Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le rapport de la commission d'enquête du Sénat sur l'immigration clandestine a fait état en outre-mer de l'existence d'un phénomène massif, qui dépasse largement le strict cadre du regroupement familial, principal objet du présent projet de loi, notamment en Guyane, en Guadeloupe et à Mayotte. Dans ces collectivités, hormis en Guadeloupe, la population étrangère en situation régulière ne constitue qu'une infime partie des immigrés présents sur le territoire.
Comme vous le savez, mes chers collègues, ces trois collectivités sont les plus exposées aux flux migratoires illégaux en raison de leur proximité géographique avec les pays sources, qu'il s'agisse d'Haïti, du Surinam, du Brésil, des Comores ou de Madagascar.
Parmi ces collectivités, Mayotte, territoire de très faible dimension, doit faire face à une pression constante. De ce fait, l'île connaît une situation tendue en matière de structures d'accueil, que ce soit à l'école maternelle et élémentaire, au centre hospitalier de Mamoudzou, dans les dispensaires et les maternités ruraux ainsi que dans les domaines du logement et de l'emploi.
Dans ce contexte, la loi du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration prévoit pour Mayotte un ensemble de mesures qui commencent à donner des résultats : visite sommaire de véhicules circulant sur la voie publique en vue de rechercher et de constater les infractions relatives à l'entrée et au séjour des étrangers, destruction sur décision du procureur de la République des embarcations ayant servi à commettre des infractions d'aide à l'entrée et au séjour irréguliers dans l'île, accompagnée de condamnations des passeurs, contrôle de l'identité des personnes le long du littoral, contrôle plus efficace des reconnaissances de paternité afin de lutter contre les reconnaissances frauduleuses, mise à la charge personnelle du père d'un enfant naturel des frais de maternité de la mère étrangère en situation irrégulière, suppression des dispositions qui s'opposaient jusqu'ici au contrôle de la régularité des employés de maison au regard du code du travail et des lois sociales.
À ces mesures, inspirées en partie par les conclusions de la commission d'enquête sénatoriale sur l'immigration clandestine, devraient s'ajouter l'implantation d'un troisième radar, la construction d'un nouveau centre de rétention administrative et l'envoi de deux vedettes rapides.
Toutefois, il convient d'observer que, si le nombre d'éloignements et d'embarcations interceptées est en constante augmentation, les drames en mer se multiplient et la liste des victimes, femmes et enfants, s'allonge aussi. Jamais ce bras de mer de 70 kilomètres qui sépare Mayotte d'Anjouan n'a aussi bien mérité son nom de « plus grand cimetière de l'océan Indien ».
Monsieur le ministre, l'expérience montre qu'il est très difficile d'empêcher les candidats à l'immigration de tenter d'entrer illégalement à Mayotte ou d'y revenir après un éloignement, malgré le renforcement considérable des moyens de contrôle et de surveillance aux frontières.
C'est pourquoi je propose que, dans le cadre de l'ordonnance prévue à l'article 17 de ce projet de loi, un équilibre soit établi entre, d'une part, la répression à Mayotte et, d'autre part, le codéveloppement et l'aide au développement aux Comores.
Je suggère que les actions prioritaires arrêtées en commun dans le cadre de la première réunion de la commission mixte franco-comorienne de 2005 fassent l'objet d'un document contractuel qui pourrait prendre la forme d'un pacte pluriannuel de développement, pacte visant à réduire la pauvreté aux Comores de 50 % en une décennie.
Ce programme de base évalué à 316 millions d'euros pourrait être financé conjointement par les fonds de la coopération française, les crédits de l'Union européenne et le concours des bailleurs de fonds internationaux.
Au préalable, il faudra résoudre la crise anjouanaise par le dialogue, sous l'égide de l'union africaine.
Monsieur le ministre, sous le bénéfice de ces observations, je soutiendrai votre projet de loi tout en restant extrêmement attentif aux termes de l'ordonnance prévue à l'article 17 visant son extension à Mayotte.