Intervention de Guy Fischer

Réunion du 2 octobre 2007 à 9h00
Régimes spéciaux de retraite — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Pourquoi ne pas profiter du développement exponentiel des technologies et du fort accroissement de l'espérance de vie ? Faut-il revenir à la situation qui était celle de la fin du xixe siècle ? Faut-il revenir au travail jusqu'à soixante-cinq ou soixante-dix ans pour les populations les plus modestes ?

Il conviendra de revoir l'ensemble des dispositions antisociales prises par les gouvernements de droite, qui rendent de plus en plus virtuel le départ à la retraite à soixante ans.

Pour ce faire, nous voulons confirmer le droit à partir en retraite à l'âge de cinquante-cinq ans pour celles et ceux qui ont commencé à travailler tôt en confortant le système de la « carrière longue », que M. Fillon souhaite remettre en cause, afin de permettre notamment la modification de la règle des cent soixante-huit trimestres validés.

Il nous faudra aussi tenir compte de l'exigence des jeunes qui, poursuivant de longues études, entament tardivement leur carrière professionnelle. Nous proposons que leurs années d'études et de formation après dix-huit ans soient prises en compte.

En effet, en moins de trente ans, le début de la vie professionnelle a reculé de près de sept ans, et de neuf ans pour ce qui est de l'intégration dans un premier emploi stable. Cela rend impossible la validation de cent soixante trimestres à l'âge de soixante ans. Parce qu'il s'agit là de l'une des conséquences de la précarisation du travail, il faudra, par équité envers les plus jeunes, y revenir.

Le problème majeur de notre société, c'est l'explosion de la précarité, qui touche essentiellement les femmes et les jeunes. §

Mais il faut également, et de manière urgente, revaloriser substantiellement l'ensemble des retraites, qui n'ont cessé de diminuer. Cela passe par leur réindexation sur l'évolution des salaires bruts. Il s'agit de mettre fin au désastre causé par l'indexation des retraites sur les prix hors tabac, qui a pour conséquence d'appauvrir les retraités.

Le Comité national des retraités et des personnes âgées estime d'ailleurs que, entre 1993 et 2005, l'évolution des retraites a été inférieure de 14 % à celle des salaires, précisément en raison de leur indexation sur les prix.

Cette réalité, vous ne pouvez la nier. C'est le vécu de millions de retraités, ceux que Jean-Pierre Raffarin, alors Premier ministre, avait qualifiés de « peuple d'en bas ».

Il existe, mes chers collègues, une véritable paupérisation des retraités. L'urgence est donc de garantir la retraite totale - retraites de base et complémentaire - à 75 % du salaire moyen des dix meilleures années de carrière, avec un minimum au moins égal au SMIC.

Il faut également poursuivre les efforts entamés en 1997 en faveur des régimes de retraite agricole en revalorisant la retraite totale du chef de l'exploitation à un niveau égal à 75 % du SMIC brut, en instaurant la parité du montant de la retraite des conjoints et des conjointes avec celle du chef de l'exploitation et en supprimant les coefficients de minoration.

S'agissant des fonctionnaires, nous proposons de rétablir les droits prévus par le code des pensions avant le plan Fillon, et même de les améliorer. En l'espèce, MM. les rapporteurs ont fait un certain nombre de propositions.

Avec mes collègues du groupe communiste républicain et citoyen, je réclame que le montant des pensions soit fixé sur la base de 75 % du traitement des six derniers mois d'activité.

Il faudra également inclure les primes et les indemnités au traitement indiciaire de base, rétablir totalement les bonifications pour enfant, supprimer les décotes pour carrière incomplète, qui pénalisent particulièrement les femmes. C'est un problème d'actualité.

Tout cela suppose, monsieur le ministre, de prendre la mesure de l'enjeu de société qui s'annonce. Il faut rompre définitivement avec la logique comptable qui anime votre politique et qui vous conduit à ignorer les besoins des Français. La solution est évidente ; elle consiste à donner à la protection sociale les moyens financiers suffisants pour lui permettre d'assumer l'ensemble de ses missions et de satisfaire tous les besoins.

Pour ce faire, nous nous prononçons pour la mise à contribution des revenus financiers et spéculatifs des entreprises et des banques. Pour nous, tous les revenus du travail doivent être concernés, car il ne saurait y avoir, d'un côté, les salariés contributeurs et, de l'autre, les plus riches qui ne participeraient pas.

Redonner à la sécurité sociale les moyens de ses ambitions passe également par le remboursement de la totalité des dettes qu'a l'État envers elle, par la suppression des exonérations de cotisations sociales et par la fin de votre politique de cadeaux fiscaux, qui n'ont eu pour seules conséquences que de l'appauvrir, de tirer les salaires « vers le bas » et d'épargner les bénéfices des entreprises.

Vous comprendrez d'ailleurs notre grand contentement lorsque, à la lecture du rapport annuel de la Cour des comptes sur la sécurité sociale, nous avons découvert que son président, qu'on ne peut soupçonner de partager les conceptions de notre groupe, propose justement de taxer les stock-options et les parachutes dorés. S'adressant à la presse lors de la présentation de ce rapport, Philippe Seguin recommandait, en effet, « la suppression ou le plafonnement de l'exonération sur les stock-options », en précisant que les « cinquante premiers bénéficiaires devraient toucher une plus-value de plus de 10 millions d'euros chacun sur les options attribuées en 2005. » Il ajoutait que pour ces seuls bénéficiaires, « les cotisations manquantes s'élèvent à 3 millions d'euros. »

Votre seule réponse consiste à réduire les dépenses alors même que la priorité devrait être à l'accroissement des recettes. La solution, c'est l'élargissement de l'assiette de cotisations, une alternative crédible reprise là encore par M. Seguin, qui précise, concernant les stock-options, qu'ils constituent « un complément de salaire au versement différé ou une incitation à l'actionnariat et [qu'ils] sont donc bien un revenu lié au travail, donc normalement taxable. » §

J'en reviens à ma question initiale : pourquoi une telle précipitation ? Il s'agit, en fait, de dissimuler les échecs de votre propre politique.

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