Quant à la taxation des niches fiscales, autant dire qu’elle est dérisoire face aux milliards qui sont en jeu : il s’agit tout de même de 73 milliards d’euros, soit 27 % de l’ensemble des recettes fiscales de notre pays ! Les quelque 100 contribuables qui gagnent le plus et obtiennent, avec les niches fiscales, une diminution d’impôt supérieure à un million d’euros peuvent dormir tranquilles !
Par ailleurs, vous demandiez initialement 3 milliards d’euros, en dessous de quoi la mise en place du RSA serait impossible. Vous parliez même de votre démission si vous ne les obteniez pas ! Aujourd’hui, vous annoncez un financement de 1, 5 milliard d’euros, et votre budget, dans son programme 304, fait état, quant à lui, d’un peu plus de 555 millions d’euros.
De plus, les expérimentations en cours, interrompues sans doute en raison des exigences du Président de la République, font l’objet d’un bilan informatif qui ne peut servir à légitimer votre généralisation. Le projet de loi n’a été expérimenté que sur quelque 4 000 bénéficiaires. Chaque département ayant défini ses propres modalités de mise en œuvre, les expérimentations ne sont pas homogènes.
Mais surtout, monsieur le haut-commissaire, ce projet de loi participe à la politique de casse de notre république sociale, menée par Nicolas Sarkozy. Ce dernier a opposé les malades aux biens portants, les malades entre eux, les salariés à ceux qui sont privés d’emploi, les locataires du parc HLM, et, aujourd’hui, vous opposez les bénéficiaires des minima sociaux aux salariés qui peinent pour atteindre un SMIC devenu, de fait, un plafond de rémunération.
Le Conseil national de la résistance est, dans cette perspective, une entrave insupportable à la « France d’après », fondée sur un seul principe : le mérite. Il y aura ceux qui gagnent de l’argent par leur travail, qui acceptent les heures supplémentaires et le travail dominical, et les autres. Il y aura les bénéficiaires des minima sociaux, qui acceptent de subir la règle des marchés et des employeurs, et qui auront droit à l’aide minimum de l’État, et puis, il y aura les autres. Il y aura les méritants, pour qui l’État se mobilisera, et ceux qui, trop éloignés de l’emploi, ne pourront satisfaire aux obligations imposées. Ceux-là perdront leur droit au RSA. De l’aide de l’État, ils ne verront rien car, après tout, leur pauvreté, ils l’auront méritée !
De l’égalité qui sert de socle à notre République, il ne restera rien, et le gouvernement auquel vous appartenez pourra ainsi librement construire sa société rêvée, faite d’une concurrence que vous voulez libre et non faussée.
Le préambule de la constitution de 1946 est réduit à un lointain souvenir que les juristes étudieront demain. Il sera l’exemple que les économistes libéraux ne voudront plus reproduire : ces derniers expliqueront comment un gouvernement, à force d’attaques répétées, a supprimé les droits créances.
Avec le RSA, l’État ne doit plus rien à personne. Toute aide de l’État doit se gagner. Vous l’avez dit vous-même, pas un euro n’ira à l’inactivité, qu’importe si celle-ci est subie !