Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, beaucoup de choses ont déjà été dites. Pour ma part, je voudrais d’abord rendre hommage à Marie-Thérèse Hermange et à François Autain, qui ont, avec constance et acharnement, en faisant preuve d’une grande honnêteté intellectuelle, suivi ce dossier de la politique du médicament.
En effet, si le rapport rédigé par Marie-Thérèse Hermange et Anne-Marie Payet après le scandale du Vioxx et intitulé « Médicament : restaurer la confiance », rapport déposé le 8 juin 2006, avait tant soit peu retenu l’attention du gouvernement d’alors, il est fort probable que l’affaire du Mediator n’aurait pas existé, à tout le moins pas dans de telles proportions, car ce sont essentiellement ses préconisations que nous examinons aujourd’hui à travers ce projet de loi.
Vice-présidente de la mission commune d’information, je n’ai pas pu assister, en raison des élections sénatoriales, à l’ensemble des auditions ; néanmoins, j’ai été très attentive aux soixante-cinq propositions qui figurent dans le rapport. Elles sont toutes très importantes, car nous sommes tous des malades en puissance.
Lors de l’examen des articles, j’interviendrai sur les dispositions relatives à la pharmacovigilance. Il se trouve que la mission commune d’information s’est rendue aux États-Unis. Nous avons pu y examiner à la fois la question des class actions et les dispositifs de pharmacovigilance. Ces derniers sont très développés dans ce pays, pour des raisons structurelles qui tiennent au système de soins américain et à la place des assurances.
Je limiterai mon intervention à la question des conflits d’intérêts, que les orateurs précédents ont déjà largement évoquée.
Cette question constitue le volet le plus emblématique du présent projet de loi. Car c’est bien dans ce terreau de la confusion des genres que germent les affaires comme celle du Mediator, affaires qui ne se limitent pas, hélas ! au domaine de la sécurité sanitaire.
La loi doit établir une étanchéité la plus absolue possible entre les intérêts marchands et la protection de la santé des personnes.
C’est ce à quoi tend le titre Ier du présent projet de loi en unifiant les dispositions concernant les déclarations d’intérêts des experts et en les généralisant à l’Institut national du cancer et aux agences régionales de santé.
Comme le recommandait le rapport de la mission commune d’information, l’article 1er établit un socle commun à tous les experts, et parties prenantes au système de veille sanitaire du médicament.
Ce texte tend donc à simplifier le dispositif, à en améliorer la transparence tout en l’universalisant. C’est propre à établir une protection effective.
Sur cette base solide, nos collègues députés et notre rapporteur ont encore renforcé le dispositif en étendant aux conjoints, aux ascendants et aux descendants l’interdiction de liens indirects personnels ou en étendant la compétence de la commission de déontologie créée par la loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite « loi Sapin », aux personnels des conseils et agences sanitaires soumis à déclaration publique d’intérêts.
Je salue particulièrement la clarification opérée par notre rapporteur visant à bien établir que la déclaration publique d’intérêts concernera autant les dirigeants des autorités sanitaires que les membres d’instances collégiales.
De même, l’article 2 du texte, notre Sunshine Act, fixe enfin les conditions de publicité des relations entre les acteurs du système de santé et les entreprises. Là encore, je salue le renforcement du dispositif opéré par notre commission des affaires sociales afin, par exemple, d’assurer la publicité des liens entre les entreprises et les établissements qui assurent la formation initiale des futurs professionnels de santé ou d’imposer la publication des rémunérations versées.
Nous avons également interdit aux entreprises de passer des conventions d’hospitalité avec les étudiants ou de leur octroyer des avantages, et ce afin de limiter au maximum l’emprise des laboratoires sur l’Université.
Il restera à régler le problème du financement de la recherche. C’est une équation difficilement soluble et nous ne l’avons pas encore résolue. Clairement, comme cela se pratique un peu partout dans le monde, il faudrait que les laboratoires puissent subventionner des universités, notamment par des dons, plutôt que d’aider directement les étudiants.
Enfin, ce dispositif serait un vœu pieux en l’absence de mécanisme de sanctions. C’est l’objet de l’article 3, qui prévoit les sanctions pénales applicables en cas de non-respect des obligations de déclaration pesant sur les personnes ou les entreprises. Ces sanctions pénales me semblent adaptées.
L’architecture générale du dispositif de lutte contre les conflits d’intérêts sanitaires dépasse ce seul texte. Nous attendons d’examiner le projet de loi Sauvet, actuellement en instance à l’Assemblée nationale. Le problème des conflits d’intérêts concerne l’ensemble de la vie publique.
Si, sur le papier, l’ensemble de ce dispositif semble propre à prévenir les conflits d’intérêts dans le domaine du médicament et des produits de santé, tout dépendra évidemment de la manière dont il sera concrètement mis en œuvre.
À cet égard, monsieur le ministre, je note que vous avez prévu une clause de revoyure au bout de trois ans destinée à évaluer son efficacité. C’est très important, …