Il fait en effet partie des deux ou trois articles emblématiques dont les dispositions conjuguées auront des conséquences très préjudiciables pour les futurs retraités.
Alors que les résultats de la réforme de 2003 ne sont pas particulièrement performants, cet article vise à confirmer le principe d’allongement de la durée de cotisation à proportion de l’allongement de l’espérance de vie.
Un raisonnement aussi binaire est forcément contestable, notamment parce que, au-delà de l’espérance de vie, se pose la question de la qualité de vie. Vivre plus longtemps est une chose ; une autre est de vivre en bonne santé !
Dans ce cadre, toutes vos statistiques ne sont pas forcément pertinentes. Pourtant, cet élément de « qualité de vie » est déterminant et doit être pris en compte. À ce titre, la politique menée en termes de déremboursements des médicaments et de franchises médicales, ainsi que la casse de l’hôpital public risquent de priver d’accès à la santé nombre de salariés qui n’auront pas les moyens de se payer non seulement les consultations, mais également les médicaments. Nous pouvons donc légitimement craindre que la santé des seniors, notamment les plus démunis, ne se dégrade par manque de soins.
Nicolas Sarkozy, Président de la République, s’est fait élire avec le slogan : « Travailler plus, pour gagner plus ! ». Par cette réforme, c’est bien l’inverse qui va se passer. Les salariés travailleront plus longtemps et gagneront moins. Beau progrès de civilisation, alors que notre pays compte parmi les plus riches, puisqu’il est la cinquième puissance mondiale !
De plus, allonger le temps de cotisation constitue un recul particulièrement important pour les femmes, qui ont d’ores et déjà des difficultés à obtenir des carrières complètes du fait de leur engagement familial et de la précarité salariale qui les touchent plus que les hommes.
À ce titre, nous trouvons particulièrement scandaleux que les périodes de congé maternité, si elles sont prises en compte dans les annuités, ne le soient pas au titre des cotisations, ce qui affaiblit irrémédiablement le niveau du revenu de référence. C’est donc la triple peine pour les femmes !
Pour les personnes nées en 1953 et en 1954, c’est également un traitement injuste qui les attend, puisque leur régime sera dérogatoire, fixé par un décret devant intervenir avant le 31 décembre de cette année et permettant de définir la durée d’assurance et de services nécessaire à l’obtention du taux plein.
Pour toutes ces raisons, nous pensons que votre réforme est injuste et constitue une contre-performance.
À l’inverse, au lieu de pénaliser les salariés, nous considérons que les financements doivent être pris ailleurs que dans la poche des salariés. Nous souhaitons notamment, pour financer les retraites, que les capitaux financiers contribuent à l’effort financier.
Certes, la crise a affaibli l’économie du pays, mais, au lieu d’en tirer les conséquences, vous accentuez le décalage entre revenus salariaux et revenus du capital, quitte à reproduire sans cesse les mêmes erreurs. Nous étions opposés à la réforme de 2003 ; nous restons opposés à celle-ci.
Denis Kessler, ancien numéro deux du MEDEF, avait, voilà quelques années, donné le sens profond de cette politique gouvernementale.
« Le modèle social français est le pur produit du Conseil national de la Résistance. [...] Il est grand temps de le réformer, et le gouvernement s’y emploie. Les annonces successives des différentes réformes par le gouvernement peuvent donner une impression de patchwork, tant elles paraissent variées, d’importance inégale et de portées diverses : statut de la fonction publique, régimes spéciaux de retraite, refonte de la sécurité sociale, paritarisme... ». J’ajouterai la privatisation des entreprises publiques fondées en 1946.
« À y regarder de plus près, on constate qu’il y a une profonde unité à ce programme ambitieux. »
Non, messieurs, les acquis du Conseil national de la Résistance ne sont pas à liquider, ni même à vendre ! Les valeurs qui ont guidé les résistants, à qui nous restons attachés et dont nous portons le message, à savoir cet espoir d’un monde juste, d’un monde de paix et d’un progrès social partagé, ne sont pas d’un autre temps, ne sont pas une figure de l’histoire à ranger dans les armoires.
Parce qu’ils voulaient défendre la vie, certains sont morts. Soixante ans plus tard, vous organisez la mort sociale de la France. Nous ne pouvons l’admettre. Voilà pourquoi nous sommes résolument contre l’article 4.