Les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG s’abstiendront sur cet article 3 bis, qui vise à étendre le périmètre du répertoire national commun de la protection sociale.
En effet, nous ne saurions nous opposer à ce que les acteurs des régimes de retraite bénéficient enfin d’un outil leur permettant de rechercher et de sanctionner la fraude des employeurs qui contreviennent à la législation du travail et de la sécurité sociale, notamment pour ce qui relève de l’infraction de travail dissimulé. Cette pratique, qui coûte cher à la sécurité sociale, constitue une remise en cause importante de notre pacte social dans la mesure où le financement de notre système repose en partie sur les cotisations sociales.
Je note au passage que, à l’heure actuelle, la lutte contre la fraude s’oriente principalement vers les salariés et les assurés.
Toutefois, si nous nous abstenons sur cet article, c’est que nous sommes sceptiques sur sa portée réelle.
En effet, vous n’avez de cesse de multiplier vous-mêmes les mesures permettant au patronat de contourner la législation et d’échapper à la solidarité, tant nationale qu’entre générations. C’est bien vous qui avez instauré les ruptures conventionnelles qui servent à déguiser des licenciements, qui avez autorisé le recours massif aux contrats à durée déterminée pour faire face à de prétendues périodes de hausse d’activité ou qui, récemment encore, avez créé le statut de l’auto-entrepreneur dont raffolent les employeurs.
Nous connaissons d’ailleurs tous au moins un exemple de salarié qui, après avoir été licencié par l’entreprise dans laquelle il a travaillé des années durant, a créé son activité et a contracté, quelques mois à peine après son licenciement, avec son ancien employeur. Bel exemple de détournement de procédure ! Dans un tel cas de figure, les pertes sont lourdes pour la sécurité sociale, puisque les auto-entrepreneurs peuvent être exonérés de cotisations sociales durant trois ans, cotisations qui, par définition, sont inférieures à celles qu’aurait rapportées un emploi salarié.
Quant à votre proposition d’échange de fichier avec le Centre de liaisons européennes et internationales de sécurité sociale, dire qu’elle nous laisse sur notre faim est un bien faible mot. Car la meilleure solution de lutter contre la fraude au niveau européen, c’est encore de favoriser une harmonisation par le haut des politiques fiscales, sociales et d’emploi. Mais il est vrai que cette proposition se heurte frontalement à la sacro-sainte loi du marché, contre laquelle vous ne voulez pas, avec vos alliés européens, vous mobiliser.