La séance, suspendue à dix-huit heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.
La séance est reprise.
L’ordre du jour appelle la déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, sur la situation au Proche-Orient.
Mes chers collègues, la France est particulièrement sensible, chacun le sait, à la situation de cette partie du monde, dont elle connaît bien les nuances.
La France est attachée au dialogue et à la paix. C’est ce qui a conduit à la tenue de ce débat, demandé par l’ensemble des groupes composant le Sénat.
Le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées rappellera que, depuis quelques semaines, une mission sénatoriale, à laquelle participent le président Jean François-Poncet et Monique Cerisier-ben Guiga, suit plus particulièrement ce dossier. C’est dire toute l’importance que nous attachons au débat de ce soir !
La parole est à M. le ministre.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je mesure la gravité de la préoccupation de la représentation nationale et, à travers elle, du pays tout entier, face à la terrible crise de Gaza. Je partage votre émotion devant le gâchis de tant de vies, d’efforts et d’espérances. Je partage votre inquiétude devant le recul de la modération et du dialogue, au bénéfice de la violence.
Je ne partage pas, en revanche, le sentiment de ceux qui croient que les efforts diplomatiques – notamment ceux de la France, mais pas seulement – n’ont servi à rien, même si les résultats attendus sont, hélas ! trop lents à se manifester. La France, vous le savez, s’est pleinement engagée, dès le premier jour et au plus haut niveau, pour rechercher une sortie de crise. Les combats n’ont pas encore cessé, mais nous avons construit et maintenu une pression qui, utile aujourd’hui, sera efficace demain, du moins je l’espère.
Je voudrais vous dire en quelques mots ce que nous avons fait, dans quel esprit, et avec quels résultats.
Nous avons agi au plus vite, dès le 27 décembre. Nous l’avons fait dans un esprit d’équilibre et de justice. Nous l’avons fait avec nos partenaires européens, d’abord en les mobilisant sous notre présidence, le 30 décembre – une journée plus tard, la présidence de l’Union européenne devenait tchèque ! –, ensuite en appuyant les efforts de la présidence tchèque qui prenait le relais. Nous l’avons fait avec la double volonté d’obtenir un cessez-le-feu immédiat, pour épargner des vies et de la souffrance, tout en espérant créer les conditions d’un cessez-le-feu durable qui garantisse la relance du processus de paix.
La France est lucide sur le partage des responsabilités dans le déclenchement des combats, et cette lucidité est la première condition de nos efforts. Dès le 27 décembre, le jour où Israël a lancé l’offensive, nous avons condamné les provocations qui ont conduit à l’escalade. Nous avons aussi condamné le refus par le Hamas de reconduire la trêve de juin dernier et de rencontrer le président de l’Autorité palestinienne, comme nous avons condamné la reprise des tirs de roquettes contre le sud d’Israël.
Nous avons également condamné l’usage disproportionné de la force par Israël, rappelant qu’il n’y avait pas et qu’il n’y aurait pas de solution militaire au conflit israélo-palestinien, y compris à Gaza. Nous avons appelé au plein respect du droit international humanitaire, notamment des conventions de Genève, qui prohibent toute punition collective des populations civiles en temps de conflit, comme au plein respect du droit de la guerre, qui définit précisément l’usage licite ou non de certaines armes. Cette position équilibrée est la seule sur laquelle on puisse bâtir la paix.
Bâtir la paix, cela veut dire d’abord obtenir l’arrêt des tirs de roquettes sur Israël, le retrait des troupes israéliennes et l’ouverture des points de passage, c’est-à-dire la levée du blocus. Cela passe nécessairement par la lutte contre la contrebande à la frontière entre l’Égypte et Gaza. Cela passe aussi par la reprise du dialogue inter-palestinien entre le Fatah et le Hamas, sous l’égide d’Abu Mazen, démarche dans laquelle l’Égypte joue un rôle essentiel.
Ces grandes lignes étaient en place dans le document adopté par les vingt-sept ministres des affaires étrangères de l’Union européenne, réunis à ma demande le 30 décembre, soixante-douze heures après le début des combats. À partir de là, nos efforts se sont déployés dans deux directions : sur le terrain et à l’ONU.
Sur le terrain, tout d’abord, face à l’urgence de la situation et au caractère intolérable des violences, le Président de la République a pris la décision et le risque de se rendre dans la région, en complément de la troïka européenne conduite par la présidence tchèque, rencontres auxquelles je participais. Le déplacement du Président de la République des 5 et 6 janvier l’a conduit successivement en Égypte, dans les Territoires palestiniens, en Israël, en Syrie et au Liban, puis une nouvelle fois en Égypte.
Je veux insister sur ce point : la France est l’un des rares États qui peut parler avec les acteurs de la région, ...
... non seulement les parties prenantes, Israël et les Palestiniens, mais encore l’Égypte, la Syrie, ou le Qatar, qui sont des médiateurs indispensables.
Cette ouverture nous donne un rôle et une responsabilité particuliers. Cela ne veut pas dire que nous dialoguons avec n’importe qui, et à n’importe quelle condition. Nous avons du dialogue une conception exigeante. Le dialogue, c’est le moyen de favoriser la paix et la modération. C’est une opération réciproque, où chacun doit faire un effort. Mais on ne peut dialoguer avec ceux dont l’ambition principale et avouée est de détruire le processus de paix !
Nous n’ignorons pas la réalité du Hamas, ni son succès électoral, ni son poids dans l’opinion palestinienne. Nous sommes prêts à engager avec lui un dialogue officiel dès qu’il renoncera à la violence, qu’il souscrira aux accords conclus par l’Organisation de libération de la Palestine, l’OLP, et reconnaîtra Israël, comme nous le demande l’OLP elle-même. Nous avons dès à présent des contacts indirects pour lui faire passer des messages via des pays comme la Norvège, la Russie, la Turquie, la Syrie, le Qatar ou l’Égypte.
Notez-le : nous ne sommes pas en compétition avec les pays que je viens de citer ; nous menons des actions complémentaires. Qui fera la paix n’aura pas gagné, mais aura contribué à l’effort général, que nous souhaitons voir produire des résultats le plus rapidement possible.
Le 6 janvier, à l’issue de cette tournée au Moyen-Orient, les Présidents français et égyptien ont présenté, à Charm El-Cheikh, une initiative de paix fondée sur trois éléments principaux, qui reprennent et développent les paramètres définis par les Vingt-sept à Paris, une semaine auparavant.
Il s’agit, d’abord, de la cessation immédiate des hostilités en vue de l’ouverture d’un ou de plusieurs corridors humanitaires permettant l’acheminement effectif de l’aide jusqu’aux populations.
Il s’agit, ensuite, de l’invitation au Caire, sans délai, des parties israélienne et palestinienne pour discuter des garanties de sécurité susceptibles d’éviter une répétition de l’escalade et de permettre la levée du blocus, notamment en ce qui concerne l’arrêt de la contrebande d’armes vers le Hamas.
Il s’agit, enfin, de la relance des efforts égyptiens en vue d’obtenir une réconciliation palestinienne, indispensable à la relance du processus de paix.
Cette démarche doit aussi aboutir à la libération tant attendue de prisonniers palestiniens et israéliens.
Une telle initiative a reçu un accueil positif de la part du Président palestinien comme des autorités israéliennes. Mais elle a surtout provoqué un contexte favorable à des avancées ; j’en retiendrai trois.
Premièrement, l’annonce par Israël d’une trêve quotidienne de trois heures, afin de permettre l’acheminement de l’aide humanitaire. C’est, bien sûr, insuffisant, je le sais, mais c’est déjà une petite avancée, et cela n’aurait pas été possible sans l’initiative franco-égyptienne.
Deuxièmement, la reprise des discussions entre l’Égypte et le Hamas, et le déplacement d’une délégation du Hamas au Caire.
Troisièmement, le déplacement du collaborateur du ministre de la défense israélien, Ehud Barak, le général Amos Gilad en Égypte rencontrant le général Suleiman, et la reprise des négociations israélo-égyptiennes sur le contrôle de la frontière avec Gaza et la contrebande d’armes.
Voilà ce que furent nos efforts sur le terrain. Et nous poursuivons jour après jour nos contacts, nos avancées, nos reculs. Nous affinons nos plans collectifs. Mais il restait à donner à cette initiative une reconnaissance plus large et une force plus grande avec le vote d’une résolution du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies.
Le 8 janvier, nous avons obtenu cette résolution, qui est importante. Le secrétaire général des Nations unies, M. Ban Ki-moon, a utilisé le mot « historique ». C’est la première fois depuis 2004 que le Conseil de sécurité vote, sur ce conflit du Moyen-Orient, une résolution qui ne soit pas dénuée de substance. C’est la première fois que nos partenaires arabes acceptent de voter un texte qui condamne le terrorisme, qui dénonce aussi la contrebande d’armes, qui demande la garantie de la sécurité d’Israël par un cessez-le-feu durable, en même temps que la réouverture de Gaza.
Nous n’avons pas obtenu le vote des Américains, auquel on pouvait pourtant croire jusqu’au dernier moment. Mais nous avons évité le veto, ce qui constitue une avancée significative. D’autant que Mme Rice a déclaré publiquement et fortement qu’elle soutenait le texte et ses objectifs. C’est notre premier motif de très faible satisfaction : avoir rassemblé la communauté internationale autour d’une ligne équilibrée et modérée, qui est la condition indispensable du retour à la paix.
Cette ligne équilibrée se décline en une proposition concrète de sortie de crise, les principaux paramètres envisagés par les Européens le 30 décembre, puis développés par l’initiative franco-égyptienne du 6 janvier rappelée par le Président de la République : cessez-le-feu immédiat et durable conduisant à un retrait israélien et à l’ouverture de corridors humanitaires ; négociations des conditions d’un cessez-le-feu permanent et durable grâce à la lutte contre la contrebande d’armes et la réouverture de Gaza ; relance du processus politique de paix.
D’aucuns disent que cette résolution ne sert à rien, puisqu’elle n’est pas suivie d’effets et que les combats continuent. Certes, les combats continuent, hélas ! mais la résolution 1860 fait peser sur les belligérants une pression supplémentaire ; on l’a vu aujourd’hui même, avec l’entretien entre M. Ban Ki-moon et M. Moubarak. Le poids de la communauté internationale est d’autant plus grand que cette communauté est rassemblée : quatorze voix pour, une abstention. Si nous n’avons pas eu le vote des États-Unis, du moins avons-nous obtenu l’abstention doublée d’une déclaration de soutien du texte et de ses objectifs. Le secrétaire général de l’ONU se rendra sept jours au Moyen-Orient, après l’Assemblée générale extraordinaire qui aura lieu demain à New York.
J’aimerais bien savoir quel sens il faut donner au mot « contraignant » ! En tout cas, je sais que toutes les déclarations issues de l’Assemblée générale qui se tiendra demain ne seront pas contraignantes.
Peut-être, mais c’est la règle ! Ce sont les résolutions du Conseil de sécurité qui sont contraignantes !
Que signifie le terme « contraignant » ? Il s’agit d’une déclaration juridiquement contraignante, politiquement contraignante, qu’il faut mettre en application.
L’exercice exige tout le poids de nos efforts, et au-delà, mais il n’y a rien de contraignant si on n’en décide pas ainsi. Le secrétaire général de l’ONU entame cette tournée pour rendre la déclaration contraignante.
Nous nous sommes adressés aux pays alentour, à toutes les puissances, et nous sommes très heureux de pouvoir parler à tous. Je vous rappelle que le dialogue n’était pas évident avec la Syrie, qui joue, comme l’Iran, d’ailleurs, un rôle considérable. Nous parlons tous les jours avec l’Iran. Par téléphone, certes, mais, aujourd’hui, la diplomatie, c’est communiquer jour et nuit par ce moyen. Ce n’est pas suffisant, mais c’est ainsi !
Nous essayons de faire en sorte que, au-delà d’une pression sur les belligérants, cette résolution prépare également l’avenir. Elle renforce notre crédibilité – ce n’est pas le sujet ! – mais aussi notre poids auprès de nos différents interlocuteurs.
Elle envoie un message à nos amis américains : nous ne sommes pas restés immobiles en attendant le Président Obama, dont la position, pour avoir été largement abordée hier par Mme Rice, n’est d’ailleurs pas extraordinairement précise pour l’heure puisqu’il ne parle pas et qu’il faut attendre le 20 janvier.
Donc, nous n’avons pas attendu. Lorsque M. Barak Obama arrivera à la Maison Blanche, il aura devant lui un texte qui a fait l’accord de la communauté internationale et qui sera pour lui, je l’espère, une inspiration et une incitation. Tel est le sens de la déclaration de Mme Hillary Clinton, hier. C’est le résultat du « document transatlantique » que la présidence française de l’Union européenne a fait parvenir, dès leur nomination, aux responsables de la politique extérieure des États-Unis. Je vous ai parlé à plusieurs reprises de ce document, adopté sur proposition française par les Vingt-Sept et qui fait allusion, notamment, à notre engagement nécessaire au Moyen-Orient.
Cette résolution 1860 renforce aussi le poids de l’ONU. Imaginons ce qui serait advenu si le Conseil de sécurité avait échoué à se rassembler autour d’une résolution ! Elle renforce, et nous en sommes heureux, le poids de la France, qui présidait les débats du Conseil.
Les uns et les autres savent maintenant que nous avons agi avec obstination, que nous continuerons de le faire et que nous sommes partiellement écoutés.
Nos efforts, je le répète, n’ont pas, hélas ! produit l’effet visible et immédiat que nous espérions tous : l’arrêt des combats. Mais nos initiatives ont suscité une convergence de vues qui finira, je l’espère, par l’emporter si nous sommes assez audacieux, inventifs et déterminés. Nous ne sommes pas seuls : d’autres pays partagent ce sentiment et indiquent à tous cette direction commune.
Dans la volonté patiente, obstinée, que l’on déploie pour surmonter l’obstacle, se dessinent, j’en suis sûr, des équilibres nouveaux, qui feront avancer la paix et, peut-être, l’histoire. Quand ? Je l’ignore !
Pour autant, nous ne négligeons pas l’urgence. L’urgence, c’est la situation des populations sur place. On compte, pour l’instant, plus de 900 Palestiniens tués et 4000 blessés. Plus du tiers sont des femmes et des enfants. Le bombardement de trois écoles gérées par l’ONU, le 6 janvier, a causé la mort d’une cinquantaine de civils, et soulevé la vague d’indignation que vous savez.
Côté israélien, dix soldats ont été tués au cours des combats. Des roquettes ont continué de s’abattre sur le Sud d’Israël, tirées par dizaines depuis Gaza, et causant la mort de trois civils israéliens. II faut rappeler que la portée de ces roquettes a été étendue récemment à plus de quarante kilomètres. Elles menacent désormais trois des plus grandes villes du pays, soit un million de civils, et se rapprochent de la banlieue de Tel-Aviv.
L’urgence, c’est aussi la situation sanitaire et alimentaire. Déjà critique du fait du blocus imposé par Israël depuis la prise du pouvoir du Hamas, elle s’est dramatiquement dégradée sous l’effet des opérations militaires. La moitié de la population n’a plus accès à l’eau potable, un million de personnes sont privées d’électricité, tandis que le déficit alimentaire s’accroît. Seules neuf boulangeries fonctionnent sur les quarante-sept de Gaza.
L’insécurité empêche le programme alimentaire mondial de travailler à pleine capacité. Les organisations internationales et les Organisations non gouvernementales sont en effet en plus grande difficulté qu’auparavant ; ce n’était déjà pas facile de travailler sur place. L’ONU a repris ses activités humanitaires à Gaza ; elle avait dû les suspendre après que l’un de ses convois a été touché par des tirs d’obus israéliens le 8 janvier, provoquant la mort de l’un de ses chauffeurs.
Je veux, une fois de plus, saluer les ONG, pas seulement les françaises, toutes les organisations non gouvernementales qui ont le courage de travailler, avec efficacité, sur place.
Notre action se déploie dans deux directions. Tout d’abord, une aide directe, au travers de l’envoi d’équipes : deux équipes chirurgicales sont entrées dans Gaza et y travaillent, deux autres sont aux portes de Gaza. Nous envoyons du matériel humanitaire à Gaza via l’Égypte et Israël : deux avions de 69 tonnes. Nous tentons également d’installer un hôpital de campagne, pour apporter sur place les premiers soins aux blessés. On nous propose un bateau-hôpital ; c’est une éventualité que nous examinons.
L’aide est ensuite financière : le ministère des affaires étrangères a alloué plus de 3 millions d’euros de crédits depuis le début de l’année ; 2 millions d’euros ont déjà été débloqués pour deux agences des Nations unies, ainsi que pour les organisations humanitaires palestiniennes et l’organisation israélienne.
Il nous faut déjà penser, mesdames, messieurs les sénateurs, à l’après cessez-le-feu. Il en sera question dès la rencontre de suivi de la Conférence de Paris consacrée à l’édification d’un État palestinien – enfin ! – viable et démocratique, comme nous l’avons toujours demandé. Cette rencontre, je l’organise demain soir, jeudi 15 janvier. Elle réunira au Quai d’Orsay M. Tony Blair, représentant du Quartet, Mme Benita Ferrero-Waldner, commissaire européenne, et mon homologue norvégien, M. Jonas Store.
Nous allons mobiliser l’ensemble des parties prenantes et nous réaffirmerons avec force que Gaza doit être reconstruite et développée, le blocus levé et Gaza intégrée au sein du futur État palestinien. Je vous rappelle l’intitulé de la Conférence de Paris : les crédits ne sont pas « pour les Palestiniens » ; ils sont destinés « à l’État palestinien », comme s’il existait déjà ! Nous souhaitons que toutes les discussions reprennent.
Nous travaillons avec la présidence de l’Union européenne, la Commission, nos partenaires, les États-Unis, la Banque mondiale, la Norvège, à la préparation d’une Conférence chargée de la reconstruction.
Voilà comment se conjuguent nos efforts, à Gaza, dans la région, au sein de l’Union européenne, à l’ONU et dans le cadre du Quartet. Une dynamique est lancée, les contacts se poursuivent quotidiennement. Aujourd’hui, nous avons des résultats qui semblent un peu plus positifs, je l’espère fortement ! Nous allons dans cette direction ; nos amis turcs également. D’autres travaillent avec nous. Les Européens sont sur place. Avec acharnement, nous ne cesserons de chercher la voie étroite qui conduit – demain ou après-demain ! – du terrain des luttes au champ des fraternités. J’ai la conviction que nos efforts vont aboutir ; je vous le dis sans forfanterie et sans aucune certitude : nous notons des reculs dans nos démarches, parfois quelques avancées.
Les contours d’un cessez-le-feu commencent à se dessiner, même si nous devons encore faire face à des obstacles très importants. Je suis encouragé par les débats et les interrogations que je perçois ces jours-ci tant en Israël que du côté des États arabes, et même, semble-t-il, au sein du Hamas entre – ce n’est un secret pour personne ! – le Hamas de Gaza et le Hamas de l’extérieur.
Enfin, au nom du Gouvernement, je veux mettre en garde contre toute importation du conflit en France. La passion, la solidarité sont plus que légitimes ; je m’en félicite, car ces manifestations témoignent de la vitalité du débat démocratique et de l’ouverture vers les autres, vers l’ailleurs, loin du repli sur soi. Mais ces solidarités doivent s’exprimer dans le respect de la loi, sans débordement.
Le Gouvernement sera particulièrement vigilant à cet égard, et combattra fermement tout acte antisémite ou raciste.
Les Français de toute confession, de toutes origines, doivent donner l’exemple et montrer qu’une coexistence sereine est possible. Les organisations religieuses se rencontrent et dialoguent, mettant en garde contre les excès.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai la certitude, malgré les épreuves, les guerres, les haines, que la paix va l’emporter. Le processus de paix va redevenir une réalité tangible, une réponse sera apportée aux attentes des Palestiniens, désespérés par la progression inexorable de la colonisation.
La France travaillera, avec le président Obama, avec Abou Mazen, avec le prochain Premier ministre israélien, à ce que ce rêve, vieux déjà de soixante ans et porté, ne l’oublions pas, dès 1947, par la résolution 181 de l’Assemblée générale des Nations unies, devienne une réalité : un État palestinien viable et démocratique, vivant en paix et en sécurité aux côtés d’Israël, avec Jérusalem pour capitale commune de ces deux États.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voici trois semaines que l’opération de l’armée israélienne à Gaza, annoncée par des déclarations officielles, a commencé. Cette intervention a replacé de manière dramatique au premier rang de l’actualité un conflit vieux de soixante ans.
Le même scénario se répète d’année en année, selon le même engrenage : provocation, répression et destruction, avec son cortège de deuils et de victimes innocentes.
Ce conflit a suscité une intense activité diplomatique, plus particulièrement au cours des années quatre-vingt-dix.
Après l’engagement des protagonistes dans ce qui s’annonçait comme un mouvement vers la paix, avec le processus d’Oslo, les discussions de Camp David et leur approfondissement à Taba, nous avons cru, à plusieurs reprises, entrevoir une solution, systématiquement contredite par les faits au moment où l’on pensait toucher au but.
Ce conflit nous concerne pour plusieurs raisons.
Notre diplomatie a une vocation mondiale. Elle se veut naturellement universelle et institue la défense des droits de l’homme comme une priorité.
Elle est, pour cette raison, impliquée dans la résolution de toute crise aux conséquences humanitaires dramatiques, comme cela est le cas aujourd’hui dans la bande de Gaza.
Surtout, ce conflit survient au voisinage immédiat de l’Union européenne et engage son avenir, comme en témoigne le projet d’Union pour la Méditerranée. Il occupe une place centrale dans l’équilibre du Proche-Orient.
Notre attachement à l’indépendance du Liban, les risques pour la paix de la politique nucléaire de l’Iran, les craintes que font peser les événements d’Irak sur la sécurité de nos approvisionnements énergétiques justifient l’intérêt que nous portons à cette zone.
Nous avons, dès sa création, apporté notre soutien à l’État d’Israël, avec lequel nous avons des liens affectifs et dont nous voulons que la sécurité des frontières et de la population soit assurée.
Nous sommes profondément conscients de l’émotion que suscite, dans le monde et dans notre pays, le déroulement des opérations militaires à Gaza.
La détermination des responsabilités dans le déclenchement des hostilités est aujourd’hui vaine et dépassée, mais, pour rechercher les solutions de sortie de crise, il faut prendre en compte l’enchaînement des faits intervenus ces derniers mois.
La stabilité du Proche-Orient, et donc le conflit israélo-palestinien, nous importent beaucoup.
Depuis de longues années, le temps n’a pas joué en faveur de la paix. Dans un contexte d’enlisement de la négociation, alors que dans le même temps perduraient les entraves à la circulation et se poursuivait la colonisation en Cisjordanie, la victoire électorale du Hamas aux élections législatives puis son coup de force à Gaza sont venus compliquer la donne.
Déclaré « entité hostile » par Israël à l’été 2006, ce territoire subit depuis lors un blocus destiné à saper le soutien au mouvement islamiste, dont les tirs depuis Gaza entretiennent un climat d’insécurité en Israël. Force est de constater la stérilité de cette politique.
Avant même l’offensive israélienne, la situation était très dégradée. En octobre dernier, notre commission, considérant la perspective incertaine de parvenir à un accord de paix avant la fin de l’année 2008, avait fait part de sa vive préoccupation devant une situation potentiellement explosive, eu égard à l’aggravation des conditions d’existence de la population palestinienne liée aux entraves à la circulation, aux progrès constants de la colonisation des territoires occupés, obstacle majeur à l’établissement d’une paix durable entre Palestiniens et Israéliens, à l’instabilité et à la faiblesse politiques des deux partenaires, mettant à mal tout dialogue constructif, à la vulnérabilité d’Israël aux tirs de roquettes, en dépit d’une politique sécuritaire particulièrement déterminée.
Quelles que puissent être les surenchères liées à la campagne électorale en Israël ou au jusqu’au-boutisme du Hamas, nul n’avait intérêt à cette opération militaire, et la trêve de six mois a montré que le dialogue était possible. Mais l’absence de progrès dans la négociation ou de médiateur entre les parties, ainsi que le discrédit de l’Autorité palestinienne, ont conduit les protagonistes à l’impasse politique et à l’engrenage de la violence.
Nous savons tous qu’il n’y a pas d’issue militaire à ce conflit.
Certes, sur le plan strictement militaire, les objectifs de l’armée israélienne d’affaiblir significativement le potentiel militaire de la branche armée du Hamas et d’obtenir ainsi l’arrêt des tirs de missiles et le bouclage effectif de la frontière sud seront peut-être atteints. Encore faut-il observer que, malgré les moyens mis en œuvre par les Israéliens, les tirs de missiles sur Israël n’ont jamais cessé et que leur portée ne fait qu’augmenter.
Mais, en termes politiques, la bataille de l’image, avec l’exploitation de l’émotion suscitée par les victimes innocentes, sera très vraisemblablement gagnée par le Hamas, et pas seulement auprès des opinions et des gouvernements arabes. Les conséquences humanitaires très graves de l’opération israélienne ne peuvent qu’accentuer cette victoire médiatique.
Je voudrais saluer, dans cette situation bloquée, l’action volontaire et courageuse du Président de la République, qui a entrepris de rechercher un cessez-le-feu immédiat en prenant contact avec toutes les parties intéressées.
La France apporte un soutien sans faille à la diplomatie égyptienne, déjà impliquée dans le dialogue inter-palestinien, pour l’élaboration d’un plan en deux étapes.
Les contours de la sortie de crise sont désormais connus : cessez-le-feu, contrôle de la frontière et ouverture des points de passage.
L’Égypte joue en effet un rôle central et modérateur dans l’ensemble des conflits du Moyen-Orient, et nous avons un intérêt puissant au succès de sa médiation.
Nous devons veiller attentivement à ce que ni la Syrie ni l’Iran n’encouragent en sous-main l’intransigeance du Hamas et de ses alliés et n’empêchent la réalisation du cessez-le-feu immédiat réclamé au travers de la résolution 1860 du Conseil de sécurité des Nations unies.
Cette résolution qui réaffirme les principes d’une paix globale et de deux États vivant côte à côte dans des frontières sûres et reconnues tout en rappelant l’importance de l’initiative de paix arabe devra servir de point d’appui à une relance du processus de paix.
Chaque jour qui passe rendra la sortie de crise plus difficile, pour autant que le processus de paix n’ait pas subi des dommages irréparables. Israël ne peut rester sourd aux injonctions de la communauté internationale, au sein de laquelle la réprobation grandit.
L’une des questions que nous allons devoir nous poser – question du reste valable depuis 2006 – sera de savoir dans quelle mesure, et selon quelles modalités, le dialogue avec l’ensemble des protagonistes s’engagera.
Vous avez souligné à plusieurs reprises, monsieur le ministre, que la diplomatie consistait à discuter avec ses ennemis.
Israël, comme d’autres, devra sans doute se résoudre à discuter avec le Hamas, directement ou indirectement.
Ainsi que l’a répété le Président de la République, les liens d’amitié réels que nous entretenons avec Israël n’excluent pas, bien au contraire, la franchise, et il est de notre devoir de mettre un terme à une aventure désastreuse.
Priver durablement toute une population de nourriture, d’emplois, de soins et du droit à se déplacer librement ne peut déboucher que sur le désespoir et la haine.
Au-delà de l’urgence du cessez-le-feu, nous nous interrogeons sur la stratégie à adopter après la sortie de crise.
Nous nous interrogeons tout d’abord sur le cadre de négociations défini lors de la conférence d’Annapolis, processus essentiellement bilatéral, mené avec le parrainage des États-Unis sur un mode entraînant, en définitive, peu de contraintes. Nous donnons-nous véritablement une chance d’aboutir avec un tel schéma, qui ne prévoit pas d’arbitrage véritable et qui a largement montré ses limites ?
Il est très vraisemblable que l’offensive israélienne ne se prolongera pas au-delà du 20 janvier, date de l’investiture du président Obama. Quel rôle la nouvelle administration américaine entendra-t-elle jouer au Proche-Orient ? Cherchera-t-elle à miser sur l’apaisement et le dialogue, ou continuera-t-elle à soutenir Israël de manière inconditionnelle, au risque de renforcer ce pays dans son intransigeance ?
La France doit continuer à inciter l’Union européenne à agir avec force pour la recherche d’une solution juste et équilibrée du conflit israélo-palestinien. Même si une nouvelle conférence des donateurs réunie sur l’initiative de notre pays recueille – cela nous semble indispensable – des fonds importants pour réparer les dommages de guerre, le rôle de l’Union européenne se résumera-t-il à celui de bailleur de fonds, au détriment de son action politique ? La recherche à tout prix d’un consensus conduisant à adopter le plus petit dénominateur commun entre nations européennes n’affaiblirait-elle pas la force de notre message ?
Dans la perspective de la sortie de crise, nous nous interrogeons aussi sur les partenaires en présence. Que restera-t-il des institutions palestiniennes après l’opération israélienne ? Un président dont le mandat est arrivé à échéance le 9 janvier dernier, un Conseil législatif dans l’incapacité de siéger, un mouvement Hamas sorti vraisemblablement renforcé, sur le plan moral, de cette crise ? Quel partenaire palestinien sera notre interlocuteur dans les prochains jours ? Pourrons-nous vraiment le choisir ?
Symétriquement, quelle sera l’autorité de notre partenaire israélien si les élections israéliennes de février amènent au pouvoir une coalition de forces politiques dont le programme serait le refus du processus de paix et la poursuite de la colonisation ?
Toutes ces interrogations sont étroitement imbriquées.
La question se pose de l’implication de notre pays dans le contrôle de la frontière avec l’Égypte et les garanties de sécurité pour l’État d’Israël si l’ouverture des points de passage est acquise. Il me semble que, sur ce sujet, nous devons avoir une approche extrêmement prudente.
Notre assemblée aura prochainement à débattre de la question des opérations extérieures, les OPEX. Notre engagement éventuel doit reposer sur les capacités de nos armées à répondre aux sollicitations qui leur sont adressées et être conditionné par l’ouverture d’un processus politique réel.
S’il faut mettre un terme à une colonisation qui exproprie brutalement des familles entières vivant depuis des décennies sur leurs terres, il faut parallèlement assurer à Israël et à sa population la sécurité.
Il faut, comme le disait Tony Blair devant les présidents des commissions des affaires étrangères de l’Union européenne en juillet dernier, que chacun des habitants de la Palestine essaye de comprendre la douleur de l’autre et que les chances d’un dialogue puissent enfin se manifester. C’est l’honneur de notre pays de contribuer à renouer les fils de ce dialogue et à lutter pour l’établissement d’une paix sincère et durable dans cette partie du monde.
Le temps est venu, pour la communauté internationale, de rechercher une solution à un conflit qui a causé trop de souffrances, de deuils, de destructions, dans ce qui était jadis la Terre sainte et qui n’est plus aujourd’hui qu’une terre de douleur.
Le mur qui sépare les habitants de la Palestine est moins haut que celui qui a été élevé depuis soixante ans par l’incompréhension, l’aveuglement et le fanatisme. Il faut cesser d’utiliser les habitants de Gaza comme des pions dans une stratégie qui vise à asseoir l’influence de certaines des puissances de la région.
Cette crise pourrait avoir le mérite de faire prendre conscience de la nécessité absolue d’une relance d’un processus de paix pour aboutir à une solution garantissant la sécurité d’Israël aux côtés d’un État palestinien comprenant Gaza et la Cisjordanie.
Il ne s’agit pas d’un conflit périphérique ou régional, ou simplement d’un conflit asymétrique. Il s’agit d’un conflit grave qui, depuis soixante ans, affecte durablement la paix et l’équilibre du monde. C’est pourquoi il faut essayer résolument de trouver une solution.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste.
Monsieur le ministre, s’agissant de cet Orient compliqué, je voudrais, plutôt qu’énoncer des affirmations péremptoires sur un dossier complexe et douloureux que notre opinion publique ne semble pas toujours comprendre, vous poser quelques questions.
Le conflit israélo-arabe a rythmé médiatiquement et visuellement tous les moments de la perception de la vie internationale des hommes et des femmes de ma génération. Comme dans ces séries télévisées sans cesse rediffusées, nous avons régulièrement l’impression que les choses ne bougent pas, que le conflit s’enlise, que l’agitation de la politique internationale ne résout rien et que reviennent toujours les mêmes douloureuses images.
Nous nous sentons successivement Israéliens et Palestiniens. En mettant en perspective ce conflit qui touche finalement une fraction réduite de la population mondiale, nous pouvons néanmoins nous demander pourquoi la diplomatie internationale et le monde médiatique ne se soucient pas avec la même intensité de l’épouvantable situation qui prévaut en République démocratique du Congo, où un général rebelle, soutenu par des États voisins membres de l’Organisation des Nations unies, agresse un État souverain et se rend responsable de milliers de morts dans l’indifférence coupable de l’opinion.
Nous pouvons nous poser la même question à propos du drame majeur de la faim dans le monde, qui suscite bien peu d’intérêt au regard de la façon dont le conflit israélo-palestinien mobilise nos écrans, nos esprits et l’énergie, pour ne pas parler de l’argent, de la communauté internationale.
J’arrête ici mon propos, car une telle comparaison comptable peut être sinistre et inopportune.
Malgré toutes ces interrogations, deux certitudes se dégagent.
Première certitude, Israël a un droit inaliénable à l’existence.
Pour le monde entier, la Shoah constitue une tache indélébile. Le maintien de l’existence d’Israël est la garantie que plus jamais l’humanité ne connaîtra un tel désastre, la preuve que l’humanité et le monde entier ont retrouvé leur âme. La disparition de cet État manifesterait le risque d’un retour aux ténèbres que nous avons connues au milieu du XXe siècle.
Seconde certitude, un peuple palestinien existe, qui a été fortement secoué mais également conforté par l’implantation brutale de l’État d’Israël en Palestine.
Oui, en ce qu’il existe beaucoup plus médiatiquement et dans le monde entier.
Monsieur le ministre, nous avons donc, sur une même terre, deux protagonistes.
Israël, tout au long des soixante dernières années, a successivement cherché à atteindre divers objectifs : la recherche de son indépendance et d’un possible élargissement de son territoire en 1948-1949 ; l’affaiblissement militaire de l’Égypte avec le concours de la France et du Royaume-Uni en 1956 ; la conquête en 1967 du Sinaï, finalement rendu à l’Égypte dix ans plus tard ; une improbable guerre d’usure en 1970, qui a eu pour conséquence la guerre du Kippour et pour corollaire la conclusion d’une paix boiteuse avec l’Égypte ; un enlisement au Liban en 2006.
En face, le monde arabe refuse, dès 1947, le principe même de l’existence d’Israël, pour finir par le concéder du bout des lèvres en 1979. Ce n’est que dans les années quatre-vingt-dix que des États arabes du Golfe ont peu à peu élaboré une nouvelle approche. Actuellement, le peuple palestinien est divisé.
Monsieur le ministre, Israël et la Palestine ont-ils une vision stratégique à long terme ? Sont-ils capables de trouver une solution à leur conflit ? Si nous répondons par la négative, nous devons nous demander si une solution ne doit pas être imposée par la communauté internationale, se substituant aux deux protagonistes, qui manquent de la volonté d’aboutir.
Interrogeons-nous alors sur l’action internationale. A-t-elle été bonne et efficace ? La naissance même de l’État d’Israël procède d’une très forte volonté de la communauté internationale. En effet, le plan de partage de la Palestine du 29 novembre 1947 a été adopté par les États-Unis, l’Union soviétique et une majorité de pays européens.
Il convient tout de même de s’interroger également sur l’opportunité de la création des camps palestiniens, constitués avec le concours, y compris financier, des organisations internationales. Ce fut une ghettoïsation rampante, qui a donné naissance à des générations d’assistés et de rebelles sans espoir. Ne sommes-nous pas responsables de cette situation ?
Interrogeons-nous aussi sur le rôle actuellement inexistant du Quartet, composé de l’ONU, de l’Union européenne, de la Russie et des États-Unis. De feuille de route en conférence d’Annapolis, la communauté internationale semble parfois avoir raté de nombreux rendez-vous. Malgré les différents sommets de Camp David, les États-Unis n’ont-ils pas trop souvent joué aux apprentis sorciers ? Monsieur le ministre, vous avez évoqué M. Obama : trouvera-t-il une solution ? Nous le souhaitons.
Par ailleurs, l’Europe a-t-elle été assez présente, de façon générale, au fil du temps ? A-t-elle su mener une action plus préventive ? En quoi a consisté le rôle de son missionnaire, Tony Blair ?
L’observateur extérieur a quelquefois l’impression que la communauté internationale, malgré sa bonne volonté, montre une grande impuissance et laisse la bande de Gaza et la Cisjordanie se transformer en une nouvelle Somalie.
Nous nous félicitons, monsieur le ministre, de votre action dans une région du monde que vous connaissez bien, ainsi que de celle du Président de la République, qui a mis son énergie, son intelligence et sa volonté au service de cette cause. Cependant, son action n’est-elle pas hypothéquée par l’exclusion du Hamas de la négociation internationale ? C’est là ma dernière question.
Le Hamas – mot qui signifie « zèle » en arabe – est une terrible formule politique. Déjà présente à Jérusalem en 1946, très influente depuis des décennies en Égypte, cette organisation d’essence religieuse, vouée à la prédication, a peu à peu pris une place politique importante.
Elle a ainsi gagné les élections législatives en février 2006 à Gaza et en Cisjordanie, Ismaïl Haniyeh étant le Premier ministre régulièrement désigné par le verdict des urnes. La communauté internationale n’a pas reconnu ces résultats. Pourtant, le général de Gaulle n’avait-il pas traité avec les terroristes algériens en 1960 ? Cela avait abouti aux accords d’Évian et à la fin de la guerre d’Algérie.
Nous constatons aujourd’hui que, même si le Hamas s’est affaibli dans la bande de Gaza, il a conforté sa position en Cisjordanie et, surtout, son image dans l’ensemble du monde arabe. Ne faut-il pas – je me borne, monsieur le ministre, à poser la question, je n’affirme rien – changer notre regard sur lui ?
Après avoir soulevé ces quelques interrogations, monsieur le ministre, je tiens à rappeler la difficile situation des chrétiens au Proche-Orient, notamment à Gaza, où des foules fanatiques ont brûlé des croix chrétiennes. La présence des chrétiens est pourtant précieuse dans cet Orient compliqué que j’évoquais en préambule. Rien ne sera possible, rien ne pourra être tenté et, surtout, rien ne réussira si tous les protagonistes ne conservent pas à l’esprit et dans le cœur cette parole des Écritures : « Réconcilie-toi avec ton frère ».
Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis satisfait que se tienne enfin ce soir le débat que nous avions demandé sur la situation au Proche-Orient et le drame humain et politique qui se déroule dans la bande de Gaza.
En effet, l’offensive israélienne très explicitement dénommée « Plomb durci » qui sévit depuis le 27 décembre dernier oblige les gouvernements et les organisations internationales à prendre leurs responsabilités pour condamner une agression insupportable.
Depuis maintenant plus de quinze jours, l’armée israélienne déchaîne toute sa puissance sur la bande de Gaza, menant son offensive la plus meurtrière depuis celle de 1967. Pour mettre fin aux tirs de roquettes sur les localités du sud d’Israël par le Hamas, l’État d’Israël a lancé contre les populations civiles de Gaza toute son armée, jusqu’aux réservistes, ainsi qu’une force de frappe n’excluant pas, selon les ONG, le recours aux bombes au phosphore et à de nouvelles armes, ce qui est intolérable.
En un peu plus de deux semaines, près de mille personnes ont trouvé la mort, dont 60 % de civils, parmi lesquels un très grand nombre de femmes et d’enfants.
Des dispensaires, des ambulances, des écoles et un convoi humanitaire de l’ONU ont été bombardés par l’armée israélienne. Ces bombardements rendent particulièrement difficile l’acheminement d’une aide dont 1, 5 million de Palestiniens ont le plus urgent besoin, 750 000 réfugiés subsistant même exclusivement grâce à elle.
La situation humanitaire dans la bande de Gaza est donc intolérable. Cette population est privée de tout : d’eau potable, d’électricité, de soins, de médicaments, de vivres. La situation sanitaire est devenue insoutenable, alors que les ONG la jugeaient déjà catastrophique avant même l’offensive israélienne, du fait du blocus.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen et ceux du Parti de gauche ne peuvent admettre que l’armée israélienne, tout en affirmant ne vouloir traquer que les membres du Hamas, s’en prenne avec une telle violence aux populations civiles palestiniennes. Nous condamnons sans appel cette agression intolérable qui se déroule, je le souligne, avant des élections importantes en Israël. Il est profondément scandaleux qu’un millier de morts tienne lieu d’argument électoral !
Comme le confirme le succès des manifestations organisées ce week-end partout dans le monde, cette condamnation est largement partagée. Elle devrait être l’objet d’un consensus au sein de la classe politique française.
La question n’est certainement pas de savoir qui a rompu la fragile trêve instaurée voilà plusieurs mois. Elle ne conduit qu’à renvoyer inutilement dos à dos les protagonistes de ce drame.
Comme le proclament vingt-quatre associations de femmes israéliennes opposées à l’agression conduite par l’État d’Israël, une seule motivation doit déterminer l’intervention de la communauté internationale : faire en sorte que « la guerre ne soit plus une possibilité, la violence une stratégie, ni l’assassinat une alternative ».
Il y a quelques jours, monsieur le ministre, je vous entendais refuser, à la télévision, de vous exprimer sur la légitimité d’une intervention d’Israël dans la bande de Gaza. Je vous l’avoue, cette déclaration m’a choqué. Aucun pays ne peut se prévaloir d’une quelconque légitimité pour massacrer des populations civiles.
Quels qu’en soient les motifs, cette violence constitue tout simplement, au regard du droit international et en particulier des statuts de la Cour pénale internationale, un crime de guerre, que la communauté internationale doit faire cesser. Comme cela nous a été confirmé par d’éminents juristes, la France a la possibilité d’y contribuer, notamment en attaquant judiciairement devant ses tribunaux nationaux tous belligérants ou responsables politiques ayant la double nationalité.
Cependant, comment s’étonner d’une aussi violente escalade ? Depuis maintenant de très nombreuses années, nous demandons inlassablement que la communauté internationale prenne ses responsabilités et mette tout en œuvre pour favoriser une solution politique du conflit et pour trouver les chemins d’une paix juste et durable entre ces deux peuples.
Au contraire, son silence proprement assourdissant et son laisser-faire devant les violations récurrentes du droit par Israël ont nourri le désespoir du peuple palestinien depuis plusieurs générations.
En effet, si nous condamnons sans ambiguïté les tirs de roquettes du Hamas, nous devons malgré tout admettre que le silence complaisant de la communauté internationale, sinon le soutien de certains pays, comme les États Unis, à l’intervention israélienne, n’ont fait que renforcer la légitimité de cette organisation aux yeux des Palestiniens et bloquer le processus de paix.
À la veille de la tenue d’élections importantes dans les territoires palestiniens, ce conflit renforcera encore le Hamas, n’en doutons pas. C’est une illustration criante de l’impasse politique dans laquelle se trouve ce conflit.
Depuis plus de soixante ans, le droit est nié dans cette partie du monde. Aucune résolution de l’ONU, aucune initiative internationale n’a permis, de quelque manière que ce soit, de faire respecter le droit des Palestiniens, qui subissent notamment l’occupation.
On ne compte plus les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU qui sont restées inappliquées depuis maintenant quarante-deux ans, y compris la plus récente d’entre elles, la résolution 1860, qui appelle à « un cessez-le-feu durable […] menant au retrait complet des forces israéliennes de Gaza » et « condamne toutes les violences et hostilités dirigées contre des civils ».
En effet, le Premier ministre israélien a déjà affirmé que l’armée allait poursuivre ses attaques jusqu’à ce que les objectifs visés aient été atteints, et parle d’agir d’« une main de fer » !
Israël continue donc de mettre en œuvre sa politique inadmissible d’occupation et d’exactions contre les civils. Aujourd’hui, plus de 10 000 prisonniers politiques sont détenus dans les geôles israéliennes. Les territoires prétendument accordés aux Palestiniens se sont réduits comme peau de chagrin. Le « mur de la honte » s’est construit autour de Jérusalem et la bande de Gaza est soumise à un blocus inacceptable, qui en fait un territoire totalement bouclé. Tout cela dans la plus complète impunité.
Cela fait des années que cette situation perdure, s’envenime. Tout processus politique de résolution du conflit a échoué, faute d’une volonté forte de la communauté internationale, particulièrement des États-Unis, de peser en faveur du dialogue et de la reconnaissance du droit effectif des deux peuples à vivre en paix.
Il faut ici rappeler que la création du Hamas en 1987 avait bénéficié de la bienveillance de l’État d’Israël, satisfait de voir se développer un rival pour l’OLP de Yasser Arafat. Selon le journal Le Monde, Ariel Sharon, responsable militaire de Gaza à l’époque, avait même fait financer les mosquées des Frères musulmans, à l’origine de la création de cette organisation.
Aujourd’hui encore, aucun moyen n’a été donné à Mahmoud Abbas pour engager de véritables négociations, et l’attitude d’Israël lors du retrait des colonies de la bande de Gaza a été plus que contestable.
L’Autorité palestinienne n’a cessé d’être affaiblie par Israël et la communauté internationale, alors qu’elle constituait pourtant le meilleur gage de la construction d’une paix juste et durable.
L’absence de solution politique et l’échec des accords entre l’Autorité palestinienne et le gouvernement d’Israël depuis maintenant quinze ans atteignent directement la crédibilité de cette autorité auprès des peuples et font le jeu des extrémismes, mettant gravement en cause l’attachement à la vie démocratique et à la laïcité qui fonde encore l’originalité et la richesse du peuple palestinien dans cette partie du monde.
Pourtant, malgré les souffrances, malgré la misère et les humiliations, les Palestiniens, dans leur majorité, comme une grande partie du peuple israélien, veulent aujourd’hui vivre dans la paix et la sécurité.
Au-delà des déclarations de bonnes intentions, y compris de la part de la France, quelles initiatives ont été prises au cours des années pour sortir de l’impasse ?
Tout d’abord, et cela est consternant, la communauté internationale a constamment refusé de prendre de véritables sanctions contre Israël, comme cela a pu être fait pour d’autres pays qui ne respectaient pas le droit international. On peut rappeler, à cet égard, l’embargo contre l’Irak, qui a duré de nombreuses années.
Au rebours du bon sens, la communauté internationale a toujours poursuivi ses relations politiques et commerciales avec Israël. Ainsi, l’Union européenne, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, a même promu au rang de priorité le rehaussement de ses relations avec ce pays, allant jusqu’à le faire entériner par le conseil des ministres des affaires étrangères le 8 décembre dernier, contre l’avis même du Parlement européen.
Monsieur le ministre, nous vous avons écrit à ce sujet un courrier de protestation le 15 décembre dernier, resté sans réponse à ce jour.
M. le ministre manifeste son étonnement.
Loin de s’attirer les foudres de l’Union européenne, Israël obtient donc, comme une récompense, de participer à un large ensemble de programmes communautaires, devenant quasiment un membre de l’Union. Pourtant, l’article 2 de l’accord d’association de l’Union européenne avec Israël mentionnait déjà clairement la suspension de cet accord en cas de non-respect du droit. En 2002, une résolution du Parlement européen demandait que l’on fasse jouer cette clause.
Nous sommes donc très loin d’une politique de sanctions à l’encontre de cet État qui ne respecte pas le droit international. Il est indispensable que l’Union européenne, au-delà de la nécessaire aide humanitaire, prenne ses responsabilités et suspende l’accord d’association et tout projet de rehaussement. Il n’est que temps de poser des actes, au-delà des discours !
Je tiens également à revenir sur l’importance de l’implication des États-Unis dans ce processus. Je note à cet égard que c’est le seul pays à s’être abstenu lors du vote de la résolution 1860, alors qu’un consensus existait. Certes, il s’agit d’un progrès au regard des vetos qu’il pose régulièrement. Pour autant, nous déplorons cette attitude et nous souhaitons que la prise de fonctions de Barack Obama amène une réorientation nette de la politique de Washington au Proche-Orient, rendant celle-ci conforme aux résolutions de l’ONU.
Cette énième crise majeure rappelle que c’est bien la question de la Palestine qu’il faut résoudre sur le fond, dans la justice, le droit et la sécurité pour tous, y compris pour l’État d’Israël. Il n’y a pas d’issue hors de cette exigence. Les ministres des affaires étrangères de l’Union européenne se sont jusqu’à présent contentés d’un appel à un cessez-le-feu et au retour au processus de paix. C’est déjà mieux que rien, mais, en agissant ainsi, les Vingt-Sept font précisément semblant d’oublier qu’il n’y a plus de processus de paix, ni dans le cadre défini hier à Oslo ni a fortiori dans celui de la conférence d’Annapolis.
Je tiens à souligner que, contrairement à ce que l’on affirme trop souvent, nous ne sommes pas devant un conflit religieux qui verrait s’opposer juifs, musulmans et chrétiens. Lorsque des actes racistes ou antisémites sont perpétrés en France, il s’agit donc non pas d’une « importation » de ce conflit, mais d’actes honteux, déconnectés des enjeux de ce dernier et qui nous choquent profondément. Nous condamnons fermement toute récupération idéologique ou religieuse.
Au Proche-Orient, la religion est d’ailleurs un simple prétexte pour justifier une guerre économique dont l’enjeu est l’appropriation des ressources naturelles de la région ; c’est une guerre pour la maîtrise du territoire.
Pour conclure, il faut qu’une force multinationale d’interposition soit déployée de toute urgence sous l’égide de l’ONU, tout d’abord pour mettre un terme à cette nouvelle guerre, ensuite pour faire respecter les frontières délimitées par l’ONU en 1967 et garantir ainsi l’existence de deux États souverains, la Palestine et Israël.
La communauté internationale doit décider une aide d’urgence pour répondre à la crise humanitaire. À ce sujet, monsieur le ministre, je vous invite à accepter le principe de l’envoi du navire-hôpital de la marine nationale au large des côtes de Gaza, demandé par des personnalités comme Raymond Aubrac, Carole Bouquet, Rony Brauman, Régis Debray, Mireille Mendès-France, Stéphane Hessel ou Gilles Perrault, parmi bien d’autres.
J’en appelle donc au Gouvernement pour qu’il préconise des sanctions européennes à l’encontre d’Israël et qu’il institue la France, notamment au moment où elle préside l’ONU, en acteur résolu de la reprise du processus de paix au Proche-Orient, seule garante de la sécurité des peuples.
Emprunter la voie politique est l’unique solution pour sortir de cette situation. Cela doit passer par le dialogue avec tous les protagonistes régionaux, y compris le Hamas, sous l’égide de l’ONU, j’y insiste. Le peuple palestinien, le peuple israélien, les peuples du monde entier ont besoin d’une paix juste et durable au Proche-Orient. Nous pouvons tous ensemble, chers collègues, si nous y sommes déterminés, contribuer à instaurer un monde plus humain.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – MM. Nicolas Alfonsi et Jean-Pierre Chevènement applaudissent également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Gouvernement a souhaité, en accord avec la Haute Assemblée, que nous puissions débattre ce soir du conflit au Proche-Orient, qui connaît une brusque aggravation depuis la fin du mois de décembre.
Au nom du groupe UMP, je vous remercie de ce débat, monsieur le ministre. C’est l’occasion pour nous de mieux nous informer et de vous faire part de nos positions respectives.
Tout d’abord, je tiens à saluer l’important travail effectué par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, présidée par Josselin de Rohan, qui met tout en œuvre pour que notre information sur ce conflit soit la plus complète, ainsi que celui de notre éminent collègue Jean François-Poncet, qui, avec Monique Cerisier-ben Guiga, conduit une mission de contact et d’analyse dans cette région.
Nous avons tous en tête le terrible engrenage des faits depuis le 27 décembre dernier, qu’ont rappelé un certain nombre de nos collègues.
Le bilan, déjà très lourd avec près de 1 000 morts palestiniens, plus de 4 000 blessés et plus de 700 roquettes tirées sur Israël, risque encore de s’aggraver cette nuit même. L’insécurité et la panique règnent parmi les populations civiles. De part et d’autre, elles sont confrontées quotidiennement à l’horreur : horreur des actes de terrorisme, des attentats perpétrés dans le passé par des commandos suicides aux terrasses des cafés ou dans les bus de ramassage scolaire ; horreur devant la réalité d’un mur érigé par Israël pour se protéger de ce terrorisme, certes, mais qui en fait exacerbe les rancœurs et rend la vie quotidienne toujours plus difficile.
La situation au Proche-Orient hante l’action internationale de toutes les grandes nations, dont la France. Les pourparlers, les négociations et les accords internationaux qui se sont succédé n’ont en fait jamais véritablement abouti à un accord de paix viable.
Combien de résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU, combien de feuilles de route ont-elles été élaborées ? Des accords de Rhodes en 1949 aux accords de Wye Plantation en 1998, en passant par ceux de Camp David en 1978 ou d’Oslo en 1993, combien de rencontres au sommet ont fait naître l’espoir, pour finalement échouer à instaurer une paix véritablement durable ?
L’histoire de ces deux peuples est rythmée de trêves et de cessez-le-feu dramatiquement interrompus. La permanence de ce conflit se traduit par de récurrents appels à la revanche. Dès lors, combien de générations faudra-t-il encore sacrifier ?
Mes chers collègues, malgré une tentation naturelle de se laisser aller au découragement, nous ne pouvons nous résigner à cette escalade de la violence et au sempiternel recours aux armes. Nous savons, en effet, que ce conflit israélo-palestinien explique pour une très grande part les multiples confrontations survenues sur cet arc de la violence et du terrorisme qui va de la Mauritanie à l’Indonésie, en passant bien sûr par l’Afghanistan et le Pakistan.
Nous avons donc le devoir d’agir pour qu’un véritable accord de paix voie le jour et, surtout, pour qu’il soit accepté par tous les acteurs. C’est là la seule condition préalable à l’instauration d’une paix durable dans cette région du monde, ainsi qu’à un recul du terrorisme à l’échelle mondiale.
Aussi, monsieur le ministre, est-ce avec un immense espoir que les sénateurs du groupe UMP ont salué l’initiative du Président de la République et le contenu du message qu’il a délivré la semaine dernière lors de son voyage au Proche-Orient.
Grâce à la qualité des contacts qu’il avait précédemment noués lors de ses visites au Liban ou en Israël, à la suite de son discours fondateur à la Knesset ou dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée, le Président de la République a pu successivement rencontrer les présidents égyptien, syrien et libanais, le président de l’Autorité palestinienne et le Premier ministre israélien, Ehud Olmert.
Grâce à une véritable coopération avec le président Moubarak, son action a permis l’élaboration d’un plan de paix visant avant tout à renouer le dialogue entre les parties et à mettre en place les conditions d’un cessez-le-feu que nous souhaitons immédiat.
Il nous paraît très important que les pays voisins, parfois ennemis d’hier, soient eux aussi associés à ce plan. Le retour de l’Égypte en tant que force organisatrice du dialogue et l’implication de la Syrie sont donc des postulats de tout processus de paix.
Pourtant, il n’y a pas six mois, certains criaient au scandale lorsque la France recevait le président syrien Bachar el-Assad. Aujourd’hui, qui peut nier que la bonne tenue de nos relations diplomatiques avec la Syrie représente un atout ? Ce pays reste en effet l’un des rares à entretenir des relations régulières et étroites avec le Hamas.
Ainsi, les interlocuteurs de la France pourront conduire à la table des négociations les différentes parties au conflit et contribuer à ce qu’elles acceptent les conditions d’un plan de paix durable.
En outre, cette initiative du Président de la République a permis de placer la France, l’Europe et, pour la première fois, l’Union pour la Méditerranée au cœur du règlement du conflit.
En effet, malgré l’aide financière importante que l’Europe apporte à la Palestine, malgré votre engagement personnel et vos missions incessantes pour rapprocher les parties, monsieur le ministre, notre rôle dans le processus de paix n’a pas souvent été à la hauteur des efforts consentis.
Certains peuvent s’agiter et critiquer l’action du Président de la République. Il n’en reste pas moins que sa mission était particulièrement risquée, voire audacieuse, et qu’elle doit être saluée. Elle l’a d’ailleurs été tant en France que bien au-delà de nos frontières.
Sa détermination est à la hauteur de l’urgence de la situation, et nous nous félicitons de sa volonté de parvenir, enfin, à un accord de paix équilibré. Il avait du reste lui-même condamné avec autant de force les tirs de roquettes du Hamas que l’offensive de Tsahal contre Gaza.
En appelant Israël et les factions palestiniennes à l’arrêt des hostilités, en les invitant à discuter sans délai des garanties d’une véritable sécurité, en demandant enfin à l’Égypte de reprendre ses efforts en vue d’une réconciliation interpalestinienne, cet accord pose les bases concrètes d’une véritable négociation qui, nous l’espérons tous, va aboutir dans les heures ou les jours prochains.
Le temps des polémiques entre pro-palestiniens et pro-israéliens est révolu ; elles ne sauvent aucune vie, elles n’ont, en vérité, cessé d’entretenir la haine entre ces deux peuples.
Dorénavant, il est primordial d’obtenir le plus rapidement possible un cessez-le feu immédiat et durable.
Cela est vital pour la population civile de la bande de Gaza, tout d’abord, qui vit dans des conditions effroyables. Depuis dix-huit jours maintenant, et en réponse aux tirs de roquettes du Hamas, les bombardements sur la ville de Gaza ont redoublé d’intensité. Près d’un demi-million de personnes sont privées d’eau et d’électricité, le système d’égouts de la ville menace de s’effondrer, les blessés ne peuvent plus être évacués, encore moins soignés, et les hôpitaux manquent cruellement de matériel et de médicaments.
Par ailleurs, les accusations selon lesquelles Israël aurait utilisé des munitions DIME ou des bombes au phosphore, dont l’emploi est interdit en milieu urbain et contre les populations civiles par le protocole III de la convention de 1980 sur les armes conventionnelles, ne laissent pas d’inquiéter. On le sait, l’utilisation de ce type d’armes peut avoir des effets dévastateurs sur les populations.
Le plan de paix rendra possible la mise en place de corridors humanitaires et de points de passage qui permettront aux ONG israéliennes, palestiniennes ou internationales et aux équipes médicales de secourir les populations. Ces équipes recevront une première aide de 3 millions d’euros – vous venez de le confirmer, monsieur le ministre – et pourront s’appuyer sur le déploiement d’un hôpital mobile.
Ce cessez-le-feu est également essentiel pour Israël, les populations du sud du pays étant quotidiennement exposées aux tirs de roquettes, qui rendent leur vie tout aussi impossible que celle des Palestiniens. Il est, en effet, primordial d’assurer définitivement la sécurité d’Israël, sécurité dont le principe est garanti depuis soixante ans par les instances internationales.
Ce plan a pour objet de mettre un terme à la contrebande d’armes au profit du Hamas à travers la frontière avec l’Égypte. Laisser circuler les armes est totalement inacceptable.
Sur quelle base doit s’établir le dialogue qui conduit à la paix ?
Tout d’abord, nous le savons, aucun plan de paix ne pourra voir le jour sans une réconciliation entre les différentes factions palestiniennes, le Fatah et le Hamas notamment. L’Égypte garde un rôle prépondérant dans ce dialogue.
En outre, la réalité imposée par les belligérants n’implique-t-elle pas de nouer un jour un dialogue plus direct avec le Hamas, qui, je le rappelle, a remporté une élection régulière, souhaitée et validée par les Européens ?
Le champ de ce dialogue devra absolument inclure la reconnaissance définitive d’Israël dans ses frontières sécurisées et l’arrêt de tout recours à la violence.
C’est à ces conditions que l’on pourra éviter que Gaza ne sombre dans l’anarchie totale, selon un processus à la somalienne, ce qui serait encore bien plus dangereux pour la sécurité d’Israël et pour la paix dans le monde.
Monsieur le ministre, bien évidemment, nous nous réjouissons de l’adoption par le Conseil de sécurité de l’ONU, le 8 janvier dernier, de la résolution 1860. Nous savons quel a été votre rôle personnel, en tant que président du Conseil de sécurité, dans le vote de cette résolution.
Bien sûr, elle n’est pas encore suivie d’effets aujourd’hui. Le lendemain de sa signature, le Hamas faisait savoir qu’il rejetait le plan franco-égyptien, prétendant que ce dernier représentait une menace pour la cause palestinienne. Dans la nuit de lundi à mardi, des chars blindés israéliens ont pénétré dans la ville de Gaza, et les quartiers se sont embrasés ces deux derniers jours.
Par ailleurs, depuis ce week-end, nous assistons à une surenchère de provocations entre responsables israéliens et palestiniens, qui risque de réduire à néant les efforts consentis la semaine dernière et le processus engagé.
Certes, Israël poursuit ses opérations militaires ; certes, le Hamas ne trouve pas dans la résolution la réponse à ses attentes ; mais le monde entier comprend bien que cette résolution trace le cadre dans lequel, tôt ou tard, s’inscriront les discussions de paix qui finiront bien par avoir lieu.
Dès lors, monsieur le ministre, comment la France compte-t-elle poursuivre ses efforts diplomatiques ? Vous avez d’ores et déjà évoqué des pistes. Les membres du groupe UMP fondent de grands espoirs en la poursuite de vos démarches.
Vous revenez des Nations unies. Alors que le secrétaire général Ban Ki-moon entreprend une tournée au Proche-Orient, dans quelle mesure pensez vous qu’il pourra faire avancer le plan de paix franco-égyptien et contribuer à l’application de la résolution 1860, qui n’est qu’un préalable ?
Enfin, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à attirer votre attention sur l’internationalisation de ce conflit et sur ses répercussions dans notre propre pays.
Les événements qui se sont déroulés ces derniers jours sur notre territoire sont aussi inquiétants qu’inacceptables. Les actes de violence commis contre des lieux de culte juifs à Toulouse dans la nuit du 5 au 6 janvier sont proprement intolérables, de même que les débordements survenus au cours des manifestations de soutien aux habitants de la bande de Gaza.
On ne saurait condamner des manifestations d’appel à la paix, car la France est une démocratie et permet cette liberté d’expression, ce qui est une chance.
Toutefois, il est de la responsabilité de tous, et notamment des hommes et des femmes politiques, que ces manifestations se déroulent sans incident et qu’elles ne se transforment pas en incitation à la haine.
Cette responsabilité incombe aussi aux journalistes. Nous souhaitons qu’ils veillent à ne pas relayer dans les foyers des images dont la véracité n’est pas toujours établie. Les vidéos de propagande que l’on trouve sur internet contribuent déjà largement à la confusion et à la désinformation, sans qu’il soit besoin de surenchérir.
Pour conclure, permettez-moi de lancer un appel à la vigilance et à la retenue, à l’intention non seulement de nos populations, mais également de certains élus.
Le Sénat, protecteur des collectivités locales, se doit aussi de les avertir lorsqu’un risque ou un danger se profile.
Or, je le dis clairement, à la lumière de mon expérience de maire d’une ville de la région parisienne où cohabitent sans difficulté une communauté musulmane et une communauté juive tout aussi importantes et pacifiques l’une que l’autre, notre présence à la tête de ces cortèges risque d’être mal interprétée par des individus ou des groupuscules à l’affût de provocations.
J’invite donc nos collègues élus à éviter de caracoler en tête de ces manifestations, comme nous avons pu le voir, malheureusement, dans la région d’Île-de-France. La récupération du conflit par certains individus ou responsables d’associations risque d’engendrer violence et renforcement des communautarismes, ce dont notre pays n’a pas besoin. La France est une démocratie laïque.
Notre rôle d’élus n’est pas d’attiser des haines qui n’ont nul besoin d’être encouragées. Souvenons-nous-en : l’écharpe tricolore que nous avons l’honneur de porter ne doit être que le symbole d’une France au service de la paix et de la réconciliation.
Monsieur le ministre, en ce moment même, le conflit fait rage et une paix durable peut paraître encore bien lointaine. Pourtant, de toutes nos forces, nous voulons vous dire, ainsi qu’au Président de la République, de continuer et d’intensifier ce travail pour la paix. Vous avez le soutien total et entier des sénateurs du groupe UMP. Un jour, que nous souhaitons très proche, la folie des hommes cessera, et cela vous rendra raison.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
Monsieur le ministre, le caractère d’urgence que vous appliquez à une trêve des combats à Gaza est sans doute bienvenu, mais risque d’occulter les responsabilités de longue durée à l’origine de ce conflit. À cet égard, permettez-moi de considérer que la lucidité dont vous vous prévalez est à courte vue.
Le Hamas, dont les positions sont ce qu’elles sont, mais qu’il n’est pas besoin de partager, a, faut-il le rappeler, gagné les élections de 2006 au Conseil législatif palestinien, élections démocratiques et internationalement contrôlées.
Il n’a pas été tenu compte du verdict des urnes, même pour tenter de responsabiliser le Hamas. Ce dernier a été récusé par Israël et par la communauté internationale, étant considéré comme une organisation terroriste.
Cependant, la connaissance que nous avons du Hamas par le biais de bons experts montre que ses positions peuvent évoluer ; elles ne sont pas toujours celles que la presse présente de manière caricaturale. Mon propos se fonde sur le programme électoral et les déclarations politiques d’Ismaël Haniyeh, qui fut un temps Premier ministre.
Vous-même, monsieur le ministre, ne voulez pas avoir de contact direct avec le Hamas et entendez recourir au canal d’autres États. Ce n’est pas une position courageuse. On ne peut pas attendre d’un adversaire qu’il se conforme à vos vues pour négocier avec lui. En réalité, vous appliquez le boycott décidé par Israël et par les États-Unis.
Cette absence de contact n’est pas seule en cause. La victoire électorale du Hamas n’a pas été un coup de tonnerre dans un ciel bleu ; elle fut elle-même le fruit d’un long pourrissement. Dois-je rappeler que la conférence de Madrid, en 1992, de même que le processus d’Oslo, ont soustrait le problème israélo-palestinien à la compétence du Conseil de sécurité de l’ONU ? Il n’a plus été question, ensuite, d’une conférence internationale organisée sous l’égide de l’ONU.
Le processus d’Oslo s’est étiré sur de longues années, plus encore après l’assassinat d’Itzhak Rabin puis l’élection de M. Netanyahu, en 1996, ainsi que la médiation trop tardive du président Clinton, en fin de mandat, à l’été 2000 et au début de 2001.
Après l’éclatement de la deuxième Intifada, le président de l’Autorité palestinienne, qui était alors Yasser Arafat, a été diabolisé. Son successeur, Mahmoud Abbas, pourtant animé d’intentions pacifiques, a été décrédibilisé par la poursuite de la colonisation israélienne en Cisjordanie, où l’étendue des implantations a été multipliée par trois, sinon par quatre, depuis la signature des accords d’Oslo.
La conférence d’Annapolis a été un échec, la mission du Quartet et de son envoyé spécial, M. Tony Blair, une farce. Tout s’est passé comme si la volonté politique d’appliquer les accords d’Oslo, dans l’esprit des résolutions de l’ONU qui prévoyaient la création d’un État palestinien viable, avait tragiquement fait défaut. Je ne prétends pas que certains n’étaient pas sincères, mais en tout cas tous ne l’étaient pas.
Naturellement, l’envoi de missiles, même rustiques, sur Israël à partir de la bande de Gaza est une agression susceptible de frapper des innocents, une violation du droit international, mais le blocus de Gaza et le refus d’Israël d’appliquer les clauses de l’accord de cessez-le-feu étaient eux-mêmes illégaux et affectaient des populations sans défense.
Les roquettes palestiniennes ne suffisent pas à légitimer l’offensive menée par Israël contre 1, 5 million de réfugiés concentrés dans un espace grand comme la moitié du Territoire de Belfort, soit environ 360 kilomètres carrés, qui a déjà fait plus de 1 000 morts et de 4 000 blessés.
Dans l’immédiat, le Gouvernement français et le Président de la République ont bien fait de chercher à réunir les conditions d’une trêve par le canal de l’Égypte pour sécuriser la frontière entre ce pays et la bande de Gaza. Cependant, monsieur le ministre, la France doit voir plus loin et garder une parole libre, franche et sans faux-fuyants, pour créer les conditions d’une réconciliation entre les Palestiniens eux-mêmes, préalable à une négociation loyale visant à l’instauration d’un État palestinien viable.
Il appartient à la France d’exercer son influence pour amener le président Obama à inverser l’ordre des priorités qu’il a énoncées et à mettre en tête de son ordre du jour l’enclenchement d’une négociation israélo-palestinienne plutôt que le renforcement des troupes de l’OTAN en Afghanistan.
Le problème de Gaza, comme l’a dit le Président de la République, est un problème mondial, une manifestation insupportable de l’existence d’un droit international à deux vitesses. Il faut faire tomber la pression dans l’ensemble du monde arabo-musulman : c’est un préalable indispensable, une question de bon sens ! C’est ainsi que l’on asséchera le terreau du terrorisme et que l’on créera les meilleures conditions d’une normalisation avec l’Iran, d’un retrait pacifique des troupes américaines d’Irak et d’une solution politique du problème afghan.
Comme l’a dit un chercheur que vous connaissez sans doute, M. Dominique Moïsi, le problème israélo-palestinien est devenu la matrice des relations internationales. Comprenons-le avant qu’il ne soit trop tard. La négociation avec l’ensemble des Palestiniens est dans l’intérêt de tous les peuples, y compris celui d’Israël. La sécurité à long terme de ce dernier est commandée par la normalisation de ses relations avec tous ses voisins, et plus généralement par la modernisation du monde arabo-musulman. Cette négociation est également dans l’intérêt de la paix et dans celui de la France, dont le projet d’Union pour la Méditerranée ne peut réussir qu’à cette condition.
Nous attendons, monsieur le ministre, de la part du Gouvernement français, moins de faux-fuyants et moins d’expressions biaisées. Vous semblez surpris par mes paroles, mais vous avez fait la déclaration suivante dans les colonnes du quotidien Le Parisien-Aujourd’hui en France, le 11 janvier : « Le Hamas représente quelque chose dans le peuple palestinien, il est donc indispensable que certains aient des contacts avec eux. » Pourquoi pas nous ?
La liberté de parole et d’action de la France sera également le plus sûr moyen de faire reculer la tentation d’importer sur notre sol le conflit du Proche-Orient et les haines fanatiques qu’il suscite. La République est une exigence dans l’ordre intérieur – M. Cambon a parlé de la laïcité –, mais c’en est aussi une dans l’ordre extérieur ! C’est l’exigence d’une parole juste et libre.
Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Monsieur le ministre, vous avez fait état d’efforts couronnés de premiers succès sur le terrain et au Conseil de sécurité. Nous en prenons acte et nous saluons ces réussites : dans une situation aussi tragique, tout progrès, si faible soit-il, est bon à prendre.
Toutefois, je crains que vous ne vous fassiez des illusions en pensant que la France peut aujourd’hui être un arbitre respecté par les deux parties. Ce n’est pas l’avis de l’opinion publique arabe, qu’il faut d’ailleurs souvent distinguer de celui des gouvernements.
En effet, nous sommes nombreux à craindre que le manque de cohérence de la France à propos de ce conflit, surtout pendant sa présidence de l’Union européenne, ne la prive en réalité d’une part de sa crédibilité.
La présidence française a donné imprudemment une sorte de feu vert à Israël en lui faisant cadeau du rehaussement de son partenariat avec l’Union européenne sans aucune contrepartie. Mme Durrieu en parlera davantage.
De surcroît, monsieur le ministre, je le dis clairement, l’image de l’accueil trop familier, trop amical et même assez déplacé que vous avez réservé à Mme Tzipi Livni sur le perron de l’Élysée, à quelques heures du début des bombardements, risque de constituer pour vous un handicap aux yeux du peuple palestinien et dans le monde arabe. Mais je n’ajouterai pas la polémique à la guerre !
Je fais la même chose avec les Palestiniens !
Depuis soixante ans, crise après crise, de blocus et de bouclages qui tuent à petit feu en tirs de missiles qui tuent au hasard, d’attentats suicides en bombardements massifs, la guerre n’a jamais vraiment cessé sur le sol de la Palestine.
Je me laisserai aller quelques instants à exprimer l’émotion qui nous étreint à la vue de la destruction de toute l’infrastructure civile de Gaza et des habitations, à la vue de ces blessés qui meurent malgré les soins de médecins exténués, à la pensée de ces familles exterminées, écrasées sous les ruines de leurs maisons, à l’idée de ces êtres humains brûlés vifs, coupés en deux ou mutilés par les bombes au phosphore. C’est criminel !
Il y a six mois, j’étais à Gaza. J’ai vu alors une population déjà sous-alimentée, prisonnière, devenue totalement dépendante, ou presque, de l’aide internationale. Je me remémore ces enfants mal nourris, mal vêtus, claquemurés dans la touffeur d’un logement surpeuplé, fait de parpaings et de tôles. Où sont-ils aujourd’hui, ces enfants du camp de Chifa, et dans quel état sont-ils ?
Pourtant, depuis soixante ans, Gaza n’est pas d’abord un problème humanitaire. J’y insiste : c’est un problème politique, posé par l’expulsion de centaines de milliers de Palestiniens en 1947 et en 1948, chassés de leurs villes et de leurs villages, qui ont été rasés depuis lors, et pris dans la nasse de cet oasis et de ce port, autrefois si prospères.
Au-delà de cette émotion, nous devons, pour comprendre, nous replacer dans la perspective historique afin de pouvoir penser à un jour de paix,
« Un jour de palme un jour de feuillages au front
« Un jour d’épaule nue où les gens s’aimeront »,
comme le disait Aragon.
M. Jack Ralite applaudit.
Cette guerre nous concerne au premier chef, nous Français, nous Européens. Sans les pogroms d’Odessa et d’Europe centrale, sans l’affaire Dreyfus, qui, par réaction, inspira Théodore Herzl, justement révolté, sans le génocide des Juifs commis par les nazis et trop de complices de toutes nationalités, cet État refuge qu’est Israël aurait-il été nécessaire ? Aurait-il été établi dans une région considérée à l’époque par les Européens comme une terre colonisable ? Nous avons une responsabilité historique, une dette que les Palestiniens paient aujourd’hui pour nous !
En 1948, l’ONU a créé l’État d’Israël, mais ensuite la communauté internationale n’a jamais fait respecter la contrepartie, pourtant régulièrement proclamée, de la reconnaissance des droits du peuple palestinien, expulsé et nié même dans son existence. Monsieur le ministre, des résolutions contraignantes, ce sont des résolutions assorties de sanctions, et ce pour les deux parties, pas seulement pour le Hamas !
Nous avons encore en tête les espoirs suscités par les accords d’Oslo, le principe de la terre contre la paix, la naissance de l’Autorité palestinienne et la perspective, enfin, d’une normalisation d’Israël dans son espace régional.
Cependant, nous n’avons pas voulu voir à quel point ce processus a tourné à vide après l’assassinat d’Yitzhak Rabin et combien la politique du fait accompli a pris le pas, pour Israël, sur celle de la paix négociée.
La guerre de Gaza marque la fin d’un leurre, d’un simulacre de processus de paix israélo-palestinien. Nous vivons dans l’illusion, entretenue par des rencontres internationales répétitives, que l’on s’achemine vers la solution des deux États vivant côte à côte dans des frontières sûres et reconnues.
La création d’un embryon d’État dans des frontières à négocier a réduit notre sentiment d’urgence tandis que la réanimation, à un rythme régulier, d’un processus moribond nous administrait, selon les termes de Dov Weisglass, directeur de cabinet d’Ariel Sharon, la « dose de formol », ou plutôt d’anesthésique, nécessaire.
Une visite sur place suffit à mesurer le divorce profond entre le processus de paix par lequel on nous endort et la réalité des territoires palestiniens.
En effet, la colonisation a littéralement explosé depuis la conférence d’Annapolis, coupant la Cisjordanie en trois enclaves.
La réalité de ces territoires, ce sont les obstacles à la circulation, les check-points, les bouclages inopinés et répétés, les routes de contournement et le mur de séparation qui prive la Cisjordanie de 40 % de son territoire.
La réalité, c’est une vie confinée, que fuient ceux qui le peuvent, les plus jeunes et les mieux formés, dans une hémorragie lente et volontairement provoquée.
La réalité, ce sont des institutions politiques privées de la possibilité d’offrir à la population un minimum de sécurité, de perspectives et de moyens de subsistance.
La réalité, c’est aussi aujourd’hui, après l’échec du gouvernement d’union nationale, que nous avons eu le tort de ne pas soutenir, une division politique profonde, des affrontements internes, la guerre civile.
Comment en sommes-nous arrivés là alors que les données de la solution sont connues ?
Ce qui a fait défaut, monsieur le ministre, c’est un arbitre impartial, capable de préserver la dynamique de la négociation. Les acteurs de la communauté internationale ont eu le tort de soutenir obstinément la volonté d’Israël de ne mener que des négociations bilatérales. Cette situation dure depuis seize ans, seize ans de trop !
Cela revient à laisser à la puissance occupante le soin de déterminer, et par conséquent d’imposer, les conditions de la fin de l’occupation. Il faut que cela cesse ! Dans une négociation sans terme défini, où la légalité internationale elle-même – ce fut déjà le cas à Oslo, et plus encore à Annapolis – devient objet de négociation, l’enlisement est inéluctable. Il faut sortir de cette logique.
La première urgence est bien sûr d’obtenir un cessez-le-feu. C’est pour nous une pétition de principe, mais il faut le dire.
La seconde urgence est de restaurer l’unité palestinienne, et donc d’avoir le courage de parler directement avec tous ceux qui sont représentatifs du peuple palestinien. Il y va de la survie du projet national palestinien, là est la clé de la stabilité du Proche-Orient.
Il n’y a pas d’alternative. Voulons-nous que les Palestiniens, condamnés à vivre dans des cantons atomisés, deviennent une population exsangue, radicalisée ? Serait-ce juste ? Serait-ce un gage de sécurité pour Israël et la région ? Certainement pas !
Pour que s’instaure une trêve, féconde cette fois-ci – la première a été stérile, monsieur le ministre –, il faut restaurer la crédibilité du processus politique, ouvrir enfin réellement les points de passage, faire cesser l’enfermement des Gazaouis, ainsi que des Cisjordaniens, qui eux ne lancent pourtant pas de roquettes !
Dans cette perspective, il faudra négocier avec les deux camps, qui ont chacun leurs extrémistes, racistes et violents. Il suffit, pour s’en convaincre, d’écouter M. Liberman et quelques autres, que l’on reçoit si aimablement ! Sachons négocier et parler avec tous, sans choisir entre les racistes selon leur religion et leur nationalité.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la situation à Gaza et dans le sud d’Israël dont nous sommes les témoins depuis trois semaines est dramatique.
Nous sommes entrés dans un contexte de guerre. Comme toute guerre, celle-ci ne peut qu’être insupportable et susciter l’émotion, voire l’indignation, de la communauté internationale et de chacun d’entre nous.
Mes collègues m’ont fait l’honneur de me réélire, hier soir, à la présidence du groupe interparlementaire d’amitié France-Israël du Sénat. J’ai pu dire, à cette occasion, combien je suis, comme vous tous, accablé par cette situation et par ses conséquences pour les populations civiles, accablé par ces blessés que l’on compte par milliers, ces morts par centaines, en grande partie des enfants, par les images terribles relayées par les médias ces derniers jours.
Toute guerre est un drame humanitaire. La situation si particulière de Gaza démultiplie l’impact du conflit sur les populations civiles : la population, dont la densité est exceptionnellement élevée – près de 4 000 habitants par kilomètre carré –, vit recluse sur un territoire exsangue, qui subit depuis des années les contraintes de l’isolement, sur les plans économique et politique.
Comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre, lors de la réunion du Conseil de sécurité des Nations unies du 8 janvier dernier, « l’heure est à la gravité ».
L’heure est également à l’urgence absolue, pour que cessent au plus vite ces violences. La réaction de la France, par la voix du Président de la République, et de la communauté internationale est à cet égard à saluer. Elle a été à la hauteur, dès le départ, de la gravité et de l’urgence de la situation.
Cependant, le combat est encore loin d’être achevé, et l’engagement déterminé de la France, de l’Europe, des Nations unies et des pays arabes voisins d’Israël sera décisif dans les jours, les semaines et les mois à venir.
J’ai souhaité intervenir à l’occasion de ce débat, monsieur le ministre, pour que nous n’occultions pas, derrière ce drame humain qui frappe Gaza, la situation elle aussi intolérable que subissent les populations du sud d’Israël.
Depuis 2001, près de 6 000 tirs de roquettes et d’obus – imaginons ce que cela peut représenter ! – ont frappé le sud du Néguev. Ces tirs se sont intensifiés depuis que le Hamas contrôle la bande de Gaza. Les « alertes rouges » font partie du quotidien de 250 000 civils israéliens qui vivent à portée de missiles Qassam, Katiousha et Grad devenus de plus en plus puissants : avec les progrès technologiques, leur portée dépasse désormais quarante kilomètres, si bien qu’ils peuvent désormais toucher près d’un million d’Israéliens, soit un habitant du pays sur sept. Qu’en sera-t-il demain ?
À Sderot, ville de 25 000 habitants, les sirènes retentissent parfois plusieurs dizaines de fois par jour. La peur fait partie du quotidien des familles, ce qui entraîne des traumatismes psychologiques chez les enfants, notamment. Aucun État ne tolérerait qu’une partie de sa population vive ainsi dans l’insécurité permanente et la peur.
Le Gouvernement israélien déploie des moyens considérables pour protéger sa population dans le sud du pays, avec la construction d’abris anti-bombes dans les immeubles ou le blindage des salles d’école. Ces efforts ont permis de limiter les pertes humaines du côté israélien, ce en dépit de la recrudescence des tirs de roquettes depuis la fin de la trêve de six mois, déclarée officiellement par le Hamas le 19 décembre.
Cette réaction sécuritaire d’Israël à l’égard de ses populations civiles ne peut constituer une solution durable et viable. Elle n’a été d’ailleurs que le prélude à une riposte militaire qui engage la région dans un nouveau cycle de violences et compromet les espoirs de parvenir rapidement à une paix durable.
Israël paie un prix fort, subissant ces dernières semaines un assaut de critiques, largement relayées dans les médias et auprès de l’opinion publique. La « martyrisation » de Gaza, où tout laisse à penser que prévaut une logique d’exposition des populations civiles sur une logique de protection, …
… ne sert pas les intérêts présents et futurs d’Israël.
Monsieur le ministre, vous avez insisté à plusieurs reprises sur la nécessité d’une approche équilibrée du conflit et d’un juste partage des responsabilités.
Il s’agit en effet d’un point central.
La France a une position privilégiée pour porter ce message et prôner des voies de règlement du conflit elles aussi équilibrées, en raison, d’une part, des liens d’amitié profonds qui l’unissent à Israël, et, d’autre part, des relations de confiance qu’elle entretient avec les autorités palestiniennes du Fatah et le président Mahmoud Abbas.
Certes, la réponse militaire israélienne peut paraître disproportionnée et n’apportera pas de solution pérenne. Nous en sommes tout à fait conscients. La France l’a condamnée fermement, et il n’aurait pu en être autrement.
Cependant, nous condamnons également – M. le Président de la République l’a affirmé clairement – les tirs de roquettes du Hamas sur Israël, qui ont servi de déclencheur de cette riposte militaire.
Le cessez-le-feu ne peut être que réciproque et simultané. En effet, pour Israël, le retour au statu quo ante, c’est-à-dire à une situation d’insécurité permanente pour une grande partie de sa population sous le feu quotidien des missiles, n’est pas une voie acceptable.
Dans cette perspective, le rôle de la France est important : sa voix compte dans la région. Je fais confiance à la détermination du Président de la République et du Gouvernement pour poursuivre les efforts engagés la semaine dernière en vue d’un arrêt immédiat des violences et relancer ensuite le processus normal des négociations de paix.
Je salue, en outre, le fait que M. le Président de la République fasse de la reconnaissance d’Israël par le Hamas un préalable à toute négociation avec cette organisation.
Les initiatives de paix ont déjà conduit à l’instauration, depuis le 7 janvier, d’un cessez-le-feu quotidien de trois heures permettant la mise en place, par l’armée israélienne, d’un corridor humanitaire vers Gaza. Ces avancées sont importantes, mais encore largement insuffisantes.
Pour aller plus loin, la mobilisation de l’Europe, de la communauté internationale, mais également des pays arabes voisins d’Israël est elle aussi primordiale.
Je salue à cet égard le rôle qu’a assumé l’Égypte, par l’engagement du président Moubarak dans la résolution du conflit. Son intermédiation est essentielle pour rétablir le dialogue entre les Palestiniens du Fatah et ceux du Hamas. Elle l’est également pour renforcer le contrôle de la frontière avec Gaza, afin de lutter contre la contrebande d’armes qui « alimente » le Hamas.
Cependant, les autres pays arabes ont également un rôle clé dans la résolution d’un conflit vieux de soixante ans.
Nous en sommes tous convaincus : la seule issue est la création d’un État palestinien viable aux côtés d’Israël, qui, pour sa part, a droit à la sécurité, d’un État palestinien doté d’institutions stables, qui puisse être un interlocuteur solide et véritable, d’une économie source de croissance et de progrès pour la population.
Dans cette optique, l’aide de l’Europe, de la France, d’Israël et de la communauté internationale devra être renforcée. Je forme le vœu que l’Union pour la Méditerranée puisse également accompagner le développement économique de Gaza, mais aussi favoriser, autour de projets concrets, la coopération et les échanges entre Israéliens et Palestiniens. La question de la gestion de l’eau, cruciale dans la région, est un point d’intérêt commun qui peut contribuer à consolider ce dialogue dans un esprit constructif.
La création de cet État palestinien viable est la seule réponse juste et durable aux aspirations légitimes d’Israël à la sécurité.
En parallèle, Israël devra faire des efforts et lutter aussi, de son côté, contre ses tentations les plus extrémistes. Je l’ai entendu souligner à plusieurs reprises à cette tribune : les Israéliens ont pris largement conscience que des compromis douloureux seront indispensables pour faire avancer le processus de paix. J’ai pu mesurer cette évolution des mentalités à travers mes fréquents échanges avec nos partenaires israéliens. Selon moi, il n’y aura pas d’État palestinien viable, et donc pas de paix durable, sans un arrêt définitif de la politique de colonisation israélienne. Cela ne se fera pas sans douleur du côté israélien, mais c’est indispensable.
Je souhaite également rappeler, à l’occasion de ce débat, le sort du jeune Guilad Shalit, otage du Hamas depuis l’été 2006. J’ai pu rencontrer le père de ce jeune garçon franco-israélien avec un certain nombre de nos collègues sénateurs, à l’automne dernier. La détresse de cette famille, laissée sans véritable preuve de vie de son fils, trouve un large écho en Israël. Cela ne contribue pas à un apaisement des esprits et ne sert pas la paix.
Je forme le vœu que les démarches engagées par le Président de la République auprès de la Syrie ou de l’Égypte puissent faire avancer les choses. Pouvez-vous nous apporter des informations sur ce point, monsieur le ministre ?
Enfin, je déplore, comme vous tous, mes chers collègues, que le conflit à Gaza puisse avoir des répercussions dramatiques dans notre pays. S’il est normal qu’il suscite un débat, même passionné, il n’est pas tolérable qu’il serve de prétexte à des actes racistes ou antisémites, qui sont indignes et intolérables, telles les attaques au cocktail Molotov contre la synagogue de Saint-Denis ou à Schiltigheim, dans le Bas-Rhin.
Je salue, à cet égard, l’attitude responsable des autorités représentatives des différentes religions, qui ont noué un dialogue constructif, dans un esprit de compréhension mutuelle et d’apaisement.
Les populations juives et arabes coexistent en paix dans notre pays, comme elles le feront aussi un jour au Proche-Orient, j’en suis convaincu. Les populations civiles expriment depuis déjà plusieurs années, tant du côté israélien que du côté palestinien, une lassitude devant la répétition des conflits et l’engrenage de la violence et du terrorisme. Il est de la responsabilité de l’ensemble de la communauté internationale de répondre à ces aspirations fortes à la paix et à la sécurité qui se font jour des deux côtés de la frontière.
L’instabilité au Proche-Orient a en effet des répercussions bien au-delà de la région. Une détermination unanime à poursuivre et à relancer le dialogue est la seule voie possible pour qu’un tel drame ne se répète pas.
Je tiens ici, monsieur le ministre, à vous remercier, ainsi que, à travers vous, le Gouvernement et le Président de la République, de l’action menée de façon déterminée et équilibrée, avec une lucidité qui ne permet pas l’enthousiasme dans la situation dramatique que nous connaissons. Je puis vous assurer que nous soutenons sans réserve vos efforts en faveur de la paix, dans cette région et dans le monde.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP, ainsi que sur certaines travées de l ’ Union centriste.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’initiative de M. le Président de la République de se rendre dans les pays du Proche-Orient les plus concernés par le conflit de Gaza doit être saluée. Il était peu probable que la paix résulte de ce voyage, mais il était indispensable que la France montre avec pugnacité la voie pour sortir de la résignation générale devant un conflit faire-valoir du terrorisme international.
La réactivité du Président de la République était essentielle, car la France est sans doute l’un des rares pays, sinon le seul, à pouvoir parler aux belligérants et à être entendu d’eux.
Ami d’Israël, le Président de la République peut se permettre de lui dire des choses difficiles à entendre ; il a affirmé que « le seul langage qui vaille, y compris en matière de diplomatie, c’est le langage de la vérité ».
La France, amie du monde arabe et musulman, bénéficie aussi de sa confiance.
Cette initiative était indispensable pour mettre en place un mécanisme contraignant les deux camps à un cessez-le-feu.
Lorsque Mme Tzipi Livni dit « trop, c’est trop », elle a raison : que la population civile soit sous la menace de roquettes Qassam, de bombes humaines, que le Hamas prévoie la destruction d’Israël est insupportable pour les Israéliens.
Qu’aucune résolution des Nations unies ne soit respectée par Israël, que 400 000 nouveaux colons se soient implantés, que Gaza soit totalement verrouillée depuis dix-huit mois, qu’un mur inacceptable soit érigé, que des dirigeants du Hamas aient été assassinés pendant la trêve est révoltant pour les Palestiniens.
Le Hamas savait qu’en lançant des roquettes sur le sud d’Israël, il ne pouvait qu’amener ce pays à réagir ; Israël savait qu’en désespérant tous les Palestiniens, il provoquerait cette révolte.
Israël savait qu’en bombardant, malgré les protestations de la Croix-Rouge internationale, de Médecins Sans Frontières et des ONG, ce tout petit territoire où sont emprisonnés un million et demi de Palestiniens, il y aurait des centaines de morts – plus d’un millier à l’heure actuelle.
Le Hamas sait que projeter la destruction d’Israël n’est admissible pour aucun pays.
Israël sait qu’en massacrant les Palestiniens de Gaza, il affaiblit considérablement le président Mahmoud Abbas, son seul interlocuteur, et qu’il va provoquer une vague de haine dans tous les pays musulmans.
Comment la communauté internationale a-t-elle pu tolérer cet engrenage ? Elle n’est pas là pour comptabiliser les exactions de chaque camp. Elle doit mettre fin à une épouvantable tuerie et garantir la sécurité d’Israël. Elle doit faire preuve de plus de courage en faisant respecter ses décisions et passer du rôle de spectateur à celui d’acteur.
Jamais le Hamas et Israël ne parviendront à la paix s’ils n’y sont pas contraints, car, par leurs actions délibérées, tous deux ont choisi la guerre.
L’État d’Israël fut créé par une décision internationale dans des conditions terribles, les Palestiniens ont eu leur Oradour-sur-Glane. Cependant, la décision des Nations unies est opposable à tous et une garantie internationale doit être donnée à Israël.
Il faut absolument que la réciproque soit vraie et que soient appliquées toutes les résolutions des Nations unies, même celles qui ne sont pas favorables à Israël, y compris celles qui prévoient le retour aux frontières de 1967. Aujourd’hui, aucune ne l’est.
La communauté internationale ne peut accepter les massacres de Gaza et le risque d’une déstabilisation, qui pourrait entraîner des conséquences géopolitiques importantes, des pays arabes et musulmans, dont les peuples dénoncent l’apathie de leurs gouvernants. Elle ne peut tolérer non plus qu’Israël soit menacé en permanence.
Elle a commis une grande faute en ne reconnaissant pas le résultat des élections de 2006, pourtant organisées sous son contrôle, qui ont donné au Hamas 42 % des sièges au Conseil législatif palestinien.
Elle a commis une grande faute en refusant un gouvernement de coalition où figurait le Hamas, tout en sachant qu’elle allait de ce fait même engendrer un sentiment d’injustice plus fort que toute réflexion rationnelle.
La communauté internationale a les moyens financiers et commerciaux de faire pression sur Israël. Elle a aussi les moyens politiques de faire pression sur les pays qui aideraient le Hamas. Elle a d’ailleurs commencé à s’engager dans cette voie lorsqu’elle a voulu mettre en place à la frontière entre Gaza et l’Égypte, pour empêcher l’entrée des armes destinées au Hamas, une force militaire turque, venant donc d’un pays musulman aux liens étroits avec Israël.
Pour avoir une chance de trouver une issue à ce conflit, nous ne devons pas nous cacher la réalité : il est évident que la religion joue un rôle. La lutte pour Jérusalem, ville non stratégique mais ville symbole, en est la preuve. L’internationalisation des lieux saints est certainement une solution susceptible de contribuer à la paix.
L’expérience a montré que seules les concessions des négociateurs au passé le plus violent pouvaient être acceptées par leur peuple. Menahem Begin et Yasser Arafat furent, à l’origine, des terroristes. Il faudra donc négocier avec le Hamas, qui, tout en refusant de reconnaître l’existence d’Israël, accepte l’existence de deux États.
Un objectif doit être d’obtenir un cessez-le-feu reconductible de six mois pour mettre en application la feuille de route du roi Abdallah d’Arabie Saoudite, soutenue par la communauté internationale.
M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.
Le Président Sarkozy a mobilisé toute l’Union européenne, mais, je le répète, la France elle-même a un rôle majeur à jouer, et c’est sans doute le seul pays qui le peut. Elle n’a jamais choisi un camp au détriment de l’autre. Elle a toujours choisi celui de la justice et du respect des règles internationales.
Pour appeler à la paix, je me référerai à Winston Churchill : « À la guerre, la maxime “sécurité d’abord” mène tout droit à la ruine. »
Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste. – M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous le soulignons les uns après les autres : la situation est tragique et l’effroi règne à Gaza, où l’on compte plus d’un millier de morts et de très nombreux blessés, des horreurs étant commises de part et d’autre.
On a parlé de Sderot. Je m’y suis moi-même rendue, j’ai vu et entendu les roquettes Qassam s’abattre sur la ville, terrorisant les habitants. La population d’Israël souffre.
Il n’en demeure pas moins que l’utilisation d’armes nouvelles est indigne. Je pense aux obus à phosphore blanc et aux bombes DIME, ces boules de carbone qui se consument et qui brûlent tout. On en voit des images terribles. Cela est insupportable !
Incontestablement, l’émotion nous gagne. Pour autant, elle ne doit pas altérer l’objectivité de notre analyse politique et des opinions ou des avis que nous sommes susceptibles d’exprimer.
Je voudrais, en ce qui me concerne, m’interroger, d’une part, sur le rôle et la responsabilité de la communauté internationale, et, d’autre part, sur l’issue du conflit : la paix est-elle envisageable ? Qui, réellement, la veut ?
Monsieur le ministre, vous avez souligné tout à l’heure les efforts de la communauté internationale, ceux de la France. Cependant, la communauté internationale est diverse, et sa responsabilité me semble lourde et grave.
Trois États ont une grande influence dans la région : les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Allemagne.
Les États-Unis et M. Bush ont considéré que ce conflit n’était pas central et ont apporté un soutien permanent et total à Israël et à sa politique.
Les Britanniques ont joué et jouent encore un rôle historique dans cette partie du Moyen-Orient. M. Blair a inscrit son action dans cette continuité mais brille aujourd’hui par son absence…
L’Allemagne, enfin, écrasée par le poids de l’Holocauste, affiche un soutien permanent, sans doute compréhensible, à Israël.
De son côté, notre pays a joué un rôle et a fait entendre sa voix.
La France de Chirac avait pris une position forte. J’étais à Ramallah en 2005, au moment de l’élection d’Abou Mazen, et j’ai gardé le souvenir des murs de la ville tapissés d’affiches représentant Yasser Arafat et Jacques Chirac.
Aujourd’hui, monsieur le ministre, la France de Sarkozy mène une politique différente. Vous avez pris, cela est vrai, un certain nombre d’initiatives, s’agissant notamment du plan de paix franco-égyptien. La France a affirmé sa présence, dans le cadre de la présidence de l’Union européenne et de celle du Conseil de sécurité des Nations unies. Les actions auxquelles il a été déjà fait référence ce soir me semblent tout à fait opportunes et se révéleront, je l’espère, efficaces.
Toutefois, nous n’avons pas compris cette politique du rehaussement sans conditions des relations entre l’Union européenne et Israël. Était-ce vraiment là le meilleur signal à envoyer ? Monsieur le ministre, permettez-nous d’en douter. D’ailleurs, nombre de membres du Parlement européen ont émis des réserves à ce sujet.
Il convient également de citer l’action du Quartet pour le Proche-Orient, qui regroupe les États-Unis, l’Union européenne, la Russie et l’ONU.
Monsieur le ministre, dans ce débat, il a beaucoup été question des résolutions de l’ONU. Cependant, même si on parvient à obtenir que les États-Unis s’abstiennent, elles ne sont pas forcément appliquées, à l’instar de la dernière d’entre elles, la résolution 1860, et le droit international est bafoué.
Je voudrais maintenant insister avec force sur ce que je considère comme une erreur majeure commise par la communauté internationale en 2006.
L’année précédente, Mahmoud Abbas, président du comité exécutif de l’OLP et porteur d’un certain espoir, avait été élu président de l’Autorité palestinienne dans des conditions tout à fait normales, tandis que le Hamas gagnait les élections municipales.
En 2006 se tinrent les élections législatives, marquées par un face-à-face entre le Fatah et le Hamas. Ces élections voulues, observées – j’ai fait partie des observateurs – et validées par la communauté internationale furent remportées par le Hamas, ce qui a été vécu comme un événement dramatique, terrible ! Qu’a fait alors la communauté internationale ? Elle a refusé le verdict des urnes…
Était-ce vraiment la chose à faire ? Quel tort fait à la démocratie et à la crédibilité de la communauté internationale ! Nous en payons encore maintenant les conséquences.
J’ajoute que quarante-huit membres du Conseil législatif palestinien sont aujourd’hui en prison. Qui en parle ? Personne !
Marques d’approbation sur les travées du groupe CRC-SPG.
Dans ces conditions, je veux bien saluer le soldat Shalit et rencontrer sa famille, mais je tiens aussi à saluer les 12 000 prisonniers palestiniens et les quarante-huit parlementaires qui croupissent dans une prison du Néguev.
Monsieur le ministre, refuser le résultat des élections, était-ce vraiment la bonne stratégie ? Je me souviens d’une audition par la commission des affaires étrangères du Sénat du ministre de l’époque, M. Douste-Blazy, au cours de laquelle nous nous étions déjà posé la question.
Aujourd’hui, avec le recul, je le dis clairement : nous avions l’obligation de respecter le résultat de ces élections, puisque nous n’avions pas refusé au Hamas le droit de présenter des candidats. Le même raisonnement vaut d’ailleurs pour le Hezbollah, qui compte non seulement des élus au Parlement libanais, mais aussi des ministres au gouvernement. Du reste, il faudra bien décider un jour si, oui ou non, un groupe armé de résistance peut participer au jeu démocratique.
Monsieur le ministre, aujourd’hui, si nous faisons un bilan, nous sommes donc en droit de nous interroger : fallait-il accepter comme interlocuteur le Hamas, ce mouvement inconnu et redouté ? Jean-Pierre Chevènement l’a souligné, le Hamas avait adressé un certain nombre de signaux pendant la campagne électorale, même si beaucoup de choses restaient dans le non-dit.
Ainsi, il ne reconnaît pas Israël, c’est vrai, mais vous connaissez la formule qu’il utilise : « Israël est là ». Il n’en dira pas davantage. Cela nous suffit-il ? Non, bien qu’il demande à intégrer l’OLP, laquelle, vous le savez très bien, a reconnu l’existence d’Israël. Le Hamas a probablement envie d’avancer masqué sur ce sujet, voilà tout.
Il y avait donc une occasion à saisir, cela était à mon avis indispensable. La communauté internationale ne l’a pas fait : c’est une erreur, même une faute, c’est une défaillance politique incontestable, dont nous payons maintenant le prix. Jean-Pierre Chevènement a posé la question tout à l’heure : étions-nous en mesure de faire évoluer le Hamas ? Aujourd’hui, nous assistons à une guerre annoncée entre le Hamas et Israël, doublée d’une guerre civile qui n’était pas non plus improbable. Le Hamas ne sera pas renversé : présent à Gaza, en progression en Cisjordanie, il restera un interlocuteur incontournable. La boucle est bouclée, nous voilà revenus à la case départ !
Monsieur le ministre, la solution du conflit ne peut être que politique, bien sûr, mais elle ne sera durable que si elle est juste. Croyez-vous qu’Israël veut la paix, monsieur le ministre ? Je me pose très souvent cette question ; vous aussi, j’en suis sûre. Quelle issue au conflit envisage-t-il ? Kissinger le disait volontiers : « Israël n’a pas de politique étrangère, il n’a qu’une politique intérieure. » Nous en avons la preuve tous les jours ! Dans l’immédiat, Israël souhaite certainement une trêve, mais s’agit-il d’une trêve à court terme, à moyen terme ou à long terme, comme le demande le Hamas ? Dans cette dernière hypothèse, le statu quo serait maintenu, pour combien de temps ?
En tout état de cause, le Hamas est un interlocuteur incontournable, y compris pour la France. Notre pays se déshonore en refusant d’engager le dialogue.
Monsieur le ministre, j’ai envie de vous poser une question à laquelle, peut-être, vous ne pourrez pas répondre : que veut M. Obama s’agissant de ce conflit ? Pour l’heure, son silence est éloquent : il se donne du temps, mais quand il voudra trouver une issue à la crise il devra nouer le dialogue. Ce n’est pas là le premier défi majeur qui s’impose à lui – un autre occupe ce rang –, mais l’enjeu est important.
Par ailleurs, puisque vous avez évoqué un « équilibre nouveau », j’aimerais connaître votre vision du Moyen-Orient. Ce conflit occupe-t-il une place centrale, est-il la « matrice des relations internationales », pour reprendre une expression utilisée tout à l’heure ? Quel sera l’ordre régional ? Quelle sera la place des pays arabes, quels rôles seront assignés à la Syrie et à la Turquie ?
Enfin, ma dernière question, peut-être la plus importante, portera sur le nucléaire. Deux États de la région disposent de la bombe. Le traité de non-prolifération de l’arme nucléaire a été signé par l’Iran, qui ne le respecte peut-être guère, mais qui est tout de même soumis au contrôle de l’Agence internationale de l’énergie atomique. En revanche, Israël, comme le Pakistan ou l’Inde, ne l’a pas signé. La politique du « deux poids, deux mesures » nous coûte cher. Faut-il laisser deux pays posséder la bombe ou promouvoir la dénucléarisation de la région ?
Sans doute obtiendrons-nous quelques réponses à partir du 20 janvier prochain, jour qui verra l’investiture de M. Obama. Il ne peut y avoir qu’un seul président des États-Unis à la fois, nous a-t-on répété ces derniers jours. Ce ne sera plus George Bush, et c’est tant mieux ! J’espère comme vous, monsieur le ministre, que les efforts consentis pour résoudre la crise pourront enfin aboutir.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le conflit israélo-palestinien, malgré toutes les initiatives, que je salue et que je soutiens, l’escalade semble inexorable, force est de le constater.
J’en veux pour preuve les propos quelque peu décousus tenus dans les deux camps, où l’on promet, d’un côté, la poursuite de l’incursion terrestre, de l’autre, la victoire prochaine des brigades Ezzedine al-Qassam.
On nous a même rapporté qu’Oussama ben Laden – il n’a, pour autant, pas été formellement identifié – était sorti de son silence pour appeler à la guerre sainte à Gaza.
Le Conseil des droits de l’homme et le Conseil de sécurité de l’ONU, l’Union européenne, le Quartet pour le Proche-Orient, pour ne citer qu’eux, appellent au cessez-le-feu, mais les signes d’ouverture des deux belligérants restent assujettis à tant de conditions qu’il est difficile de croire sans réserve à la bonne volonté des uns et des autres.
Même si de telles initiatives permettent aux protagonistes de se retrouver autour de la table, elles ne sont malheureusement pas relayées sur le terrain, où l’extrémisme prime sur la raison.
Tous les jours, la presse se fait l’écho de drames et de souffrances des deux côtés de la frontière.
À qui faut-il jeter la pierre ? Au Hamas, assurément, qui profite de la misère et du désarroi des populations pour verser de l’huile sur le feu ; au gouvernement palestinien, sans doute, qui, malgré ses bonnes intentions, manque dramatiquement de crédibilité ; mais également au gouvernement israélien, qui ne sait aujourd’hui malheureusement répondre à la violence que par la violence !
Les réalités politiques, les tentatives de médiation, les bonnes paroles et les « accords de paix », les gestes du gouvernement israélien, les conférences d’Annapolis, de Paris ou de tant d’autres lieux n’ont que peu d’effet sur le terrain. Nous faisons tous, hélas ! le même constat.
Il nous reste à travailler, et à travailler encore, pour prouver que « la paix est possible », comme l’a si souvent souligné le Président de la République, Nicolas Sarkozy.
Je le crois fermement, nous avons tous cet objectif au cœur, tant ce que nous voyons et ce qui nous est rapporté nous révolte.
Dans cette perspective, il nous revient de relayer les craintes de nos ressortissants vivant dans cette zone de conflits. C’est là tout l’objet de mon intervention de ce soir, en ma qualité de sénateur représentant les Français de l’étranger.
Déjà prise en étau lors du conflit israélo-libanais de 2006 et de ceux qui l’ont malheureusement précédé, la communauté française se retrouve une nouvelle fois prisonnière de douloureux événements. Je suis en relation constante avec ses représentants, c'est-à-dire les conseillers à l’Assemblée des Français de l’étranger et les présidents d’associations. Comme vous le savez très bien, monsieur le ministre, les informations qui nous parviennent sont préoccupantes.
Du côté israélien, nous avons évalué, en collaboration avec le consulat de France à Tel-Aviv, à environ 9 400 le nombre des Français immatriculés qui se trouvent dans les zones de tir du Hamas, sans compter quelque 3 000 à 3 500 Français non enregistrés au consulat.
Du côté des territoires palestiniens, trois Français immatriculés résident à Gaza, ainsi que vint-huit non-immatriculés, huit de nos compatriotes travaillant par ailleurs dans des associations humanitaires.
Je rappelle également que, depuis ce matin même, la situation à la frontière nord d’Israël s’aggrave, puisque trois roquettes s’y sont écrasées. Or plus de 13 000 Français vivent dans cette zone. Nous devons en être bien conscients.
À titre d’exemple concret, avec trop peu de moyens à leur disposition, si ce n’est le « système D », leur dévouement et leur formidable détermination, certains de nos élus de l’Assemblée des Français de l’étranger essayent, aux côtés des associations, d’éloigner, ne serait-ce que pour une nuit, les cent cinquante Français de Sderot directement menacés par les tirs de roquettes.
« Le silence éternel de ces espaces infinis m’effraie », écrivait Blaise Pascal. C’est un peu l’impression que j’éprouve –j’exagère à dessein, monsieur le ministre – en considérant les moyens que la France met à la disposition de nos représentations diplomatiques et consulaires pour venir, concrètement et matériellement, en aide à nos compatriotes dans la douleur et la détresse, placés au cœur d’une situation exceptionnelle qui les dépasse et qu’ils subissent.
À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Monsieur le ministre, à l’instar de ce que la France avait décidé pour la communauté française du Liban en 2006, quel dispositif envisagez-vous de mettre en place ? Quels moyens comptez-vous dégager pour aider nos compatriotes au plus près des besoins ponctuels et individuels ? Je vous remercie des précisions que vous pourrez nous apporter sur ce point.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur les propos de Mmes Monique Cerisier-ben Guiga et Josette Durrieu, dont je partage les analyses et les préoccupations. Chacune d’entre elles a traité un aspect de cet horrible conflit, qui touche de manière massive les populations civiles. Pour ma part, je m’attacherai à en décrire les conséquences sur le plan intérieur, en m’intéressant à la manière dont il affecte notre nation.
Notre pays connaît une période de tensions fortes, marquée d’actes condamnables et odieux : tombes et synagogues profanées, personnes des deux communautés prises à partie. Ainsi, dans ma circonscription, deux lycéens d’origine maghrébine du lycée Janson-de-Sailly – c’est le lycée où sont scolarisés mes enfants – ont été agressés parce qu’ils ont refusé des tracts distribués par une organisation de soutien à Israël.
J’ai parfois le sentiment qu’émergent désormais des musulmans et des juifs plus que des citoyens. Cette situation donne l’occasion à certains d’utiliser des référentiels identitaires comme mots d’ordre politiques, en expliquant que l’universalisme républicain ne serait plus un modèle. Cela représente aujourd’hui un réel danger.
Mais cette importation présumée du conflit sur notre territoire ne doit pas nous leurrer. La République est mise à mal non pas par un éventuel réveil du religieux et de l’ethnique, mais par la désagrégation du lien social. Certaines personnes se sentent exclues, et la frustration qu’elles ressentent trouve un écho dans celle des populations palestiniennes. À l’occasion de ces malheureux événements, une telle identification par la relégation et l’injustice offre un exutoire dans un combat de substitution, à travers une explosion de colère.
Nous l’avons vu lors des manifestions qui se sont déroulées dans toute la France, d’autres jeunes se mobilisent désormais dans le cadre d’une citoyenneté active. C’est nouveau. Il ne faut sous-estimer ni leur indignation ni leur frustration.
Aussi est-ce une réponse politique au Proche-Orient et une réponse sociale en France qu’il faudra apporter.
Au sujet de sa judéité, Raymond Aron déclarait ceci : « Je suis Français, citoyen français, et je reste en fidélité avec la tradition qui m’a porté. » Je fais mienne cette citation. Les identités multiples nous concernent tous. Nombre de Français de confession juive se sentent préoccupés par la sécurité d’Israël. Issue moi-même de la culture arabo-musulmane, je vis, comme d’autres, avec le problème palestinien inscrit dans ma conscience politique. Ce conflit se transmet maintenant de génération en génération et contribue à forger une « identité tragique » des deux côtés. Il existe un terreau commun en dépit des différences, ne laissons pas nos enfants grandir dans la haine de l’autre.
Pourquoi évoquer nos enfants ? Parce que nous avons les plus importantes communautés musulmane et juive d’Europe. Aussi nous devons-nous d’être attentifs à ne pas faire de différences entre les communautés et, surtout, à ne pas confessionnaliser ce conflit.
Dans ce contexte, que penser de la convocation des seuls Conseil représentatif des institutions juives de France et Conseil français du culte musulman au ministère de l'intérieur ? Une telle question est politique, et non religieuse. C’est un conflit géopolitique avec lequel interfère le phénomène religieux, et non l’inverse. Le prisme religieux donne une coloration spécifique, ne la rendons pas exclusive. En d’autres termes, ne passons pas une fois encore à côté du conflit en posant la mauvaise question.
Dès lors, la situation appelle une réaction forte et immédiate de condamnation des actes, puis une réflexion et une action des pouvoirs publics sur le long terme, dans quatre domaines principalement : la lutte contre l’exclusion sociale et les discriminations, qui – on ne le dira jamais assez – sont des morts sociales ; la nécessaire promotion, sur le plan républicain, de l’égalité et de l’équité ; une pro-activité gouvernementale sur la question du Proche-Orient ; une évolution du traitement de l’islam et du monde musulman par les médias.
Sur le terrain social, dans le contexte actuel de crise, il faut porter une attention particulière aux populations issues de l’immigration, montrer que l’État est attentif à faire en sorte que leur souffrance soit semblable à celle des autres, c'est-à-dire ni plus ni moins grande, et ne pas relâcher la lutte contre les discriminations.
Sur le terrain de la République, islamophobie et antisémitisme sont les deux faces d’une même médaille. Frantz Fanon disait : « Quand vous entendez dire du mal des juifs, dressez l’oreille : on parle de vous. »
Dans notre République, toute insulte communautaire est une insulte à l’ensemble de la communauté nationale. Toute profanation de mosquée, de synagogue, d’église ou de tombe est une atteinte à la République, à notre lien social, à notre nation. Doit-on instaurer une hiérarchie dans l’indignation en mobilisant plus de moyens dans un cas que dans un autre ? Non ! Il est important de faire preuve d’équité dans la compassion, sous peine d’aider au développement d’un sentiment d’injustice. Il y va de la cohésion nationale.
La République que je soutiens, c’est celle qui traite ses enfants de manière égale. Dans ce domaine, ce n’est pas toujours le cas. Nous l’avons vu lors de la profanation des tombes musulmanes du cimetière militaire de Notre-Dame-de-Lorette, perpétrée à l’occasion de la plus importante fête canonique musulmane : la République a été absente.
En tant que républicains, nous avons plus que jamais l’obligation de promouvoir la laïcité, cet espace de concorde qui nous permet de vivre ensemble au-delà de nos différences.
Sur le terrain de l’action des pouvoirs publics, pour éviter d’importer le conflit, il faut d’abord le déconfessionnaliser et, surtout, le politiser. Cela a été souligné par plusieurs intervenants.
Une telle démarche exige par exemple de juger les actes, et non les acteurs, et de mettre à bas la « bien-pensance » qui immobilise nos élites de tous bords.
Juger l’armée israélienne ou le Hamas, ce n’est pas être antisémite ou islamophobe, c’est s’appuyer sur des faits et des données pour établir des responsabilités. Je réclame le droit à l’objectivité et à l’analyse sans être taxée d’antisémitisme. Le terrorisme intellectuel a vécu !
À ce titre, monsieur le ministre, la France, patrie des droits de l’homme, doit être au premier rang pour condamner l’impossibilité d’entrer dans la bande de Gaza pour les convois humanitaires et pour la presse, laquelle ne peut rendre compte de la situation, ce qui alimente toutes les rumeurs, ni établir la vérité, gage de la paix sociale. Comment peut-on laisser aussi silencieusement le gouvernement israélien bafouer le droit ?
Cela veut-il dire que la France ne commencera à s’inquiéter que lorsque l’armée israélienne emploiera des moyens encore plus terribles ? La diplomatie n’empêche pas la fermeté. On est davantage pris au sérieux quand on est ferme. De surcroît, au moment où les populations civiles de Gaza sont sous les bombes, la Cisjordanie est témoin d’une colonisation massive. Doit-on l’oublier et jouer ainsi le jeu du gouvernement israélien actuel, en obérant les possibilités de paix futures ?
Comme cela a été souligné dans le débat, les armes se tairont peut-être après l’investiture du président Obama. En attendant, combien de morts civils, de femmes ou d’enfants tués dans cette prison à ciel ouvert qu’est Gaza ?
Les poètes Mahmoud Darwich et Edward Saïd me manquent. « Même le soleil ne se lève plus à Gaza sous les bombes. » En guise de lumière, ses habitants ont celle des bombes au phosphore blanc…
Monsieur le ministre, vous qui êtes le promoteur, le chantre du droit d’ingérence quand des atrocités sont commises, permettez-moi de vous interpeller : ce droit serait-il valable partout dans le monde, sauf pour le conflit israélo-palestinien ?
Nous avons le devoir de réagir avec intelligence, parce que des populations qui sont marquées par ce conflit vivent sur notre territoire. À ce titre, le rôle des médias dans la représentation tant des différentes communautés que du conflit est essentiel.
Rappelons une évidence : le processus de mondialisation concerne également l’information, ce qui fait que nos concitoyens ont accès aussi bien à internet qu’à des journaux étrangers. Ils déconstruisent l’information et portent de plus en plus un regard critique sur la manière dont les médias en France rendent compte du conflit. Le souci d’un traitement sobre, sans parti pris, doit animer les rédactions de l’ensemble de nos médias.
De manière plus générale, comme je l’ai déjà dit lors du débat sur l’audiovisuel public, je m’insurge contre le traitement de l’islam par les médias. Il est tout simplement révoltant que l’on invite à discourir sur l’islam à une heure de grande écoute des personnes ne parlant ni l’arabe ni le français – je les qualifierai d’ « analphabètes bilingues » – ou des wahhabites intransigeants, alors que nombre d’intellectuels, musulmans ou non, sont tout aussi capables d’évoquer cette question.
Quand on parle de l’islam dans ces termes, c’est de moi que l’on parle ! On méprise le téléspectateur, on renforce une vision stéréotypée sans montrer la diversité de la pratique et la réalité de cette religion, qui relève du socle abrahamique, comme le christianisme et le judaïsme. Pire, on conforte aussi bien l’islamophobie que l’islamisme radical dans leurs certitudes, ce qui peut jouer un rôle dans une éventuelle importation du conflit.
Je veux saluer ici toutes les organisations qui œuvrent pour la paix, notamment les organisations féminines composées de femmes palestiniennes et israéliennes, en particulier la Coalition des femmes pour une paix juste, la Coalition des pacifistes israéliens pour Gaza et le Collectif des femmes en noir, que nous avons rencontré au Sénat grâce au groupe CRC-SPG. Il faut du courage, dans cette région du monde, pour faire la paix, et ces femmes en ont.
Je conclurai, monsieur le ministre, en disant que la violence conduit à l’impasse.
Si les causes à l’origine de la violence dans cette région du monde ne sont pas traitées dans un processus raisonné, nous finirons inévitablement par être atteints. C’est pourquoi il nous faut continuer inlassablement, d’abord pour ceux qui subissent cette violence, ensuite pour nous-mêmes, à faire preuve d’exigence avec nos amis des deux bords, en tenant un discours de vérité et de courage.
Pour que le courage fasse école, monsieur le ministre, il faut que, sur cette question, la peur nous quitte. De part et d’autre, nous devons dépasser les réactions émotionnelles que nos origines nous imposent, pour ne voir que la justice et le droit.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l’Union centriste.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite tout d’abord exprimer, de manière solennelle, mon empathie pour les populations d’Israël et de Palestine qui souffrent, depuis plusieurs années, et particulièrement ces derniers mois, d’une escalade de la violence.
Comme le dit le journaliste israélien Uri Avnery, « au début, tous les médias occidentaux ont répété la ligne de propagande officielle israélienne et n’ont fait aucune mention des manifestations quotidiennes du camp de la paix israélien, comme ils ignorent les faits historiques ». Nous le regrettons.
Depuis soixante ans, nous le savons, le peuple palestinien se voit spolié de ses terres et vit réfugié dans son propre pays.
Depuis quarante-deux ans, les colonies se multiplient et l’occupation militaire se développe, au mépris des frontières tracées par l’ONU. La construction d’un mur illégal transforme la Palestine occupée en prison à ciel ouvert et prive les Palestiniens de leurs droits les plus élémentaires.
Depuis dix-neuf mois, Gaza suffoque en raison d’un blocus qui affame un million et demi d’habitants, dont des milliers de femmes et d’enfants, privés de vivres, d’eau potable, d’électricité, de médicaments. Sont ainsi recréés les ghettos que l’on croyait disparus à jamais !
L’agression armée de Gaza par Israël, le 27 décembre dernier, est venue ajouter à cette triste situation une tonalité macabre, nous en avons tous conscience.
Personne ne peut rester insensible à cette tragédie : mille morts, des milliers de blessés privés de soins… Il y a urgence ! Ne nous laissons pas enfermer dans un débat stérile visant à déterminer qui a rompu la trêve, refusons tous les amalgames qui tendraient à nous faire croire que nous sommes dans une guerre de religion. Nous l’affirmons avec force et vigueur : il s’agit d’une guerre coloniale, à laquelle nous devons mettre fin immédiatement ! Nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas !
Même si tout est fait pour censurer l’information en interdisant l’accès de Gaza aux journalistes internationaux, il n’en demeure pas moins que quotidiennement, sous nos yeux, des violences inouïes sont perpétrées, dans l’immobilisme le plus total de la communauté internationale et le silence des pouvoirs politiques, en Europe comme en France.
Sortons des discours incantatoires, consistant à compter les morts, à déplorer les pertes, au mieux à condamner la guerre et à appeler la paix de nos vœux… Prenons nos responsabilités en tant qu’élus français et européens : la paix ne se décrète pas, elle se construit !
Il faut en finir avec cette politique de l’autruche hypocrite qui recherche l’équilibre là où, depuis des années, il n’y a qu’asymétrie et disproportion.
Nous avons, d’un côté, un peuple qui résiste à l’occupant, comme le lui permet le droit international, avec les moyens dont il dispose, et, de l’autre, un État qui terrorise une population avec une des plus puissantes armées au monde. Mes chers collègues, cessons de renvoyer dos à dos agressés et agresseurs, occupés et occupants, colonisés et colonisateurs : ce déni de réalité n’est pas acceptable. Nous ne pouvons pas réécrire l’histoire ; elle s’impose à nous et nous devons l’assumer si nous voulons construire l’avenir dans une paix juste et durable.
Aujourd’hui, nous devons nous placer sur le terrain du droit et de la justice. Il faut agir, créer et mettre en œuvre des instruments juridiques contraignants pour permettre au peuple palestinien de vivre en paix dans les frontières définies en 1967 par l’ONU. L’impunité d’Israël doit cesser. Toutes les résolutions des Nations unies et les principes du droit international doivent s’appliquer, sous peine de sanctions.
Ainsi, seule une solution juridique contraignante peut mettre un terme aux exactions israéliennes à Gaza. Le droit international et européen offre une palette de mesures, dont presque aucune n’a été utilisée à ce jour.
La première de ces mesures consisterait à faire constater, par la Cour pénale internationale, le caractère particulièrement grave des violations, par Israël, de ses engagements conventionnels, notamment de la quatrième convention de Genève relative à la protection des populations civiles en temps de guerre.
N’oublions pas qu’Israël est, au regard du droit international, une puissance occupante. À ce titre, Israël doit protéger les populations civiles et les biens non militaires. Toute attaque ciblée d’une population ou de biens civils doit être regardée, purement et simplement, comme un crime de guerre justifiant des poursuites par les juridictions internationales. Leur mise en œuvre relève de la responsabilité de tous les États parties aux conventions de Genève, y compris la France, qui est tenue de respecter et de faire respecter le droit humanitaire.
Le Président Nicolas Sarkozy recevra d’ailleurs bientôt une demande de saisine de la Cour pénale internationale, rédigée par d’éminents juristes et qui sera également transmise prochainement au procureur de la CPI.
Une deuxième mesure envisageable consisterait à mettre en œuvre, sur le fondement des chapitres VI et VII de la Charte des Nations unies, l’adoption d’une résolution contraignante visant à obliger Israël à mettre un terme à son agression.
L’agression armée menée par Israël ne peut pas être considérée comme une simple mesure de représailles. Aucune raison ne justifie qu’une armée s’en prenne à des civils ou à des biens non militaires. Le droit à la légitime défense ne saurait permettre à un État de répondre de manière disproportionnée, et encore moins d’utiliser des bombes au phosphore blanc, prohibées par la convention de Genève de 1980, ou des bombes à fragmentation causant de graves dommages aux populations.
Nous sommes face à un crime contre la paix, qui porte atteinte à la sécurité internationale et que la communauté des États doit non seulement constater et condamner, mais également sanctionner, par des moyens contraignants que nous devons inventer si nécessaire. La France, dans ce domaine, peut jouer un rôle décisif et a une responsabilité historique.
Monsieur le ministre, vous exercez actuellement la présidence du Conseil de sécurité des Nations unies : il vous appartient de négocier la levée du blocus de Gaza, ainsi que l’arrêt immédiat des hostilités par le retrait des troupes israéliennes et par des sanctions. Ce n’est qu’à ce prix que la légalité internationale sera rétablie et respectée.
Une troisième mesure envisageable concernerait l’échelon européen.
Permettez-moi de vous rappeler qu’Israël s’est engagé, aux termes de l’article 2 de l’accord d’association avec l’Union européenne signé le 20 novembre 1995 et renouvelé en 2002, au « respect des droits humains et des principes démocratiques ».
En raison du non-respect de cet engagement, le Parlement européen avait voté, le 10 avril 2002, la suspension de l’accord d’association. Il est absolument intolérable que le conseil des ministres de l’Union européenne ait décidé, selon la volonté même de la France et au mépris du vote du Parlement européen, d’accélérer le processus de rehaussement des relations de l’Union européenne avec Israël, dans le cadre de la politique européenne de voisinage.
Monsieur le ministre, vous avez, avec vos collègues européens, choisi le pire moment qui soit pour promouvoir une telle initiative. Aujourd’hui, consciente de la gravité des événements qui se déroulent sous nos yeux, la Commission européenne a décidé d’une « pause dans le rehaussement ». Mais est-ce suffisant pour rappeler à Israël ses engagements internationaux ?
Le massacre de la population de Gaza doit amener à geler purement et simplement ce processus, jusqu’à l’arrêt de cette agression, au retrait des troupes et à la levée du siège de Gaza.
Il faut aujourd’hui suspendre l’accord d’association, ainsi que tous les accords économiques, commerciaux ou de partenariat scientifique et technologique liant Israël aux puissances démocratiques soucieuses du respect effectif des droits humains.
Enfin, la France doit clarifier la nature des relations qu’elle entretient avec l’État d’Israël. La France n’a-t-elle pas contribué à la construction du « tramway de la honte », appelé aussi « tramway de l’apartheid », qui desservira les colonies de Jérusalem, territoires annexés illégalement ? La France doit cesser de coopérer militairement, par marchés interposés, avec Israël.
Monsieur le ministre, je vous rappelle que, en juin 2004, votre ministère et celui de la défense ont annoncé la conclusion de contrats militaires entre la France et Israël, mettant ainsi un terme au boycott des ventes d’armes à destination d’Israël décidé par le général de Gaulle.
Aujourd’hui, la société EADS, associée aux sociétés Dassault et Thales, fabrique avec Israël Aircraft Industries les drones qui survolent quotidiennement le territoire palestinien. Monsieur le ministre, un État qui participe à des programmes militaires représentant des centaines de millions de dollars peut-il rester neutre devant les agissements militaires d’Israël ? N’a-t-il pas accepté de faire des concessions politiques ?
Sortez de cette schizophrénie qui consiste à condamner les violences, à déclarer que vous souhaitez la paix, tout en procédant à des transferts de technologies vers Israël, en mêlant affaires et politique ! Nos compatriotes sont en droit de savoir quelle est la nature de ces accords et si des technologies françaises sont utilisées par l’armée israélienne dans la perpétration de ses crimes de guerre contre la population palestinienne ! Nous devons suspendre ces transferts technologiques qui contribuent à l’effort de guerre d’Israël et impliquent indirectement la France dans des exactions inacceptables.
Depuis toujours, les Verts luttent contre les fabricants et les vendeurs d’armes, quelle que soit leur nature. La France doit prendre ses responsabilités dans ce domaine, d’autant que des liens étroits existent entre la filière nucléaire civile et la filière nucléaire militaire et qu’elle vend des unités de production à des pays se trouvant dans une situation tendue. Le spectre d’une réaction nucléaire risque de se manifester dans toute la région du Moyen-Orient si l’ONU et l’Union européenne ne se donnent pas les moyens d’enrayer immédiatement cette guerre et de protéger le peuple palestinien.
Nous exigeons que la France, qui préside le Conseil de sécurité, envoie des troupes pour protéger la population palestinienne, comme le fait la FINUL au Sud-Liban, ou du moins jouer un rôle de force internationale d’intimidation.
Pour conclure, je réaffirme que nous avons la responsabilité de mettre en place toutes les conditions d’un retour des protagonistes à la table des négociations, pour construire cette paix que nous voulons.
N’oublions pas qu’il n’y aura pas de paix durable sans justice. C’est pourquoi nous devons agir dans le respect du droit international, en faisant appliquer toutes les résolutions de l’ONU qui exigent la création d’un État palestinien viable, dans les frontières définies en 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale, et qui imposent la fin de l’occupation militaire et le retrait des colonies.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je remercie l’ensemble des orateurs, dont les interventions ont été souvent extrêmement justes, parfois très émouvantes, toujours sincères et intéressantes.
Monsieur le président de la commission des affaires étrangères, il est facile de dire qu’il faut discuter avec ses ennemis quand on est extérieur au conflit ; pour les belligérants, une telle pétition de principe, que je ne peux qu’approuver, reste bien souvent théorique.
Beaucoup d’intervenants ont appelé à prendre les choses comme elles sont et donc à parler avec le Hamas. Je leur répondrai que telle n’est pas actuellement la position de la France. En effet, dans les circonstances présentes, nouer un tel dialogue ne nous mettrait pas en situation de jouer le rôle positif que vous avez tous appelé de vos vœux, mesdames, messieurs les sénateurs.
Ce n’est d’ailleurs pas une exigence de l’Organisation de libération de la Palestine et de son président. Quand on l’interroge sur ce point, le président de l’Autorité palestinienne lui-même avoue ne pas dialoguer avec le Hamas, bien qu’il essaye de le faire ! Vous connaissez, mesdames, messieurs les sénateurs, les craintes qui furent les nôtres, en novembre dernier, lorsque le Hamas a refusé toute discussion avec l’Autorité palestinienne, malgré les efforts déployés en ce sens par l’Égypte pendant des mois. Quelques-uns avaient alors prédit l’aggravation de la crise.
Madame Cerisier-ben Guiga, notre rôle, pour le moment, est d’essayer d’imposer un cessez-le-feu. La France, présidant le Conseil de sécurité de l’ONU, a réussi, après quarante-huit heures d’efforts acharnés, à obtenir l’adoption à la quasi-unanimité de la résolution 1860, qui vise à exiger le cessez-le-feu. C’est toujours à cet objectif que nous nous attachons, non seulement en raison des sentiments d’horreur et d’indignation qu’inspire la situation à Gaza, mais également par respect pour les populations.
Il revient à Israël de savoir s’il doit ou non se résoudre à discuter avec ses ennemis. Engager un tel dialogue est un devoir et un fardeau dans tous les cas d’affrontement et de guerre – j’en ai connu beaucoup. Pour l’heure, ce n’est pas le rôle de la France.
Monsieur de Rohan, vous m’avez interrogé sur l’identité des partenaires palestiniens à l’issue de la crise. Je l’ai dit à plusieurs reprises, j’espère que l’Autorité palestinienne sera alors en mesure de renouer le dialogue politique. Je n’en suis pas certain, mais j’essaie de m’en persuader ! La plus grande réussite de la violence du Hamas serait d’affaiblir la représentativité de l’Autorité palestinienne dans le nécessaire dialogue : c’est ce que nous voulons absolument éviter.
Ainsi, lors de la réunion des États de la Ligue arabe qui s’est tenue à New York sous la direction du prince Saoud al-Fayçal, nous avons essayé de faire en sorte que l’ensemble des Arabes modérés et les Syriens puissent continuer à se parler.
Après la sortie de crise, je l’ai dit tout à l’heure, notre stratégie sera donc de chercher résolument à renouer le dialogue politique entre Israéliens et Palestiniens, conférence d’Annapolis ou pas. Avec l’Union européenne, nous avons fait le maximum, et pas seulement dans le cadre de la conférence de Paris, pour que ce dialogue se renforce et puisse aboutir à un résultat.
Dans le discours qu’il a prononcé à la Knesset puis à Ramallah, le Président Sarkozy a lui-même fortement et très clairement dénoncé la colonisation, sans se contenter de simples allusions. Notre politique est d’affirmer la nécessité de la coexistence de deux États. La conférence de Paris a été organisée au nom de la création d’un État palestinien, indispensable à la sécurité d’Israël. Nous n’avons donc jamais mis notre drapeau dans notre poche !
Quant au soutien inconditionnel de l’administration américaine à Israël, pourquoi me le reprocher ? Qu’y puis-je ? Je puis vous dire qu’obtenir l’abstention des États-Unis sur la résolution 1860, au lieu du veto prévu, n’a pas été simple ! J’aurais souhaité que l’on puisse reporter le vote au lendemain matin et poursuivre la négociation, mais ce n’était pas possible. Il s’agit en tout cas à mon sens d’une avancée, car un tel résultat était inespéré au départ.
Monsieur de Rohan, il m’est impossible de dire dès à présent quelles seront nos relations avec le gouvernement israélien issu des prochaines élections.
Quant à l’Autorité palestinienne, je rappelle que le mandat de son président arrivait à échéance le 9 janvier dernier. L’impossibilité de parler avec le Hamas, pour des raisons qui tiennent à cette organisation et non à l’OLP ou à l’Autorité palestinienne, met dans l’embarras les Palestiniens qui croient au dialogue et estiment que deux États viables et démocratiques doivent coexister. La Ligue arabe considère que la prolongation du mandat du président de l’Autorité palestinienne découle automatiquement de l’absence complète de dialogue entre les deux factions. C’est donc, théoriquement, ce qui devrait se produire. Malgré la colonisation, le dialogue est le seul espoir, et nous formons des vœux pour qu’il soit renoué.
Monsieur Pozzo di Borgo, vous avez à la fois posé des questions et apporté des réponses : je vous en félicite !
Sourires
Vous avez vous aussi estimé qu’il convenait de parler avec le Hamas. Qu’en pense l’OLP ? Ne soyons pas plus palestiniens que les Palestiniens ! Des contacts indirects, en particulier via l’Égypte, permettent de connaître les positions du Hamas. Une dépêche parvenue du Caire ce soir même laisse pressentir que l’on s’acheminerait vers l’esquisse d’une issue positive – je ne sais quels termes suffisamment prudents employer ! – s’agissant de la conclusion d’un cessez-le-feu. L’envoyé du Hamas retourne en Syrie. Nous verrons bien !
Vous avez raison, monsieur Pozzo di Borgo, de souligner que les chrétiens d’Orient sont dans une situation très difficile. Nous sommes intervenus à plusieurs reprises à ce sujet et nous nous sommes rendus sur place, mais cela ne suffit pas.
Nous avons accordé des visas aux chrétiens d’Irak, qui sont particulièrement menacés, mais le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés n’autorise pas la sélection des réfugiés. En outre, les chrétiens d’Irak ne souhaitent pas forcément s’installer en France, car beaucoup ont de la famille dans d’autres pays, par exemple en Suède.
Quoi qu’il en soit, 527 personnes sont déjà entrées sur notre territoire, et de 500 à 1 000 autres visas pourraient encore être délivrés. Ce n’est pas suffisant, certes, mais en tout état de cause nous prenons ce problème en considération. Quant à la réconciliation entre frères à laquelle vous avez appelé, monsieur le sénateur…
Sourires
Monsieur Billout, je voudrais d’abord clarifier, une fois pour toutes, la notion de partenariat privilégié.
L’Union européenne a conclu un partenariat privilégié avec l’Ukraine la même année qu’avec Israël, et auparavant elle en avait établi un avec le Maroc : cessez donc, s’il vous plaît, d’en faire un argument !
Le processus a été entamé par l’Allemagne en 2005 et a été achevé sous la présidence slovène. Nous n’avions donc plus qu’à le mettre en œuvre, sans pouvoir recourir, à ce stade, à la codécision et donc à l’intervention du Parlement européen.
Cela étant, un partenariat privilégié consiste en fait à réunir une fois par an les chefs d’État des pays concernés. Nous avons d’ailleurs proposé la même chose aux Palestiniens, alors qu’ils n’ont pas encore d’État.
Au-delà du principe, la définition du champ du partenariat privilégié relève de la codécision, et le Parlement européen pourra donc éventuellement s’opposer à ce qu’une action concrète soit menée. Du reste, la Commission vient de décider d’arrêter le processus.
Par conséquent, ne travestissez pas la réalité des choses en voyant partout des intentions machiavéliques !
Quant à l’Union pour la Méditerranée, c’est la seule instance où les quarante-trois pays de la région peuvent se réunir. Elle compte parmi ses secrétaires généraux adjoints un Israélien, un Palestinien, alors que l’État palestinien n’existe pas, et un représentant de la Ligue arabe.
Mesdames, messieurs les sénateurs, en ce qui concerne les sanctions, jamais une résolution n’en a prévu d’emblée. La résolution 1860 date du 8 janvier dernier. M. Ban Ki-moon, secrétaire général des Nations unies, est présent sur le terrain pour sept jours, afin de voir comment cette résolution pourrait s’appliquer et comment elle est perçue par les pays de la région. D’éventuelles sanctions ne viendront que plus tard, il en est toujours ainsi. Par exemple, les sanctions contre l’Irak que vous avez évoquées, monsieur le sénateur, ne sont intervenues qu’après plusieurs mois. Il fallait d’abord adopter une résolution et éviter qu’un pays n’oppose son veto, comme c’est l’habitude quand il s’agit du Moyen-Orient.
Vous reprochez à la présidence française du Conseil de sécurité de ne pas avoir été assez efficace. Je l’admets. C’était le début !
Madame Khiari, je vous remercie d’avoir parlé de la lutte contre l’antisémitisme.
Bien entendu, il ne s’agit pas d’un conflit religieux, et vous avez eu raison de le souligner. Je m’indigne des violences, des manquements au droit international, et je répondrai au devoir d’ingérence. Mais je comprends pourquoi on s’anime, en France : c’est un problème tellement difficile ! Nous éprouvons tellement de remords, les uns et les autres – pas tous au même niveau –, depuis soixante ans ! Vous avez raison de dire que la culpabilité européenne, ou son expression très particulière – mais il n’y a pas seulement la culpabilité, il y a aussi la réalité de l’Holocauste –, a été transférée dans une région qui avait peu de chose à y voir. C’est vrai !
De chaque côté, on sent comme un attachement très compréhensible pour un camp, avec une défense partiellement biaisée, bien sûr. Mais c’est une souffrance, pour chacun d’entre nous, que de ne pas pouvoir mettre un terme à ce conflit.
C’est pour cela que le Gouvernement a réagi de la façon la plus risquée, me semble-t-il. Il est très facile de dire de loin que nous aurions pu faire mieux – je ne parle pas de vous, madame, mais des chefs d’État qui n’étaient pas présents. Pourtant, seul le Président Sarkozy s’est rendu sur place, accompagné de la représentation de la troïka – cela ne s’était jamais vu non plus ! Ce n’est pas assez, ce n’est jamais assez : la preuve en est que le cessez-le-feu n’est pas encore intervenu.
Beaucoup d’entre vous ont parlé de l’envoi d’une force internationale. Tout d’abord, je le rappelle, la dernière qui ait été mise en place, la FINUL, s’est déployée entre le Litani et la frontière israélienne, et seulement après le conflit : de telles interventions ne se font jamais en plein conflit ! Ensuite, une force internationale doit être acceptée par un État : le Liban, non seulement l’acceptait, mais la demandait.
Pour le moment, une force internationale d’interposition ne serait pas acceptée. Il ne pourrait donc s’agir que d’une force d’observateurs. Celle-ci pourrait disposer du concours de l’Union européenne – nous y avons travaillé –, mais pas seulement : les Turcs, les Brésiliens, seraient disposés à y participer. Elle serait placée, au mieux, sous le drapeau des Nations unies. Mais elle est, pour l’heure, absolument refusée par les Égyptiens et les Israéliens.
Voulez-vous dire qu’être contraignant signifie envoyer une force militaire ? Je ne pense pas que telle soit votre intention. Nous avons étudié la question sous tous ses angles, au Conseil de sécurité, évidemment, mais aussi bien avant ; la discussion, en particulier au niveau de l’Union européenne, dure depuis plusieurs mois, voire plusieurs années.
Vous le savez, l’EUBAM – l’European Union Border Assistance Mission –, qui est composée de quelques observateurs, a été mise en place à Rafah, c’est-à-dire hors du territoire égyptien, en 2005. Récemment, lors de ses conversations avec le Président Sarkozy, le Président Moubarak a accepté de recevoir d’éventuels observateurs, par exemple pour les loger. Ils sont actuellement dix-sept, et ne peuvent plus travailler depuis que le Hamas a pris le pouvoir.
Si cette force était augmentée, elle ne pourrait travailler que dans la « zone Philadelphie », cette bande de territoire qui sépare l’Égypte de Gaza : sans être inenvisageable, une telle hypothèse ne correspond pas exactement à ce que nous souhaitions. Il faut donc une autorisation, sinon je ne vois pas comment une armée internationale pourrait forcer l’accès. Ma réponse s’adressait notamment à M. Cambon.
Dès le premier jour, nous avons condamné l’usage des bombes au phosphore, illicite en ville.
Beaucoup d’entre vous ont évoqué le rôle que devrait jouer l’Union pour la Méditerranée. Pour le moment, celle-ci n’accepte plus de se réunir : voilà où nous en sommes ! Il ne s’agit donc pas du forum où nous pourrions déployer plus d’énergie. Nous avons envisagé cette possibilité, et je l’ai proposée aux Égyptiens, qui, vous le savez, occupent la vice-présidence ; pour le moment, cela ne paraît pas envisageable.
Jean-Pierre Chevènement m’a reproché une lucidité à courte vue. Je lui rappellerai que j’ai demandé dès 1975 deux États pour deux peuples, dans un article – dont il pourrait me faire l’amitié de se souvenir – publié par L’Événement, journal dirigé par Emmanuel d’Astier de la Vigerie, que l’on peut retrouver. Je n’ai donc pas une courte vue.
Madame Cerisier-ben Guiga, je n’embrasse pas seulement Mme Tzipi Livni. Vous m’avez beaucoup choqué !
Peut-être n’y prêtez-vous pas grande attention, mais j’embrasse également M. Abou Mazen, de même qu’Abou Allah et tous les Palestiniens qui viennent nous voir. J’ai travaillé chez eux, en particulier à Gaza, et je les connais depuis trente ans, comme je connais tous les protagonistes de la région. Si vous voulez bien revoir les images de mes rencontres avec M. Abou Mazen, vous constaterez que je l’embrasse chaque fois avec beaucoup d’affection, que ce soit à Ramallah, à Paris, au Caire ou ailleurs !
Je ne choisis pas mes embrassades, …
M. Bernard Kouchner, ministre. … mais elles sont extraordinairement neutres.
M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.
Monsieur Chevènement, il est vrai que, d’une certaine façon, le Hamas est caricaturé. Il m’est déjà arrivé de dire que je n’aimais pas une démocratie qui choisit les vainqueurs d’une élection : c’était entre les deux tours des élections algériennes, vous vous en souvenez peut-être, et je l’ai répété lorsque le Hamas a gagné les élections législatives. Mais je n’étais pas ministre à l’époque, pardonnez-moi si c’est là une faute personnelle.
Je voudrais rappeler que, si la France – la France de Jacques Chirac, madame Durrieu – n’a pas adopté de position très déterminée, elle a néanmoins été la seule nation à se montrer plutôt favorable à une reconnaissance de cette victoire électorale. Nous avons tenté de convaincre les autres dirigeants de l’Union européenne. Malheureusement, au moment où nous avions un faible espoir d’y parvenir, le Hamas a attaqué brutalement l’OLP, faisant plusieurs centaines de morts – que vous avez oubliés. Ce coup d’État a fait échouer la tentative de constituer un gouvernement d’union nationale.
M. Aymeri de Montesquiou esquisse une moue dubitative.
Le blocus a été renforcé, sur le plan politique, par la communauté internationale : je ne connais personne qui ait alors protesté, pas même les Norvégiens, qui entretiennent pourtant des rapports avec le Hamas et participent maintenant à la médiation. Nous avons été très choqués par l’affrontement entre le Hamas et l’OLP. Souvenez-vous-en, nous n’étions pas responsables !
Monsieur Chevènement, vous nous conseillez de demander à Barack Obama de recentrer la politique des États-Unis sur le Proche-Orient : c’est exactement ce que nous avons fait dans le document transatlantique paraphrasé hier par Mme Hillary Clinton ! Mais nous ne décidons pas pour le Président Obama.
Vous avez évoqué l’Afghanistan ; c’est un autre problème.
Je comprends aussi le désir, exprimé collectivement, que nous parlions avec le Hamas. Cependant, la position officielle de la France est de n’entretenir des relations avec le Hamas, comme je l’ai dit dans mon discours introductif, qu’à trois conditions : que ce mouvement accepte les résolutions négociées par l’OLP – dont le représentant authentique, le président élu, est M. Abou Mazen – ; qu’il reconnaisse l’État d’Israël, comme le fait l’OLP ; qu’il renonce à la violence comme moyen d’expression politique. Ce n’est ni impossible ni inenvisageable !
Mme Cerisier-ben Guiga m’a demandé pourquoi nous n’avions pas soutenu le gouvernement d’union nationale. Nous l’avons soutenu ! Simplement, nous n’avons pas réussi à convaincre nos partenaires de l’Union européenne, puis le coup d’État a eu lieu.
Je répondrai au président du groupe sénatorial d’amitié France-Israël que nous sommes tous attentifs à la sécurité d’Israël et que nous pensons, très naïvement si j’ose dire, que celle-ci ne sera assurée qu’avec la création d’un État palestinien, ainsi qu’il l’a lui-même indiqué. Nous nous sommes battus pour cela, nous avons beaucoup agi, avant la conférence de Paris, pour l’existence d’un État palestinien viable, et de notre point de vue, je l’affirme, cela reste la seule solution envisageable. Par ailleurs, nous nous sommes toujours élevés officiellement contre la poursuite de la colonisation.
Bien sûr, le Hamas utilise la population civile comme un bouclier. Malheureusement, toutes les guerres se font maintenant contre les civils, et les militaires ne sont plus l’objectif unique. Ce n’est pas une raison pour accepter ce qui se passe à Gaza, et nous le refusons !
Si on ne lutte pas contre la contrebande d’armes, le calme n’a aucune chance d’être rétabli. Il existe neuf cents tunnels, ou sept cents, ou six cent cinquante… Nous n’arriverons à rien sans un contrôle suffisant. Lorsque nous en parlons à nos amis égyptiens, ils répondent qu’ils les contrôlent comme ils le peuvent. Il ne semble pas que ce soit complètement efficace ; en tout cas, c’est ce que nous constatons dans la réalité, et l’allongement de la portée des roquettes, hélas ! nous le confirme.
Monsieur de Montesquiou, je vous rappellerai l’élection présidentielle de 2005, les élections législatives de 2006, le débat de 2007, l’accord entre l’OLP et le Hamas pour un gouvernement d’union nationale négocié sous l’égide des Saoudiens juste avant que le coup d’État ne surprenne tout le monde, et d’abord les Saoudiens.
Il est vrai que, depuis juin 2007, nous ne nous sommes plus exprimés et que nous ne sommes pas plus intervenus que les autres, en particulier pas plus qu’aucun membre de l’Union européenne.
Vous avez par ailleurs abordé la plupart des questions. La garantie internationale de sécurité que M. de Montesquiou proposait a été donnée à Israël par toutes les résolutions des Nations unies ; chaque fois, Israël a dû lutter pour ses frontières. Je condamne évidemment toutes les violences, mais constatons que, depuis soixante ans qu’Israël existe, il ne lui a pas été facile de s’imposer face à un milieu hostile. Si les choses devaient évoluer, nous en serions tous heureux, et je pense que c’est exactement ce que vous souhaitez.
Begin et Shamir ont été des terroristes, je le sais ! Est-ce à dire que l’action terroriste précède l’action légale et gouvernementale ? En tout cas, c’est un constat : ils ont été des terroristes, et c’est ainsi qu’ils ont imposé Israël. Est-ce vrai pour le Hamas contre l’OLP ? Je ne le crois pas, mais, bien entendu, je reconnais cette évolution.
Madame Durrieu, vous avez parlé d’un soutien permanent à Israël. Mais la France de Jacques Chirac a fait la même chose ! Vous avez oublié cet épisode, mais au début de 2007, Jacques Chirac était encore Président. Que pouvait-on faire d’autre ?
Bien sûr qu’il faut être volontariste ! Mais, hormis le discours de François Mitterrand devant la Knesset en 1982, jamais un Président français n’avait tenu de propos aussi volontaristes que ceux de Nicolas Sarkozy devant cette même assemblée, en posant les mêmes exigences à la partie israélienne et à la partie palestinienne. Ce discours a été non seulement apprécié, mais approuvé par les Israéliens et les Palestiniens : il réclamait deux États ayant Jérusalem comme capitale commune et demandait la fin de la colonisation. Pour autant, je ne dis pas que nous ayons eu alors une attitude plus volontariste que celle des autres pays européens.
J’ai répondu sur l’upgrade. Franchement, on pourrait en parler pour l’Ukraine, en ce moment !
Israël veut-il la paix ? Oui, le peuple israélien veut la paix, …
… tout comme le peuple palestinien.
Une fois qu’on a dit cela, peut-on s’en satisfaire ? Non.
Israël veut-il une trêve ? Je pense – je le dis avec beaucoup de précaution – que celle-ci est en train de se dessiner, car elle est exigée par tous. Interviendra-t-elle à court terme ? à moyen terme ? Je n’en sais rien. Je fais tout pour qu’elle puisse être instaurée au plus vite.
Monsieur Christophe-André Frassa, vous avez évoqué la protection des Français à l’étranger. Je sais que c’est chaque fois très difficile, mais les efforts sont exactement les mêmes que ceux que nous avions faits au Liban, dont vous avez également parlé.
Je commencerai par une évidence : les Français dont vous parlez sont pour la plupart des Franco-Israéliens qui se considèrent comme protégés par l’État d’Israël et non par la France. Si néanmoins d’autres devaient être recensés par le consulat ou l’ambassade, comme ce fut le cas au Liban, le système d’alarme mis en place serait en tout point semblable. Cependant, la situation n’est pas la même : au Liban, les Français comptaient sur la France beaucoup plus que ne le font les Franco-Israéliens, même si, bien évidemment, nous reconnaissons à ces derniers les mêmes droits.
Notre système n’est pas si mauvais que cela. Comparée aux autres pays, la France protège beaucoup mieux ses ressortissants, et je ne parle pas seulement des enlèvements ou des prises d’otage : je parle de la réalité des protections sur le terrain.
Je connais le nombre des Français établis dans ce pays, mais vous avez raison, étant leur représentant, de soulever cette question ; je rappelle toutefois que 99 % d’entre eux sont des binationaux.
Nous avons évacué la plupart des Français de Gaza, avec l’autorisation à la fois d’Israël et de l’Égypte. Trois ont voulu rester, et c’est tout à fait leur droit ; nous n’allons pas les obliger à partir ! Ce sont bien sûr, essentiellement, des Franco-Palestiniens.
Madame Bariza Khiari, je vous remercie de nouveau. J’ai été très ému par votre intervention, par votre manière de nous faire sentir le profond déchirement que représente pour chacun d’entre nous, même s’il n’est ni juif ni musulman, cette injustice faite au peuple palestinien pour en réparer une autre, elle-même immense.
Ce conflit s’inscrit dans la conscience de chacun, vous avez raison de le souligner. Oui, nous avons les plus importantes communautés musulmane et juive d’Europe. Je trouve admirable le travail mené par les organisations communautaires pour empêcher les affrontements et pour exiger au contraire qu’il y ait un dialogue. Celui-ci est généralement respecté dans notre pays, même si se sont produits des dérapages, que nous condamnons complètement. Je suis d’accord avec vous : ne « confessionnalisons » pas ce conflit.
Le ministre de l’intérieur, dites-vous, n’a reçu que le CRIF. Je l’ignorais.
J’ai retenu de votre intervention cette phrase de Frantz Fanon : « Quand on dit du mal d’un juif, dressez l’oreille, on parle de vous. » Mais, si Frantz Fanon avait sur la violence un discours que nous avons apprécié à une certaine époque, depuis, nous avons réfléchi.
Je ne peux qu’approuver vos propos sur la laïcité : on peut bien sûr juger Israël ou le Hamas sans être antisémite ou islamophobe.
Quant au manque de fermeté de la diplomatie en matière de droits de l’homme, le reproche est toujours beaucoup plus facile à formuler quand on n’a aucune responsabilité en ce domaine ! S’il est très aisé d’attaquer la diplomatie, il est beaucoup plus difficile de faire mieux qu’elle. En France, comme en Europe, comme partout dans le monde, certains s’engagent, d’autres moins, et vous trouverez toujours des fonctionnaires plus actifs que d’autres…
Vous dénoncez, sans doute à juste raison, la couverture journalistique du conflit. Mais qui ne laisse pas entrer les journalistes à Gaza ? Israël ! C’est une erreur profonde ! Israël nous avait habitués à mettre les journalistes au premier rang, leur attribuant même un officier pour leur permettre d’aller où ils voulaient. On se plaint ensuite que les seules images disponibles proviennent du Hamas ; mais il est impossible d’en obtenir d’autres, à l’exception de celles que peuvent fournir les quelques rares journalistes qui se trouvaient déjà sur place !
Vous avez évoqué le droit d’ingérence. Être ministre des affaires étrangères, ce n’est pas être un militant, ni même un inventeur du droit d’ingérence – désormais accepté par toutes les nations, par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale des Nations unies – devenu responsabilité de protéger ; c’est avoir choisi d’exercer des responsabilités un peu plus larges que celles des droits de l’homme.
En effet, je le répète avec beaucoup de précaution, confondre les attitudes militantes, celles qui sont propres à la société civile, avec les responsabilités gouvernementales – même s’il est bon d’avoir en permanence les droits de l’homme au cœur pour mieux les défendre –, m’apparaît comme une obligation de démission permanente, et je parle devant Jean-Pierre Chevènement, qui est un orfèvre en la matière. Cela n’est pas possible.
Le droit d’ingérence, c’est-à-dire la responsabilité de protéger les populations, doit à mon avis s’exercer à titre préventif. Sinon, c’est toujours trop tard. Venir avec l’Organisation des Nations unies pour tenter d’arrêter les combats quand ils font rage, ce n’est ni suffisant ni satisfaisant.
Dans mes fonctions actuelles, sous la direction, bien sûr, du Premier ministre et du Président de la République, j’essaie d’appliquer au mieux cette responsabilité de protéger. C’est de plus en plus difficile, et non pas seulement en Israël. Ainsi, au Darfour, la responsabilité de protéger est bafouée tous les jours, personne ici ne le niera.
Être militant est tout à fait légitime, et c’est nécessaire. Appliquer le droit et la justice, c’est ce que je m’efforce de faire. C’est extrêmement imparfait, et j’en reconnais moi-même les limites. Il m’arrive même de me poser des questions à propos de ces limites.
Madame Alima Boumediene-Thiery, être en empathie avec les populations civiles, c’est ce que j’ai fait toute ma vie, et je continue de le faire. J’ai travaillé à l’hôpital Shifa de Gaza, je connais bien cette région et la nécessité d’être aux côtés des populations. Mais, à ce point du conflit, un cessez-le-feu doit absolument intervenir ! Il s’agit de l’obtenir au plus vite, et cela relève bien de la responsabilité politique.
Sans faire, comme vous l’avez dit, madame Alima Boumediene-Thiery, la politique de l’autruche, je m’efforce d’être efficace dans une situation qui exige avant tout que cesse cette guerre. Après, nous verrons.
Quel autre choix le Conseil de sécurité pouvait-il faire pour la résolution ?
Certes, mais que pouvions-nous faire d’autre ? Entre demander une trêve humanitaire, comme on l’a dit, et une trêve politique, c’est-à-dire durable, nous avons fait, à travers la résolution 1860, le choix de la trêve durable.
Pour autant, cela ne suffit pas ; et si demain on nous disait que l’on peut obtenir à Gaza une simple trêve humanitaire, mais permanente et donc susceptible d’être durable, j’y souscrirais malgré la résolution 1860, dont je rappellerais les termes.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que je m’efforce de faire.
Je vous remercie de votre attention, en vous priant de m’excuser d’avoir été un peu long.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
Je ne voudrais pas laisser ce débat s’achever sur un malentendu.
Dans votre réponse à mon intervention, monsieur le ministre, j’ai cru comprendre – mais peut-être me trompé-je – que vous aviez le sentiment que je vous aurais reproché de ne pas avoir de contacts directs avec le Hamas. Or, en relisant mes notes, je n’ai pas vu que je vous avais demandé de le faire ou reproché de ne pas l’avoir fait.
Le Hamas est aujourd’hui une réalité sur le terrain. Il a remporté de la manière la plus légale qui soit les élections en Palestine. Après l’épisode que vous savez, un coup d’État a eu lieu dans la bande de Gaza, sans doute ; mais, incontestablement, le Hamas est aujourd’hui une force. Il est même très probable qu’à la suite des événements qui viennent de se produire – et je n’en félicite ni n’en blâme personne – son influence en Cisjordanie va croître, ce qui est exactement le contraire de ce que recherchait Israël. Pour autant, c’est un fait.
Il va donc falloir trouver une solution à la crise ; du moins, j’espère que l’on y parviendra. Je ne croyais pas, monsieur le ministre, vous désobliger en vous citant…
… et en rappelant que, à un moment ou à un autre, il faut discuter avec ses ennemis pour trouver une solution.
Que s’est-il passé dans la France des années soixante ? M. Jean-Pierre Chevènement et moi-même, qui sommes de la même génération, …
… avons entendu dire sur tous les tons que jamais la France n’accepterait de discuter avec le Front de libération nationale algérien, qu’elle considérait comme un mouvement d’assassins. C’est le général de Gaulle qui a pris l’initiative de discuter avec le FLN : sans cela, et quoi que nous pensions de l’action de cette organisation et de la manière dont elle s’était comportée, jamais nous n’aurions pu faire la paix.
De la même façon, que l’on aime ou non le Hamas, il est difficile d’imaginer pouvoir trouver une solution sans lui. Il faudra trouver les moyens les plus appropriés pour le faire. J’ai aussi la conviction que, directement ou indirectement, Israël sera bien obligé de tenir compte de cette réalité politique qu’est le Hamas. Le jour où ils seront assis ensemble à la table des négociations – certains s’y emploient –, ce sera une reconnaissance de fait d’Israël par le Hamas, et celui-ci sera obligé de revoir sa charte, dans laquelle il nie l’existence d’Israël. Peut-être s’agit-il là d’un vœu pieux qui ne se réalisera pas avant cinquante ans, je n’en sais rien.
En tout cas, monsieur le ministre, je ne vous reproche ou ne vous ai reproché en aucune manière d’avoir refusé de discuter avec le Hamas, et ce pour une raison simple : c’est que vous n’êtes pas chargé d’organiser de médiation entre les parties.
Je considère – ce sera ma conclusion – que l’action du Président de la République a été parfaitement méritoire. Je suis fier de la manière dont, avec nos partenaires européens, il l’a engagée. Vous avez plutôt à vous féliciter de la façon dont les choses ont été conduites. C’est pourquoi je souhaite qu’il n’y ait pas de malentendu entre nous.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Le débat est clos.
Acte est donné de la déclaration du Gouvernement, qui sera imprimée sous le n° 158 et distribuée.
J’ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant la ratification du traité de Singapour sur le droit des marques.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 159, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J’ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant la ratification du traité sur le droit des brevets.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 160, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J’ai reçu de M. François Zocchetto un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale sur la proposition de loi de M. Laurent Béteille, relative à l’exécution des décisions de justice et aux conditions d’exercice de certaines professions réglementées (no 31, 2008-2009).
Le rapport sera imprimé sous le n° 161 et distribué.
J’ai reçu de M. Philippe Marini un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2009 (no 154, 2008-2009).
Le rapport sera imprimé sous le n° 162 et distribué.
J’ai reçu de M. Bruno Sido un rapport fait au nom de la commission des affaires économiques sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement (no 42, 2008-2009).
Le rapport sera imprimé sous le n° 165 et distribué.
J’ai reçu de M. Philippe Richert un rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi de Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Ivan Renar, Jack Ralite, Jean-François Voguet, Mmes Éliane Assassi, Marie-France Beaufils, M. Michel Billout, Mmes Nicole Borvo Cohen-Seat, Annie David, M. Jean-Claude Danglot, Mmes Michelle Demessine, Évelyne Didier, MM. Guy Fischer, Thierry Foucaud, Mme Gélita Hoarau, MM. Robert Hue, Gérard Le Cam, Mmes Josiane Mathon-Poinat, Isabelle Pasquet, Mireille Schurch, Odette Terrade, MM. Bernard Vera, François Autain et Jean-Luc Mélenchon, abrogeant la loi n° 2008-790 instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire (no 147, 2008-2009).
Le rapport sera imprimé sous le n° 166 et distribué.
J’ai reçu de Mme Élisabeth Lamure un rapport fait au nom de la commission des affaires économiques sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés (no 157, 2008-2009).
Le rapport sera imprimé sous le n° 167 et distribué.
J’ai reçu de M. Hubert Haenel un rapport d’information fait au nom de la commission des affaires européennes sur les conséquences institutionnelles de la non-entrée en vigueur du traité de Lisbonne.
Le rapport d’information sera imprimé sous le n° 168 et distribué.
J’ai reçu de M. Philippe Marini un avis présenté au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés (no 157, 2008-2009).
L’avis sera imprimé sous le n° 163 et distribué.
J’ai reçu de M. Laurent Béteille un avis présenté au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés (no 157, 2008-2009).
L’avis sera imprimé sous le n° 164 et distribué.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 15 janvier 2009, le matin, à 15 heures et le soir :
– Suite de la discussion du projet de loi organique (no 144, 2008-2009), adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l’audiovisuel extérieur de la France et du projet de loi (no 145, 2008-2009), adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.
Rapport (no 150, 2008-2009) de Mme Catherine Morin-Desailly et M. Michel Thiollière, fait au nom de la commission des affaires culturelles.
Avis (no 152, 2008-2009) de M. Bruno Retailleau, fait au nom de la commission des affaires économiques.
Avis (no 151, 2008-2009) de M. Joseph Kergueris, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le jeudi 15 janvier 2009, à une heure.