Monsieur Billout, je voudrais d’abord clarifier, une fois pour toutes, la notion de partenariat privilégié.
L’Union européenne a conclu un partenariat privilégié avec l’Ukraine la même année qu’avec Israël, et auparavant elle en avait établi un avec le Maroc : cessez donc, s’il vous plaît, d’en faire un argument !
Le processus a été entamé par l’Allemagne en 2005 et a été achevé sous la présidence slovène. Nous n’avions donc plus qu’à le mettre en œuvre, sans pouvoir recourir, à ce stade, à la codécision et donc à l’intervention du Parlement européen.
Cela étant, un partenariat privilégié consiste en fait à réunir une fois par an les chefs d’État des pays concernés. Nous avons d’ailleurs proposé la même chose aux Palestiniens, alors qu’ils n’ont pas encore d’État.
Au-delà du principe, la définition du champ du partenariat privilégié relève de la codécision, et le Parlement européen pourra donc éventuellement s’opposer à ce qu’une action concrète soit menée. Du reste, la Commission vient de décider d’arrêter le processus.
Par conséquent, ne travestissez pas la réalité des choses en voyant partout des intentions machiavéliques !
Quant à l’Union pour la Méditerranée, c’est la seule instance où les quarante-trois pays de la région peuvent se réunir. Elle compte parmi ses secrétaires généraux adjoints un Israélien, un Palestinien, alors que l’État palestinien n’existe pas, et un représentant de la Ligue arabe.
Mesdames, messieurs les sénateurs, en ce qui concerne les sanctions, jamais une résolution n’en a prévu d’emblée. La résolution 1860 date du 8 janvier dernier. M. Ban Ki-moon, secrétaire général des Nations unies, est présent sur le terrain pour sept jours, afin de voir comment cette résolution pourrait s’appliquer et comment elle est perçue par les pays de la région. D’éventuelles sanctions ne viendront que plus tard, il en est toujours ainsi. Par exemple, les sanctions contre l’Irak que vous avez évoquées, monsieur le sénateur, ne sont intervenues qu’après plusieurs mois. Il fallait d’abord adopter une résolution et éviter qu’un pays n’oppose son veto, comme c’est l’habitude quand il s’agit du Moyen-Orient.
Vous reprochez à la présidence française du Conseil de sécurité de ne pas avoir été assez efficace. Je l’admets. C’était le début !
Madame Khiari, je vous remercie d’avoir parlé de la lutte contre l’antisémitisme.
Bien entendu, il ne s’agit pas d’un conflit religieux, et vous avez eu raison de le souligner. Je m’indigne des violences, des manquements au droit international, et je répondrai au devoir d’ingérence. Mais je comprends pourquoi on s’anime, en France : c’est un problème tellement difficile ! Nous éprouvons tellement de remords, les uns et les autres – pas tous au même niveau –, depuis soixante ans ! Vous avez raison de dire que la culpabilité européenne, ou son expression très particulière – mais il n’y a pas seulement la culpabilité, il y a aussi la réalité de l’Holocauste –, a été transférée dans une région qui avait peu de chose à y voir. C’est vrai !
De chaque côté, on sent comme un attachement très compréhensible pour un camp, avec une défense partiellement biaisée, bien sûr. Mais c’est une souffrance, pour chacun d’entre nous, que de ne pas pouvoir mettre un terme à ce conflit.
C’est pour cela que le Gouvernement a réagi de la façon la plus risquée, me semble-t-il. Il est très facile de dire de loin que nous aurions pu faire mieux – je ne parle pas de vous, madame, mais des chefs d’État qui n’étaient pas présents. Pourtant, seul le Président Sarkozy s’est rendu sur place, accompagné de la représentation de la troïka – cela ne s’était jamais vu non plus ! Ce n’est pas assez, ce n’est jamais assez : la preuve en est que le cessez-le-feu n’est pas encore intervenu.
Beaucoup d’entre vous ont parlé de l’envoi d’une force internationale. Tout d’abord, je le rappelle, la dernière qui ait été mise en place, la FINUL, s’est déployée entre le Litani et la frontière israélienne, et seulement après le conflit : de telles interventions ne se font jamais en plein conflit ! Ensuite, une force internationale doit être acceptée par un État : le Liban, non seulement l’acceptait, mais la demandait.
Pour le moment, une force internationale d’interposition ne serait pas acceptée. Il ne pourrait donc s’agir que d’une force d’observateurs. Celle-ci pourrait disposer du concours de l’Union européenne – nous y avons travaillé –, mais pas seulement : les Turcs, les Brésiliens, seraient disposés à y participer. Elle serait placée, au mieux, sous le drapeau des Nations unies. Mais elle est, pour l’heure, absolument refusée par les Égyptiens et les Israéliens.
Voulez-vous dire qu’être contraignant signifie envoyer une force militaire ? Je ne pense pas que telle soit votre intention. Nous avons étudié la question sous tous ses angles, au Conseil de sécurité, évidemment, mais aussi bien avant ; la discussion, en particulier au niveau de l’Union européenne, dure depuis plusieurs mois, voire plusieurs années.
Vous le savez, l’EUBAM – l’European Union Border Assistance Mission –, qui est composée de quelques observateurs, a été mise en place à Rafah, c’est-à-dire hors du territoire égyptien, en 2005. Récemment, lors de ses conversations avec le Président Sarkozy, le Président Moubarak a accepté de recevoir d’éventuels observateurs, par exemple pour les loger. Ils sont actuellement dix-sept, et ne peuvent plus travailler depuis que le Hamas a pris le pouvoir.
Si cette force était augmentée, elle ne pourrait travailler que dans la « zone Philadelphie », cette bande de territoire qui sépare l’Égypte de Gaza : sans être inenvisageable, une telle hypothèse ne correspond pas exactement à ce que nous souhaitions. Il faut donc une autorisation, sinon je ne vois pas comment une armée internationale pourrait forcer l’accès. Ma réponse s’adressait notamment à M. Cambon.
Dès le premier jour, nous avons condamné l’usage des bombes au phosphore, illicite en ville.
Beaucoup d’entre vous ont évoqué le rôle que devrait jouer l’Union pour la Méditerranée. Pour le moment, celle-ci n’accepte plus de se réunir : voilà où nous en sommes ! Il ne s’agit donc pas du forum où nous pourrions déployer plus d’énergie. Nous avons envisagé cette possibilité, et je l’ai proposée aux Égyptiens, qui, vous le savez, occupent la vice-présidence ; pour le moment, cela ne paraît pas envisageable.
Jean-Pierre Chevènement m’a reproché une lucidité à courte vue. Je lui rappellerai que j’ai demandé dès 1975 deux États pour deux peuples, dans un article – dont il pourrait me faire l’amitié de se souvenir – publié par L’Événement, journal dirigé par Emmanuel d’Astier de la Vigerie, que l’on peut retrouver. Je n’ai donc pas une courte vue.
Madame Cerisier-ben Guiga, je n’embrasse pas seulement Mme Tzipi Livni. Vous m’avez beaucoup choqué !