Intervention de Philippe Richert

Réunion du 14 janvier 2009 à 21h30
Situation au proche-orient — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de Philippe RichertPhilippe Richert :

… ne sert pas les intérêts présents et futurs d’Israël.

Monsieur le ministre, vous avez insisté à plusieurs reprises sur la nécessité d’une approche équilibrée du conflit et d’un juste partage des responsabilités.

Il s’agit en effet d’un point central.

La France a une position privilégiée pour porter ce message et prôner des voies de règlement du conflit elles aussi équilibrées, en raison, d’une part, des liens d’amitié profonds qui l’unissent à Israël, et, d’autre part, des relations de confiance qu’elle entretient avec les autorités palestiniennes du Fatah et le président Mahmoud Abbas.

Certes, la réponse militaire israélienne peut paraître disproportionnée et n’apportera pas de solution pérenne. Nous en sommes tout à fait conscients. La France l’a condamnée fermement, et il n’aurait pu en être autrement.

Cependant, nous condamnons également – M. le Président de la République l’a affirmé clairement – les tirs de roquettes du Hamas sur Israël, qui ont servi de déclencheur de cette riposte militaire.

Le cessez-le-feu ne peut être que réciproque et simultané. En effet, pour Israël, le retour au statu quo ante, c’est-à-dire à une situation d’insécurité permanente pour une grande partie de sa population sous le feu quotidien des missiles, n’est pas une voie acceptable.

Dans cette perspective, le rôle de la France est important : sa voix compte dans la région. Je fais confiance à la détermination du Président de la République et du Gouvernement pour poursuivre les efforts engagés la semaine dernière en vue d’un arrêt immédiat des violences et relancer ensuite le processus normal des négociations de paix.

Je salue, en outre, le fait que M. le Président de la République fasse de la reconnaissance d’Israël par le Hamas un préalable à toute négociation avec cette organisation.

Les initiatives de paix ont déjà conduit à l’instauration, depuis le 7 janvier, d’un cessez-le-feu quotidien de trois heures permettant la mise en place, par l’armée israélienne, d’un corridor humanitaire vers Gaza. Ces avancées sont importantes, mais encore largement insuffisantes.

Pour aller plus loin, la mobilisation de l’Europe, de la communauté internationale, mais également des pays arabes voisins d’Israël est elle aussi primordiale.

Je salue à cet égard le rôle qu’a assumé l’Égypte, par l’engagement du président Moubarak dans la résolution du conflit. Son intermédiation est essentielle pour rétablir le dialogue entre les Palestiniens du Fatah et ceux du Hamas. Elle l’est également pour renforcer le contrôle de la frontière avec Gaza, afin de lutter contre la contrebande d’armes qui « alimente » le Hamas.

Cependant, les autres pays arabes ont également un rôle clé dans la résolution d’un conflit vieux de soixante ans.

Nous en sommes tous convaincus : la seule issue est la création d’un État palestinien viable aux côtés d’Israël, qui, pour sa part, a droit à la sécurité, d’un État palestinien doté d’institutions stables, qui puisse être un interlocuteur solide et véritable, d’une économie source de croissance et de progrès pour la population.

Dans cette optique, l’aide de l’Europe, de la France, d’Israël et de la communauté internationale devra être renforcée. Je forme le vœu que l’Union pour la Méditerranée puisse également accompagner le développement économique de Gaza, mais aussi favoriser, autour de projets concrets, la coopération et les échanges entre Israéliens et Palestiniens. La question de la gestion de l’eau, cruciale dans la région, est un point d’intérêt commun qui peut contribuer à consolider ce dialogue dans un esprit constructif.

La création de cet État palestinien viable est la seule réponse juste et durable aux aspirations légitimes d’Israël à la sécurité.

En parallèle, Israël devra faire des efforts et lutter aussi, de son côté, contre ses tentations les plus extrémistes. Je l’ai entendu souligner à plusieurs reprises à cette tribune : les Israéliens ont pris largement conscience que des compromis douloureux seront indispensables pour faire avancer le processus de paix. J’ai pu mesurer cette évolution des mentalités à travers mes fréquents échanges avec nos partenaires israéliens. Selon moi, il n’y aura pas d’État palestinien viable, et donc pas de paix durable, sans un arrêt définitif de la politique de colonisation israélienne. Cela ne se fera pas sans douleur du côté israélien, mais c’est indispensable.

Je souhaite également rappeler, à l’occasion de ce débat, le sort du jeune Guilad Shalit, otage du Hamas depuis l’été 2006. J’ai pu rencontrer le père de ce jeune garçon franco-israélien avec un certain nombre de nos collègues sénateurs, à l’automne dernier. La détresse de cette famille, laissée sans véritable preuve de vie de son fils, trouve un large écho en Israël. Cela ne contribue pas à un apaisement des esprits et ne sert pas la paix.

Je forme le vœu que les démarches engagées par le Président de la République auprès de la Syrie ou de l’Égypte puissent faire avancer les choses. Pouvez-vous nous apporter des informations sur ce point, monsieur le ministre ?

Enfin, je déplore, comme vous tous, mes chers collègues, que le conflit à Gaza puisse avoir des répercussions dramatiques dans notre pays. S’il est normal qu’il suscite un débat, même passionné, il n’est pas tolérable qu’il serve de prétexte à des actes racistes ou antisémites, qui sont indignes et intolérables, telles les attaques au cocktail Molotov contre la synagogue de Saint-Denis ou à Schiltigheim, dans le Bas-Rhin.

Je salue, à cet égard, l’attitude responsable des autorités représentatives des différentes religions, qui ont noué un dialogue constructif, dans un esprit de compréhension mutuelle et d’apaisement.

Les populations juives et arabes coexistent en paix dans notre pays, comme elles le feront aussi un jour au Proche-Orient, j’en suis convaincu. Les populations civiles expriment depuis déjà plusieurs années, tant du côté israélien que du côté palestinien, une lassitude devant la répétition des conflits et l’engrenage de la violence et du terrorisme. Il est de la responsabilité de l’ensemble de la communauté internationale de répondre à ces aspirations fortes à la paix et à la sécurité qui se font jour des deux côtés de la frontière.

L’instabilité au Proche-Orient a en effet des répercussions bien au-delà de la région. Une détermination unanime à poursuivre et à relancer le dialogue est la seule voie possible pour qu’un tel drame ne se répète pas.

Je tiens ici, monsieur le ministre, à vous remercier, ainsi que, à travers vous, le Gouvernement et le Président de la République, de l’action menée de façon déterminée et équilibrée, avec une lucidité qui ne permet pas l’enthousiasme dans la situation dramatique que nous connaissons. Je puis vous assurer que nous soutenons sans réserve vos efforts en faveur de la paix, dans cette région et dans le monde.

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