La loi dite « Trautmann-Tasca » du 1er août 2000 qui constitue, réaffirmons-le, la dernière vraie réforme de la loi de 1986 avant le retour en arrière auquel vont aboutir les projets de lois que nous examinons, a construit un dispositif réglementaire complet et cohérent fixant une perspective pérenne au développement de la télévision publique.
Ce dispositif complétait la création de la société holding France Télévisions et l’allongement de la durée du mandat du président du groupe de trois à cinq ans par la formalisation des relations stratégiques et financières entre l’État et les organismes du service public de l’audiovisuel dans le cadre de contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens.
Ce bel édifice, la droite revenue au pouvoir en 2002 s’est immédiatement acharnée à l’abattre en décidant unilatéralement d’annuler le plan de développement de France Télévisions pour la période 2001-2005 et de bloquer les financements importants. J’attire particulièrement votre attention sur ce point, monsieur Fourcade, compte tenu de ce que vous avez dit tout à l’heure !
Ainsi était signée la disparition, sans autre forme de procès, du projet numérique de France Télévisions, qui prévoyait de faire de la télévision publique le premier bouquet de chaînes gratuites de la télévision numérique terrestre, la TNT, sans que le gouvernement de M. Raffarin crût nécessaire de renégocier le premier COM signé à la fin de 2001 par Marc Tessier, alors président de France Télévisions, et par Catherine Tasca, alors ministre de la culture et de la communication.
La logique vertueuse instaurée par la loi d’août 2000 de contractualisation pluriannuelle des relations entre France Télévisions et l’État était en fait brisée pour longtemps.
France Télévisions ne se vit doter d’un nouveau COM qu’en 2007, après deux ans de tergiversations de l’État, sur la stratégie de développement de la télévision publique et sur les moyens à y accorder.
Finalement, ce second COM confirma le sous-financement structurel de France Télévisions, induit par le blocage décidé en 2003 du taux de la redevance. J’attire également votre attention sur ce point, monsieur Fourcade !
Ce contrat avait cependant le mérite d’exister et permettait au moins aux équipes de France Télévisions de gérer le développement des sociétés du groupe dans un cadre fixe. Par son annonce du 8 janvier 2008, le Président de la République fit voler en éclats ce contrat.
Aujourd’hui, on nous affirme que des négociations sont en cours entre les services compétents de l’État et la direction de France Télévisions pour construire un plan d’affaires cohérent avec la réforme dont nous discutons.
Madame la ministre, pouvez-vous nous dire quand ce plan d’affaires, dont la conclusion nous semble urgente au regard de la situation économique et sociale de France Télévisions, sera prêt et si l’équipe dirigeante actuelle du groupe public aura la responsabilité de le mettre en œuvre ? On peut effectivement en douter au regard des déclarations du Président de la République, ces dernières heures, sur ses intentions quant au changement de président à la tête de notre télévision publique.
En outre, le projet prévoit que chaque COM devra avoir pour durée d’exécution la durée du mandat du président qui l’aura négocié et signé.
Vu que l’horizon de vie - ou plutôt de survie - de l’équipe dirigeante actuelle de France Télévisions paraît limité, au mieux, à l’été 2010, pensez-vous qu’un COM « nouvelle formule » prendra le relais du plan d’affaires en cours de négociation dans moins d’un an et demi ?
Pour notre part, nous considérons que toutes ces incertitudes nourrissent un climat de confusion très malsain autour des perspectives de développement de France Télévisions. C’est pourquoi nous estimons nécessaire d’encadrer les possibilités de renégociation, en cours d’exécution, d’un COM.
Seuls des événements imprévisibles ayant un impact certain sur la gestion des organismes du service public audiovisuel, liés à la conjoncture économique ou à des évolutions technologiques rapides, devraient à notre sens pouvoir justifier la renégociation d’un COM.
Cet amendement permettrait ainsi d’éviter que l’État ne décide unilatéralement de revoir ses engagements à l’égard du service public audiovisuel en cours d’exécution d’un COM.