Le projet de loi qui nous est proposé évite ces écueils. Il tente de consolider le tournant pris par la France, celui d'une immigration contrôlée, qui intègre au lieu de marginaliser, qui profite à l'économie plutôt qu'à l'assistanat, qui facilite le codéveloppement plutôt que la fuite du travail qualifié.
Sur tous ces objectifs, comment ne pas être d'accord ? Toutes les dispositions que contient ce texte en vue d'atteindre ces objectifs ne peuvent que rencontrer notre assentiment.
Pour autant, et la commission des lois l'a relevé à juste titre, la médaille a son revers.
Tout d'abord, on constate que l'immigration est diverse. On ne peut pas comparer l'immigration en provenance des pays du Sud - Afrique, Maghreb - et celle qui est issue d'Europe de l'Est ou d'Asie, régions dont le niveau de vie, l'organisation sociale et familiale et le système de croyances sont profondément différents. Vouloir imposer un parcours unique à des réalités humaines si différentes peut conduire à des erreurs et à des injustices.
Les migrants sont d'abord des êtres humains ; ils ont donc droit au respect de leur identité et de leur culture autant qu'ils doivent respecter l'identité et la culture du pays qu'ils veulent rejoindre. À l'époque de la mondialisation, où tout homme, toute femme est citoyen du monde, cette égalité de droits et de devoirs, fondée sur l'universelle dignité de la personne humaine, est l'aune à laquelle nous devons mesurer le bien-fondé de toute disposition réglementant l'accueil, le séjour, l'établissement des migrants.
Autrement dit, le droit de l'immigration, notamment le droit d'asile, n'est pas simplement économique, administratif ou pénal. C'est aussi un droit qui s'enracine dans une éthique universelle dont nous sommes les tenants depuis des siècles, qui intègre les droits fondamentaux de la personne, de la famille, de la solidarité. C'est un droit international et d'abord européen, car, face à ces mouvements migratoires à caractère planétaire, il est illusoire de penser régler le problème seul et unilatéralement.
Avant d'aborder le fond du sujet, je voudrais d'abord soulever deux questions de méthode.
Le fait que le droit de l'immigration soit élaboré par une succession de lois partielles crée une surenchère particulièrement dangereuse sur un sujet difficile, qui favorise l'apparition de dispositions comme celles qui ont été adoptées à l'Assemblée nationale. Pourquoi ne pas s'en être tenu à l'esprit du texte du Gouvernement ? Le moins que l'on puisse dire est que le travail de l'Assemblée nationale ne l'a pas enrichi.