La loi d’orientation relative à la lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998 consacre un volet propre à l’insertion par l’activité économique. Elle a l’ambition de clarifier ses missions et de lui donner une définition unique. Elle reconnaît également trois catégories dans le champ de l’insertion par l’activité économique : celles qui relèvent du secteur marchand et produisent des biens et des services en vue de leur commercialisation, telles les associations intermédiaires, les entreprises d’insertion, et les entreprises de travail temporaire d’insertion ; celles qui mettent en œuvre une activité d’utilité sociale, à l’instar des régies de quartier ou des CAVA ; celles dont l’activité est mixte, à l’image des chantiers école.
En 2006, plus d’un million de personnes étaient accueillies dans le cadre de l’insertion par l’activité économique, mais seulement 207 400 étaient salariées du secteur marchand de l’insertion par l’activité économique, dernier tremplin vers l’insertion durable.
Même si le RSA est reconnu par l’ensemble des acteurs du secteur de l’insertion par l’activité économique, cette loi n’atteindra ses objectifs en matière de lutte contre la précarité et de retour à l’emploi qu’à une double condition : d’une part, pourvoir des moyens pour mettre en œuvre un réel accompagnement de ses bénéficiaires, d’autre part, coordonner cet accompagnement avec les autres services d’insertion du département.
Nous devons d’ailleurs nous féliciter de l’adoption par l'Assemblée nationale de l’article 9 bis qui, au travers des groupes économiques solidaires, structure les parcours d’insertion en assurant une complémentarité des actions à entreprendre sur un territoire.
Au final, nous nous interrogeons sur les contrats spécifiques de l’insertion par l’activité économique, qui s’éloignent de plus en plus du droit commun. Pourquoi prévoir une durée minimale susceptible d’être pénalisante dans un parcours ?
Le glissement juridique de ce contrat de travail – temps minimum de six mois et durée hebdomadaire de vingt heures – introduit une dérogation au droit commun. Cette disposition est antinomique avec les conclusions du Grenelle de l’insertion. L’effet induit conduit à limiter les embauches de personnes en difficulté. Cela va priver les entreprises d’insertion de la possibilité d’embaucher sur des contrats très courts des jeunes de moins de vingt-six ans, privés par ailleurs du dispositif du RSA. Ces contrats permettaient de découvrir les métiers et étaient organisés en concertation avec les missions locales.
L’insertion par l’activité économique a démontré toute sa pertinence, et ce à moindre coût.
Claude Alphandéry, dans le rapport précité, a évalué les coûts évités pendant le passage en structure d’insertion. En fonction des difficultés des personnes, ces coûts évités étaient de l’ordre de 1 400 euros à 30 260 euros par an et par personne, montants récemment validés par lui-même.
C’est donc au travers de ce projet de loi que peut se développer une offre équilibrée d’insertion sur un territoire. La réforme de l’insertion par l’activité économique est nécessaire, mais elle peut être déstabilisante et contre-productive si elle est menée dans la précipitation.
Il serait socialement dangereux de réduire les politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion à des objectifs exclusivement quantitatifs et à court terme.
Pour ces diverses raisons, nous demandons un renvoi du projet de loi à la commission.