Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cette motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité, pour différentes raisons que je vous livrerai une à une, en reprenant les arguments que vous avez développés, madame Pasquet.
D’abord, vous avez contesté l’existence d’indicateurs de réduction de la pauvreté. Or nous avons défini, en accord avec l’ensemble des partenaires sociaux et des associations, un tableau complet d’indicateurs, sur lequel nos points de vue ont convergé.
Afin que ces données ne soient pas manipulables par un gouvernement, nous avons pris en compte, à la demande notamment d’associations comme ATD-Quart Monde, la situation des plus pauvres afin d’y intégrer, à partir de l’indicateur monétaire central, les différentes dimensions, notamment la santé, le logement, le surendettement. Ce tableau de bord constitue aujourd'hui une arme incontestable entre les mains de tous ceux qui veulent vérifier les évolutions de la pauvreté au fil des ans.
En tant qu’ancien président d’association, je me souviens de l’époque où, lorsque nous alertions les autorités sur l’affluence dans les communautés Emmaüs et les files d’attente dans les Restos du Cœur, on nous répondait : « Mais regardez les indicateurs, ils sont bons ! » Je m’étais promis de ne pas reproduire ce type de situation. C’est pourquoi, je le répète, nous avons travaillé avec les différentes associations à l’élaboration de nombreux indicateurs, qui donnent un reflet fidèle et objectif des situations de pauvreté.
Ensuite, il ne faut pas prendre en compte le seul aspect monétaire de la pauvreté, avez-vous dit. Je suis d’accord sur ce point, mais je serai un peu plus nuancé que vous. En effet, les pauvres n’ont pas d’argent, et – je vous le dis très sincèrement – le fait de combler leur pauvreté monétaire en leur donnant plus d’argent répond bien à leurs besoins. À cet égard, l’indicateur permettant de savoir si l’on augmente de 100, 150 ou 200 euros le revenu de ceux qui disposent de ressources extrêmement faibles doit constituer le fil directeur de notre action. Certes, de nombreux autres aspects sont également à prendre en compte, mais je ne pense pas que l’on puisse réduire la pauvreté en occultant la dimension monétaire.
Par ailleurs, vous avez évoqué une enquête, que je connais très bien, montrant que, à Paris, 30 % des personnes sans domicile fixe ont un emploi. Pour ma part, je n’accepte pas cette situation ! Je ne supporte pas de voir des personnes disposant de revenus extrêmement faibles se retrouver hébergées dans les foyers des différentes associations ; je ne supporte pas que des personnes travaillant à Paris soient obligées d’habiter à cent cinquante kilomètres parce que leurs revenus globaux sont inférieurs au loyer qu’on leur demande dans la capitale !
Bien évidemment, de telles situations s’expliquent par différentes raisons, mais, là encore, assurer un revenu supplémentaire de 150 ou 200 euros à ces personnes répond à un besoin. N’oublions pas qu’il s’agit, par définition, de travailleurs pauvres, dont le nombre a augmenté de plus de 20 % au cours des trois dernières années connues.
Notre objectif est clair : d’ici à la fin de l’année 2009 – et je vous donne rendez-vous pour le vérifier –, si la présente motion tendant à opposer l’irrecevabilité n’est pas adoptée et si nous appliquons le dispositif du revenu de solidarité active, le nombre de travailleurs pauvres aura diminué, inversant ainsi pour la première fois depuis de nombreuses années la tendance à la hausse, y compris dans les années où le SMIC a connu ses plus fortes majorations.
Puisque vous avez affirmé que mon analyse et celle du Gouvernement étaient bonnes, je vous indique que c’est en se calant sur ces analyses que nous avons essayé de trouver des solutions.
Vous avez à la fois estimé que le RSA n’était pas un bon dispositif et regretté qu’il ne soit pas appliqué aux jeunes.