantir l’aide aux familles vulnérables. Cependant, l’État a toute sa place dans le financement de mesures en faveur de la parentalité et de la protection des personnes faibles, qu’il s’agisse des enfants ou des adultes sous tutelle.

Ce projet de budget est celui d’une nouvelle dynamique en faveur des familles les plus vulnérables.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Nadine Morano, secrétaire d'État

Tout d’abord, 15, 5 millions d’euros sont donc consacrés à accompagner les familles dans leur rôle de parents. En ce qui concerne le réajustement des crédits du réseau d’écoute et d’aide à la parentalité, le REAP, à hauteur de 7, 1 millions d’euros pour 2009, je rappelle à Mmes Campion, Pasquet et Chevé la réalité incontestable suivante : depuis 2002, ces crédits étaient en moyenne sous-consommés. À cet égard, l’année 2007, au cours de laquelle 11 millions d’euros avaient été employés, avait été tout à fait exceptionnelle, les crédits ayant été presque doublés pour faire connaître les dispositions de la loi réformant la protection de l’enfance.

Il me semble donc plus judicieux et plus adapté de mieux cibler les projets. Cela étant, l’action de soutien à la parentalité demeure pour moi fondamentale. Je prends d’ailleurs devant vous l’engagement d’augmenter, si besoin est, le montant des crédits qui lui sont alloués, mais pas dans n’importe quelles conditions !

L’attribution de nouveaux crédits, en concertation avec les directions départementales des affaires sanitaires et sociales, sera décidée sur la base d’une évaluation, ce qui est pour moi la meilleure manière de gérer l’argent public.

Je souligne que la prochaine convention d’objectifs et de gestion signée entre l’État et la CNAF pour la période 2009-2012 nous donnera l’occasion de renouveler notre soutien à l’action en faveur de la parentalité.

En outre, le programme 106 n’est pas la seule source de financement des actions de soutien à la parentalité. L’État peut compter, en effet, sur la branche famille de la sécurité sociale. L’intervention des caisses d’allocations familiales à ses côtés s’est généralisée depuis plusieurs années, notamment en matière de médiation familiale et dans le cadre des REAP. L’intervention de la branche famille représente ainsi environ 4 milliards d’euros.

Enfin, monsieur Vasselle, vous m’avez interpellée sur la question des jeunes adolescents en difficulté. Je partage votre préoccupation. Nous souhaitons développer les maisons des adolescents sur l’ensemble du territoire, à raison d’une par département.

Les chiffres sont éloquents : quelque 900 000 adolescents sont en situation de souffrance psychologique, soit 15 % de cette population, sachant que, parmi eux, à peine 14 % font appel à un médecin. Des crédits d’un montant de 2 millions d’euros au bénéfice des maisons des adolescents sont inscrits dans ce projet de budget afin d’aider au démarrage des projets. Cet engagement en faveur de l’aide à la parentalité et aux familles en souffrance est indispensable.

De surcroît, le soutien aux familles en souffrance devant être constant, j’indique à Mmes Campion et Pasquet que les crédits destinés au financement de la médiation familiale permettant l’exécution des décisions judiciaires sont maintenus, à hauteur de 2, 4 millions d’euros.

Par ailleurs, un peu plus de 601 millions d’euros sont consacrés aux familles monoparentales par le biais de l’allocation de parent isolé, dont bénéficiaient, au 31 décembre 2007, 218 500 personnes. MM. Cazalet et de Montgolfier se sont interrogés sur les hypothèses de progression du nombre des allocataires. Pour établir le projet de budget pour 2009, nous avions tablé sur une croissance de 1 % du nombre des allocataires, mais il va de soi que si cela est nécessaire au regard de la situation, nous saurons ajuster notre politique et nos moyens aux besoins.

L’année 2009 est bien entendu une année de transition, comme je l’ai déjà dit, puisque l’API sera supprimée en cours d’année et intégrée au RSA. Plus précisément, tous les allocataires de l’API auront droit à un RSA majoré. La création du RSA ne fera donc aucun perdant parmi les bénéficiaires actuels de l’API. Martin Hirsch et moi nous en portons garants.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire

Absolument !

Debut de section - Permalien
Nadine Morano, secrétaire d'État

Je me félicite de la mise en œuvre de cette mesure, qui correspond parfaitement à ma conception de la solidarité. Il s’agit d’une aide pour repartir, et non d’un piège où l’on s’enferre !

Enfin, 220 millions d’euros sont consacrés à la protection des enfants et des familles, madame Campion. En particulier, 3, 75 millions d’euros seront consacrés en 2009 à l’aide à l’adoption. Qu’elle ait lieu sur le territoire national ou à l’étranger, mon unique objectif est qu’elle se fasse d’abord dans l’intérêt de l’enfant. L’Agence française de l’adoption, l’AFA, a précisément pour vocation d’informer et de conseiller les candidats à l’adoption dans leur démarche et de servir d’intermédiaire pour l’adoption de mineurs étrangers de plus de quinze ans.

Si les crédits sont réajustés entre 2008 et 2009, c’est, là aussi, pour les adapter à la réalité des dépenses effectivement engagées. J’ai pleinement conscience de l’ampleur du chantier de la réforme de l’adoption. Nous la mènerons à bien, avec pragmatisme et détermination. Il s’agit là encore d’une commande du Président de la République, qui est très attentif à ce dossier. L’AFA sera également réformée et dotée de la capacité juridique de mener des actions de coopération à l’étranger, afin de renforcer son potentiel d’intervention.

Je tiens, à cet instant, à saluer tout particulièrement l’action du Conseil national d’accès aux origines personnelles, le CNAOP. Faciliter l’accès aux origines personnelles est pour nous un devoir, tant la souffrance liée au secret de l’identité des parents peut être lourd. Le CNAOP a procédé à 897 communications de l’identité de parents de naissance, pour 2 538 dossiers constitués. Je suis attachée à ce que le programme que je défends aujourd’hui puisse contribuer à son financement.

Si l’État et la solidarité nationale ont une ambition prioritaire, c’est bien celle de protéger les personnes vulnérables et les plus faibles de nos concitoyens. C’est là tout l’objet de notre action en faveur de la protection de l’enfance, que la loi du 5 mars 2007 a rénovée pour la renforcer.

On m’a interrogée sur l’état d’avancement des décrets d’application de cette loi. Je viens d’en signer un deuxième, relatif à la création des observatoires départementaux de la protection de l’enfance. Il sera très prochainement publié. Un troisième décret, relatif à la formation des intervenants, le sera courant décembre. Nous serons, je vous le dis, au rendez-vous de cette loi !

Le projet de budget que je vous présente prévoit le financement à hauteur de 2, 18 millions d’euros du groupement d’intérêt public « Enfance en danger », qui soutient l’observatoire national de l’enfance en danger et assure un service téléphonique fonctionnant vingt-quatre heures sur vingt-quatre et répondant, en moyenne, à plus de 4 000 appels quotidiens. Derrière ces chiffres, ce sont des vies sauvées chaque jour.

Enfin, 214 millions d’euros sont consacrés à la protection des majeurs. La loi du 5 mars 2007 permet que chaque euro dépensé soit mieux investi, avec un plus grand respect de la volonté des personnes sous tutelle, grâce à la révision du dossier tous les cinq ans, à la création d’un mandant de protection future qui permet à une personne de désigner à l’avance son curateur et à une procédure de placement désormais pleinement contradictoire.

Une plus grande attention est accordée à la diversité des situations, par la création d’une mesure d’accompagnement social personnalisé qui place sous la responsabilité des conseils généraux les personnes ayant seulement quelques difficultés à assurer la gestion de leurs ressources, sans souffrir d’altération mentale.

L’État sera pleinement aux côtés de ces personnes, envers lesquelles nous avons des devoirs tout particuliers. Nous tiendrons cet engagement aussi !

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous ai présenté un projet de budget sincère, pragmatique, ajusté aux réalités, qui témoigne de la volonté du Gouvernement d’optimiser nos dépenses pour pérenniser un système de protection sociale plus juste et plus équitable. Le Gouvernement veillera toujours attentivement à la protection des personnes les plus faibles.

Je vous remercie de soutenir ce projet de budget consacré aux familles vulnérables, de relever avec nous ce défi d’une année de transition, d’approuver l’instauration du revenu de solidarité active.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le programme 304, créé dans le projet de loi de finances pour 2008 pour permettre l’expérimentation du RSA, a changé d’intitulé et de dimension : en 2009, on passera de l’expérimentation à la généralisation.

Ainsi, les crédits du programme, qui étaient de 45 millions d’euros en 2008, s’élèvent à plus de 582 millions d’euros, dont 555 millions d’euros pour la généralisation du revenu de solidarité active, dans le présent projet de budget.

Comme vient de le souligner Nadine Morano, nous procédons à la fusion du RMI et de l’API dans la nouvelle prestation. Je tiens à souligner que les travaux du Sénat ont inspiré cette mesure. Je voudrais, à cet instant, rendre hommage à MM. Henri de Raincourt et Michel Mercier, qui avaient fait œuvre de pionniers, voilà trois ans, en proposant cette fusion, que personne n’imaginait voir se concrétiser un jour, au motif que des divergences de vues opposeraient toujours les gestionnaires des deux budgets.

Cette fusion a permis, je le signale au passage, de protéger les parents isolés. En effet, je vous le dis sous le sceau du secret, le ministère du budget avait des visées sur l’API. Il comptait la rogner progressivement, année après année, pour l’aligner sur le RMI et supprimer, sous divers prétextes, la majoration dont bénéficient les allocataires de l’API.

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire

Nous avons donc, ensemble, sauvegardé cette majoration au profit des parents isolés, qui se trouve maintenant sanctuarisée !

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire

Le RMI a été instauré voilà presque vingt ans jour pour jour, le 1er décembre 1988. Hier s’est d’ailleurs tenu un débat sur ce thème, réunissant deux anciens Premiers ministres, Michel Rocard, qui a créé le RMI, et Jean-Pierre Raffarin, qui en a permis la décentralisation, ainsi que Pierre Méhaignerie, qui en a assuré l’expérimentation, et un certain nombre d’élus, en particulier du Doubs, dont je salue ici le président du conseil général, Claude Jeannerot.

Vingt ans après, le principe du revenu minimum d’insertion n’est plus contesté, mais on peut envisager de modifier le dispositif, afin que ne soient pas pénalisés celles et ceux qui reprennent du travail.

Cela ne signifie pas, madame Demontès, que nous misons tout sur le retour au travail. Vous le savez bien !

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire

En effet, à l’heure actuelle, dans certains départements, 25 % des allocataires du RMI travaillent déjà, mais pour rien !

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire

M. Martin Hirsch, haut-commissaire. Oui, mais seulement pour un an ! Or je ne vois pas pourquoi, tandis que les avantages fiscaux sont pérennes, l’intéressement lié au retour à l’emploi ne durerait qu’un an !

Mme Gisèle Printz applaudit.

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire

C’est une question d’équité, il n’y a là aucune idéologie du travail ! Vous en revenez toujours aux mêmes arguments, mais je ne veux pas polémiquer : je souhaite seulement que nous allions de l’avant.

M. Paul Blanc l’a souligné, le coût global du RSA s’élève à 10 milliards d'euros, la charge étant partagée au trébuchet entre l’État et les conseils généraux, dans des conditions précisées par la loi et fortement confortées par le Sénat.

Ainsi, les départements assumeront à hauteur de 6, 6 milliards d'euros le financement du dispositif, le solde, soit plus de 3 milliards d’euros, étant à la charge de l’État, à travers le Fonds national des solidarités actives. Le FNSA présente cet avantage que si diverses sources peuvent l’alimenter, il ne peut en revanche servir qu’au financement du revenu de solidarité active.

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire

Cette particularité constitue une sécurité tant pour les bénéficiaires de la prestation que pour les départements.

En outre, le Fonds national des solidarités actives assumera les frais de gestion des caisses d’allocations familiales et de la Mutualité sociale agricole à hauteur de 100 millions d'euros, montant évalué des charges nouvelles que ces organismes devront supporter à la suite de la mise en place du RSA.

De la même façon, le Fonds national des solidarités actives financera l’aide personnalisée au retour à l’emploi, grâce à une enveloppe de 150 millions d'euros. Cette mesure est très différente de la prime de retour à l’emploi, qui est versée au terme du quatrième mois d’activité et dont les effets pervers étaient dénoncés par tous les bénéficiaires. Le versement de la nouvelle aide pourra être déclenché par les référents en fonction des besoins des personnes concernées, le cas échéant dès le premier jour d’activité si c’est nécessaire, en tout cas au plus près des besoins.

Des inquiétudes relatives au financement du RSA et à son incidence sur les dépenses des départements ont été exprimées, notamment par M. Vasselle.

Dans la mesure où les départements financent le « socle » et l’État le « chapeau », à partir de juin prochain, dès qu’un allocataire reprendra une activité, cela engendrera une économie directe et immédiate pour les départements, alors que, dans le mécanisme actuel de l’intéressement, le retour au travail n’entraîne aucune baisse des dépenses pour ces derniers. Cette clarification ne sera possible que si vous adoptez ce projet de budget, mesdames, messieurs les sénateurs.

M. le rapporteur pour avis s’est interrogé sur le Fonds d’expérimentations pour les jeunes. Celui-ci a été doté de 10 millions d'euros au titre du budget de 2008, auxquels s’ajouteront 4 millions d'euros en 2009, des crédits supplémentaires pouvant éventuellement être débloqués. En outre, d’autres acteurs seront sollicités.

Là encore, je me réfère aux débats qui ont eu lieu lors de la création du RMI, voilà vingt ans. Une question se posait alors : l’âge minimal pour bénéficier de l’allocation étant fixé à 25 ans, que proposer à ceux qui sont âgés de 18 à 25 ans ? Vingt ans après, nous avons le même débat, dans les mêmes termes, sans avoir avancé d’un pouce entre-temps ! J’espère tout de même que nous n’en serons plus au même point en 2028 !

C’est pourquoi seront lancés, dès le début de 2009, des programmes d’expérimentation, dans des départements volontaires, afin d’étudier des dispositifs d’aide aux jeunes de moins de 25 ans. Je pourrai ensuite, en fonction des résultats de cette expérimentation, revenir vous proposer des solutions, sans attendre encore vingt ans !

Par ailleurs, dans la mesure où certains jeunes très désocialisés rencontrent d’importantes difficultés, par exemple en matière de logement, et deviennent même parfois des SDF, il me semble que des programmes spécifiques devront être élaborés, en concertation avec des chercheurs et universitaires évaluateurs ainsi que des collectivités territoriales. Plusieurs propositions en ce sens nous ont déjà été adressées, et nous essaierons, d’une manière ou d’une autre, de mobiliser les crédits nécessaires.

Madame Pasquet, vous avez accusé le Gouvernement de profiter de la réforme des droits connexes nationaux pour récupérer de l’argent sur le dos des bénéficiaires de la prestation. Non, cela est faux ! Il n’est qu’à examiner en détail l’ensemble des crédits pour 2009 : aucune économie ne sera réalisée au titre des droits connexes.

Certes, un léger différentiel de 80 millions d’euros, sur un total de 1, 5 milliard d’euros, apparaîtra lorsque l’on passera de droits attachés au statut à des droits liés aux ressources des bénéficiaires, mais il s’agit de basculer d’un système dont chacun s’accorde qu’il comporte des effets de seuil injustes à un dispositif mieux lissé, où aucune personne reprenant du travail ne sera perdante.

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire

M. Vasselle, qui porte un intérêt particulier aux conditions de financement du RSA, a proposé, avec beaucoup d’éloquence, que ce dispositif soit financé par une reprise sur les allégements de charges sociales. Par ailleurs, il s’est interrogé sur l’avenir du financement en fonction des évolutions prévisibles.

On peut prévoir que le RSA rencontrera un certain succès. Cela signifie-t-il pour autant que les prévisions seront outrepassées ? Pas forcément. Pour ma part, je ne le pense pas, mais restons prudents !

Je signale d’abord que jamais le Gouvernement n’a anticipé et pris en compte dans ses calculs les économies envisagées.

Par exemple, dans le cadre des programmes expérimentaux d’application du RSA que nous avons conduits dans certains départements, nous avons observé un taux de retour à l’emploi supérieur de 30 % à ce qu’il est dans les zones témoins, et une baisse des dépenses au titre du RMI nettement plus rapide. Je parle sous le contrôle de certains présidents de conseil général ici présents.

Si nous avions extrapolé ces données à la France entière, nous aurions pu évoquer des centaines de millions d'euros d’économies. Or nous avons préféré rester prudents et n’avons pas pris en compte ces économies potentielles, dont une partie se réalisera.

Ensuite, la loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion prévoit que les recettes dégagées grâce au plafonnement des niches fiscales, qui a été inscrit dans le présent projet de loi de finances, pourront venir abonder le Fonds national des solidarités actives. Lors de l’élaboration de cette loi, certains parlementaires avaient très clairement suggéré qu’il serait alors possible de réduire la taxe prévue… Mais si cela se révèle nécessaire, on pourra maintenir la taxe au taux actuel tout en mobilisant le produit du plafonnement des niches fiscales : cela nous donnera encore une marge de 200 millions d'euros.

Enfin, nous créons un droit et un fonds destiné à le financer : ce financement sera honoré. Soyez donc sans inquiétudes à cet égard.

Cela étant, si par exemple les partenaires sociaux s’accordaient subitement pour réduire la durée d’indemnisation du chômage, une telle initiative aurait des répercussions d’abord sur l’allocation de solidarité spécifique, puis sur le RSA « socle ». Cependant, cela serait dû non pas à la nature du RSA, mais au fait que le RSA « socle » est le dernier étage de l’indemnisation du chômage. Une telle évolution ne saurait être imputable au dispositif.

Cependant, les enjeux sont connus. Dans la perspective de la mise en place du RSA, nous avons alerté les départements et les partenaires sociaux sur ce risque pour qu’ils se concertent afin d’éviter que les uns ne prennent des décisions qui auraient des répercussions sur les budgets des autres. Il me paraît important de le souligner.

Je souhaite rappeler à M. Vasselle et à Mme Chevé que, au moment où nous créons le revenu de solidarité active, nous avons reconduit les crédits du Fonds de mobilisation départementale pour l’insertion à hauteur de 500 millions d'euros, alors qu’ils devaient se tarir à la fin de l’année 2008. Une telle reconduction aurait pu ne pas être décidée, mais il nous aurait semblé pour le moins difficile d’annoncer aux départements, avec lesquels les discussions ont été tout à fait loyales, que nous mettions un terme à l’existence du FMDI en même temps que nous instaurions le revenu de solidarité active !

Comme cela a été souligné, la taxe sera perçue dès le mois de janvier alors que le RSA ne sera versé qu’à compter de juillet : cet excédent de ressources conforte notre marge de sécurité pour l’année prochaine. Nous avons prévu un excédent de 360 millions d'euros à ce titre en 2009, ce qui rendra possibles certains ajustements, en particulier en vue de la fin de l’année 2010.

Je souhaiterais maintenant répondre à M. Marsin, qui a insisté sur les attentes suscitées, parmi nos concitoyens d'outre-mer, par la création du revenu de solidarité active et s’est dit prêt à voter ce projet de budget sous réserve de quelques clarifications, que je vais maintenant lui apporter.

Tout d’abord, le Gouvernement n’a pas l’intention d’attendre jusqu’au 1er janvier 2011 pour appliquer le RSA outre-mer. Il le fera dès que les départements ultramarins seront prêts. C'est la raison pour laquelle nous avons missionné le député René-Paul Victoria pour qu’il nous fasse, dans les six mois, des propositions en vue de l’adaptation à l’outre-mer du revenu de solidarité active.

Juste après l’adoption de la loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion, nous avons tenu une réunion avec les présidents des conseils généraux d’outre-mer. Ils ont admis qu’une application directe et immédiate du RSA dans leurs territoires aurait pu entraîner des difficultés, liées notamment à des télescopages avec des dispositifs spécifiques. Par conséquent, il faut aller le plus vite possible, mais en s’assurant toutefois que la mise en place du RSA interviendra dans des conditions satisfaisantes.

Je le redis donc de la manière la plus officielle, le revenu de solidarité active pourra entrer en vigueur avant le 1er janvier 2011 dans les départements d’outre-mer.

De ce fait, la taxe de 1, 1 % destinée à financer le dispositif ne sera pas prélevée outre-mer tant que le RSA n’y sera pas entré en vigueur. J’avais apporté cette précision aux présidents de conseil général ; je la réitère dans cette enceinte. Voilà qui vous permettra, mesdames, messieurs les sénateurs, de vous déterminer sur ce projet de budget et de décider si vous accordez votre confiance au Gouvernement.

Madame Campion, selon vous, cette mission pourrait se résumer au seul revenu de solidarité active. Ne voyez aucune psychologie de mâle dominateur dans cette affaire !.) D’ailleurs, si le programme 304, avec ses 580 millions d’euros, au sein d’une mission d’un montant total de 11, 2 milliards d’euros, exprimait une domination, ce serait celle paradoxalement de la minorité, comparé, par exemple, aux crédits pour le handicap, excellemment défendus par Valérie Létard, qui atteignent, eux, 8, 6 milliards d’euros !

Nous essayons de répondre à toutes vos questions, mesdames, messieurs les sénateurs, parce que nous avons élaboré cette réforme ensemble.

Il ne s’agit pas pour nous d’opposer le retour à l’emploi aux autres dimensions sociales de cette mission. Bien au contraire, nous essayons de concilier les deux, comme les créateurs du RMI ont tenté, voilà vingt ans, de le faire. En réalité, nous tenons à peu près le même langage. Simplement, à chaque époque ses réalités : il y a vingt ans, nous ne connaissions pas le phénomène des travailleurs pauvres. Il y a vingt ans, les premiers bénéficiaires du RMI étaient des personnes moins concernées par l’emploi et, pour tout dire, cette allocation n’était pas le troisième étage de l’indemnisation du chômage.

Il nous faut donc aujourd'hui remotiver les différents acteurs en tenant compte de ces nouveaux paramètres.

La question de savoir si le RSA risquait d’être appliqué à partir du 1er janvier 2009 m’a été posée. Afin que cette mesure puisse être correctement mise en œuvre à partir du mois de juin prochain, nous estimons préférable de bien préparer son entrée en vigueur au cours des sept mois qui restent, ce qui ne nous interdit pas de soumettre, dès le premier semestre 2009, d’autres propositions en faveur des personnes aux revenus modestes si la période se révèle trop difficile.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », figurant à l’état B.

En euros

Solidarité, insertion et égalité des chances

Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales

Actions en faveur des familles vulnérables

Handicap et dépendance

Égalité entre les hommes et les femmes

Dont titre 2

Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales

Dont titre 2

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° II-183, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales

Actions en faveur des familles vulnérables

Handicap et dépendance

Égalité entre les hommes et les femmesDont Titre 2

Conduite et soutien des politiques sanitaires et socialesDont Titre 2

13 159 645

13 159 645

TOTAL

SOLDE

La parole est à Mme Valérie Létard, secrétaire d’État.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Il s’agit d’un amendement de coordination lié à la poursuite de la décentralisation en matière sanitaire et sociale. Nous tirons les conséquences du transfert progressif des agents de l’État vers les départements pour assurer, notamment, la gestion du RMI ou de certaines politiques sanitaires telles que la lutte antivectorielle.

Le nombre d’agents et les montants précis n’étaient pas connus au moment de l’élaboration du projet de loi de finances compte tenu, notamment, des délais dans lesquels les agents peuvent exercer leur droit d’option.

C’est à l’occasion de la réunion de la commission consultative d’évaluation des charges du 13 novembre dernier que ces éléments ont pu être définitivement arrêtés, en accord avec les représentants des collectivités locales. Les 13, 9 millions d’euros en cause sont presque totalement constitués par des crédits de personnel correspondant à 432 équivalents temps plein travaillé.

Je tiens enfin à rappeler que les conséquences financières de la décentralisation ont déjà été traduites dans l’équilibre du budget de l’État.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Tout d’abord, on peut regretter le dépôt tardif de cet amendement, qui vise à prendre en considération la compensation des transferts de compétences aux collectivités dans différents domaines.

Cet amendement tient compte, notamment, du nombre d’agents qui, par détachement vers les régions ou vers les départements, ont opté pour la fonction publique territoriale. Par coordination, le plafond d’emplois devrait être réduit de 432 équivalents temps plein travaillé.

Avant de donner l’avis de la commission, je souhaiterais obtenir du Gouvernement l’assurance que ces frais de personnel seront intégralement compensés pour les collectivités. Sur quels crédits trouve-t-on la compensation ? A-t-on prévu un prélèvement sur le produit de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, par exemple ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Je peux vous assurer, monsieur le rapporteur spécial, que la compensation sera bien intégrale. C’est l’objet de l’amendement.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Compensation intégrale, mesdames, messieurs les sénateurs !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Très bien ! Sans compensation, on ne votait pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Ayant obtenu cette assurance, la commission émet un avis favorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

J’ai été saisi, dans le délai limite, d’une demande d’explication de vote de la part de Mme Isabelle Pasquet.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Mesdames les secrétaires d’État, monsieur le haut-commissaire, nous vous avons entendus, mais les sénateurs du groupe CRC-SPG regrettent toujours que, pour des motifs budgétaires, la mission que nous examinons ne se limite finalement qu’à trois actions.

D’autres pistes existent ; il est indispensable de les explorer, notamment dans la période de crise que nous vivons et qui risque d’aggraver la situation des plus faibles.

Ce projet de budget est avant tout la traduction de la logique du Gouvernement : on n’a rien sans rien ! Tel est le cas avec la généralisation du RSA et l’abandon concomitant d’un certain nombre de programmes.

Mais cette logique n’est pas valable pour tout le monde. Qu’ont donné en retour les plus riches, qui bénéficient du bouclier fiscal ? Rien ! Qu’ont-ils versé comme contribution à la solidarité nationale ? Aucune !

Vous réduisez l’action de l’État dans le domaine de la solidarité à une seule compétence ou presque, écartant, de fait, certains programmes participant de manière indirecte à la lutte contre l’exclusion. Tel est le cas des réductions drastiques de la mission « Égalité entre les hommes et les femmes », alors que les vieux schémas sexistes perdurent, que l’inégalité sur le lieu de travail demeure et que les violences faites aux femmes ne diminuent pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Nous aurions souhaité, au contraire, un renforcement en la matière, par exemple, une consolidation des compétences de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, la HALDE, qui devrait être dotée des moyens financiers nécessaires pour accomplir sa mission.

Nous ne pouvons cautionner ce qui se passe actuellement dans le secteur médico-social, mis en danger du fait de la réduction considérable de ses moyens.

Madame la secrétaire d’État, monsieur le haut-commissaire, vous ne nous avez pas convaincus. Nous avons une tout autre conception de la solidarité nationale. Nous voterons donc contre ces crédits.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Ces crédits sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

J’appelle en discussion l’article 74 et l’amendement portant article additionnel après l’article 74, ainsi que les articles 75, 76 et 76 bis, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Solidarité, insertion et égalité des chances

Le deuxième alinéa de l’article L. 314-4 du code de l’action sociale et des familles est complété par une phrase ainsi rédigée :

« À cet effet, un arrêté interministériel fixe, annuellement, les tarifs plafonds ou les règles de calcul desdits tarifs plafonds pour les différentes catégories d’établissements sociaux et médico-sociaux mentionnés au premier alinéa, ainsi que les règles permettant de ramener les tarifs pratiqués au niveau des tarifs plafonds. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

En ce qui concerne les crédits du programme « Handicap et dépendance », vous comprendrez que je ne partage pas l’optimisme de M. le rapporteur spécial.

S’agissant, notamment, des établissements et services d’aide par le travail, les ESAT, qui, je le rappelle, se sont substitués aux centres d’aide par le travail en application de la loi du 11 février 2005, je constate que le nombre de places créées reste insuffisant au regard des besoins.

De l’aveu même de la direction générale de l’action sociale, le rythme de création de nouvelles places devrait s’établir à 2 500 par an pour pouvoir faire face aux besoins. Or le projet de budget pour 2009 ne prévoit la création que de 1 400 nouvelles places. C’est insuffisant. Par conséquent, un certain nombre de projets de création ou d’extension d’établissement ne pourront pas voir le jour, faute de crédits et de places.

Ma collègue Nicole Bricq m’a notamment signalé le cas d’un projet d’ESAT en Seine-et-Marne dont le dossier est complet depuis la fin de l’année 2006, qui a reçu toutes les autorisations nécessaires, notamment l’avis favorable du conseil régional d’organisation sociale et médico-sociale d’Île-de-France, mais qui reste bloqué faute de places affectées à l’établissement.

De telles situations existent dans de nombreux départements, ce qui porte préjudice avant tout aux personnes handicapées et à leurs familles. Il n’y a donc pas vraiment lieu de se réjouir de la « hausse » annoncée des crédits.

De surcroît, madame la secrétaire d’État, l’article 74 prévoit de fixer par arrêté un tarif plafond pour la dotation globale de fonctionnement des ESAT, entraînant une économie de 4 millions d’euros. Cette somme serait générée par un écrêtement des établissements dits « surdotés » en mettant en œuvre les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens. Mais vous aurez remarqué, mes chers collègues, que cet article ne prévoit pas de mesures permettant parallèlement de relever la dotation des établissements sous-dotés ! Or ils sont légion.

Aux termes mêmes de l’article précité, ces tarifs plafonds doivent être définis par arrêté interministériel, mais nous ne disposons, pour le moment, d’aucune information sur leurs montants. Pouvez-vous nous donner des indications précises sur ce point, madame la secrétaire d’État ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je tiens à vous indiquer, mes chers collègues, que nous avons pris quarante-cinq minutes de retard. Compte tenu de l’importance du sujet, la présidence a été libérale, mais elle ne sera pas laxiste. Il appartient donc à chacun de respecter son temps de parole, et je vous remercie, monsieur Godefroy, de l’avoir fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° II-159, présenté par Mmes Pasquet et David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Madame la secrétaire d’État, monsieur le haut-commissaire, avec cet article 74, vous entendez poursuivre le mouvement que vous avez lancé voilà plusieurs années dans le domaine médical et que vous avez étendu, à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, au domaine médico-social, par le biais de la tarification à l’activité couplée à l’instauration de montants plafonds.

Il s’agit pour vous, selon l’exposé des motifs présenté à l’Assemblée nationale, de rationaliser les coûts des établissements concernés, à savoir les établissements et services d’aide par le travail ou encore les centres d’hébergement et de réadaptation sociale.

En réalité, là encore, comme nous l’avions dénoncé durant l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale au sujet de l’application d’une mesure identique à celle-ci mais pour les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, il s’agit de faire de substantielles économies au détriment du domaine médico-social.

Vous souhaitez réaliser près de 4 millions d’euros d’économies avec cette mesure. Pour se faire, vous êtes prêts à renverser toute la logique du financement de ces établissements médico-sociaux.

Comme vous le savez, jusqu’à maintenant, ce financement était calculé en fonction des charges particulières de ces établissements, en somme, à partir de leurs besoins.

Vous nous proposez actuellement, au contraire, de moduler la participation de l’État au financement de ces établissements à partir des ressources qu’ils dégagent. Vous comptez fixer des montants plafonds sans tenir compte de certaines situations très particulières. Cela conduira inévitablement, ne vous en déplaise, à contraindre les établissements en cause à opérer une sélection des publics qu’ils accompagnent.

Ainsi, vous entérinez la fin de la loi du 2 janvier 2002 qui tendait justement, à partir des situations individuelles, à apporter la réponse la mieux adaptée. Tel n’est plus le cas en l’espèce. Vous faites passer le besoin de réponse individualisée par pertes et profits.

Pour toutes ces raisons, nous proposons la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

L’article 74 vise à instaurer des tarifs plafonds et à permettre une meilleure rationalisation des coûts dans les établissements sociaux et médico-sociaux. La commission y étant favorable, elle ne peut qu’être défavorable à l’amendement n° II–159.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Depuis plusieurs années, le Gouvernement met en place des mécanismes visant à réduire les écarts de coûts injustifiés entre les établissements médico-sociaux. Un tel dispositif existe déjà pour les établissements relevant du champ de l’ONDAM, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, qu’il s’agisse des EHPAD ou des établissements pour personnes handicapées.

L’article 74 vise simplement à élargir ce mécanisme aux établissements qui relèvent d’un financement d’État, c’est-à-dire les établissements et services d’aide par le travail, les centres d’hébergement et de réinsertion sociale et les centres d’accueil des demandeurs d’asile.

Bien évidemment, il ne s’agit pas d’appliquer un tarif uniforme indépendamment des contraintes qui pèsent sur les différents établissements.

En ce qui concerne les ESAT, pour lesquels la disposition doit entrer en vigueur dans le courant de l’année 2009, il ne sera pas fixé un tarif plafond unique. Nous tiendrons compte de la diversité des besoins d’accompagnement selon le type de handicap des travailleurs handicapés accueillis, car cette diversité engendre des variétés de coûts parfaitement justifiées.

Nous tiendrons également compte du type d’activité des ESAT et de leur plus ou moins grande complexité, ainsi que du poids représenté par les dépenses d’entretien des bâtiments.

Une enquête va être ouverte auprès des services déconcentrés et des ESAT pour apprécier finement la composition des coûts et aider à la détermination des tarifs plafonds.

Au total, il s’agit surtout d’une mesure qui vise à permettre une meilleure harmonisation sur l’ensemble du territoire et à assurée l’égalité de traitement entre les établissements.

Enfin, pour les établissements les moins bien dotés, monsieur Godefroy, nous dégageons 4 millions d’euros dans le cadre des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, les CPOM, afin de permettre leur mise à niveau.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 74 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° II-160, présenté par Mmes Pasquet et David, MM. Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 74, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. Après le troisième alinéa de l'article L. 7232-4 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

a bis) Les régies de quartier ;

II. Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.

III. Les pertes de recettes pour l'État et les organismes de sécurité sociale résultant du I sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Notre amendement a pour objet de permettre aux régies de quartiers de bénéficier de l’aide fiscale prévue à l’article 199 sexdecies du code général des impôts, c'est-à-dire des exonérations d’impôt sur le revenu au titre des sommes versées par un contribuable qui emploie un salarié à domicile.

La loi du 26 juillet 2005 prévoit que les associations et les entreprises qui œuvrent en direction des personnes les plus fragiles peuvent, si elles bénéficient d’un agrément, avoir droit à ces exonérations, mais aussi à un taux réduit de TVA, ou encore à des exonérations au titre de l’utilisation des chèques emploi service.

Toutefois, la loi admet certaines exceptions à cette obligation d’agrément, à l’image des associations intermédiaires, des centres communaux ou intercommunaux d’action sociale, qui peuvent donc obtenir un agrément dérogatoire, puisque ces structures ne remplissent pas l’obligation qui leur est faite par la loi de 2005, de se consacrer exclusivement à l’exercice d’une ou plusieurs activités de services à la personne.

Nous entendons, avec cet amendement, autoriser les régies de quartiers à obtenir cet agrément dérogatoire.

Ces régies jouent un rôle important dans nos quartiers. Elles regroupent en une même structure les collectivités locales, les logeurs sociaux et, naturellement, les habitants. En incluant les régies de quartier et de territoire labellisées par le Comité national de liaison des régies de quartiers, le CNLRQ, dans la liste des organismes dispensés de la condition d’activité exclusive, en leur permettant d’être agréées, vous permettrez de lever un obstacle au développement des services à la personne dans des territoires qui ont particulièrement besoin de politiques prioritaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Cet amendement est intéressant puisque l’assouplissement proposé permettrait aux régies de quartier d’obtenir l’agrément même si elles mènent plusieurs activités. Elles bénéficieraient ainsi du régime applicable aux associations intermédiaires ou aux centres communaux d’action sociale.

Néanmoins, le coût de cette mesure n’étant pas évalué, la commission souhaite, avant de se prononcer, entendre l’avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.

En effet, les régies de quartier, même si elles sont évoquées dans le code du travail, ne sont pas définies juridiquement. L’attribution du label « régie de quartier » relève de la seule compétence du Comité national de liaison des régies de quartier : les pouvoirs publics n’ont pas les moyens de la contrôler.

Par ailleurs, si l’on devait réfléchir à l’élargissement de la dispense de la condition d’activité exclusive, il faudrait prendre en compte l’ensemble des structures relevant de l’insertion par l’activité économique, et pas seulement les régies de quartier.

D’une façon plus générale, le Gouvernement souhaite limiter les dérogations accordées aux structures d’insertion par l’activité économique afin qu’elles tendent à se rapprocher du droit commun, et ce afin de limiter les effets possibles de concurrence déloyale.

Par ailleurs, un plan II de développement de services à la personne est en préparation et le Gouvernement souhaite que les modifications éventuelles de la réglementation dans ce secteur puissent s’inscrire dans ce cadre.

Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Il s’agit d’un sujet essentiel et complexe qui mérite d’être traité dans un débat plus général. Lorsque l’on s’occupe de la prise en charge des personnes âgées et handicapées, c’est-à-dire de personnes très fragiles, toutes les questions de label et d’agrément doivent être examinées avec la plus grande attention afin de garantir l’aspect qualitatif de la prise en charge.

Il s’agit non pas d’occulter ce secteur d’activité, mais bien au contraire de définir, dans le cadre du débat général auquel je vous renvoie, les voies et moyens qui nous permettront d’ouvrir ce champ d’intervention à d’autres acteurs tout en préservant cet aspect qualitatif.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Madame la secrétaire d’État, il existe de nombreuses similitudes entre les pratiques de certains centres communaux d’action sociale et celles de certaines régies.

En fait, il s’agit ici d’autoriser la mise à disposition de personnes salariées de régies municipales.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Non, il s’agit des régies de quartier et non pas des régies municipales.

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire

Ce sont des entreprises d’insertion !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Dans ces conditions, la commission des finances se range à l’avis du Gouvernement.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L’article L. 523-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L’allocation de soutien familial est ouverte de plein droit aux bénéficiaires de l’allocation de parent isolé qui assument la charge effective et permanente d’un ou plusieurs enfants remplissant l’une des conditions précédemment mentionnées. » ;

2° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 552-1, après les mots : « allocation de parent isolé, », sont insérés les mots : « de l’allocation de soutien familial versée dans les conditions prévues au cinquième alinéa de l’article L. 523-1, » ;

3° Après l’article L. 524-7, il est inséré un article L. 524-8 ainsi rédigé :

« Art. L. 524 -8. – Tout paiement indu d’allocation ou de la prime forfaitaire mentionnée à l’article L. 524-5 peut, sous réserve que l’allocataire n’en conteste pas le caractère indu, être récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de primes forfaitaires à échoir ou par remboursement de la dette selon les modalités fixées aux premier et troisième alinéas de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles ainsi qu’au 2° de l’article L. 262-22 du même code.

« La créance de l’organisme peut être réduite ou remise en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausses déclarations. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° II-58 rectifié bis, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après le 1° de cet article, insérer un 1° bis ainsi rédigé :

bis À compter du 1er juin 2009 et au plus tard au 1er janvier 2011 pour les départements d'outre-mer et les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, à l'article L. 523-1 tel qu'il résulte du 1° ci-dessus, les mots : « de l'allocation de parent isolé » sont remplacés par les mots : « du revenu de solidarité active visés à l'article L. 262-9 du code de l'action sociale et des familles, dont les ressources n'excèdent pas le montant forfaitaire majoré mentionné au même article, » ;

La parole est à M. le haut-commissaire.

Debut de section - Permalien
Martin Hirsch, haut-commissaire

C’est un amendement de coordination qui tire les conséquences de l’adoption de la loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Cet amendement tient en effet compte de la création du revenu de solidarité active.

À compter du 1er juin 2009, les bénéficiaires du RSA accéderont plus facilement à l’allocation de soutien familial, l’ASF. La commission ne peut qu’être favorable à cet amendement.

L'amendement est adopté.

L'article 75 est adopté.

I. – Après l’article L. 821-7-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 821-7-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 821-7-3. – Une procédure de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé mentionnée à l’article L. 5213-2 du code du travail est engagée à l’occasion de l’instruction de toute demande d’attribution ou de renouvellement de l’allocation aux adultes handicapés. »

II. – L’article L. 5213-2 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 5213-2. – La qualité de travailleur handicapé est reconnue par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées mentionnée à l’article L. 241-5 du code de l’action sociale et des familles. Cette reconnaissance s’accompagne d’une orientation vers un établissement ou service d’aide par le travail, vers le marché du travail ou vers un centre de rééducation professionnelle. L’orientation vers un établissement ou service d’aide par le travail, vers le marché du travail ou vers un centre de rééducation professionnelle vaut reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé. »

III. – Le 2° de l’article L. 821-2 du code de la sécurité sociale est abrogé. Le 3° devient le 2°.

IV. – Après l’article L. 821-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 821-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 821 -3-1. – Le montant de l’allocation aux adultes handicapés est fixé par décret.

« Le coefficient annuel de revalorisation de l’allocation est au moins égal à l’évolution prévisionnelle des prix à la consommation hors tabac prévue dans le rapport économique, social et financier annexé à la loi de finances pour l’année considérée.

« Ce minimum de revalorisation est réajusté si l’évolution constatée des prix à la consommation hors tabac, mentionnée dans le rapport économique, social et financier annexé à la loi de finances pour l’année suivante, est différente de celle qui avait été initialement prévue.

« Le minimum de revalorisation mentionné au deuxième alinéa peut être assuré au moyen de plusieurs révisions du montant de l’allocation dans l’année. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

Comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner, nous sommes loin de trouver aussi satisfaisants que notre rapporteur les crédits du programme « Handicap et dépendance », non seulement en termes financiers, mais également du point de vue de la philosophie qui sous-tend les mesures proposées.

L’article 76 en est une parfaite illustration sur au moins trois points.

Premièrement, si nous reconnaissons les efforts qui ont été faits pour revaloriser l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, force est de constater cependant qu’ils ne sont pas aussi importants que vous voudriez nous le faire croire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

En effet, cette revalorisation est exprimée en euros courants et non en euros constants, ce qui est très différent en période de forte inflation.

Ainsi, pour l’année 2008, l’AAH a été revalorisée de 5 %. Toutefois, l’inflation qui, cette année, devrait atteindre 3 %, limite en fait cette augmentation à 2 % seulement, sans compter, et j’attire votre attention sur ce point, monsieur le rapporteur spécial, que les effets de l’inflation moyenne sont différents selon les revenus.

Comme l’ont démontré certains experts, lorsque l’on calcule l’inflation sur la consommation d’une personne ayant un revenu inférieur à 1 000 euros par mois, on atteint en fait un chiffre entre 8% et 12 %. Je rappelle que le montant de l’AAH passera de 652 euros à 682 euros par mois. Nous savons que l’effet est extrêmement négatif sur les bas revenus.

Pour 2009, les experts économiques, notamment ceux de l’OCDE, prévoient pour l’instant une inflation aux alentours de 2 %. Le secrétaire d’État chargé de la consommation, M. Luc Chatel, estime même qu’elle devrait être de 2% à 2, 5%. On nous prépare !

La revalorisation réelle de l’AAH sera, en fait, moitié moins élevée que celle que l’on nous annonce aujourd’hui.

Quoi qu’il en soit, et c’est un sujet sur lequel nous avons longuement débattu en 2005, son montant reste toujours très en deçà du seuil de pauvreté.

Deuxièmement, nous avons de sérieux doutes sur l’orientation des mesures que vous proposez en matière d’insertion professionnelle des personnes handicapées.

Comme je l’ai indiqué à l’occasion lors de l’examen de la loi généralisant le revenu de solidarité active, parier sur l’employabilité des personnes peut être positif à condition que cela ne soit pas exclusif. C’est vrai en particulier des personnes en situation de handicap. Il me semble peu pertinent de lier attribution de l’AAH et retour à l’emploi.

Troisièmement, enfin, en ce qui concerne les places en établissements, vous annoncez notamment 20 000 aides au poste et aides financières spécifiques pour les entreprises adaptées. La vérité est qu’en 2008 le nombre d’aides au poste pour les entreprises adaptées avait fortement baissé. En fait, et si j’ose dire, on revient seulement à la situation antérieure.

La vérité, et j’attire également votre attention sur ce point, est aussi que l’augmentation budgétaire apparente ne concerne pas la subvention spécifique, dont l’enveloppe est maintenue à 42 millions d’euros. Or cette subvention à pour vocation non seulement de soutenir l’accompagnement social et professionnel des travailleurs handicapés, mais également de permettre à l’entreprise adaptée de faire face aux mutations économiques en se modernisant et de développer les compétences de ses salariés par la formation.

Il aurait fallu faire un effort aussi dans ce domaine essentiel pour la pérennité des entreprises adaptées, surtout compte tenu de la crise financière actuelle qui touche énormément les PME, afin de leur donner les moyens de se moderniser pour conserver et développer leurs marchés et leurs emplois.

L'article 76 est adopté.

I. – Après le 12° du I de l’article 128 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, il est inséré un 13° ainsi rédigé :

« 13° Politique de l’égalité entre les femmes et les hommes. »

II. – L’article 132 de la loi des finances pour 2000 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999) est abrogé.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Dès le 17 avril dernier, j’avais interpellé le Gouvernement pour lui faire part de mon inquiétude. Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, un schéma mettait en péril l’approche transversale et partenariale mise en œuvre par notre pays dans le cadre du service des droits des femmes et de l’égalité, le SDFE. Cette approche est pourtant vivement recommandée par l’Union européenne ; il est vrai que nous n’en suivons pas toujours les préconisations. J’avais considéré qu’il s’agissait d’un mauvais signe.

Je crois me rappeler que Mme Morano m’avait répondu que la promotion des droits des femmes, comme la famille, est une question essentiellement interministérielle et que l’objectif du Gouvernement était d’inscrire la politique de l’égalité au cœur de l’exercice budgétaire par l’élaboration d’un document de politique transversale lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2009. Or, en guise de présentation transversale, on organise plutôt, me semble-t-il, l’abandon du SDFE dans sa forme actuelle.

Force est en outre de constater que les craintes des personnels sont justifiées. En effet, comme dans le reste de la fonction publique, la mise en œuvre de la RGPP dans ce service s’effectue sans le moindre dialogue social. Elle n’en a pas moins suscité la mobilisation, notamment, des syndicats, relayés par le collectif « Droits des femmes en danger » auquel j’appartiens, des déléguées régionales aux droits des femmes et de l’Observatoire de la parité. Et l’on persiste à prétendre que tout va bien.

La réalité semble cependant opposer un démenti à ce discours rassurant. Dans les départements, le rattachement des chargées de mission départementales, selon les cas, aux directions départementales de la cohésion sociale ou aux directions départementales de la population et de la cohésion sociale, fait peser une menace de dilution des missions départementales « Droits des femmes et égalité » dans d’autres thématiques, sinon une menace de suppression pure et simple des postes de chargée de mission.

Le service central doit, pour sa part, être intégré sous une forme encore à définir à la future direction générale de la cohésion sociale, comme si les personnels n’avaient rien à dire sur leur mission !

Après la disparition du site internet dédié aux droits des femmes et à l’égalité et la suppression du centre de documentation du SDFE, vous nous proposez d’entériner la fin pure et simple du service central et le démantèlement de son réseau. Sans celui-ci, les différents positionnements territoriaux rendront impossibles le pilotage et la mise en œuvre d’une politique d’égalité entre les femmes et les hommes efficace et cohérente comme nous pouvions l’espérer.

Ces choix empêcheront de tenir véritablement compte de la question de l’égalité dans l’ensemble des politiques publiques que vous évoquez par ailleurs. Les missions du service seront effectivement segmentées et confinées dans des approches thématiques cloisonnées de manière étanche.

Peut-être pourrez-vous, madame la secrétaire d’État, me rassurer quelque peu, mais le constat que je dresse m’en fait douter.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Valérie Létard, secrétaire d'État.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais effectivement dissiper l’essentiel des inquiétudes exprimées par Mme Borvo Cohen-Seat à propos de l’avenir du SDFE et de la manière dont la politique du droit des femmes se situe dans le cadre de la RGPP.

Je vous rappellerai donc très rapidement que le Gouvernement entend créer, dans le cadre de la RGPP, une délégation interministérielle aux droits des femmes. Il s’agit de garantir la dimension interministérielle de notre approche, dimension sur laquelle se fonde ce document de politique transversale dont le principe a été introduit par l’Assemblée nationale à l’occasion de l’examen du présent projet de loi de finances. Ce document sera donc créé dès le prochain exercice budgétaire. Ainsi disposerons-nous de l’outil nécessaire pour mener une politique telle que l’Union européenne la définit. Le fait est acquis.

Je voulais également vous rassurer sur la question des territoires. Aujourd’hui, nous avons envoyé aux préfets une circulaire leur demandant de rattacher les déléguées régionales au secrétariat général des affaires régionales, le SGAR.

Debut de section - Permalien
Valérie Létard, secrétaire d'État

Non, tous les territoires n’étaient pas dans la même situation. La circulaire répond à une demande exprimée sur toutes les travées de cet hémicycle. Tous les délégués régionaux aux droits des femmes seront donc bien rattachés au champ interministériel des services déconcentrés de l’État.

Dans le cadre de la mise en œuvre de la RGPP, pour des raisons d’organisation technique, le niveau départemental demeure. Nous travaillons à trouver la meilleure articulation entre ce niveau et celui des déléguées. Il s’agit à la fois de tenir compte de la spécificité de chaque département et de garantir une approche interministérielle.

Voilà pour vous rassurer, madame Borvo Cohen-Seat. Sachez que nous nous préoccupons vraiment du problème que vous évoquez.

L'article 76 bis est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Avant d’examiner les crédits de la mission « Outre-mer », je vous propose, mes chers collègues, une courte suspension de séance.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-huit heures cinq, est reprise à dix-huit heures quinze.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Outre-mer » (et articles 64 et 65).

La parole est à M. Marc Massion, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission des finances exposera en deux temps les crédits de la mission « Outre-mer ».

Je ferai tout d’abord une présentation globale de l’évolution de la mission ainsi que des crédits à destination de l’outre-mer en général et de ceux du programme « Emploi outre-mer » en particulier. Notre collègue Éric Doligé, également rapporteur spécial de la mission « Outre-mer », vous présentera ensuite le second programme de la mission, « Conditions de vie outre-mer », ainsi que les deux articles rattachés.

Avec 1, 97 milliard d’euros en autorisations d’engagement, la mission « Outre-mer » représente en 2009 moins de 15 % de l’effort budgétaire en faveur de l’outre-mer. Elle ne donne donc qu’une vision très parcellaire de l’effort de l’État en direction de l’outre-mer, qui, en réalité, s’élèvera au total à 13, 3 milliards d’euros de crédits.

À ces 13, 3 milliards d’euros, il convient par ailleurs d’ajouter 3, 3 milliards d’euros de dépenses fiscales à destination de l’outre-mer, en hausse de 17 % par rapport à l’année 2008.

Au regard de cette augmentation, que l’on peut qualifier d’« incontrôlée », il nous est proposé de mettre en place de nombreuses mesures destinées à limiter le montant des dépenses fiscales consacrées à l’outre-mer. Issues de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, ces mesures sont contenues, d’une part, dans le présent projet de loi de finances et, d’autre part, dans le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer, ou LODEOM, que notre assemblée devrait examiner au début de l’année 2009.

Le projet de loi de finances pour 2009 prévoit principalement deux mesures en ce sens : la réforme du régime des exonérations de cotisations patronales et le plafonnement des réductions d’impôt sur le revenu résultant des opérations de défiscalisation outre-mer, repris à l’article 43 non rattaché.

Le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer, quant à lui, prévoit le recentrage sur le logement social de la défiscalisation des investissements en matière de logement. Nous nous félicitons de la volonté du Gouvernement d’axer davantage les efforts financiers de l’État sur le logement social, qui subit actuellement les conséquences de la défiscalisation dans le secteur du logement libre.

De nombreuses orientations du présent projet de loi de finances sont d’ailleurs liées aux dispositions contenues dans le projet de loi LODEOM.

Le deuxième point d’ordre général que je voudrais évoquer concerne la structure du secrétariat d’État à l’outre-mer. Celle-ci a évolué de manière satisfaisante depuis l’année dernière, puisqu’une unique délégation générale à l’outre-mer, la DGOM, a été créée au 1er septembre 2008 pour remplacer les deux directions existantes. L’objectif est de réorienter le secrétariat d’État vers des missions de coordination, d’expertise et d’évaluation de l’action de l’État outre-mer, conformément aux souhaits formulés à plusieurs reprises par la commission des finances du Sénat.

Certes, les effets de cette réorganisation ne se feront sentir qu’à moyen terme, mais la commission des finances n’en sera pas moins attentive à ce qu’ils soient réels et effectifs. Il serait notamment souhaitable que le secrétariat d’État puisse disposer d’informations plus complètes et plus fiables sur l’efficacité des nombreux dispositifs spécifiques mis en œuvre en faveur de l’outre-mer.

Pour ce qui est des crédits, je relève que la mission « Outre-mer » fait figure d’exception au sein du présent projet de loi de finances, puisque ses dotations croissent de 19 % en autorisations d’engagement et de 16 % en crédits de paiement. Cette augmentation concerne aussi bien le programme « Emploi outre-mer » que le programme « Conditions de vie outre-mer ».

Les crédits du programme « Emploi outre-mer » sont en hausse de près de 20 %, tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement, afin de compenser aux organismes de sécurité sociale le manque à gagner résultant des exonérations de charges sociales propres à l’outre-mer. La commission des finances avait à de nombreuses reprises constaté la sous-budgétisation de ces compensations, qui provoquait l’accumulation d’une dette de l’État à l’égard desdits organismes, principalement de leur agence centrale, l’ACOSS. Ainsi, en 2008, seuls 867 millions d’euros étaient prévus au titre de la compensation, alors que le coût global des exonérations était estimé à plus de 1, 15 milliard d’euros !

Les crédits consacrés à la compensation de ces exonérations passent pour 2009 à 1, 011 milliard d’euros. Cette hausse de 16, 6 % correspond à un effort marqué pour mettre fin aux sous-budgétisations récurrentes évoquées.

Par ailleurs, le programme « Emploi outre-mer » comporte des mesures qui visent à accentuer la politique d’insertion des jeunes éloignés de l’emploi et se traduisent par l’augmentation des crédits consacrés à deux dispositifs spécifiques : le projet initiative jeune « création d’entreprise », ou PIJ, et la formation individualisée en mobilité, ou FIM.

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Éric Doligé, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, prenant la suite de notre collègue Marc Massion, je m’attacherai pour ma part à détailler le second programme de la mission, « Conditions de vie outre-mer », et les articles 64 et 65 rattachés.

Les crédits du programme « Conditions de vie outre-mer » bénéficient eux aussi de la hausse globale des crédits de la mission, puisqu’ils augmentent de 17 % en autorisations d’engagement et de 10 % en crédits de paiement.

En matière de logement, le présent projet de loi de finances est mitigé. En effet, d’un côté, le montant des autorisations d’engagement connaît une forte augmentation – elle atteint 9, 3 % – qui montre qu’il a été pris acte des besoins réels des collectivités territoriales d’outre-mer. Mais, de l’autre côté, l’écart entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement croît de manière inquiétante, passant de 36 millions d’euros en 2008 à 49 millions d’euros en 2009. Comme la commission le notait dans ses précédents rapports, une telle situation risque d’être à l’origine d’impayés et de l’accumulation d’une dette auprès des bailleurs sociaux. Le Gouvernement devra nous éclairer sur ce point particulier.

Par ailleurs, les crédits consacrés au financement des opérations contractualisées entre l’État et les collectivités d’outre-mer augmentent de 13 %. Cette hausse est très satisfaisante, puisque de réels problèmes de sous-budgétisation avaient été relevés les années précédentes.

Enfin, le programme « Conditions de vie outre-mer » tient compte de la mise en œuvre du fonds de continuité territoriale et du passeport mobilité. Ces nouveaux outils, prévus dans le projet de loi LODEOM, doivent permettre de remédier aux dérives de l’ancien dispositif du passeport mobilité, dont le coût a triplé entre 2003 et 2008.

On peut regretter le manque de clarté de ce programme quant à l’évolution des dotations spécifiques propres aux collectivités d’outre-mer. Ainsi, il contient peu d’informations sur des dispositifs importants, telle la dotation globale de développement économique de la Polynésie française, qui regroupe 151 millions d’euros pour 2009. À l’inverse, d’autres dotations, telle la dotation de premier numérotage de Mayotte, qui s’élève à 150 000 euros, sont manifestement insuffisantes pour atteindre leur fin.

J’en viens aux deux articles rattachés à la mission « Outre-mer ».

L’article 64 a pour objet de proroger jusqu’en 2011 deux dotations spécifiques propres à Mayotte.

La première est la dotation exceptionnelle liée à la réforme de l’état civil. D’un montant de 300 000 euros par an, elle doit permettre à Mayotte de mettre en place l’état civil qui lui fait cruellement défaut. Il serait souhaitable que le Gouvernement nous apporte des éclairages sur l’avancement de ces travaux.

La seconde est la dotation spéciale de construction et d’équipement des établissements scolaires, qui sera abondée à hauteur de 4, 5 millions d’euros en 2009 ; sa prorogation est essentielle pour permettre à Mayotte de rattraper son retard en équipements scolaires.

L’article 65, sur lequel portent un certain nombre d’amendements, vise à réformer le dispositif spécifique d’exonération de cotisations patronales dont bénéficient les entreprises ultramarines.

Actuellement, ce dispositif prévoit une exonération totale des cotisations patronales dues pour l’ensemble des salariés, jusqu’à une limite qui varie entre 1, 3 et 1, 5 SMIC, selon le degré d’exposition du secteur à la concurrence. L’exonération n’est pas dégressive, ce qui signifie que, même pour les salariés les mieux payés, les entreprises restent exonérées d’une partie de leurs cotisations patronales.

L’article a un double objet. D’une part, il tend à harmoniser les plafonds d’exonération à 1, 4 SMIC, afin de donner une plus grande lisibilité au dispositif. D’autre part, il vise à rendre l’exonération dégressive : elle sera totale jusqu’à 1, 4 SMIC pour diminuer linéairement et s’annuler à 3, 8 SMIC. Cette dégressivité est souhaitable, puisqu’elle concentre les aides sur les bas salaires, à l’image de l’exonération de droit commun pratiquée en métropole.

Par ailleurs, l’article 65 tend à mettre en place une exonération plus importante pour certains secteurs prioritaires.

Enfin, il subordonne le droit à exonération au paiement effectif des cotisations et à l’absence de travail illégal. Cette condition avait été supprimée en 2003 par la loi dite « Girardin » ; il semble souhaitable qu’elle soit de nouveau appliquée.

Au total, la réforme proposée à l’article 65 paraît efficace et équilibrée. En termes financiers, elle rendra possible une économie de 138 millions d’euros en année pleine qui permettra notamment de contribuer au financement des mesures prévues dans le projet de loi LODEOM.

La commission a toutefois déposé un amendement visant à subordonner l’entrée en vigueur de ce dispositif, qui faisait initialement partie du projet de loi LODEOM, à la promulgation de cette future loi.

La commission des finances vous proposera donc, mes chers collègues, d’adopter sans modification les crédits de la mission « Outre-mer » et l’article 64, ainsi que l’article 65, mais modifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Georges Patient, en remplacement de M. Claude Lise, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je vous prie tout d’abord d’excuser notre collègue Claude Lise, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, qui a dû rentrer en Martinique à la suite d’un décès dans sa famille.

Le projet de budget pour l’outre-mer dont nous débattons aujourd’hui s’inscrit dans un contexte particulier, puisqu’il anticipe un certain nombre de mesures prévues dans le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer que nous devrions examiner au début de l’année prochaine.

Ce projet de budget est, à première vue, en augmentation substantielle puisqu’il croît, à périmètre constant, de 9, 2 % en crédits de paiement. Néanmoins, cette progression, dont beaucoup se félicitent, doit être relativisée. En effet, elle servira pour l’essentiel à combler les dettes que l’État a contractées auprès des organismes de sécurité sociale, dans le cadre des compensations d’exonérations de charges patronales. Ces crédits ne financeront en aucun cas des dépenses nouvelles.

Je voudrais évoquer la présentation des crédits de la mission « Outre-mer », qui est encore largement perfectible.

La commission des affaires économiques avait recommandé au Gouvernement l’établissement de deux documents : l’un aurait récapitulé l’ensemble des crédits destinés aux collectivités d’outre-mer provenant de chacun des ministères et des différents fonds d’intervention européens ; l’autre aurait présenté les crédits par collectivité destinataire. Nous n’avons à ce jour obtenu ni l’un ni l’autre, et nous espérons, monsieur le secrétaire d’État, que vous répondrez à cette demande pour les prochains budgets.

Avant d’aborder l’examen des crédits proprement dit, je tiens à souligner que les collectivités d’outre-mer sont une chance pour la France. Au-delà de la diversité culturelle et de la biodiversité d’une très grande richesse qu’elles lui apportent, elles lui offrent une présence sur quatre océans et des possibilités d’échanges, notamment économiques, avec de nombreuses régions du monde. Elles doivent toutefois relever d’importants défis pour promouvoir leur développement.

J’évoquerai tout d’abord les crédits consacrés à l’emploi.

Vous le savez, les économies ultramarines sont confrontées à des fragilités particulières du fait des contraintes d’éloignement, du dynamisme démographique, des pressions migratoires et, surtout, du différentiel de coût du travail avec les pays avoisinants.

Le décalage de développement avec la métropole se mesure d’ailleurs à l’aune du taux de chômage : il est plus de deux fois supérieur à celui de l’Hexagone, et le rapport est même de un à trois lorsque l’on concentre l’analyse sur les seuls DOM, où il s’élève en moyenne à 26 % de la population active.

Face à une telle situation, qui risque de s’aggraver sous l’effet de la crise économique, le dispositif d’exonération de cotisations patronales, mis en place dès 2000 par la loi d’orientation pour l’outre-mer et amélioré, sur certains points, par la loi Girardin de 2003, me semble essentiel en ce qu’il permet de restaurer la compétitivité du travail.

C’est pourquoi la réforme envisagée par l’article 65 du projet de loi de finances ne me paraît pas aller dans le bon sens.

Au-delà de l’alourdissement des charges pour nos entreprises, cette réforme risque de créer une « trappe à bas salaires », en incitant au recrutement de salariés rémunérés à 1, 4 SMIC.

Un tel dispositif n’est pas de nature à favoriser les emplois qualifiés outre-mer, pourtant indispensables dans de nombreux secteurs d’activité, notamment à haute valeur ajoutée.

Quant aux dépenses fiscales, elles me paraissent fondamentales pour la compensation de nos handicaps de compétitivité.

Mes chers collègues, le Gouvernement s’est engagé dans une vaste révision des « niches fiscales ». Même si une actualisation peut sembler nécessaire, la réforme de la défiscalisation outre-mer envisagée par l’article 43 du projet de loi de finances touche trop brutalement nos territoires.

En effet, le niveau de plafonnement prévu risque de rendre beaucoup moins attractifs les investissements en outre-mer. La défiscalisation outre-mer n’est pas un avantage indu, c’est un outil indispensable à l’investissement, au développement et à l’emploi dans des territoires structurellement sous-capitalisés.

En ce qui concerne les crédits consacrés au programme « Conditions de vie outre-mer », je constate que la priorité est toujours accordée au logement. Et pour cause ! Dans ce domaine, nous sommes confrontés à des difficultés particulières : insuffisance de l’offre, en particulier dans le secteur du logement social ; habitat insalubre encore trop important et prolifération de l’habitat spontané ; risques sismiques et climatiques ; rareté et cherté du foncier.

Face à cette réalité, les moyens sont cette année encore très insuffisants et je regrette, en particulier, la diminution de 40 % de l’effort en faveur de l’accession à la propriété.

Je constate également que persiste l’épineux problème de la dette de l’État envers les entreprises du bâtiment et des travaux publics qui œuvrent dans le domaine de l’amélioration de l’habitat et de la construction très sociale. Cette année encore, le budget fait apparaître un écart de près de 50 millions d’euros entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement consacrés au logement.

S’agissant des crédits destinés à la coopération régionale, je voudrais souligner, monsieur le secrétaire d’État, que les crédits inscrits paraissent encore modestes au regard des fortes potentialités de développement qui existent dans ce domaine.

J’en viens maintenant à la création du Fonds exceptionnel d’investissement, destiné à soutenir la dynamique de développement des infrastructures et des équipements déterminants pour la croissance de nos territoires. Vous en conviendrez, les financements prévus sont insuffisants, compte tenu des objectifs : 16 millions d’euros en crédits de paiement. Je doute que cette somme soit de nature à garantir un financement à la hauteur des besoins.

En définitive, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les besoins en matière d’emploi et de logement sont encore considérables. L’État ne doit donc pas relâcher son effort en direction des populations ultramarines. Or les réformes programmées en matière de défiscalisation ou d’exonération de charges sociales constituent de réels sujets de préoccupation.

C’est pourquoi, en l’état actuel de ce projet de loi, le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques n’a pas émis un avis favorable sur l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer », la commission s’étant, au contraire, prononcée en faveur de leur adoption.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Payet

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2009 consacre un engagement financier fort de l’État en faveur de l’outre-mer. Il est d’autant plus appréciable qu’il intervient dans un contexte budgétaire particulièrement contraint. Les crédits affectés à cette mission ne représentent cependant qu’une part modeste des 13, 2 milliards d’euros qui seront globalement consacrés par l’État à l’outre-mer, sans compter la dépense fiscale, évaluée pour 2009 à 3, 3 milliards d’euros, soit une augmentation de 17, 4 %.

Cet effort financier intervient au moment où un nouvel élan doit être donné au développement des territoires ultramarins ; malgré la croissance réelle de leurs économies, la situation reste particulièrement fragile et plus encore avec la crise mondiale, aujourd’hui confirmée.

Il faut d’abord renforcer les outils juridiques et budgétaires permettant le rattrapage de l’outre-mer par rapport à la métropole en matière d’emploi.

Il convient également de relancer la politique du logement outre-mer, tant les besoins sont nombreux et insatisfaits, malgré les multiples dispositifs mis en place.

Sur ces deux sujets, j’espère que vous pourrez nous rassurer, monsieur le secrétaire d’État, sur le fait que les plafonnements des avantages fiscaux prévus par ce projet de loi, qui obéissent à une volonté de moralisation légitime, ne détourneront pas les investisseurs de l’outre-mer.

Pouvez-vous nous donner des précisions sur la revalorisation du « forfait charges » dans les DOM et l’extension de l’allocation de logement foyer ?

Vous avez déclaré récemment vouloir mettre à disposition des collectivités d’outre-mer pour un euro symbolique des terrains appartenant à l’État pour la construction de logements sociaux. Pouvons-nous en savoir plus à ce sujet, monsieur le secrétaire d’État ?

Il est enfin nécessaire d’accomplir de nouvelles avancées en termes de santé publique, car si la situation sanitaire en outre-mer est à certains égards très spécifique, d’autres aspects, pourtant dépourvus de particularités par rapport à la métropole, y sont moins bien pris en charge par la collectivité publique.

La commission des affaires sociale a d’ailleurs adopté trois amendements destinés à limiter l’accès au tabac outre-mer ; nous en reparlerons.

Les crédits proposés répondent de façon relativement satisfaisante à ces défis et devraient également permettre le financement d’un certain nombre de mesures figurant dans le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer, que nous examinerons au début de l’année prochaine.

J’observe notamment que sera mieux financée la compensation aux organismes sociaux des exonérations de charges sociales patronales. Au cours de l’année 2009, celles-ci devraient obéir à deux régimes juridiques successifs : d’abord, au dispositif introduit par la loi de programme de 2003 ; ensuite, au dispositif recentré d’exonération de charges prévu par l’article 65 de ce projet de loi de finances, qui devrait entrer en vigueur le 1er avril prochain.

Il faut évoquer aussi l’augmentation des crédits destinés à l’insertion et à la qualification professionnelle, qui financent notamment le service militaire adapté. Je voudrais mettre en exergue l’exemplarité de ce dispositif, qui réussit à qualifier des jeunes sans diplôme et à insérer près de 80 % d’entre eux dans la vie professionnelle. Ce succès doit amener à envisager son extension à un nombre plus élevé de volontaires.

Ce projet de loi de finances prévoit également une augmentation sensible de la dotation de la ligne budgétaire unique. Pourtant, j’observe qu’en matière de logement social la réalisation de l’objectif de la loi DALO, instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, qui prévoit la construction de 37 500 logements sociaux d’ici à la fin de l’année 2009, a été reportée à 2012.

Dans ce contexte, on peut regretter l’écart, de nouveau marqué cette année, entre le montant des autorisations d’engagement et celui des crédits de paiement, soit 49 millions d’euros pour 2009. S’il devait être renouvelé lors des prochaines lois de finances, nous risquons de revenir à la situation comptable dégradée de l’année 2006.

Enfin, je regrette que la fusion des actions « Sanitaire et social » et « Culture, jeunesse et sports » du programme « Conditions de vie outre-mer » se traduise par une baisse de 2, 2 millions d’euros des mesures sanitaires et sociales et, en particulier, du financement d’actions de santé dans les collectivités d’outre-mer, tant ce domaine revêt pour elles un aspect essentiel.

Comme vous l’avez constaté, mes chers collègues, la particularité de la mission « Outre-mer » est cette année qu’elle s’accompagne d’un article rattaché – l’article 65 – qui modifie le régime d’exonérations de charges sociales patronales s’appliquant dans les quatre départements d’outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon depuis 2003.

Cet article constitue la reprise de dispositifs figurant dans le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer que le Gouvernement a souhaité insérer dans ce projet de loi de finances.

L’objectif est de concentrer le dispositif actuel d’exonérations sur les salaires pour lesquels l’impact sera le plus fort. Cette réforme va incontestablement dans le sens d’une meilleure efficacité de la dépense publique. Pour autant, la commission des affaires sociales a adopté deux amendements destinés à renforcer son effet positif sur l’emploi.

Si la qualité de ce budget doit donc être saluée, les mesures proposées m’inspirent trois interrogations.

La première porte sur la réforme du dispositif de mobilité, notamment celle de son opérateur, l’Agence nationale pour la promotion et l’insertion des travailleurs d’outre-mer.

La deuxième a trait à la revalorisation des paramètres du financement du logement social outre-mer, cette question étant indissociable du montant inscrit sur la ligne budgétaire unique.

La troisième, enfin, concerne la formation des personnels médicaux outre-mer, car la Réunion est sous-médicalisée. Avec un étudiant formé pour 24 800 habitants, contre un pour 8700 en métropole, elle accuse encore le niveau le plus faible des régions françaises.

Sans doute certains de ces points seront-ils l’objet de dispositions de la future loi pour le développement économique de l’outre-mer ou de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires » en ce qui concerne la formation des médecins, mais ils sont également étroitement liés aux choix budgétaires faits dans le cadre du présent projet de loi de finances. C’est pourquoi je souhaiterais connaître les orientations du Gouvernement à court terme et à moyen terme.

Ces questions ne font pas obstacle, mes chers collègues, à l’avis favorable de la commission des affaires sociales sur l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer » pour 2009, ainsi que sur l’article 65 rattaché, sous réserve de l’adoption des amendements que je vous présenterai dans la suite de la discussion.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Christian Cointat, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cointat

Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le développement de l’outre-mer est non seulement un devoir de solidarité vis-à-vis de nos compatriotes ultramarins, mais également un investissement utile à la France tout entière.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cointat

N’oublions pas, comme l’a souligné M. le secrétaire d’État devant la commission des lois, qu’environ 95 % de la surface maritime de notre pays proviennent des zones économiques générées par l’outre-mer, ce qui nous place au deuxième rang mondial des puissances maritimes et nous permet d’être présents dans les instances internationales couvrant notamment les trois principaux océans : l’océan Atlantique, l’océan Indien et le Pacifique, sans compter l’océan Antarctique et d’autres mers du globe.

L’effort de l’État qui, en dépit d’une conjoncture difficile, fait plus que se maintenir avec une augmentation de 3, 4 %, est donc pleinement justifié et doit être salué. Les crédits globaux, tous ministères confondus, sont ainsi loin d’être négligeables, atteignant environ 16, 5 milliards d’euros.

Toutefois, la mission « Outre-mer » proprement dite, que nous examinons aujourd’hui, se limite à une petite partie de l’ensemble des mesures prévues pour l’outre-mer, à savoir un peu plus de 14 % de la totalité.

De plus, comme les années précédentes, on doit constater, comme si cela devait être systématique, une modification du périmètre de cette mission par rapport à l’exercice précédent, ce qui rend les analyses et les comparaisons plus difficiles. Il serait temps d’arrêter une bonne fois pour toutes le cadre de cette mission budgétaire, soit en la recentrant clairement et définitivement sur la seule coordination des politiques ultramarines, soit en changeant de cap et en se tournant, ainsi que le permet la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, vers une mission interministérielle.

Certes, les documents de politique transversale sont de mieux en mieux faits, je le reconnais, et donc de plus en plus explicites, mais, au pays de Descartes, un minimum de logique et de cohérence s’impose, d’autant plus que de nouvelles modifications du périmètre de cette mission sont annoncées pour l’avenir.

Comme je l’ai dit précédemment, l’effort de l’État pour l’outre-mer continue et s’amplifie. On peut s’en féliciter. Encore faut-il veiller à ce qu’il soit efficace, c’est-à-dire « rentable », en suscitant un développement réel et concret des économies ultramarines et du niveau social des territoires concernés.

En d’autres termes, il est essentiel de mesurer régulièrement les effets directs et indirects de chacun des instruments retenus, qu’ils le soient sous forme de subvention, de défiscalisation ou d’exonération de charges sociales.

Cet effort doit également se fonder sur une sincérité des marchés et des coûts de distribution, faute de quoi il perdrait en efficacité pour une charge financière plus élevée, génératrice, de surcroît, d’effets d’aubaine. Aussi, nous ne pouvons qu’approuver vos déclarations devant la commission des lois, monsieur le secrétaire d’État, selon lesquelles les maîtres mots de votre action dans ce domaine sont et seront : « transparence et concurrence ».

Nous savons tous qu’un grand nombre de prix outre-mer sont anormalement élevés et ne se justifient ni par le surcoût du transport dû à l’éloignement et à l’insularité, ni par l’étroitesse du marché. Il est donc essentiel de favoriser la vérité des prix pour répondre à l’attente des populations ultramarines et favoriser le développement économique et social de ces territoires.

Il en est de même pour la continuité territoriale : l’engagement important de l’État ne trouvera sa pleine signification qu’avec des tarifs compétitifs et un nombre de sièges passagers suffisant.

En effet, la transparence et la concurrence dans une approche équilibrée seront de nature à grandement améliorer la situation et nous appuyons la démarche du secrétariat d’État à l’outre-mer et donc du ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.

La commission des lois, comme à son habitude, mes chers collègues, a procédé, lors de l’examen de ce budget, à un tour d’horizon des différents territoires d’outre-mer pour faire le point sur leurs éventuels problèmes. Je vais rapidement résumer ses réactions.

La commission des lois regrette que l’immigration clandestine, malgré des mesures importantes, reste aussi préoccupante, notamment en Guyane, où elle aggrave l’insécurité, ou en Guadeloupe, à Saint-Martin et à Mayotte.

Elle regrette également la dégradation persistante de la situation carcérale, avec des taux de surpopulation que l’on ose à peine indiquer : par exemple, 251 % à Saint-Denis de la Réunion, ou 285 % à la prison Nuutania, à Tahiti. La visite de ces établissements, que votre rapporteur pour avis a pu faire pour certains d’entre eux, est une épreuve encore plus significative, mais qui permet de comprendre que seuls le dévouement et le pragmatisme du personnel de l’administration pénitentiaire sont à même d’éviter le pire, et encore doivent-ils agir dans des conditions extrêmement difficiles.

Quant aux nouvelles constructions, elles sont souvent absorbées et dépassées, en Martinique notamment, par l’augmentation du nombre de détenus.

La commission des lois ne cache pas non plus ses préoccupations quant aux conditions qui sont celles de la justice dans les différents territoires, avec parfois un manque crucial de moyens.

La jeunesse mérite toute notre attention, et l’outil « enseignement », qui est fondamental, prend une dimension plus importante encore outre-mer. L’État en est conscient et ne ménage pas, je tiens à le souligner, son engagement en la matière, mais la démographie galopante, éventuellement liée à une immigration massive, a parfois raison des efforts entrepris en matière d’équipement et de fonctionnement.

Tel est le cas, par exemple, à Mayotte – une collectivité qui attend la suite du processus de départementalisation –, où le nombre élevé d’enfants scolarisés est sans commune mesure avec la population de la collectivité. Votre commission souhaite donc que les financements soient adaptés aux réalités du terrain.

La question du désenclavement de Saint-Pierre-et-Miquelon, qui est liée à un développement important de la coopération avec le Canada, ainsi que le préconise dans son excellent rapport notre collègue Denis Detcheverry, mérite toute notre attention. Il serait temps que des mesures concrètes d’envergure voient enfin le jour.

Les deux nouvelles collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy prennent leur essor, et votre commission se félicite de constater que leurs statuts sont désormais quasiment applicables en totalité. Elle se réjouit également de la poursuite des transferts de compétences en Nouvelle-Calédonie, et ce dans le respect non seulement des accords de Nouméa, mais également des positions exprimées par l’ensemble des membres du comité des signataires. Sur des sujets aussi sensibles, seul un consensus entre toutes les parties est gage de succès.

La question des compétences et des moyens des communes de Polynésie est toujours ouverte et mérite de faire l’objet d’avancées prochaines pour que la réforme statutaire de ce territoire prenne tout son sens.

Pour ce qui concerne Wallis-et-Futuna, votre commission se réjouit de l’inauguration récente par M. le secrétaire d’État de la piste aérienne de Futuna, qu’elle réclamait sans relâche depuis de nombreuses années afin de désenclaver cette île qui est la plus éloignée de la métropole.

Elle s’inquiète, cependant, de la baisse démographique qui touche l’ensemble de cette collectivité, la population étant passée de 15 000 habitants à 13 500 habitants en cinq ans. Il convient de noter que le nombre de Wallisiens est bien plus important en Nouvelle-Calédonie qu’à Wallis-et-Futuna !

Alors que s’achèvera, en mars 2009, l’année polaire internationale, je me réjouis de l’entrée de l’île de Clipperton dans la Constitution aux côtés des Terres australes et antarctiques françaises, les TAAF.

Tous les territoires de la République sont désormais consacrés par notre loi fondamentale.

Sous ces réserves et au bénéfice de ces observations, la commission des lois vous invite, mes chers collègues, à approuver les crédits de la mission « Outre-mer ».

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je vous rappelle, mes chers collègues, que le temps de parole attribué aux groupes pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

En application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quarante-cinq minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Adrien Giraud.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Giraud

Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la discussion du projet de loi de finances est toujours un moment essentiel du travail législatif, qui engage des choix primordiaux pour l’avenir de notre pays. Elle nous permet également d’engager une réflexion sur le bien-fondé de nos décisions passées et de dresser un bilan de leur efficacité.

Pour nous, parlementaires de l’outre-mer français, il s’agit d’un événement fondamental, même si le budget du secrétariat d’État chargé de l’outre-mer ne représente, nous le savons tous, qu’une fraction du total des crédits publics destinés à l’outre-mer français.

Au-delà, ce débat budgétaire nous donne l’occasion – encore trop rare ! – de conduire une réflexion d’ensemble sur la situation financière de nos collectivités et sur leurs priorités.

Aujourd’hui, alors que s’achève l’année 2008, le passé et le futur de Mayotte, son bilan et ses projets, se rejoignent dans la perspective, désormais proche, de bénéficier d’un statut départemental.

La départementalisation de Mayotte a cessé d’être un vœu pieux, un appel sans réponse… Après cinquante années de combat, les Mahorais ont cette fois-ci la possibilité de voir consacrer leur volonté de rester Français, c'est-à-dire d’afficher et de revendiquer pleinement leur attachement aux institutions et aux valeurs fondamentales de notre République. De ce fait, ils veulent aussi dire leur détermination à être reconnus à part entière dans le droit européen.

Enfin, ils affirment leur espoir de voir leur collectivité s’épanouir dans un développement équilibré au sein d’un environnement paisible. On nous dit que la « départementalisation de Mayotte n’est pas une panacée ». Nous le savons mieux que personne, mais nous savons aussi qu’elle constitue, avec toutes les adaptations requises, la meilleure réponse aux multiples problèmes qui freinent aujourd’hui nos progrès. Il s’agit non pas seulement d’obtenir la départementalisation de Mayotte, mais de la réussir en franchissant toutes les étapes, en obtenant les différents concours et en faisant des efforts pour surmonter tous les obstacles que nous rencontrerons.

À l’occasion de la discussion de ce projet de loi de finances pour 2009, j’aimerais aborder ici cette question.

Mes chers collègues, la revendication mahoraise, cette longue marche qui remonte aux premiers temps de la ve République, n’a jamais été aussi proche de son aboutissement. Monsieur le secrétaire d'État, je souhaiterais, comme l’ensemble des Mahorais, connaître la question qui leur sera posée, lors de la consultation prévue en mars 2009, concernant le choix institutionnel qui leur sera proposé. Cette question devra être simple et claire, similaire à la formulation suivante que je vous propose : « Voulez-vous que la collectivité départementale de Mayotte devienne un département d’outre-mer ? »

J’ajoute que cette procédure, pleinement démocratique, est tout à fait conforme aux vœux des Mahorais.

La départementalisation de Mayotte est une revendication qui date d’un demi-siècle. Il faut en rappeler toute la portée, car ce changement statutaire ne saurait en aucun cas se résumer à un simple changement de dénomination.

À terme, Mayotte devra tout d’abord rentrer progressivement, mais pleinement, dans un processus d’application du droit commun. Cela implique d’y étendre les six domaines dans lesquels s’applique encore le principe de spécialité législative, même si nous demeurons acquis, je le répète, au principe d’une départementalisation « adaptée », ce qui ne signifie nullement dans notre esprit une départementalisation au rabais.

Surtout, il sera nécessaire de donner à Mayotte les moyens de mener à bien son développement. Trop longtemps en effet, nous nous sommes heurtés à une curieuse logique selon laquelle nous devions rattraper les autres DOM pour devenir département, alors même que les moyens de ce « rattrapage » résultent précisément du statut départemental.

Il serait également nécessaire de prévoir une dotation spéciale d’équipement, qui permettra à Mayotte de combler, au moins partiellement, ses importants retards.

C’est simplement avec une véritable politique d’investissement que Mayotte progressera de manière saine et rapide sur la voie du développement. Certes, nous avons déjà parcouru un très long chemin, mais beaucoup reste à faire !

À cet égard, je me dois de vous signaler qu’une part importante des crédits d’État prévus dans le cadre du contrat de projets de Mayotte 2008-2014 n’ont toujours pas été délégués. Il en va ainsi notamment des moyens de la politique du logement : sur les 24 millions d’euros accordés par l’État au titre des crédits publics, seuls 15 millions d’euros ont été délégués.

Ces retards pèsent lourdement sur les finances de notre « collectivité départementale » et limitent sensiblement ses pouvoirs d’initiative et d’investissement. Ainsi, cette année, nous avons été contraints une fois de plus, par manque de liquidités, d’ouvrir un lycée en préfabriqué, alors même que les besoins en constructions scolaires, qui ont été évalués depuis longtemps, se révèlent de plus en plus pressants. Comment voulez-vous que nous menions une véritable politique de « rattrapage », si les retards de paiement de l’État nous contraignent à ouvrir, dans l’urgence, des structures éphémères ? Cette situation doit être rapidement réglée, monsieur le secrétaire d'État.

Enfin, comment parler de développement sans évoquer la place et l’importance des « fonds européens » ?

Si la Guyane a pu bénéficier, entre 2000 et 2006, de 388 millions d’euros au titre des subventions, Mayotte, dont le poids démographique est comparable, n’a reçu que 15 millions d’euros entre 2004 et 2008, soit vingt-cinq fois moins ! Une telle inégalité de traitement confine à l’injustice.

Monsieur le secrétaire d'État, vous connaissez le problème aussi bien que moi ! Alors que Mayotte présente toutes les caractéristiques des « régions ultrapériphériques » de l’Union européenne, elle est classée parmi les pays et territoires d’outre-mer, les PTOM. À ce titre, à l’instar des territoires indépendants associés à l’Europe, elle ne reçoit que les aides prévues par le Fonds européen de développement, le FED.

Il est donc urgent que nous ayons accès aux fonds structurels européens. Pour ce faire, il existe une solution simple et rapide : la départementalisation.

En devenant un DOM, Mayotte accédera au statut de région ultrapériphérique et pourra enfin bénéficier de ces crédits européens ô combien nécessaires à son développement. Cette décision dépend donc exclusivement de l’État français ; il ne tient qu’au Gouvernement de faire cesser ce fâcheux paradoxe qui voit l’Europe moins aider ceux qui en ont pourtant le plus besoin !

Vous le voyez, madame le ministre, monsieur le secrétaire d'État, l’urgence du développement de Mayotte passe par le statut départemental, ce dont nous sommes convaincus depuis longtemps.

Enfin, j’aimerais évoquer un problème grave. Si la départementalisation participe à la fois de l’exigence du symbole et de l’urgence du développement, elle renvoie également aux problèmes de sécurité résultant d’une immigration étrangère encore trop mal maîtrisée.

J’ai déjà eu maintes fois l’occasion d’aborder cette question liée, chacun le sait, à l’arrivée massive, et parfois dans conditions dramatiques, comme ce fut le cas très récemment, d’immigrés d’origine comorienne, pour la plupart, qui entrent clandestinement à Mayotte. Il est capital que l’État se saisisse de ce problème avec la plus grande fermeté. Les patrouilles de la police aux frontières ont déjà été renforcées, et un radar supplémentaire a été installé. Nous nous félicitons de ces nouveaux moyens, mais ne nous leurrons pas : tant que la France n’aura pas adopté une position ferme à l’égard des autorités comoriennes, en engageant un dialogue d’État à État, et affirmé que le choix des Mahorais ne peut être remis en cause, rien de ce que nous ferons ne pourra être suffisant !

Mes chers collègues, vous l’avez compris, j’en suis sûr, 2009 devrait être, pour les Mahorais, une année essentielle : celle de l’ancrage définitif et volontaire de Mayotte au sein de la République française, celle de l’initiation d’une politique de développement économique et sociale ambitieuse et celle de la paix retrouvée dans son environnement régional.

Dans une récente allocution à l’Élysée prononcée devant les élus d’outre-mer, M. le Président de la République a affirmé qu’il respectera la parole donnée à Mayotte. Un tel engagement est, à nos yeux, essentiel, et je lui exprime, au nom de la population mahoraise, ma profonde gratitude.

Il est urgent de répondre à notre demande d’accession au statut de département français d’outre-mer. C’est dans cette perspective, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, et pour vous témoigner ma confiance, que je voterai ce budget.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gélita Hoarau

Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, la Réunion est l’un des départements qui connaissent la plus forte croissance démographique. Dans une vingtaine d’années, la population de l’île atteindra 1 million d’habitants. La Réunion est donc au carrefour des chemins.

Si rien ne change, tous les problèmes qu’elle connaît s’aggraveront. Je veux parler du taux de chômage, qui repart à la hausse pour atteindre de nouveau 30 %, des 65 000 RMIstes, des 30 000 demandeurs de logements sociaux, des 120 000 illettrés, des 300 000 personnes relevant de la CMU, la couverture maladie universelle, et, plus généralement, des 52 % de la population vivant sous le seuil de pauvreté.

Ou alors, on s’oriente vers des solutions innovantes, en rupture avec celles qui ont prévalu jusqu’à présent et qui ont inspiré tous les plans gouvernementaux, avec les résultats que l’on connaît.

C’est dans cet esprit que la majorité du conseil régional de la Réunion a élaboré un plan régional de développement durable - PR2D -, en concertation avec les partenaires sociaux et les autres collectivités locales.

Ce plan prévoit des solutions aux problèmes auxquels la Réunion est confrontée– chômage, déplacements, logement, protection de l’environnement et de la biodiversité – tout en tenant compte des grands défis mondiaux que sont le changement climatique, la crise énergétique, la mondialisation des échanges et l’évolution rapide de la technologie.

C’est ainsi qu’un programme de grands travaux a été élaboré pour une période allant jusqu’en 2014. Il porte sur plus de 3 milliards d’euros et permettra, notamment, de réaliser la route des Tamarins, le tram-train, ainsi qu’un nouveau tracé pour la route du littoral. Ce programme a fait l’objet d’un accord de principe et de financement en 2007 à Matignon. Ces grands travaux maintiendront en activité des milliers de travailleurs dans le bâtiment. De plus, ils régleront de manière durable le problème des déplacements à la Réunion, tout en respectant l’environnement grâce au tram-train.

Le plan régional de développement durable vise aussi l’autonomie énergétique du département à l’horizon 2025. La poursuite de cet objectif, en plus d’offrir une solution énergétique non polluante et renouvelable en remplacement des énergies fossiles, constitue aussi un gisement d’emplois très important. De ce point de vue, sous l’impulsion de la région, la Réunion se distingue par ses initiatives et ses réalisations.

Toutefois, la fin du chantier de la route des Tamarins, qui génère plus de 3 000 emplois directs et indirects, et l’attente du début des autres grands chantiers font craindre une période de forte récession. De plus, l’arrêt ou le report de certains travaux ainsi que les interrogations sur l’efficacité du nouveau dispositif de défiscalisation, qui remplacera le système en vigueur, nourrissent les plus vives inquiétudes.

Des milliers de travailleurs craignent pour leurs emplois pendant que des dizaines d’entreprises s’inquiètent pour leur survie. Selon certaines prévisions, on parlerait même du licenciement de quelque 3 000 à 4 500 ouvriers dès janvier prochain, lors de la reprise du travail dans le bâtiment, si ce n’est pas 9 000, comme le craignent certains.

Pour toutes ces raisons, au mois d’octobre dernier, des centaines de patrons ont, pour la première fois à la Réunion, manifesté devant la préfecture pour exprimer au représentant de l’État leur désarroi. Depuis, les articles réformant la défiscalisation ont été adoptés. Ce vote n’a pas pleinement rassuré les chefs d’entreprise, qui attendent du débat et de l’adoption de la future loi pour le développement économique de l’outre-mer davantage de garanties.

Pour tenter de maintenir le secteur du BTP à un niveau d’activité plus acceptable, le conseil régional, le conseil général, l’Association des maires et les représentants de la Réunion économique se sont réunis en « comité de suivi » afin d’inventorier les travaux en étude pour faire sortir des projets, définir les priorités et accompagner autant que possible leur réalisation. Des engagements ont été pris par l’ensemble des partenaires, ce qui devrait éviter une diminution trop importante de l’activité dans ce secteur. Le préfet de la Réunion a pris une initiative identique en y associant les banquiers.

Il reste un domaine qui n’est pas moins pourvoyeur d’emplois, celui du logement. De ce point de vue, l’engagement de l’État, compétent en la matière, constitue un élément décisif. J’aurai l’occasion d’y revenir tout à l’heure.

La crise financière et économique actuelle est venue exacerber tous ces problèmes. Il est primordial de maintenir le cap sur les objectifs du PR2D, lesquels tendent également au développement du secteur de la recherche et de l’innovation dans des domaines aussi variés que l’agriculture, la pêche et la forêt, la santé ou encore les télécommunications.

Cependant, cette crise fait ressortir plus que jamais l’impérieuse nécessité d’apporter une réponse à ceux qui sont le plus dans l’attente, c’est-à-dire les chômeurs et les demandeurs de logements sociaux.

Pour les premiers, l’entrée en vigueur du RSA doit être une opportunité à saisir de toute urgence. Nous pensons qu’il est possible à cette occasion de satisfaire les besoins de la Réunion dans des domaines très précis et de créer des dizaines de milliers d’emplois. Ces domaines concernent principalement l’environnement et les services à la personne.

S’agissant, tout d’abord, de l’environnement, la Réunion dispose encore d’une biodiversité riche et unique au monde. L’Union européenne a déjà souligné la contribution très importante de cette île au patrimoine mondial de la biodiversité et l’urgence de mener des actions de masse pour préserver la richesse de ce patrimoine, gravement menacé.

Sa sauvegarde et sa mise en valeur nécessitent la création de milliers d’emplois, notamment dans le parc national de la Réunion, qui recouvre une bonne partie du territoire de l’île, et dans le parc marin. Il en est de même pour la collecte, le tri systématique et la valorisation des déchets. C’est tout cela que j’englobe dans ce que j’appelle le secteur de l’environnement. On pourrait y ajouter d’autres activités, mais je ne prétends pas être exhaustive. Nous proposons de créer dans ce domaine un véritable service public qui mobiliserait des milliers de jeunes susceptibles d’entrer dans le champ d’application du RSA.

S’agissant, ensuite, de l’aide à la personne, un autre service public pourrait également être créé. À la Réunion, les offres d’accueil et d’encadrement pour les personnes âgées, les personnes handicapées et la petite enfance sont dramatiquement insuffisantes. Il est indispensable de donner à cette population fragile les moyens nécessaires pour vivre décemment, si l’on veut assurer la cohésion sociale. Dans ce secteur aussi, les besoins en emplois se chiffrent par milliers, et seule la création d’un service public permettrait de satisfaire les demandes et de ne laisser personne sur le bord du chemin.

La création de ces deux grands services publics, qui pourraient générer de manière pérenne plusieurs dizaines de milliers d’emplois, suppose des actions de formation adéquates, une gestion transparente et paritaire de ces services afin d’éviter ce que le préfet de la Réunion a appelé « les emplois-magouilles ».

C’est cela, la rupture avec les pratiques jusqu’ici en vigueur.

Une telle démarche nécessite également une mobilisation de tous les outils financiers existants : ceux du RMI, des emplois aidés, des emplois verts, des crédits supplémentaires prévus pour le RSA, et je ne les cite pas tous.

À ces crédits peuvent s’ajouter, pour le service public d’aide à la personne, des contributions de la caisse d’allocations familiales, de la caisse de sécurité sociale et, éventuellement, des bénéficiaires de ce service, en fonction de leur capacité financière.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, la création de ces deux grands services publics est une expérience qui mérite d’être menée à la Réunion, en vertu du droit constitutionnel à l’expérimentation. Elle répond à des besoins urgents de notre population et elle peut atteindre l’objectif que se fixe le Gouvernement, à savoir une perspective d’insertion avec un revenu décent pour le plus grand nombre.

Je pense que l’on peut trouver les moyens pour la réaliser, sans qu’il soit nécessaire de demander un effort financier exorbitant à l’État, même si ce dernier doit être raisonnablement sollicité puisqu’il s’agirait surtout d’un redéploiement de fonds déjà existants.

L’état d’urgence dans lequel se trouve l’emploi à la Réunion ne nous permet pas d’attendre 2011, comme le prévoit l’article 15 de la loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion.

Mettons en œuvre, dès maintenant, cette action expérimentale de création de ces deux services publics. Accepteriez-vous, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, que nous introduisions cette demande lors de la discussion du projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer ? Il n’y a pas d’autres solutions si l’on veut limiter les dégâts de la crise actuelle et éviter la catastrophe !

En ce qui concerne le logement social, vos crédits, madame la ministre, ne permettront manifestement pas de faire face aux besoins des Réunionnais.

En 2009, la ligne budgétaire unique, ou LBU, comportera 258 millions d’euros en autorisations d’engagement et 209 millions d’euros en crédits de paiement. Ces chiffres sont supérieurs à ceux de 2008, mais inférieurs au montant moyen des crédits affectés durant la période 2005-2007, qui s’élevait à 270 millions d’euros.

Le problème réside dans les difficultés qu’éprouvent les promoteurs sociaux à utiliser ces crédits. L’augmentation des coûts de production et les nouvelles exigences réglementaires font qu’il existe un écart de l’ordre de 30 % entre les coûts réels de production et les paramètres financiers de la LBU.

Le résultat le plus tangible de cette situation, c’est qu’avec un même budget l’on finance de moins en moins de logements. À la fin des années quatre-vingt-dix, on pouvait espérer construire 4 500 à 5 000 logements sociaux par an à la Réunion. La moyenne se situe aujourd’hui à 2 800 logements par an, logements locatifs sociaux et très sociaux compris.

Nous savons que vous êtes en train de préparer de nouveaux textes pour réévaluer ces paramètres financiers. Selon les informations en notre possession, il semble que vos propositions apportent, certes, des améliorations, mais qu’elles ne répondent pas suffisamment aux attentes de la profession.

Enfin, et ce sera le dernier élément sur ce chapitre, l’État a signé avec les vingt-quatre communes réunionnaises des contrats d’objectifs fonciers qui fixent des perspectives de construction de logements sociaux. Le projet de budget pour 2009 est présenté selon de nouvelles modalités, dans le cadre d’une programmation triennale couvrant la période 2009-2011. Nous ne voyons pas, dans les chiffres annoncés, les moyens susceptibles d’atteindre les objectifs fixés dans ces contrats.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, d’une manière générale, ces crédits nous étant soumis avant le projet de loi LODEOM, il s’agit, en quelque sorte, d’un budget sous embargo puisque la plupart des dispositions qu’il doit financer- les fonds exceptionnels d’investissements, les aides aux intrants et aux extrants, la continuité territoriale, le nouveau système d’exonérations de charges, le nouveau dispositif de défiscalisation, pour ne citer que ceux-là. - ne seront applicables qu’une fois la loi adoptée. Autrement dit, elles entreront en vigueur avec trois, voire six mois de retard !

Au début de l’année prochaine, l’examen du projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer nous donnera l’occasion de débattre plus profondément de la politique que le Gouvernement compte mettre en œuvre pour nos départements et collectivités.

La discussion du projet de loi de finances pour 2009ne donne, au mieux, qu’un avant-goût de ce futur débat, auquel nous y ajouterons, notamment, les préoccupations de nos producteurs vis-à-vis de l’entrée en vigueur, l’année prochaine, des accords de partenariat économique, les APE, et celles de nos agriculteurs à propos de la fin des accords sucriers européens, en 2014.

Nous souhaitons connaître les initiatives que compte prendre le Gouvernement pour faire face à ces nouvelles menaces.

Debut de section - PermalienPhoto de Lucette Michaux-Chevry

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui les crédits de la mission « Outre-mer » dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances pour 2009.

Il faut d’abord souligner que l’architecture de cette mission a évolué depuis un an.

En effet, à partir de 2009, le contenu de la mission traduit un changement de modèle de la politique gouvernementale dans nos régions. L’approche régionale s’appuie désormais sur une programmation pluriannuelle des dépenses publiques, grâce à la réorganisation de l’administration chargée de l’outre-mer, sur une logique de développement de nos régions dans les secteurs les plus dynamiques ainsi que sur une présence économique fortement affirmée dans leur environnement régional.

Ainsi, la nouvelle délégation se voit confier un rôle de synthèse, de conception et de coordination de l’action de l’État envers les collectivités d’outre-mer. L’objectif est de faire du secrétariat d’État une administration non pas de gestion mais de renforcement des actions d’expertise et d’évaluation, celles-ci étant indispensables à l’ensemble des politiques de l’État outre-mer.

Dans le projet de loi de finances, la mission « Outre-mer » est dotée pour 2009 de 1, 97 milliard d’euros en autorisations d’engagement et de 1, 88 milliard d’euros en crédits de paiement, ce qui traduit, dans un contexte budgétaire particulièrement difficile, un engagement financier fort de l’État en faveur de l’outre-mer.

L’évolution des crédits pour 2009 porte fondamentalement sur l’emploi et sur les conditions de vie outre-mer.

L’emploi en outre-mer constitue incontestablement une question récurrente. Depuis des années, pour y répondre, le budget s’efforce de contribuer à la lutte contre les handicaps structurels qui affectent nos régions.

Cette année encore, je note, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, l’effort qui a été accompli au travers du programme « Emploi outre-mer », avec la mise en place de deux types d’action qui visent, d’une part, à abaisser le coût du travail par des exonérations de charges sociales et, d’autre part, à instaurer et à pérenniser des dispositifs encourageant la formation professionnelle.

Le mécanisme d’exonération de charges sociales, appelé désormais « soutien aux entreprises », va permettre, en abaissant les charges de ces dernières, de favoriser la production de biens et de services et de créer des emplois.

L’action « Soutien aux entreprises » voit donc sa dotation passer de 856, 7 millions d’euros en 2008 à un peu plus d’un milliard d’euros en 2009, ce qui représente une hausse incontestable. Cette augmentation résulte notamment de l’apparition d’une aide publique nouvelle destinée aux entreprises, notamment pour soutenir le fret.

La finalité du programme « Emploi outre-mer » est de faciliter la création d’emplois et l’accès au monde du travail. Ce programme s’inscrit par ailleurs dans une réalité économique des régions ultramarines marquée par un taux de chômage toujours plus élevé qu’en métropole. En Guadeloupe, ce taux oscille autour de 22 %.

À ce stade de mon intervention, j’en viens au chômage des jeunes, un thème qui justifie mon inquiétude, en Guadeloupe mais plus particulièrement dans la région de Basse-Terre, où le chômage des jeunes est provoqué par un aménagement inéquitable du territoire. Le chômage frappe, dans nos régions, tous les jeunes, qu’ils aient reçu une formation professionnelle qualifiante ou qu’ils soient en situation d’échec scolaire. L’ensemble de ces jeunes rentrent dans un processus d’assistanat très marqué dans la région de Basse-Terre, qui s’appauvrit.

Ces jeunes se marginalisent, car ils s’estiment de plus en plus exclus de toute possibilité de travail. Ils ne trouvent refuge que dans la rue, avec son cortège de dérives.

Là encore, si les effets négatifs de la délinquance sont mieux maîtrisés, si les résultats se sont améliorés, il n’en demeure pas moins que la petite délinquance reste encore très forte.

Ce qui frappe particulièrement en Guadeloupe, c’est l’apparition d’un phénomène inacceptable, je veux parler de ces jeunes désœuvrés qui déambulent par petits groupes dans les rues, qui fouillent les poubelles pour récupérer les restes de nourriture, surtout devant les supermarchés. Or le long combat qui a été mené pour obtenir la départementalisation avait justement pour finalité de faire disparaître ces situations de détresse de nos régions.

De plus, en tant que maire de la ville de Basse-Terre, je suis très préoccupée par le refus de certains jeunes de s’insérer dans notre société, en dépit des efforts que nous faisons pour eux, au nom d’un mode de vie totalement différent du nôtre.

J’espère que les crédits inscrits à l’action « Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle » permettront d’apporter des réponses aux problèmes que j’ai évoqués et contribueront à une véritable politique de relance de la région de Basse-Terre.

Je crois fortement à l’action efficace du service militaire adapté, …

Debut de section - PermalienPhoto de Lucette Michaux-Chevry

… qui reste un moyen indispensable pour resocialiser notre jeunesse, faciliter son insertion dans la vie sociale et, ainsi, mettre fin à des situations d’échec.

Outre le taux de chômage des jeunes, je veux insister ici plus encore sur la détérioration du territoire de la Basse-Terre.

Le fort taux de chômage que connaît la région de Basse-Terre est dû à son faible développement et à l’exode d’une grande partie de sa population vers la région pointoise.

On assiste aujourd’hui à un phénomène de recentralisation de la population autour du centre urbain formé par Pointe-à-Pitre, Les Abymes, Le Gosier et Baie-Mahault. Le regroupement de ces communes, rendu possible grâce, notamment, aux importants financements apportés par l’État à travers l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, se fait dans l’intérêt d’une seule partie du territoire et au détriment d’autres parties.

Outre l’attirance artificielle qu’exercent sur les jeunes ces pôles, même nécessaires, ce regroupement concentre les infrastructures nécessaires au développement que sont le port et l’aéroport, ainsi que l’importante zone économique de Jarry, cela au détriment de la Guadeloupe profonde, de ses zones rurales, dont la dévitalisation va s’accélérer.

Madame le ministre, monsieur le secrétaire d'État, je m’inquiète du devenir très préoccupant de la région de Basse-Terre, chef-lieu administratif de la Guadeloupe.

Cette ville voit disparaître des pans entiers de son économie avec la perte d’administrations qui en formaient jusqu’à présent le poumon, que ce soient les services des douanes ou de la poste, toutes transférées vers Pointe-à-Pitre, sans parler de la réduction de son espace judiciaire. S’il est indispensable que Saint-Martin et Saint Barthélemy disposent d’une administration judiciaire, pour autant la compétence administrative du tribunal de grande instance de Basse-Terre aurait pu s’étendre à d’autres communes, par exemple Petit-Bourg. Cela n’a pas été fait.

De même, aucun projet structurant n’est prévu pour prendre en compte la vitalité du port de Basse-Terre, laissé dans un état de total abandon, alors que les moyens techniques modernes auraient permis de donner un souffle nouveau à cette infrastructure.

J’en arrive à m’interroger, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État : est-il encore bien utile que je m’évertue à demander au ministère chargé des transports que le port de Basse-Terre soit membre du port autonome de la Guadeloupe ? Aucune des requêtes que j’ai adressées dans ce sens depuis 1995 n’a connu de suite favorable !

Le développement économique de l’île se concentrant à Pointe-à-Pitre, ne faudrait-il pas, dans le cadre du nouveau contrat de plan, que l’État joue son rôle d’arbitre pour imposer une autre politique patrimoniale et culturelle en faveur de la région de Basse-Terre, autour de l’emblématique Fort Delgrès ou du chevalier de Saint-Georges ?

Pointe-à-Pitre, capitale économique, Basse-Terre capitale administrative et culturelle, ville d’art et d’histoire : ce rééquilibrage du territoire prendrait en compte la réalité géographique et historique de la Guadeloupe.

J’en viens maintenant au programme « Conditions de vie outre-mer » de la mission « Outre-mer ».

Le logement, en particulier le logement social, bénéficie d’un effort important. Je rappelle que les besoins considérables en la matière exigent que cet effort soit soutenu. Toutefois, je souhaiterais qu’il ne soit pas uniquement financier, mais qu’il prenne en compte d’autres éléments, tels que le respect de l’architecture des constructions réalisées autrefois en Guadeloupe. Un certain modèle de construction propre aux Antilles est en train de disparaître. J’oserai donc le dire, et vous conviendrez qu’il faut un certain courage s’agissant du logement social : il en faut moins, mais de meilleure qualité !

Les logements sociaux sont en réalité des blocs sans âme, où la vie devient insupportable, où les jeunes n’ont que les escaliers pour s’amuser en raison d’aménagements extérieurs souvent médiocres, d’espaces de convivialité inexistants, d’espaces verts insuffisants. Est-ce ainsi que nous voulons continuer ? Allons-nous persister à défigurer le paysage guadeloupéen ?

En outre, monsieur le secrétaire d'État, comme je vous l’ai dit lorsque nous nous sommes rencontrés à la préfecture de Basse-Terre, la construction des logements sociaux doit prendre en compte les difficultés liées à la pénurie en eau potable et les problèmes d’assainissement. Il est tout de même inadmissible que la Guadeloupe, autrefois appelée l’île aux belles eaux, soit confrontée à une grave pénurie d’eau potable. Certes, le conseil régional aurait pu apporter son soutien financier aux investissements nécessaires, mais il ne le fait qu’en fonction de certaines considérations.

M. Serge Larcher sourit.

Debut de section - PermalienPhoto de Lucette Michaux-Chevry

Ainsi, la région de Basse-Terre, partie pluvieuse de la Guadeloupe, est complètement oubliée dans cette politique de l’eau.

Certes, le dispositif mis en place par le Gouvernement afin de faciliter l’accès à la propriété nous permettra d’apporter des réponses aux problèmes des dents creuses. Je reste néanmoins préoccupée par l’absence de tout soutien en faveur des vieilles maisons coloniales, qui perdent peu à peu ce qui faisait leur charme parce que les personnes âgées qui les occupent n’ont pas les moyens d’en assurer l’entretien.

Je tiens à souligner l’intérêt du fonds exceptionnel d’investissement prévu dans le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer. Permettre le financement « d’opérations portant sur des équipements publics collectifs structurants » est une excellente idée qui permettra ainsi à l’État de veiller à plus d’équité.

Je note avec satisfaction qu’il est doté pour la première année de 40 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 16 millions d’euros en crédits de paiement.

En ce qui concerne le passeport mobilité, les modifications apportées au dispositif, qui ont suscité quelques secousses, mais ils étaient nécessaires, visent à introduire plus de justice et à mettre fin à une politique véritablement démagogique de certaines collectivités.

Le dossier de la défiscalisation, monsieur le secrétaire d'État, a créé de nombreuses turbulences et a suscité des interventions incompréhensibles et contradictoires de la part de certains prétendus défenseurs des plus défavorisés.

Aujourd'hui, le Gouvernement entend s’engager dans une politique de défiscalisation plus démocratique, plus territorialisée et devant répondre à l’intérêt général, c'est-à-dire orientée vers un nombre plus important de Guadeloupéens.

En effet, les malins, ceux qui savent utiliser les outils législatifs, avaient trouvé le moyen, en accumulant les mesures de défiscalisation, de se soustraire totalement à l’impôt. Est-ce ce que nous voulons ? Voulons-nous que, demain, nos enfants et nos petits-enfants ne trouvent plus de terrains pour construire leur maison, parce que des gens venus d’ailleurs investissent dans des programmes immobiliers sans même savoir où se trouve la Guadeloupe ? Est-ce cela que nous appelons une défiscalisation au profit de l’intérêt général ?

Madame le ministre, monsieur le secrétaire d'État, vous avez fait acte de courage, et, dans ces cas-là, les réactions sont inévitables, ici et ailleurs. Mais le Gouvernement a ainsi manifesté sa volonté de permettre à l’outre-mer de se moderniser par la recherche de l’excellence et de la performance et a invité les élus à prendre toutes leurs responsabilités pour faire face aux grands défis qui attendent notre espace régional.

Pour ma part, je voterai les crédits de la mission « Outre-mer ».

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Marsin

Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le vote des crédits de la mission « Outre-mer » est l’occasion, chaque année, de rappeler que l’outre-mer est non pas un boulet pour la France, mais bien un atout précieux, en raison de sa diversité culturelle, de ses potentiels en termes de ressources naturelles, de son environnement géographique et des possibilités qu’il offre sur le plan des échanges et des relations géostratégiques.

Monsieur le secrétaire d'État, dès votre prise de fonction, vous vous êtes attelé avec efficacité aux dossiers en cours, et la tâche n’était pas aisée, notamment la préparation du projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer, la question du chlordécone ou encore les mesures d’urgence nécessitées par la crise financière actuelle, dont les effets pourraient être encore plus dévastateurs dans nos contrées qu’en métropole.

À périmètre constant, les autorisations d’engagement de la mission « Outre-mer », d’un montant de 1, 97 milliard d’euros, progressent de 19, 2 %, tandis que les crédits de paiement, d’un montant de 1, 88 milliard d’euros, progressent quant à eux de 16 % par rapport à 2008. Cet effort est appréciable, même si, ici ou là, quelques interrogations subsistent.

Avant de m’intéresser plus avant aux programmes composant cette mission, je ferai quelques remarques d’ordre général.

D’une part, je suis conscient que ce budget ne représente pas l’effort financier global de l’État en faveur de l’outre-mer, mais qu’il n’en retrace qu’une petite partie. Cet effort global, qui se monte à 13, 4 milliards d’euros, est considérable, même s’il a tendance à stagner.

Toutefois, si l’on prend en compte les 3, 3 milliards d’euros consacrés, en 2009, aux exonérations fiscales, cet effort financier global augmente de 6 %, ce qui est appréciable dans le contexte financier actuel.

D’autre part, on ne peut que prendre acte de la volonté de rationalisation qui s’est manifestée à travers la révision générale des politiques publiques. Celle-ci a conduit à la mise en place de la délégation générale à l’outre-mer, dont on ne peut qu’espérer qu’elle ne compromettra pas l’efficacité de l’action de l’État, compte tenu des enjeux majeurs de la période qui s’ouvre.

J’en viens maintenant à la mission « Outre-mer » proprement dite.

Tout d’abord, les ajustements réguliers de périmètre, si judicieux et nécessaires soient-ils, rendent toujours plus difficiles l’étude et l’appréciation de l’évolution de l’ensemble des crédits consacrés à cette mission.

Nous espérons que ce périmètre finira par se stabiliser, ce qui facilitera la tâche des uns et des autres.

J’en viens maintenant aux détails des programmes composant la mission « Outre-mer ».

Tout d’abord, le programme « Emploi outre-mer », qui représente la plus grosse part des crédits alloués à cette mission, soit 63, 40 %, connaît une hausse de 19, 42 % en crédits de paiement et de 20, 26 % en autorisations d’engagement. Je m’en félicite.

Il convient de noter que les crédits de l’action « Soutien aux entreprises » de ce programme enregistrent une forte hausse, de 21, 1 %.

Soulignons également la nouvelle ligne de crédits destinés à soutenir le fret. Cet effort budgétaire important montre que le Gouvernement est décidé à aider les entreprises, afin que celles-ci puissent créer des emplois.

Si ces avancées sont tout à fait notables, en revanche certaines questions se posent en matière d’exonérations de charges sociales, monsieur le secrétaire d'État, notamment à cause de l’article 65 du projet de loi de finances, qui est rattaché à la mission « Outre-mer ».

Comme d’autres intervenants avant moi, je regrette que cet article soit discuté avant l’examen du projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer, qui se trouve sur le bureau du Sénat depuis le 28 juillet dernier !

C'est pourquoi je soumettrai deux amendements à notre assemblée, l’un visant à conditionner l’application des dispositions de cet article à l’entrée en vigueur de la future loi, l’autre tendant à prendre en compte l’existence de zones franches urbaines outre-mer.

Monsieur le secrétaire d'État, je voudrais également vous faire part de nos interrogations sur les conséquences prévisibles que les dates butoirs et les paliers prévus par l’article 65 en matière d’exonérations de charges sociales entraîneront sur l’emploi qualifié.

Nous souhaitons tous que se développent dans nos régions des entreprises à forte valeur ajoutée, notamment dans les secteurs de l’environnement et des nouvelles technologies. Espérons donc que l’impact de cet article sur l’emploi qualifié ne sera pas négatif !

J’en viens à un sujet vital pour les petits entrepreneurs ultramarins. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner, ceux-ci bénéficiaient jusqu’à présent de la défiscalisation dite « en interne », qui leur permettait d’autofinancer leurs investissements et d’assurer leur trésorerie par le refinancement de leurs créances sur l’État.

Or, en l’état actuel du projet de loi de finances pour 2009, cette disposition semble remise en cause. Monsieur le secrétaire d'État, comptez-vous rétablir la situation antérieure, au bénéfice de ces petites entreprises ?

En ce qui concerne l’action n° 2 « Aide à l’insertion et à la qualification professionnelle », nous constatons également une augmentation des crédits de paiement, de l’ordre de 8, 74%. Je me réjouis de cette hausse, qui sert essentiellement à financer le SMA, le service militaire adapté. En effet, ce dispositif a rencontré un véritable succès, comme le soulignait à l’instant Mme Lucette Michaux-Chevry, et il mérite d’être développé.

Pour autant, les autres aides à la qualification ou à la formation me semblent nettement en deçà des énormes besoins en la matière.

Monsieur le secrétaire d'État, je m’interrogeais tout à l’heure sur l’application du RSA outre-mer, mais votre collègue Martin Hirsch m’a rassuré, en soulignant, d'une part, que la taxe de 1, 1 % ne serait pas prélevée outre-mer tant que le RSA n’y serait pas en vigueur, et, d'autre part, que le dispositif du RSA s’appliquerait outre-mer dès que les départements y seraient prêts.

J’en viens maintenant au programme « Conditions de vie outre-mer ». Celui-ci représente 39, 51 % des crédits de la mission et connaît une hausse substantielle, dont il convient de se réjouir. Au sein de ce programme, mon propos va cibler trois actions en particulier.

Tout d’abord, j’évoquerai l’action « Logement ». Même si les crédits ici ont légèrement augmenté, je regrette que les dotations prévues ne puissent « éponger » entièrement la dette de l’État envers les bailleurs sociaux. Mes chers collègues, nous devons conforter la situation financière de ces derniers – j’y insiste – si nous voulons qu’ils réalisent les importants programmes de construction de logements sociaux qui leur incombent et qui induisent d’importants effets positifs sur le bâtiment et sur l’emploi.

De même, à la suite de Mme Anne-Marie Payet, j’aimerais attirer l’attention sur la nécessaire réactualisation des paramètres retenus pour le financement du logement social. Monsieur le secrétaire d'État, où en est ce dossier ? Ces paramètres étant figés depuis un certain temps, une action résolue s’impose à cet égard, me semble-t-il, afin de favoriser la réalisation de ces programmes de construction que nous attendons tous.

Ensuite, je veux insister sur l’action permettant la création du Fonds exceptionnel d’investissement. Le principe, monsieur le secrétaire d'État, en est tout à fait excellent, et je vous en félicite. Mais encore faut-il y mettre les moyens ! Seuls 16 millions d’euros en crédits de paiement et 40 millions d’euros en autorisations d’engagement sont alloués pour 2009, ce qui est bien peu.

Je me demande d'ailleurs si nous ne devrons pas procéder en cours d’année à certains arbitrages pour abonder cette ligne budgétaire, car, compte tenu des besoins énormes de l’outre-mer, la demande sera sans doute extrêmement forte. Avez-vous d'ores et déjà quelques idées sur cette question, monsieur le secrétaire d'État ?

Enfin, j’évoquerai l’action « Continuité territoriale ». Ses crédits n’ont pas évolué de façon très positive alors que, vous le savez comme moi, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, nos compatriotes de l’outre-mer sont très attachés au principe fondamental de la continuité territoriale, qui assure le lien entre tous les citoyens.

À l’évidence, les crédits sont insuffisants quand on sait combien le passeport mobilité et les actions menées dans le cadre du projet initiative jeune, qui rencontre d'ailleurs un grand succès, sont essentiels, pour les étudiants comme pour les jeunes en parcours d’insertion.

À propos, monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous éclairer sur l’état d’avancement du dossier des tarifs aériens low cost pour les vols longs courriers, au sujet desquels, je le sais, vous menez des discussions ? Les résultats de ces négociations sont-ils favorables ? Sommes-nous proches de la fin du quasi-monopole d’Air France ?

Ne serait-il pas judicieux d’envisager la mise en place de « tarifs résidents », qui, comme ce fut le cas entre la Corse et le continent, entraîneraient une baisse substantielle des tarifs entre l’outre-mer et la métropole ?

Enfin, monsieur le secrétaire d'État, quelles actions avez-vous entreprises pour traiter le problème de la pollution des sols par le chlordécone, qui est toujours d’actualité ? Vous savez combien cette question est importante pour l’image de l’outre-mer, et singulièrement de la Guadeloupe et de la Martinique.

Pour conclure, monsieur le secrétaire d'État, faire de l’outre mer un pôle d’excellence et de croissance économique est une mission difficile, mais pas impossible !

C’est en tout cas la tâche que vous vous êtes fixée, et j’ai envie de vous encourager. Pour cela, le mieux serait sans doute de voter votre budget

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Marsin

Toutefois, vous vous en doutez, avant de prendre une telle décision, j’attends, et avec beaucoup d’impatience, les réponses que vous voudrez bien apporter aux questions cruciales que je viens de poser.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaston Flosse

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, comme tous les parlementaires, j’ai été très intéressé par la présentation d’un budget en forte augmentation pour l’outre-mer.

J’apprécie la valeur du message ainsi adressé à nos populations.

Dans un contexte de très graves difficultés économiques et financières, le Gouvernement de la République veut montrer aux Français ultramarins qu’ils ne sont pas oubliés, qu’ils constituent même une véritable priorité, puisque, malgré la crise, l’effort de la nation en leur faveur augmente de plus de 9 %.

J’ai eu envie d’applaudir vigoureusement. D'ailleurs, j’aurais dû le faire immédiatement, sans réfléchir et sans lire le texte, parce que, quand on examine celui-ci avec attention, ce ne sont plus les mains qui expriment bruyamment l’enthousiasme, ce sont les dents qui grincent sourdement d’amertume et de colère impuissante.

Ce budget n’est qu’une opération de communication, monsieur le secrétaire d'État ! Il vise à masquer la réalité du recul des engagements de l’État en faveur des collectivités d’outre-mer.

Tous ceux qui ont lu comme moi le compte rendu des débats de l’Assemblée nationale savent que les députés n’ont pas été dupes des artifices de présentation de ce budget. Et les sénateurs ne seront certainement pas plus naïfs.

Notre rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, malgré sa grande mansuétude, signale d’ailleurs qu’« il ne peut passer sous silence le fait que cette progression affichée ne correspond pas à la réalité. En effet, les augmentations consenties aux crédits de la mission Outre-mer servent à combler les dettes que l’État a contractées […] ».

Sans entrer dans des détails trop techniques, il faut d’abord rétablir la vérité : l’augmentation affichée de 9 % de ce budget n’a aucune signification ; elle peut même dissimuler une sévère diminution des crédits alloués !

Prenons-en un exemple simple. En Polynésie française, les pensions des retraités polynésiens constituent un soutien très important à l’économie. La réduction drastique de cette ressource et sa suppression progressive représentent pour nous une perte bien plus grande que les 9 % d’augmentation des crédits que l’on nous présente triomphalement !

Et qu’on ne vienne pas nous dire que cet argent sera réinvesti chez nous : c’est faux, et nous en avons déjà la preuve, avant même que la mesure ne soit appliquée ! Oui, déjà l’Assemblée nationale, sous la pression de Bercy, a adopté un amendement visant à transférer 10 millions d’euros économisés sur l’ITR, l’indemnité temporaire de retraite, vers une autre ligne budgétaire.

Je n’entrerai pas dans une querelle de chiffres pour déterminer l’augmentation réelle des moyens consacrés à l’outre-mer. À quoi bon, d'ailleurs, puisque c’est la sincérité de la présentation qui est en cause !

Je me contenterai de deux exemples pour montrer que cette augmentation n’est qu’un artifice de présentation.

Premier exemple, dans ses dépenses en faveur de l’outre-mer, l’État comptabilise les ressources perdues à cause de la défiscalisation. C’est légitime, ou plutôt ce le serait si l’on prenait en considération le coût de la défiscalisation tel qu’on peut raisonnablement le prévoir en 2009, après les mesures de restriction qui seront adoptées la semaine prochaine. Malheureusement, le calcul a été réalisé à partir des sommes actuellement défiscalisées !

Or chacun sait qu’en raison même des mesures annoncées les sommes défiscalisées augmentent en ce moment très fortement et très provisoirement. C’est nous tromper que de prendre appui sur ce phénomène ponctuel pour réaliser une prévision pour 2009. Comment peut-on espérer accroître de plus de 300 millions d’euros l’incitation à l’investissement outre-mer au moment où l’on plafonne celui-ci ?

Second exemple, une part importante des dépenses affichées pour 2009 est constituée par le paiement de dettes de l’État, notamment vis-à-vis des organismes de sécurité sociale. Ce sont donc des dépenses déjà affichées dans les budgets précédents, qui n’ont pas été exécutées et que l’on nous « ressert » aujourd’hui en les faisant passer pour une augmentation de l’effort de l’État en faveur de nos collectivités !

Ces constats, qui concernent l’ensemble de l’outre-mer, suffiraient à motiver ma décision de voter contre ce budget. Toutefois, je dois également évoquer ici des problèmes propres à la collectivité que je représente.

La Polynésie française est naturellement touchée comme les autres collectivités d’outre-mer par le plafonnement de la défiscalisation ainsi que, plus que les autres, par la suppression de l’ITR.

Néanmoins, chez nous, ces régressions budgétaires s’inscrivent dans un contexte général de désengagement de l’État.

Mes chers collègues, jugez-en par vous-mêmes.

La Polynésie française n’a jamais bénéficié du RMI ni même des bourses scolaires. Elle a construit son propre système de protection sociale. Pendant quinze années, l’État a participé à l’équilibre de notre régime de solidarité envers les personnes sans ressources.

Cette aide est désormais supprimée.

L’État devait nous aider à achever et à mettre en service le nouvel hôpital que notre éloignement rend absolument nécessaire.

Cette aide nous est désormais refusée.

Le ministère de la défense, qui ne se faisait pas prier pour installer ses bases chez nous à l’époque où il organisait des essais nucléaires, nous considère aujourd’hui comme inintéressants pour la défense nationale. Partout, les effectifs sont réduits et près de 700 civils polynésiens perdent leur emploi.

Même le commandement supérieur des forces armées du Pacifique est transféré à Nouméa. Il est vrai que la Polynésie ne constitue plus un enjeu stratégique !

Et comment accepter que l’on repousse indéfiniment la reconstruction d’une prison qui détient le triste record de France pour la surpopulation carcérale ?

Comment expliquer surtout que, dans les archipels les plus éloignés des Australes et des Marquises, des gendarmeries comme celles de Raivavae, de Rimatara ou encore de Ua Pou soient fermées ? La population ne cesse d’augmenter, la délinquance est en nette progression dans ces îles éloignées, les plantations de pakalolo, autrement dit de cannabis, s’étendent dans pratiquement toutes les vallées, et l’on supprime des gendarmeries ?

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

C’est faux !

Debut de section - Permalien
Yves Jégo, secrétaire d'État chargé de l'outre-mer

Tout à fait ! C’est faux !

Debut de section - PermalienPhoto de Gaston Flosse

Madame la ministre, répondez-nous : allez-vous réellement fermer ces gendarmeries ?

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre

La décision n’est pas prise !

Debut de section - PermalienPhoto de Gaston Flosse

Partout, financièrement, matériellement, humainement, l’État se désengage. Les faits sont là, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État !

Debut de section - Permalien
Yves Jégo, secrétaire d'État

Non, c’est faux !

Debut de section - PermalienPhoto de Gaston Flosse

Pardon, je suis injuste : il est un domaine dans lequel l’État est beaucoup plus présent et s’intéresse plus que jamais à notre vie quotidienne : celui des conseils, des remontrances et des leçons.

L’État nous impose son observatoire des prix, alors qu’il s’agit d’un domaine qui relève de notre compétence.

Debut de section - Permalien
Yves Jégo, secrétaire d'État

Assumez-le !

Debut de section - PermalienPhoto de Gaston Flosse

On nous explique ce que nous devons faire, dire et penser ; on nous dit pour qui et contre qui il faut voter, et, pendant que l’on nous déstabilise en réduisant nos ressources, on nous explique que nous devons tout accepter et, surtout, rechercher la stabilité.

Le plus triste, c’est que, contrairement à d’autres collectivités, nous avions les moyens institutionnels de résister à ces ingérences. Malheureusement, le président actuel de la Polynésie française est totalement soumis à la volonté du gouvernement central et donne sa bénédiction, explicite ou tacite, à tous les coups qui nous sont portés.

En tant que sénateur, je n’ai pas les moyens de m’opposer à ces dérives, mais j’ai un devoir : celui de dire la vérité aux Polynésiens. C’est ce que je ferai. Je leur dirai qu’il est inutile de mener des combats de retardement ou de gémir sur notre sort.

Nous devons désormais apprendre à nous débrouiller seuls et mobiliser toutes nos énergies pour construire ensemble une Polynésie véritablement autonome.

Nous devons nous responsabiliser.

La France a-t-elle encore conscience de ce qu’elle nous doit ?

La France a-t-elle encore conscience de ce que nous lui avons apporté tout au long des années ?

Avec nous, grâce à nous, la France est plus grande, la France est plus indépendante, la France est plus belle.

Faut-il croire que la France ne veut plus de nous tels que nous sommes ? Il est vrai que l’outre-mer n’est plus à la mode à Paris.

On nous somme de nous comporter comme de bons métropolitains ou de sortir de la République.

Nous ne pouvons pas – nous ne voulons pas – renoncer à notre langue, à notre culture, à notre art de vivre pour devenir des copies conformes des métropolitains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaston Flosse

Nous avons écouté avec attention les déclarations rassurantes du Président de la République, ainsi que les vôtres, monsieur le secrétaire d’État, mais, en Polynésie française, le désengagement de l’État est tellement évident que de bonnes paroles ne suffisent pas à nous convaincre.

Il est possible que nous nous trompions. Si c’est le cas, tant mieux ! En effet, la majorité des Polynésiens – une majorité qui, hélas ! s’est considérablement affaiblie – reste fortement attachée à la France.

Je me suis beaucoup battu toute ma vie pour que la Polynésie reste française. J’avais la certitude que c’était le souhait de la majorité des Polynésiens, le souhait de la France.

Aujourd’hui, je doute. Je doute non pas du souhait des Polynésiens, mais de la volonté de la France : si la France ne veut plus de nous, qu’on nous le dise clairement !

Certes, le pire n’est jamais certain, mais les Polynésiens ne peuvent plus s’abstenir de se poser la question : ne doivent-ils pas se préparer à assumer seuls leur destin de peuple polynésien ?

Le pacte qui existe entre la France et nous a toujours été un pacte librement choisi : il a même été voulu.

Jamais nous ne pourrons nous résigner à l’indifférence et à l’oubli : telle n’est pas l’idée que nous nous faisons des femmes et des hommes de France.

Je mesure la gravité de cette question que je pose devant vous, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, et devant les Polynésiens. Je sais qu’elle me vaudra des mesures de rétorsion, mais je l’assume, parce que j’aime la Polynésie, comme j’aime la France.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris : même si ce projet de budget n’est pas la cause principale des craintes que je viens d’exprimer sur l’avenir de la Polynésie française, il les confirme, malheureusement : c’est donc sans hésitation que je voterai contre les crédits qui nous sont proposés.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’état, mes chers collègues, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser M. Claude Lise, qui, comme M. Georges Patient le rappelait tout à l’heure, a dû rentrer précipitamment en Martinique, en raison d’un décès survenu dans sa très proche famille. Il m’a fait l’honneur de me demander, non pas de le remplacer – il est irremplaçable ! –, mais de vous faire part des réflexions que lui inspire ce projet de budget.

Depuis quelques années, le budget de l’outre-mer présente deux caractéristiques remarquables.

La première, c’est que son périmètre varie au gré d’incessants transferts de crédits vers – ou en provenance – d’autres ministères.

La seconde, c’est qu’en dépit des dites variations il affiche toujours des taux de progression enviables, permettant d’étayer l’affirmation, reprise invariablement, selon laquelle l’outre-mer est une priorité pour la France.

En réalité, un examen attentif du document budgétaire révèle, chaque fois, que l’augmentation annoncée résulte, pour une bonne part, d’un changement de périmètre d’un budget à l’autre.

C’est le cas pour le projet de budget pour 2009. Présenté comme étant en augmentation de 16 % en crédits de paiement, il n’augmente, à périmètre constant, que de 9, 2 %, un taux qui, de surcroît, doit être sérieusement relativisé.

En effet, il résulte, pour l’essentiel, de l’abondement du programme « Emploi outre-mer », destiné, en fait, pour une large part, à réduire la dette de l’État à l’égard des organismes de sécurité sociale, dette provenant d’une insuffisante compensation annuelle des exonérations de cotisations sociales patronales.

Si l’on ne tient pas compte de cette somme, sans effet sur le développement des collectivités ultramarines, le budget n’augmente, en réalité, que de 5 millions d’euros, c’est-à-dire de 0, 3 % ...

Toutefois, ce qui est le plus préoccupant, c’est non pas tellement cette absence d’augmentation, mais bien le fait que l’on répande dans l’opinion publique l’idée que, dans un contexte budgétaire particulièrement contraint, la France d’outre-mer est privilégiée, puisqu’elle disposerait de crédits en augmentation de 16 %.

C’est cette idée que beaucoup retiendront, alors que le budget de l’outre-mer ne représente qu’à peine plus de 14 % de l’effort global de l’ensemble des ministères et que, par ailleurs, cet effort global, en n’augmentant que d’un peu plus de 2 %, croît pratiquement dans les mêmes proportions que le budget de l’État.

Aussi préoccupant, ce budget restreint est présenté comme le support financier essentiel du projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer, en dehors, bien sûr, de ce qui relève des mesures fiscales.

Si tel est réellement le cas – comme le craint M. Claude Lise –, il faut reconnaître que les inquiétudes exprimées depuis des mois par l’ensemble des forces vives locales n’étaient pas sans fondement.

Certes, dans ce projet de loi de finances pour 2009 figure une prévision de dépenses fiscales en augmentation d’environ 500 millions d’euros, mais il s’agit d’une prévision dont la portée réelle dépendra largement de l’impact de la réforme du dispositif de défiscalisation déjà voté par l’Assemblée nationale.

Tout en souscrivant à l’objectif avancé d’une plus juste contribution de tous les contribuables au financement des charges publiques, je crains que cette réforme, opérée précipitamment et sans évaluation suffisante, n’altère par trop, pour les investisseurs, l’attractivité d’un dispositif d’aide à l’investissement dont le besoin est reconnu.

Bien sûr, il faut tenir compte des engagements pris lors de la présentation triennale du budget, selon lesquels les crédits de la mission « Outre-mer » devraient augmenter de 11, 5 % d’ici à 2011. Je reconnais qu’il s’agit là d’un point positif.

Cependant, pour l’heure, ces engagements sont pris au conditionnel, et, surtout, ils ne peuvent avoir d’effet sur la situation que nous allons devoir affronter en 2009. Or, cette situation s’annonce particulièrement préoccupante.

La crise financière et économique qui sévit va, en effet, frapper, outre-mer, des économies qui, malgré le dynamisme dont font preuve les acteurs économiques locaux, demeurent structurellement fragiles.

À la Martinique, département dont M. Claude Lise préside le conseil général et dans lequel on panse encore les plaies du cyclone Dean et du séisme de novembre 2007, les signes inquiétants se multiplient.

On assiste, en effet, depuis le début de l’année, à un assez net fléchissement de l’activité, souligné par un recul de l’investissement et une baisse des importations de biens d’équipement.

Le secteur du BTP est particulièrement touché, mais celui du tourisme et de l’hôtellerie l’est également.

L’agriculture, quant à elle, à peine remise des événements climatiques qui l’ont durement frappée, connaît de nouvelles difficultés.

La situation de l’emploi s’en ressent, bien évidemment : d’octobre 2007 à octobre 2008, le nombre de demandeurs d’emploi en catégorie 1 a augmenté de 3, 5 %, alors qu’il était en baisse depuis 2000.

Il y a là, déjà, de sérieuses raisons d’inquiétudes pour les mois à venir.

Il faut y ajouter la situation des collectivités territoriales de la Martinique. Celles-ci, comme d’ailleurs toutes les collectivités territoriales d’outre-mer, sont particulièrement pénalisées par la mauvaise compensation des transferts de compétences, l’inadaptation des modalités de calcul des dotations de l’État et les proportions insupportables que prennent les dettes de l’État.

Ces collectivités ne peuvent plus continuer à faire face à une demande sociale qui, elle, va continuer à croître, et elles sont contraintes de réduire fortement leurs dépenses d’investissement et, donc, leurs politiques en faveur de l’équipement et du développement de l’île.

La situation va donc – on s’en rend bien compte – très vite se dégrader, en Martinique, bien sûr, mais aussi dans la plupart des autres collectivités ultramarines.

Il va falloir y faire face, mais on ne le pourra pas sans consentir nombre d’efforts.

Tout d’abord, il faut faire en sorte que les collectivités territoriales retrouvent très rapidement leur capacité d’intervention. Malheureusement, ce projet de budget ne comporte pas les indispensables mesures de soutien qui pourraient le permettre, monsieur le secrétaire d’État.

Ensuite, il faut relancer la politique des emplois aidés. Or, les crédits destinés à les financer, actuellement gérés par le ministère du travail et de l’emploi, sont en très nette diminution : 74 % en autorisations d’engagement et 38 % en crédits de paiement.

Enfin, il faut soutenir l’activité des entreprises du BTP œuvrant dans le domaine de l’amélioration de l’habitat et de la construction sociale. Cela exigerait d’apurer les dettes de l’État à leur égard sans utiliser à cette fin les crédits destinés aux actions nouvelles.

Il y a là, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, un réel sujet d’insatisfaction pour Claude Lise, auquel s’en ajoute un autre, qui concerne, lui, le débat à venir sur le projet de loi pour le développement économique de l’outre-mer.

Il est en effet profondément regrettable que l’on ait pris le parti de le réduire à un débat de pure forme. En effet, force est de constater que pratiquement tout se joue lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2009. C’est le signe qu’une fois de plus, Bercy n’a pas pris la mesure des enjeux.

Il est à craindre, en tout cas, que la portée d’un projet de loi qui, outre-mer, suscite évidemment énormément d’attentes, ne soit d’ores et déjà réduite et que les conséquences, demain, ne rendent bien dérisoires les économies réalisées aujourd’hui.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures cinq, sous la présidence de M. Guy Fischer.