Comme nous l’avons amplement démontré durant ce débat, l’indépendance des organismes participant au service public de l’audiovisuel vis-à-vis du pouvoir exécutif et des puissances économiques ne sera réelle qu’à la condition que deux critères soient vérifiés, tous deux nécessaires mais insuffisants l’un sans l’autre. En effet, si l’autonomie de gestion n’a aucun sens sans indépendance politique, inversement, l’indépendance politique serait vidée de sa substance si elle était placée sous tutelle financière.
En nous appuyant notamment sur les exemples allemand ou britannique, nous sommes nombreux sur les travées de cette assemblée à considérer, à l’instar de la commission des affaires culturelles depuis longtemps, que le produit de la redevance constitue la ressource la plus adaptée pour assurer au service public de l’audiovisuel un financement sûr, pérenne, dynamique et adapté à ses besoins.
En effet, la redevance doit être vue non pas comme un impôt, mais comme une contribution au financement d’un service public, comme le sont d’autres prélèvements de ce type dont le produit est affecté au financement de services publics locaux bien connus dans cet hémicycle, ce qui incite justement la commission des affaires culturelles à proposer de modifier la dénomination de notre redevance audiovisuelle.
Cette forme de financement répond parfaitement au besoin des dirigeants des entreprises publiques du secteur qui nous intéresse de disposer d’une visibilité pluriannuelle sur l’évolution de leurs ressources, ce qui leur garantit par ailleurs une réelle autonomie dans leurs choix de gestion, au moins pour la durée de leurs fonctions.
La loi d’août 2000 avait introduit une innovation allant tout à fait dans cette direction, en instituant une forme de contractualisation entre, d’une part, l’État et, d’autre part, pris individuellement, France Télévisions, Radio France, Radio France Internationale, ARTE-France et l’Institut national de l’audiovisuel.
Aux termes des actuelles dispositions de l’article 53 de la loi de 1986, les contrats d’objectifs et de moyens sont ainsi négociés pour trois à cinq ans et déterminent, pour cette durée, le montant des ressources publiques devant être affectées à chacun des organismes précités.
Alors que le Gouvernement a imposé à France Télévisions de supprimer, dès avant le terme de ce débat, la publicité de ses écrans entre vingt heures et six heures et a donc bouleversé toute l’économie du paysage audiovisuel français d’un trait de plume, la responsabilité du législateur est d’apporter à notre radio et à notre télévision publiques, ainsi qu’à l’INA, l’assurance de bénéficier d’une ressource publique pérenne et sûre pour l’avenir.
L’adoption par le Sénat de notre amendement n° 314, qui vise à reconnaître légalement que le produit de la redevance constitue la principale ressource financière de France Télévisions, va dans ce sens. En cohérence avec cette mesure, le Sénat devrait aussi approuver notre présente proposition, qui vise à ce que les contrats d’objectifs et de moyens précisent expressément, parmi l’ensemble des ressources publiques devant être affectées à chacun des organismes qu’ils couvrent, le montant du produit de la redevance, et ce pour la durée de leur exécution.
Mes chers collègues, notre assemblée doit à la constance de sa commission des affaires culturelles, soutenue si longtemps par deux de nos anciens collègues le président Jacques Valade et Louis de Broissia, de faire bloc face aux adversaires irréductibles de la redevance, peu présents il est vrai sur nos travées, mais beaucoup plus nombreux sur les bancs de l’UMP de l’Assemblée nationale. Notre amendement vise à offrir cette opportunité au Sénat. Ne la laissons pas passer !