Intervention de Jacky Le Menn

Réunion du 13 novembre 2010 à 9h30
Financement de la sécurité sociale pour 2011 — Articles additionnels après l'article 35

Photo de Jacky Le MennJacky Le Menn :

Cet amendement se situe dans la même veine que le précédent. Il convient, nous semble-t-il, d’améliorer l’information des patients en matière de dépassements d’honoraires, notamment en supprimant la subordination de l’obligation d’information à un seuil de dépassement, qui est aujourd’hui de 70 euros, fixé par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

Les budgets des familles sont souvent très serrés. Un dépassement de 65 euros est, par exemple, susceptible de constituer un réel obstacle à l’accès aux soins. Il importe donc que le patient en soit informé à l’avance, ne serait-ce que pour pouvoir s’y préparer, même s’il accepte ce dépassement.

Derrière l’information du patient se profile la pratique du dépassement d’honoraires, devenue presque systématique pour un nombre croissant de praticiens, notamment de spécialistes, et en certains lieux de notre territoire. Les dépassements d’honoraires sont tellement généralisés qu’ils constituent un recul de la solidarité nationale. Ils sont un obstacle à l’accès aux soins et, à ce titre, contraires aux principes fondateurs de l’assurance maladie.

Mal informés, perdus dans le maquis des remboursements, obligés de jongler entre les grilles tarifaires des mutuelles et des assurances complémentaires, pour ceux qui en ont une, les malades n’ont d’autre choix que celui de payer ! La vraie question est de savoir pourquoi tant de praticiens imposent des actes à des prix prohibitifs pour un nombre croissant de nos concitoyens. Les dépassements d’honoraires sont la cause principale de l’augmentation du reste à charge des assurés français.

En effet, les organismes complémentaires participent toujours plus à la prise en charge des forfaits hospitaliers, journaliers et autres. En revanche, les dépassements d’honoraires sont peu couverts par la très grande majorité des organismes complémentaires. On ne peut d’ailleurs en faire grief aux mutuelles, car cela reviendrait à « solvabiliser » une pratique qui atteint des proportions inquiétantes, pour ne pas dire délirantes.

Selon un rapport de l’IGAS, qui remonte à deux ans, en Île-de-France, certains praticiens appliquent des taux de dépassement d’honoraires très élevés : 200 % en neurochirurgie, 100 % en chirurgie et en ophtalmologie, 73 % en psychiatrie. Pour une opération de la cataracte, 71 % des patients doivent payer en moyenne 91 euros dans le secteur public et 200 euros dans le secteur privé ; pour une coloscopie, 66 % des patients doivent acquitter un montant moyen de 60 euros dans le secteur public et de 105 euros dans le secteur privé.

Le tarif opposable devient une référence dont l’utilité nous échappe, puisqu’il n’est plus pratiqué par personne. Le système est devenu si incontrôlable que, dans plusieurs départements, les dépassements d’honoraires constituent la part principale des revenus de certains spécialistes.

Au-delà de la nécessité d’informer, force est de constater que l’on ne peut plus laisser perdurer un système dans lequel les tarifs opposables ne sont plus pratiqués – les patients ne les connaissent même plus – et dans lequel aucune mesure ne permet de lutter de manière suivie et conséquente contre ces dépassements.

Notre amendement est pour nous un moyen d’attirer l’attention sur une réalité préoccupante, à savoir le recul croissant de l’accès aux soins.

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