Intervention de Évelyne Didier

Réunion du 13 octobre 2010 à 21h30
Réforme des retraites — Article 4

Photo de Évelyne DidierÉvelyne Didier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il s’agit, avec cet article 4, de procéder à l’allongement de la durée de cotisation donnant droit à une pension versée à taux plein.

On commence donc par augmenter d’un an et demi la durée de cotisation, avec tout ce que cela implique.

Mes chers collègues, demandez-vous quelles sont les conséquences financières d’une telle mesure, qui se traduira tout de même pour un smicard par 750 euros à 800 euros de plus par an de cotisations versées pour la seule part ouvrière !

En effet, faute de mesures de recettes, le projet de loi commence par agir sur l’alimentation des régimes de retraite, en prolongeant la durée de cotisation.

Les salariés doivent donc cotiser plus longtemps, mais également se serrer la ceinture, puisque, faute de mesures efficaces sur les recettes, on n’a pas trouvé mieux que de restreindre les dépenses et de limiter leur évolution.

On nous a évidemment servi l’argument de la démographie pour justifier un tel allongement de la durée de cotisation. Les Français vivront en meilleure santé plus longtemps, ce qui justifie, selon vous, d’exiger d’eux plus d’efforts.

Aussi, j’invite tous ceux qui pensent ainsi à venir à trois heures du matin à la Marée au marché international de Rungis, à prendre le métro parisien sur la ligne 13 vers six heures du matin avec les femmes de ménage qui vont nettoyer les bureaux de la Défense ou encore à passer une journée sur les chaînes de fabrication de quelque entreprise du textile, avec les métiers en pleine action, pour voir ce que signifie l’exigence d’une retraite à taux plein à soixante ans !

Afficher comme des vérités tous les arguments que vous utilisez est une chose, regarder la réalité des conditions de travail et, partant, des inégalités sociales telles qu’elles sont en est une autre !

En fait, la démographie a bon dos lorsqu’elle sert juste d’écran pour justifier le fait de réserver une part sans cesse croissante de la richesse créée à la rémunération du capital.

En outre, comme les salariés d’aujourd'hui commencent à cotiser de plus en plus tard, bien souvent au-delà de l’âge de vingt-deux ans révolus, on peut s’attendre à ce que les 41, 5 annuités soient difficiles à réunir et que la retraite à 65 ans à taux plein ne soit même pas envisageable pour nombre d’entre eux.

À ce stade, on se souviendra du fameux mot de Bismarck. Ayant posé la question de savoir à quel âge mouraient les ouvriers des grandes usines allemandes, le chancelier allemand obtint comme réponse : « À 65 ans ». Il conclut alors : « Nous fixerons donc l’âge de la retraite à 65 ans ! ».

Nous ne voulons pas d’un tel cynisme d’État, revenant à raboter le niveau des pensions au nom d’un équilibre financier qui pourrait être obtenu par une autre répartition des richesses !

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