... mais peut-être aurions-nous préféré vous entendre parler de l'amendement n° 21, lui aussi parlementaire, car les associations qui jouent un rôle essentiel auprès des sans-papiers en leur apportant soutien, protection et parfois même nourriture - je veux notamment parler des Restos du Coeur et d'Emmaüs - sont aujourd'hui très inquiètes. Nous reviendrons sur cette question lors de l'examen des amendements.
Au-delà des différentes mesures prévues dans ce projet de loi, c'est l'état d'esprit dans lequel vous le présentez qui nous inquiète et trouble l'image de notre pays dans le monde.
Face à la défiance que vous entretenez à l'encontre des étrangers, il est bon de rappeler, comme le fera tout à l'heure Pierre-Yves Collombat, que l'immigration est une nécessité pour faire face à l'évolution de notre démographie. La mise en place d'une politique de l'immigration est donc indispensable, mais elle doit être juste, efficace et humaine.
Sans égard pour ces exigences, votre logique consiste à faire du chiffre à tout prix et à multiplier des lois toutes plus inefficaces les unes que les autres. Vous avez convoqué certains préfets, les accusant de ne pas avoir réalisé les chiffres prévus au titre des expulsions d'étrangers en situation irrégulière. Si vous avez atteint votre objectif en matière d'exposition médiatique, le procédé consistant à considérer comme des objets jetables des individus aussi respectables que tous les autres est inadmissible, car il ouvre la porte à de nombreux dérapages sur le terrain. Nous le constatons d'ores et déjà, certains magistrats et policiers s'en inquiètent. Vous entretenez un climat détestable qui place certaines personnes dans des situations dramatiques, voire fatales.
Par ailleurs, il ne faut pas laisser penser à l'opinion publique que ce texte va réduire le nombre de personnes en situation irrégulière. Les dispositions de ce projet de loi portent exclusivement sur l'immigration régulière, sur laquelle vous jetez la suspicion. Les mesures que vous proposez sont non seulement injustes, mais elles ouvrent également la voie à un renforcement de l'immigration illégale, que vous prétendez, par ailleurs, combattre.
Au travers de votre politique et de vos déclarations, vous portez atteinte à l'image de la France dans le monde.
Je suis, vous le savez, très engagée au sein de l'Assemblée parlementaire de la francophonie et, à ce titre, je travaille régulièrement hors de nos frontières.
Comme de nombreux parlementaires me l'avaient signalé, j'ai pu personnellement mesurer, lors de notre assemblée générale, à Rabat, en juillet 2006, l'ampleur du trouble suscité dans de nombreux pays, notamment en Afrique, par la loi de 2006.
Cette vague d'inquiétude et d'hostilité s'est encore aggravée après le discours à forte teneur culturaliste prononcé par le Président de la République, à Dakar, dans lequel il reproche à l'homme africain de n'être pas « assez entré dans l'histoire » et de ne s'être jamais élancé vers l'avenir. Dès lors, faut-il s'étonner que ces pays se tournent vers les États-Unis ou la Chine ?